
to;re. Il emporta aux ennemis plufieurs places
confidérables.En 17 1 5 , il fit le liege de Fribourg.
La ville étant fur le point d'être prife d’affaut,
le gouverneur l'abandonna à la difcrétion du maréchal
, & fe retira dans le château. Les malades
& les bicffés étoient reliés dans la ville :
quoique Villars fût en droit de l’abandonner au
pillage j & même de faire palier les habitans au
Hl de l’épée , il établit un ordre parfait , & ne'
fit point couler de lang. A l’égard des malades
& des bleffés, il les fit porter fur l’efplanade , où
ils étoient expofés au leu de l’artillerie du château.
Le gouverneur ne put tenir contre un pareil
fpeéhcle ., & fe rendit.
Louis X V ayant en 1734 déclaré la guerre
à la maifoh d’Autriche , le maréchal de Villars,
quoiqu’agé de quatre-vingt-deux ans j fut choifi
pour commander en Italie les troupes réunies
cL* France, cTEfpagne & de Sardaigne. Un o fficier
confidéiabie lui repréfentant au fiége de
Fizzightonne qu’il s’expoiSit trop : « Vous auriez
ra fo n , fi j’étois à votre âg e , répondit le
maréchal3 mais à l’âge où je fuis, j’ai fi peu de
jours à vivre, que je ne dois pas les ménager,
ni négliger les occafions qui pourroient me procurer
une mort glorieufe que doit ambitionner
un vieux général d’aïmèe.
L ’affoibliffement de fes forces ne lui ayant
permis de faiye qu’wne campagne, il partit pour
s’en retourner en France > mais une maladie mortelle
l’arrêta, à Turin. » Dieu vous fait de grandes
grâces , lui. dit fon confeflêur. Vous avez
mené une vie où vous vous occupiez plus de
votre gloire que de^ votre falut. Dieu pouvoit
vous la faire perdre dans les fréquens dangers
où vous vous expofiez. Cependant il vous a
cqnfervé jufqu’à préfent 5 il vous donne le temps
dé vous reconnoitre & la grâce de vous repentir
de vos fautes. Ce font la des faveurs qu’il n’accorde
pas à tout le monde. Voilà ie maréchal
de Berwich qui n’a pas eu le même bonheur
que vous il vient d’être tué au fiége de Phi-
lisbourg d'un coup de canon , en vifitant les travaux
de la tranchée «c. Quai ! répond Villars,
h maréchal de Bcrwich ejl mort de cette maniéré?
Je l'avais toujours dit . q u il étoit plus heureux que
moi. . Il expira un moment après.
On devoir fans doute s’attendre aux plus belles
allions de la part d'un homme que la gloire feule
fëmbldit enflammer.^ Il difoit fouvent qu’ il n’a- :
voit eu que deux plaifirs bien vifs en fa v ie , !
celui de remporter un prix au collège & celui de !
gagner une bataille.
On le prefloit en 1677- de. prendre une cui-
raffe pour uoéaétion .qui, félon toutes les apparences,
devoit être vive & meurtrière. » Je ne
« o is pas, répondit-il tQut haut, enpréfencede
, fon régiment, ma vie plus précieufe que celle
de ces braves gens »*
Dans une de fes campagnes, ayant laifie tomber
le fourreau de fon épée, quelqu’un s’emprefîa de
le ramaffer. Un officier qui connoiffoit bien l’ac^
tivité de ce général 3 lui dit : Monfieur le maréchal,
vous n’en avez'pas befoin , puifque vous
avez toujours l’épée à la main contre les ennemis
de la France».
Villars témoigna fouvent fon mépris pour ces
agréables de cour toujours portés à fe regarder
comme des perfonnages impôrtans. Cette con-
1 duice lui fufeita des ennemis, & il ne l'ignoroit
pas. Un jour prenant congé du roi devant toute
la cour pour aller commander l’armée : »Sire,
lui dit-il, je vais combattre les ennemis de votre
majefté, & je vous biffe au milieu des miens».
Le maréchal de Villars avoit acquis fes rî-
cheffes par des contributions dans le pays ennemi.
Des courtifans du duc d’Orléans régent du
royaume , devenus riches parce bouleverfement
de l’état appelle fyftême , fembloient fe glorifier
de leurs richeffes : Pour moi , leur dit Villars ,
je nai jamais11 rien gagné que fur les ennemis.
On a mis au bas du portrait du maréchal de
Villars a dont le nom de baptême eft Heétor.
Hic novus Hecior adejl contra quemnullus Ackiüesï
V IN C I , ( Leonard de) peintre né l’an Ï443,
mort en 1513»
A peine Léonard commençoit-il à éjudier lar
peinture, que Verrochio , fon maître , le crut en
état de travailler à un ange qui reftoic à finir dans
un de fes tableaux. Le jeune Léonard s’en acquitta
avec tant d’art, que cette figure effaçoit toutes
les autres : Verrochio , honteux, défefpe'ré de
fe voir air,fî furpaffé. par fon élève , ne voulut
plus manier le pinceau , & renonça pour toujours
à la peinture.
Le fénat de Florence , ayant fait bâtir une fal-
Ie fpacieufe dans le palais public, ordonna par
un décret folemnel, .qu’elle feroit ornée d’une
peinture faite de là mai* de Léonard.
Il fe propofa un -jour^de peindre une affemblée
de payfans, dont l’innocente gaieté & les ris
naïfs' fe corcmuniquaffent aux fpeélateurs. Four
parvenir à ce qu’ il avoit en vue, il raflernbla
quelques gens de bonne-humeur, qu’il invita à
dîner > & lorfque le repas les eut tous difpofés â
la joie , il les entretint de contes plaifans qui les
égayèrent encore davantage : cependant il étu-
dioit leurs ge-ftes, examinoic avec attention les
mouvemens de leur vifage 5 & d è s qu’il fut libre,
il fe retira dans fon cabinet, où il deffinafi
parfaitement, de mémoire, cette fcène comique
que, qu'il étoit .impoffible, en la voyant, de
s’empêcher de rire.
Le plus fameux tableau de Léonard,, c’ eft ce-,
lui de la Cene, qu’il peignit dans le réfectoire
de# dominicains à Milan : lorfqu’il travailloit à
cette admirable co'mpofition , il commença par
les apôtres j fon génie s’étant épuifé à donner
une éxprdlion étonnante-à chaque: tête , il ne
trouva rien d’affez beau , d’affez frappant, pour
rendre ce- caraétèr-e divin, qui doit annoncer le
fils de Dieu} & prit le parti de ne faire que
l ’ébaucher.,. -., ^
Dans la chapelle du Rofaîre à Milan , on voit
de Léonard un tableau des plus bizarres : le
purgatoire eft au fond d un puits, 4k la fainte-
Vieige en retire des âmes avec un chapelet qui
tient lieu de chaîne.
Vinci fit plufieurs portraits à Florence, ’ efttr’au-
res celui de la femme d’un riche particulier j il
employa quatre mois à perfectionner ce portrait :
pendant toutes les féances qu’il exigea de la dame,
il eut toujours foin de faire trouver auprès
d’elle plufieurs muficiens qui jouoient de divers
■ inftrumens, àjSrr de lui infpirer de la gaieté.
François I vit ce tableau à Florence , & l ’efti-
ma tellement, qu'il en donna quatre mille écus.
Dans une dé fes expéditions en Italie, ce prince
admira aufli, à Milan, plufieurs ouvrages de
Léonard, & le prefTa de le fuivre en France.
Léonard , quoique âgé de foixarrte-dix ans, crut
devoir fe rendre à des invitations fi flatteufes :
mais à peine fut-il eh France, qu’ il y tomba malade.
Le r o i , qui connoiffoit tout fon mérite, ne
dédaigna point de le vifiter très-fouveat. Comme
quelques feigneurs de fa cour paroifïoient furpris
qu’il traitât avec tant de difiipCtion un fimple particulier
, ce monarque leur dit ces belles paroles:
« Ne vous étonnez pas de l’honneur que je
rends à ce grand peintre : je puis faire en un jour
beaucoup de feigneurs comme vous ; mais il n’y
a que Dieu feul qui puifle faire un homme pareil
à celui que je vais perdre ». —-
Un jour que la maladie de Léonard étoit devenue
plus facheufe, on lui annonça que le roi entroit
dans fa chambre : fenfible aux marques de
bonté qu’il reçevoit d’un fi grand prince , il raf-
fembla le refte de fes forces pour fe mettre fur
fon féant, & pour témoigner fa reconnoifTance
au monarque} mais cet effort fut le dernier de fa
v ie , il tomba en foibleffe , tandis que François
I . s’empreffoit lui-même de le fecourir >: &
mourut entre les bras de ce prince qui l’ho-
nera de fes larmes.
Cette fcène fi inte'reflante eft le fujet d’un fu-
perbe tableau de M. Menageot, peintre du roi &
directeur de l’académie de peinture à Rome.
Encÿclopédiana.
Le fameux traité de la peinture , eft le feul ouvrage
de Léonard de Vihcî, qui foit imprimé}
encore ne^ l’a-t-il été que par les foins d’un fran-
çois, en 16.JI , cent-trente-quatre ans après la
mort de fon auteur.
Annibal Carrache, lut une copie manuferîte
de ce fameux traité vers-l’ an ié e o , & fut fâché
de n’avoir pas eu plutôt connaiffance des
leçons admirables qu’il renferme } « parce qu’ elles
lui auroient épargné , ( difoit-il ) vingt années de
travail, s’il les avoit lues dans fa jeuneffe».=*
V IR G IL E , .( Publius Maro) poète latin, né
dans un villà'gé près de Mantoue, de parens obf-
curs, le iy odobre de l’an 70 avant Jéfus-
Chriit,' mort ai Brindes en Calabrè le '12, fep-
tembre> de l’an 1.9 avant la. même époque.
Virgile avoir lé teint brun j ce qu’il tenoit peut-
être de fon père natif d’un pays chaud. Il étoit
d’une haute- t a i l l é & on peut croire que c’eft
lui-même qu'il dépeint fous le nom de mufée au
fixième : livré de l’Enéide. Ses infirmités & fes
études le firent Vieillir de bonne heure.' Il avoit
un embarras dans la langue qui l’ empêchoït de
s’énoncer avecrfacilité. Son cara&ère étoit doux,
modefte & même timide. Tl fe défcrbûif très-fouveat
à la multitude qui açcouroit pour le voir.
La première églogue de Virgile eft un hem-
mag» de fon ame fenfible & reconnoiffance. Il Ja
compofa pour remercier Aügufte de la grâce qu’il
lui avoit faite de le rétablir dans fon patrimoine
dont il avoit. été dépouillé par la diftribution fâiro
aux foldats vétérans de ce prince, des terres du
Mantouan & du Cremoneis.
Aügü'fte dbnnoit fouvent des fpeCIâcles dans
un tems où il pieuvoic toutesles nuits. Virgile com-
pofâ a ce fujét cette epigramme. Il y fait Céfar
égal à Jupiter.
No&e pluii totâ : redeunt fpeftacula-mane.
Divifum imperium cum Jove, Csfar habet.
« II pleut toute la nuit, & le matin l’on voit
renaître les fpeCtacles. Çéfar. partage l’empire
avec Jupiter ».
Virgile fit afficher ce diftique à la porte du palais
d’Augüfte, fans marquer qui l'àvoit com-
pofé. L ’empereur en parut content, & donna une
récompenfe à un certain Bathyle q u i, voyant que
perfonne ne fe préfentoît, s’étoit déclaré l’auteur
de çes. vers« Alors Virgile fit afficher de nouveau
à la porte du palais ces mets répétés quatre fois :
Sic vos non vobis. Il les propofa comme des vers
à remplir , ainfî que nous le pratiquons à l’égard
de nos bouts rimes. Quelques jours ?près, comme
tous les poètes paroiffoient avoir yenoncé à cette
efpèce de défi, Virgile afficha.une féconde fois le