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fuffent pleinement convaincus- Lorsqu’on leur
faifoit quelques objections, ils fe contentoienr de
répondre : Le maître l'a dit.
Nous avons , fous le nom de Pythagore 9 un
ouvrage en grec, intitulé : Les vers dorés. Quoique
cet ouvrage ne foit point de Pythagore, mais de
l’un de fes difciples qui y a mis le nom du maître,
fuîvant l ’ufage des anciens, on peut néanmoins
. s’y former une idée de la morale du philofophe
grec.
Ce philofophe comparoit le fpeCtaclé du
monde, à celui des jeux olympiques ; les uns y
tiennent boutique, & ne fongent qu’à leur profit;
les autres y payent de leur perfonne, & cherchent
la gloire 5 d’autres fe contentent de voir
les jeux.
Il eft défendu, difoit Pythagore, de quitter
fon pofte fans la volonté de celui qui commande.
Le polie de l’homme eft la vie.
La tempérance eft la force de l’ame ; l’empire
fur les paflïons fait fa lumière. Pofféder la continence,
c’eft être riche & puiffant.
L’homme eft mort dans l’ivreffe du vin ; il eft
furieux dans l’ivreffe de l’amour.
Il faut, s’occuper de la propagation de l’efpèce
en hyver ou au printemps. Cette fonction eftfu-
nefte en été & nuifible en tout temps;
Quand l’homme doit-il approcher de la femme ?
Jorfqu’ il s’ennuiera d’être fort.
L’homme n’eft en fûreté que fous le bouclier
de la fagelfe, & il n’eft heureux que quand il eft
en fureté.
Ne fouffrons point qu’il y ait une cicatrice dans
l’ame de notre ami.
Il n’y aura ni blefîure, ni cicatrice dans l’ame de
notre ami, fi nous favons lui céder à propos
Que le plus jeune le cède toujours au plus
âgé.
La fidélité que vous devez à votre ami eft une
chofe làcFée qui ne fouffre pas même la plaifan-
terie. •
P Y T, .
L’homme eft un abrégé de l’univers; il a la rai'
fon par laquelle il tient à Dieu ; une.puiffance végé-
tative, nutritive, reproductrice, pat laquelle il tient
aux animaux, une fubftance inerte qui lui eft commune
avec la terre.
Le philofophe s’occupe ou de vérités à découvrir,
ou des actions à faire, & fa fcience eft théorique
ou pratique.
Il faut commencer par la pratique de vertus;
L’aCtion doit précéder la contemplation.
Pythagore eut la gloire de former des difciples
qui devinrent d’excellens légiilàteurs. Mais la fcience
des moeurs &: des loix n’ étoit pas la feule que pof-
fédât ce philofophe. Il étoit très-verfé dans l’aftro-
nomie, dans la géométrie & dans toutes les autres
parties des mathématiques. On lui doit la fameufe
démonftration du quarré de l’hypothénufe qui ell
d’un fi grand ufage dans tous les traités de mathématiques.
On rapporte qu’il en fentit lui-tfiême
tellement l’utilité^ qu’il immola à Dieu par re-
connoiffance une hécatombe de cent boeufs : mais
il falloit qu’il n’eut pas encore adopté le fyllême
de la tranfmigration des âmes d’un corps dans
un autre. Car Pythagore 3 par une fuite de ce fyf-
tefne, ne vouloit point que l’on tuât des animaux,
& il défendit à fes difciples l’ufage delà
viande.
Il y a toujours un côté par lequel les hommes
les mieux organifés touchent à la folie, & la
métempfycofe étoit le foible dé Pythagore. B
fuffifoit de frapper cette corde pour faire /dérai-
fonner le philofophe grec. Il fe vantoit de fe fou-
venir dans quel corps il avoit été avant que d’être
Pythagore. Sa généalogie remontoir jufqu’au liège
de Troyes; mais il ne tenoit qu'à lui de la faite
remonter plus haut. Il avoit été d’abord Cétha-
lide, fils adoptif de Mercure, enfuite Euphorbe,
le même qui fut blelfé par Ménélas. Son âme pafla
du corps d’Eùphorbe dans celui d’Hermotlme, de
celui-ci dans le corps d’un pêcheur, enfin dans celui
dt Pythagore. Les autres parties de fon fyilêmfi
étoient moins ridicules.
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Q .
J j A prononciation de la lettre q caufa jadis,
une grande difpute dans l’univerfité de Paris.
Le célèbre Ramus ou la Ramée eut affez de goût
pour fentir le ridicule de la prononciation gothique
adoptée & enfeignée par les profeffeurs de
runivernté, affez de hardieffepour le combattre,
& affezde force pour le détruire. Après avoir
enfeigné pendant plufieurs années la philofophie
dans le collège de Prêle à Paris, il obtint de
Henri I I , par le crédit du cardinal de Lorraine,
la place de profeffeur d’éloquence au collège royal.
Lorfqu’il fe vit honoré de cette dignité, il fe
fentit un nouveau zèle pour perfectionner les
lettres & y travailler avec une nouvelle ardeur.
Le premier abus qu’il attaqua fut la prononciation
gothique qui s’étoit gliffée dans les écoles : on y
pronoiiçoit le qu comme le k , ainfi on difoit /r/V
au lieu de quis } kifkis au lieu de quifquis, kankan
au lieu de quanquam. Ramus avert:t fes difciples
de la défeCtuofité de cette prononciation, & leur
dit qu’il falloit donner aux lettres leur fon propre ;
plufieurs profeffeurs approuvèrent & fuivirent ce
fentiment, & l’on n’entendit plus dans les écoles
ni kankan ni kifkis. Mais les dcCteurs de Sorbonne,
piqués qu’on eût fait cette réforme fans les
confulter, s’affembîèrent pour examiner le $ &
le k. Le q leur déplut, ils fe décidèrent en faveur du
k3 & quiconque prononçoit quanquam , encouroit
la cenfure de la Sorbonne.
Un jeune eccléfiaftique peu docile 'ofa prononcer
dans une thèfe publique quanquam : les partions
de kankan en avertirent la Sorbonne, qui,
pour punir ce rebelle, déclara vacant un bénéfice
confîdérable qu’iL poffédoit. Il fe pourvut au
parlement, la caufe fut appelée ; les dcCteurs s’y
trouvèrent pour y fouter.ir le kankan. Ramus à la
frète des profeffeurs du collège royal, s’y rendit,
& prouva avec fon éloquence ordinaire, le ridicule
d.e ce procès, Le parlement envoya le jeune
eccléfiaftique en pcffeffion de fon bénéfice & le
kankam à décider aux grammairiens.
Il paroît que cette difpute à donné lieu au proverbe.:
Voila un beau kankam , lorfqu’on veut dé
ligner une conteftation de peu de conféquence.
QUAKERS. S i f on en croit \ts quakers, ce qu’ils
apjpelent leur religion, exifte depuis Jéfus-Chrift
qui fut le premier quaker. Ce feu facré , après feize
cents ans de corruption, pendant lefcuels il avoit
été caché dans le fein de quelques fidèles, jetta
dans l’Angleterre des étincelles brillantes en i J42.
Georges Fox eft l’apôtre de cette feCte. N i la prf~
fon, ni les coups de verges, ne l’empêchèrent de
prêcher publiquement fa doctrine : il fit nombre
de profélites, qui, ainfi que leur maître, prirent
l'habitude cie trembler, dans le temps qu’ils pré-
tendoient être infpirés. Cornwell, qui n’aimoit
pas des fanatiques qui réfutaient de fe battre, les
pérfécutà, & ils ne furent pas plus heureux fous
Charles I I , parce qu'ils vouîoient tutoyer les ma-
gilrrats , qu'ils faifoient difficulté de prêcher les
fermons preferits par la lo i, & fur-tout, parce
qu’ils pretendoient ne devoir payer, aucune dixme
au clergé.
Guillaume Barclay, en i j « 8 préfenta au roi
une apologie des quakers. L’épître dédicatoire qui
l’accompagnoit eft remarquable. « T u as goûté,
dit-il à Charles I I , de la douceur & de l’amertume
, de la profpérité & de, grands malheurs : tu
as été chafté des pays où tu règnes : tu as fenti
le poids de l’oppreffion 5 & tu dois favoir combien
l’oprelfeur eft déteftable devant Dieu & devant
les hommes; que fi, après tant d’épreuves’
& de bénédictions, ton coeur s’endurcilïbit &
oublioit le E)ieu qui s’clt fouvenu de toi dans tes
difgraces , ton crime en feroit plus grand & ta
condamnation plus- terrible. Au lieu donc d’écouter
les, flatteurs de la cour, écoute la voix
de ta confcience , qui ne te flattera jamais. Je
fuii ton fidèle ami & fu je t,, Barclay ». Leftyle
mâle de cette épître frappa le roi, & la perfécu-
tion ceffa.
Vers ce temps, Guillaume Pen, âgé feulement
de quinze ans, fe fit trembleur. Fils d’un vice?»
amiral d’Angleterre,;il abandonna les efpéranccs
d’ une fortune confîdérable, pour prêcher la nouvelle
doCtrme; & fa jeune fié & fa bonne mine
lui procurèrent un tel fuccès, fur-tout parmi les
femmes de la cour, que,, fur fa réputation, le
patriarche Georges Fox vint du fond de l’Angleterre
, pour le voir & l'entendre. Le père de Pen
étant mort, & le jeune Quaker devenant heritier
de biens confidérables , entre lefquels fe
trouvoient des dettes de la couronne pçur des
avances faites par le vice-amiral dans des expéditions
maritimes, il en obtint en dédommagement,
vers l’an 1680, la propriété & la fouverainecé
d’une province de l'Amérique, au fudde Maryland.
C ’eft-là que fut écablie la feCte des quakers ,
& que Pen fut le bienfaiteur & le légiflateur de
fes frères, & c’eft vers ce temps qu’ il obtint pouc
eux le noble privilège de ne jamais.jurer & d’être
çrus en juftice fur leur parole. Il eft vrai, qu’en
recevant l’aCte qui leur affuroit ce droit, le chancelier
leur dit : « Mes amis, Jupiter un jour or