
fous les boyards & les dames aux noces d’un de
les bouffons : il exigea que tout le monde y parue
vêtu à l’ancienne mode. vV
. P n fèîrvit un repas tel qu’on le faifoit au fei-
leme fiècle.
Une ancienne fuperftîtion' ne permettoit pas
qu on allumât du feu le jour d’un mariage, pendant
le froid le plus rigoureux : cette coutume fut
fé.vèrement obfervée le jour de la fête.
Les rufles ne bu voient- point de vin autrefois,
nvais de l’hydromel & de l ’eau-de-vie 5 il neper-
m t pas ce jour-la d’autre boifion : on fe plaignit
en vain, il répondoit en raillant: « Vos ancêtres
en ufoient ainfî, les ufages anciens font toujours
les meilleurs ».
Cette plaisanterie contribua beaucoup à corriger
ceux qui préfèrent toujours le temps paiTe au
prefent, ou du moins à décréjiter leurs murmures.
Journal de Pierrele grand, & 1‘hijloire de
l'empire de Rujfie par M. de Voltaire.
Les grands projets de réforme du czar avoient
été fouvent arretés par les guerres cruelles que
lui faifoit Charles X I I , roi de Suède.
C e fut pour s’a lonner tout entier à l’exécution
de ces projets, qu’après les,campagnes de 1708,
il hafarda quelques propofitions de paix qui furent
portées par un gentilhomme polonois à l’armée
de Suède.
Mais Charles X I I , accoutumé à n’accorder la
paix 4 fes ennemis que dans.leur capitale, répondit
: Je traiterai avec le c^ar à Mofcou.
Quand on rapporta au czar cette réponfe hautaine
: «Mon frère Charles, dit-il, prétend toujours,
faire l’Alexandre ; mais je me flitte qu’ il ne
trouvera pas én moi un Darius ». H/Jloire de Charles
XII.
Les foins infatigables de Pierre & les défaites
même des mofeovites leur apprirent enfin le métier
de la guerre.
Ils remportèrent une vi&oîre complétée fut Charles
XII à Pultava le 8 juillet 1709.
Il y. eut beaucoup d’officiers prifonniers parmi
les fuédois, entr’autres Renchild, général de l’ armée
de Suède.
On les amena au. camp du czar, qui les invita
à manger avec lui le'jour même de fa vi&oire.
Comme le czar paroüfoit furpris de ce que les
fuédois fe fufient hafardés dans un pays fi reculé 3
& eulfent affiégé Pultava avec un petit nombre
de croupes : « Nous n’avons pas toujours été con"
fuites, répondit le général ; mais comme fidèles
ferviteuis, nous avons obéi aux ordres de noue
maître , fans jamais y contredire ».
Le czar fe tourna à cette réponfe vis-à-vis
quelques-uns de fes couru fan s , autrefois foupcon-
nes d avoir trempé dans des confpiratïons contre
lui : « Ah! dit-il, voilà comme il faut fervir fon
fouverain. Alors, prenant un verre de vin : A
la Jante, dit-il, de mes maîtres > en l'art de la
guerre y».
Renchild lui demanda qui étoient ceux qu’il honorent
d’un fi beau titre ? . . . Vous , mejfieurs les
generaux fuédois.
« Votre majefté eft donc bien ingrate, reprit
Renchild, d’avoir tant maltraité fes maîtres ».
Le c z a r , après le repas, fit rendre les épées à
tous les officiers généraux , & les traira avec bonté.
Hijloire de Charles XII.
Le c zar, par fa bravoure & fa magnanimité ,
avoir mérité la vi&oïre.de Pultava. Son chapeau
y fut perce d’une balle de moufquet.
Dans le combat du 7 oftobre 1708 , contre les
fuédois , la confuïion s’étoit mife dans l’armée des
mofeovites.
Dès que l’empereur vit que fes troupes com-
mençojent à reculer, il courut à l'arrière-garde,
où étoient les cofaques & les calrnoukes : Je vous
• ordonne 3 leur dit-il, de tirer fur quiconque fuira ,
, & de me tuer moi- même , f i j ’étois ajfe1 lâche pour
De-là il retourna à l’avant-garde , &• rallia Les
troupes lui-même. Hijloire de Charles XII.
En 1704, il avoit pris d’afiaut la ville de Narva:
Comme fes troupes, malgré les ordres qu’il
avoit donnés, mettoient tout à feu & à fang, il
fe jette au milieu des plus mutins, arrache des
! femmes de leurs mains, & ayant tués deux de ces
emportes, il entre a 1 hôtel-de-villeoù les citoyens
fe réfugioient. en foule ;• là pofant fon épée fan-
glante fur la table : « C e n’elf pas du fang des
habitans, d i t - i lq u e cette épée èft teinte ; mais
du fang de mes foldats , que j’ai verfé pour vous
fuiver la vie ». Hijloire de l-empire de Ruffie fous
Pierre; le Grand. ■ .
Au mois de juillet 1711 , ce prince , à la tête
! ce.fes troupes, & manquant de proyi fions, fs
troilvoit renfermé fur les bords du Pruth par une
armée de cent cinquante mille turcs.
Les ennemis lui imposèrent, entr’autres conditions
, qu’on leur livrât Cantemir, Vaivode de
Moldavie, qui s’étoit réfugié auprès du czar.
Ce prince, malgré l’extrémité où il étoit réduit
,-écrivit de fa propre main à fon plénipotentiaire
: « J’abandonnerai plutôt aux turcs tout le
terrein qui s’étend jufqu’à Cursk 5 il me reliera
J’efpérancc de le recouvrer : mais la perte de ma
foi eft irréparable, je ne peux la violer. Nous n’avons
de propre que l’honneur 5 y renoncer, c’eft
C:fl'er d’être monarque ». Hifioire de l'empire de
Rujfie fous Pierre le Grand.
On a reproché à ce prince une inflexibilité dans
le car a été re qui le rendit quelquefois cruel. Mais
peut-être ‘cette févérité étoit-elle néceflaire pour
cimenter les fondemens de fon empire naiffant.
Il fit condamner fon propre fils à mort, pour
avoir violé fes ordres.
L’impératrice Catherine ,qui avoit tant de droit
fur fon coeur & par fes fervices & fon attaché/'
ment, ne put obtenir la grâce d’une de fes dames
d’atour, accufée auprès du czar d’avoir accepté
des préfens , malgré les défenfes faites à toutes
perfonnes en place d’en recevoir.
Comme Catherine le follicitoit vivement, Pierre,
dans fa colère, caffa une glace de Venife, & dit
à fa femme : « Tu vois qu’il ne faut qu’un coup
de ma main pour faire rentrer cette glace dans la
pouffière d’où elle èft fortie *>.
Catherine le regarda avec une douleur atten-
drifiante, & lui dit : «Hé bien, vous avez caffé
ce qui faifoit l’ornement de votre palais, croyez-
vous qu’il en devienne phi s beau ».
Ces paroles appaisèrent l’empereur ; mais toute
la grâce que fa femme put obtenir de lui , fut que
fa dame d’atour ne recevroit que cinq coups de
knout, au lieu de onze- Hijloire de 'l'empire de
Rujfie fous Pierre le Grand.
On a lieu d’être étonné qu’un prince législateur
& aufîi abfolu que le czar, n’ait point fait de tef-
tament: Peut-être ne fe croyoic-il' pas fi proche
de fa fin lorfqu’U mourut entre les bras de fon
époufe, après une agonie de feize heures. L’impératrice
lui fuccéda.
PIRON ( Alexis ) né en 1689-, mort en
*7 7 3 •
Piron fit fes études à Dijon fa patrie, au college
des jéfuiies. Dès fa première jeuneffe, il fe
fentit un attrait invincible pour la poéfie ; & l’a mour
de la gloire augmentant ce goût dominant ,
il vint à Paris, où il fut admis dans les fociétés
les plus gaies, & y portoit lui-même la joie &
les piaifirs. On cite encore fes bons mots & fes
faillies, dans lefquels on trouve de l’efpvit fans
méchanceté, de la gaieté fans envie de nuire.
Piron commença fa carrière dramatique par
des opéra-comiques & des parodies qu’d composa,
tantôt feul, tantôt en fociété avec le Sage & d’Or-
neval, pour les fpt&acles forains. .
11 eutenfüite l’ambition de briller fur un théâtre
plus élevé & compofa des comédies, des tragédies
& des paftorales-
Il compofa la Métromanie & Gufiave, la première
fur-tout, afliirent à leur auteur, dans le
genre dramatique , la réputation d’homme de génie
rieur fuccèsau théâtre prouve le difeernement,
le goût, l’équité du-public, & difpenfe de tout
autre éloge.
Outre les ouvrages de ce genre , Piron a
laide encore une allez grande quantité de pièces
fugitives, parmi.IefqueIles on a toujours diltingué
, fon epitre à mademoifeile Chéré.
\ A vingt ans, il tomba dans un court égarement
qu’ .l paya cher à foixante.
Les gens de lettres ne doutent point que ce ne
fut l’abbé d’O livet, qui l’empêcha d’entrer à
l’académie : c’eft lui , du moins, qui remit entre
les mains de M Boyer, ancien évêque de Mire-
poix, l’Ode licencieufe que Piron n’avoit ni avouée,
ni fait imprimer. Cette pièce fut l’unique cauie
qui s’oppofa à la réception de l’auteur de h.Mé-
! tromanie : il ne s’en eft vengé qu’en fai fan t une
epitaphe qui n’eft que badine. La voici:
C i - g î t le p é d a n t M a r t in ,
S u p p ô t d u p a y s l a t in ,
J u r é p r i fe u r de d ip h to n g u e ,
R i g o u r e u x au d e rn ie r p o in t
S u r la v i r g u le & le p o in t ,
L a f y lla b e b r e v e & l o n g u e ,
S u r l ’a c c e n t g r a v e & l 'a ig u ,
L ’U v o y e l l e & l ’V co n fo n n e .
C e c h a rm e q u i l ’ e n flam m a ,
F u t fa p a ffio n m ig n o n n e :
S o n h u i le i l y co n fum a .
D u r e f t e , i l n ’a im a p e r fo n n e j
E t p e r fo n n e n e l ’a im a .
Un jeune homme après la repréfentation du Tartuffe
s’écrioit fans fin, a h ! mon dieu ! ah mon
Ç c c c c 2