donna que toutes les bêtes de lomme vinflfent fe
feire ferrer. Les -dues repréfentèrent que leur loi
ne le pe'rmettoit pas. Eh bien, dit Jupiter, on ne
vous ferrera point, mais au premier faux pas
que vous ferez, vous aurez cent coups d’étri-
vieres ».
Il n eft pas permis aux quakers ,
i° . De donner à des hommes les titres de
votre fainteté , votre hnajefté, votre éminence,
votre excellence, votre grandeur, &c. ni de
faire en un mot, aucun compliment qui fente la
flatterie;
2°. De s’agenouiller ou de fe profterner
devant aucun homme, ou de lui ôter fon chapeau.
: 3°. D'ufer d’aucunes fuperflnités dans les habil-
lemens, & de tout ce qui ne fert que pour l’ornement
ou la vanité ;
4°. De jouer, de chafler, d’alfifter à des comédies
, a des recréations, &c. ce qui, félon eux ,
ne convient pas au filence, à la gravité & àlafageffe
des chrétiens ;
y°. De juter fur l’évangile, non-feulement en
vain & dans les difcours ordinaires, mais même
devant les magiftrats ;
6°. De réfifter à ceux qui les attaquent, de
faire la guerre ou de fe battre pour quelque caufe
que ce foir.
Tels font les principes des quakers , qui ne
peuvent former que d’honnêtes gens. Ce font,
je crois, les feuls fanatiques qui jouiflent de la
paix, fans jamais avoir fait aucun pas pour troubler
la fociétéi . . ^
y « Avoue, dît le quaker | André Fit à notre célèbre
Voltaire , que tu as eu bien de la peine à
t’empêcher de rire, quand j’ai répondu à toutes
tes'civilités 'avec mon chapeau fur la tête & en
te tutoyant. Cependant tu me parois trop inftruit
pour ignorer que du temps de Jéfus-Chrift, aucune
nation ne tomhoit dans le ridicule de Tubf-
ticuer le plurier au fingulier: on difoit à Céfar Au-
gufie, je t’aime^, je te pne , je te remercie : il ne
fouffroit pas même qu’on l’appelât, M. Dominas.
Ce ne fut que long temps après lui qu’on s’a-
vifa de faire appeler vous au lieu de tu, comme
fi les hommes étcient doubles , Sc qu’on ufurpât
Jes titres impertinens de grandeur, d’éminence,
de fainteté, de divinité même, que des vers de
terre donnent à d’autres v e rs , en les affurant
qu’ »ls font avec un profond refpeét^ & avec/une
fauffètéinfâme, leurs très-humbles & rrès-obéif-
fahs ferviteurs. C ’eft pour être plus fur nos gardes
coptre cet indigne commerce de menfonges 8c
de flatteries, que nous tutoyons également les
rois & les'charbonniers, que nous ne faluoosper-
Q U A
fonne, n’ayant pour les hommes- que de la charité,
8c du retpcét que pour les loix. Nous portons
aufli un habit un peu différent que les autres
hommes, afin que ce foit pour "nous un avertif-
fement continuel de ne leur pas reifembler. Les
autres portent les marques de leurs dignités, &
nous celles de l’humilité chrétienne. Nous fuyons
les affemblées de plaifir, les fpe&acles, le jeu :
car nous ferions bien à plaindre de remplir de ces
bagatelles des coeurs en qui Dieu doit hab ter.
Nous ne faifons jamais de ferment, pas même
en juftice: nous penfons que le très-haut ne doit
pas erre proftitué dans les débats miférables des
hommes. Loifque nous comparoiffons. devant les
magiftrats pour les affaires des autres, car nous
n avons jamais^ de procès, nous affirmons la vérité
par un oui ou par un non', & les juges nous
en croyent fur notre iïmple parole, tandis que
tant d'autres chrétiens fe parjurent fur l’évangile:
nous n’allons jamais à la guerre : ce n’eft pas
que nous craignons la mort, au contraire nous
béniltons le moment qui nous unit à l’être des
etresj mais ce ft que nous ne fommes ni loups,
ni tigres , ni dogues , mais chrétiens- Notre
Dieu qui nous a ordonné d’aimer nos ennemis
& de fouffrir fans murmure, ne veut pas fans
doute que nous pallions la jnèr, pour aller égorger
nos frères, parce que des meurtriers, vêtus de
rouge, coëffés d'un bonnet haut de deux pieds,
, enrôlent des citoÿens, en faifant du bruit avec
deux petits bâtons fur une peau d’âne bien tendue,
& lorfqu après la bataille gagnée, tout Londres
brille d’illumination, que (e ciel eft enflammé de fu-
fées, que l’air retentit du bruit des actions de
grâces, des cloches, des orgues, des canons:
nous gémiffons en filence fur ces meurtriers, qui
caulenc l’allégrefle publique ».
Après la défaite du général Braddhock, Iorf-
guej 1« fauvages répandoient la terreur de tous
côtés, le gouvernement voulut faire armer les
quakers de la Penfilvanie ; mais pour toute réponse
le plus^ célèbre prédicateur de Philadelphie,
dit à fes frères : « Si de foibles fragmens d’argile
s’entrechoquent enfemble, qu'eft-ce que cela
nous fait ?
Les quakers, du temps du roi Jacques I I , con-
fervoient encore cette noble frânchifê, cette har-
dieffe qu’ils avoient reçues de leurs fondateurs. Ils'
écrivirent à ce prince en ces termes, pour le féliciter
fur fon avènement -au trône.
_K Celles-ci font pour te témoigner notre chagrin
pour notre Charles , que nous efpérons que I
tu imiteras dans tour ce qui eft honnête.
. * Nous apprenons qqe tu n’es pas de la religion
du pays, non plus que nous : c’eft pourquoi,
nous pouvons raifonnablemenc attendre que tu
nous accorderas la même liberté que tu prends
pour toi-même.
Q U I
te Nous efpérons qu’en cela, 8c en toute autre
ehofe, tu procureras le bie» de ton peuple; ce
qui nous obligera à prier que ton règne pusfle être
long 8c heureux.
Depuis ce temps, que les quakers appellent leurs
jours de gloire, cette (ette eft devenue moins
nombreufe : les pères des Trembleurs d’aujourd’hui
ont mis leur volupté à ne point porter de
boutons, à ne point jurer devant^ un magiftrat,!
& à entendre leur commerce : leurs enfans vou-
droient avoir féance au parlement, pofleder des
charges, jouir des honneurs, 8c, pour s’élever,
ils commencent à jurer, à porter des boutons 8c
des manchettes ; ils finiront par fe faire protef-
tans. Déjà les quaquerefifes ne font plus diftinguées
des perfonneS de leur fexe , elles portent la foie ,
lés rubans 8c les dentelles. L’ambitiôn des hommes
& la coquetterie des femmes ruineront cette feéte :
ces deux pafljons ont bien opéré d'autres prodiges
dans le monde.
Un chariot chargé de bagages militaires pafloit
un jour fur le pont de Londres ; les commis,
chargés de la perception du droit qui fe paie fur
ce pont, l ’avoient arrêté : ce fut un fujet de que-*
relie avec les foldats qui l’efcortoient. Il s’amafla
bientôt une foule nombÿeufe : les foldats préien-
doient qne le bagage appartenant aux troupes , il
n’étoit point fujet aux droits. Des injures on al-
loit en venir aux coups, & il y auroit eu du fang
répandu, fans un trembleur qui vint à palier. Il
paya le droit exigé par le commis, exhorta les
foldats à continuer leur route, & s’en al a. Chacun
dit, c’eft un quaker, & en un moment la
multitude fut difperfée.
Q U IL L E T , (C.laude) poète latin, mort en
1661, âgé de 59 ans.
(juillet exerça, pendant quelques années, la
médecine. Il fe trouva à Loudun dans le temps
que Lobardemont y. vint de la part du cardinal
de Richelieu, pour prendre connoiffance de la
fatneufe poflfeffion des religieufes Urfulines de
cette ville.
Le diable, qui partait par la bouche de l’une
de ces enforcelées, menaça un jour d’éjèver le
lendemain, j-ufqu’ à la voûte de l ’églife, le premier
qui oferoit douter de fon pouvoir. L ’incrédule
Quillet ofa en douter, & ne manqua pas de
fe trouver dans cette églife à l’heure marquée.
Toute la diablerie, comme on le penfe bien, fe
trouva en défaut. Ce fut une raifon de plus pour
les auteurs de cette ridicule comédie, de crier à
l’impiété ; & Lobardemont, qui avoit des ordres
fecrets de trouver cette polfeflion réelle
pour perdre le malheureux Grandier, étoit fur
le point dé décréter contre Quillet, lorfque ce-
Iui-ci avoit déjà pris le fage parti de fortir de
LoudiiH.
Q U I 7 W
Quillet s'étoit retiré à Rome, & y avoit pris
l’habit eccléfiaftique comme le plus favorable pour
fe procurer un état. Ce fut dans cette ville qu’il
commença fa Callipédie. Il l’acheva lorfqu’il frit
de retour à Paris , & la fit imprimer pour la pre -
mière fois à Leyde en 165y , *’«-4°. fous ce titre :
Càlyidii Lsti Callip&dia, five de pulchr.s prolis ha-
bends rations, poèma. Plufieurs traits lancés dans
ce poème contre le cardinal Mazarin, furent la
principale raifon qui l’obligèrent à f e , déguifer
fous le nom de Calvidii Lsti. Ces traits ne fe trouvent
que dans cette première édition, qui eft devenue
très-rare. Quillet difoit, en parlant des italiens
: ce Ils ont un efprit fin & difïimulé, une
fourde politique , dont les f efforts abufent l’uni-
vers imbécille. Flatteurs adroits, bas courtifans ,
s’élevant à force de ramper, fourbes avides de
gain, ils prennent toutes fortes de formes. Ordonnez
à un italien affamé d’aller jufqu’aux enfers,
il y péne'trera, & ne fe refufera aucun crime ».
Ce fécond trait eft plus direct : Les premiers
miniftres , par de coupables vues, entretiennent
les rois dans l’ignorance & la molleffe. Pour prolonger
leur règne, ils perdent tous les soyaumes.
Mais je me flatte que la gloire de notre fiècle ,
l’ornement de la France, ce ro i, digne préfent
des dieux, Louis, l’objet de tous leurs foins,
diflipera les nuages qui nous cachent fon éclat, 8c
brillera un jour de fa propre lumière ».
Dans un autre endroit de fon poème, Quillet
lance encore ce trait hardi contre le cardinal Mazarin,
né à Rome, mais Sicilien d’origine. «Parlerai
je , difoit i l , des ca'reflès que la céur de
France fait aujourd'hui à un étranger, 8c qui plus
eft, à un homme amené de l’ifle de Sicile ? La
France a des bontés excefllves pour ceux qui ne
font pas nés dans fon fein.Que dis-je ? Elle le jette
le plus fouvent dans leurs bras pour en être gouvernée
, 8c les fait dépofitaires de fa gloire 8c de
fes forces ».
Le miniftre ofiFenfé découvrit le véritable nom
de l’auteur. Il lui fit dire .qu’il avoit â lui parler.
Quillet, qui fe çroyoit'à l’abri même de tout
,loupçon, n’héfita peint de fe préfenter. Le cardinal
lui fit d’abord des complimens fur la beauté
du poème qu’il avoit lu. Il fe plaignit enfuite avec
douceur de ce qu’il -l’a voit fi cruellement déchiré.
« Vous favez, ajouta-t-il, qu’il y a long-temps
que je vous éftime. Si je ne vous ai pas encore
fait du bien, c’ tft que des importuns m’obsèdent
8c m’arrachent les grâces. ». Le poète, confus de
tant de bontés, fe jetta à fes genoux. L’adroit
miniftre le releva, 8c demanda à Ondedei, évêque
de Fréjus, qui avoit la feuille des bénéfices, 8e
qui étoit préfent, s’il n’ y avoit pas quelqu’abbaye
vacante. Le prélat ayant répondu qu’il y en avoit
une de quatre mille livres. « Je vous la donne,
M. Quillet, dit le cardinal ; apprenez à ménager