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Zc de volupté. Ovide , non content de louer l*a-
tnour & fes effets, voulut encore apprendre
l.art d aimer, & réduifis en fyflême cette dan-
gereufe palfion. Dans ces différens ouvrages,
ainfî que dans les faftes, le poëte annonce un
efprit orné & fécond , une imagination vive &
riante. L'expreffion femble courir au-devant de
fa penfée.
Augufte, ami des taîe'ns, reçut Ovide & fa cour,
& lui accorda fa faveur ; mais il la retira par la
fuite pour exi'er le poëte à Tomes j ville d'Europe
fur le pont Euxin , vers les embouchures
du Danube. L'endroit de fon exil pouvoit être
agréable aux habitans du pays ; mais les mon-
t ignés qui font au fud, & les vents de nord &
de l’eft qui faufilent du pont Euxin , le froid &
1 humidité des forêts & du Danube rendoient
cette contrée^ infupportable à un homme né en
Italie. Quel étoit le crime d*Ovide} Augufte lui
reprocha fes poéfies licencieufes. Mais ces poéfies
furent plutôt le prétexte que la véritable caufe
de 1 exil du poëte. Comment d'ailleurs l'empereur^
auroit-il pu exiler Ovide pour fon poème
de 1 art d aimer , lui qui chérifloit & protégeoit
Horace dont les poéfies font fouillées de tous
les termes de la plus infâme proftitution ? Ovide 3
ainfi qu'il le dit lui-même dans fes ouvrages ,■
s étant plaint à l ’amour qu'après avoir travaillé
à étendre fon empire, il n'en avoir obtenu d’autre
récompenfe que d’être exilé parmi les barbares
, l’amour lui répondic : » Vous favez bien
« que ce ifeft pas ce qui vous a fait le plus
*> de tort ».
Il eil yraifemblable de croire qù’Ovide commit
une indifcrétion femblable à celle d’Aëtéon,
& qu'il vit au bain la princeffe Livie , époufe
d Augufte 3 pour laquelle il pouvoit foupirer en
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fecret. C*eft ce qu’il femble exprimer dans ces
vers :
Cur ali qui d vidi ? cur noria lumina feci J
Cur imprudenti cognita cütpa mihi ejl'i
Infcius A3eon vidit fine vejle Dianam,
Prcsda fu it canibus non minus ïlle fu is«
Ces mots fine vefle Dianam conviennent mieux
d ailleurs à Livie qui pafToit pour chafte, qu’à
aucune des Julies trop fameuf&s par leur libertinage*
Ovide 3 du milieu de fon exil., tournoit fou-
vent fes regards vers Rome; il foupiroit fans celle
après les pjaifirs qu’il y avoit ldifés ; & cette
foibleffe lui fit donner fans mefure dans fes
Trifies des louanges à Augufte & à Tibère, fon
fucceffeur. Lorfqu'd apprit la mort du premier 3
il lui confacra une efpèce de temple où il lui offrait
tous les matins de l'encens. Il n'avoît fait
un dieu de cet empereur que pour faire un homme
du monftre qui lui fuccéda,, & qu’il efpéroit toucher
en fa faveur : mais Tibère laifia mourir
Ovide dans fon exil qui dura neuf à dix ans.
Il avoit demandé qu'en cas qu'il mourût dans
le pays des Gètes fes_ cendres fuflent portées à
Rome , afin de ne point demeurer encore exilé
même après fa mort. Il defîroit que l ’on mît fur
fon tombeaû cette épitaphe qu'il compofa lui-
même, & qu'il a rapportée danslatroifïème élégie
du troifième livre de fes Trifies :
Hic ego qui jaceo, tenerorum lufor ainorum,
Ingenio périt Nafo po'èta meo.
A t tibi qui tranfis , ne fit grave, quifquis amafii3
Dicere, Nafonis molliter ojfix cubent»
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P A N .
ji_ . Quatre P furent mis au-deflus de la porte
du premier président de Bordeaux, qui s'appela
it Pierre Pontac , & cela vouioit dire Pierre
Pontac, premier préfident. Un plaideur ayant un
jour attendu trois ou quatre heures dans fon antichambre
, fut furpris par le premier préfident
lorfqu'd avoit encore les yeux attachés fur ces
quatre P. Le préfident lui demanda : eh bien ,
moniteur >. que croyez-vous que veulent dire ces
quatre lettres? Ma fo i, moniteur, lui répondit
le plaideur, elles lignifient : pauvres plaideurs,
prene\ patience.
P A L A P R A T , (Jean) né en iû jo , mort en
1721.
Palaprat étoit fecrétaire des commandemens de
M. de Vendôme , grand-prieur de France , avec
lequel il vivoit dans une grande liberté. M. de
Catînat qui l ’a moît fo r t , lui dit un jour en l’em-
brafiant : les vérités que vous lâchez au grand-
prieur,, me font trembler pour vous. Raifurez-
voivs, moniteur, lui dit plaifamment Palaprat, ce
font mes gages.
Palaprat logeoit au temple, chez M. le grand-
prieur, où quelquefois il n'y avoit point de dîner,
& d'autres fois il y avoit des repas énormes. Palaprat
dsfoit. fur cela : dans cette maifon on. ne
peut mourir que d’indigeftion ou d'ifaanition.
On prétend que Palaprat avoit fait le Grondeur
en un a 61e , & que Brueys, à qui il l'envoya, le
mit en trois. Sur quoi Palaprat dit : jarnidious ,
j’avois envoyé à ce coquin-là une jolie petite montre
d’Angleterre; il m’ en a fait un tourne broche.
M. le grand -prieur, trouva un jour Palaprat
qui battoit fon domeftique. Il lui en fit des reproches
affez vifs. Comment, moniteur, vous me
blâmez, dst le poëte : favez vous bien, que quoique
je n'aie qu'un laquais, je fuis aufli mal fervi
que vous qui en avez trente?
Dès que le livre de Labruyère eut paru, on
employoit à tout propos le mot de caractère. J'en
avoisles oreilles fi rebattues , dit Palaprat 3 qu’un
jour que je dînois avec un beau parleur qui s'en
fervit un million de fois , je m'avifai, pour me
moquer de lu i , de dire d'un ton précieux , que
je trouvois des faucilles qu'il y ayoît à ce repas,
d un ,cara6tère tranfeendant.
Dans le temp$ qu'on fut que Catînat méditoit
a bataille de la Marfaille, je fus envoyé chez
par M. le grand prieur, dit Palaprat. Après
que je me fus acquitté de ma coramifllon , je
me retirai. Le maréchal me rappella, & me dit
froidement : « Vous né croiriez pas une chofe,
cependant je fuis homme vrai J’étois en peine
où aboutiroit ce préambule ; & je fus fort fur-
pris lorfque j'entendis cette grande vérité. Il y
a plus de huit jours, me dit-il, en me ferrant les
bras , que je n'ai pas fo n.gé à faire un vers 5 & il
rentra tranquillement dans fon cabinet fans me
1 ailler le temps de lui répondre.
Palaprat étoit tout à la fois un bel efprit pour
les faillies, & un enfant pour la naïveté. Il s'eit
peint ainfî dans fon épitaphe :
- .Tai vécu l’homme le moins fin
Qui fut dans la machine ronde ,
Et je fuis mort la dupe enfin
De la dupe de tout le monde.
PAMPHILE. Ce peintre fleuriftoit vers la foi-
xantième olympiade.
Il joignit les fciençes à la peinture, & difoit
qu'un peintre qui ne pofiede point parfaitement
les mathématiques , ne pou voit jamais être habile
dans fa profeflîon.
Pamphile fe fit un plaifir d'enfeigner fon art :
mais afin de ne donner fes leçons qu'à des jeunes
gens de bonnes familles , il ne pretioit aucun élève
qu'à rai.fan de dix talens, & pour dix années d'ap-
prentiffage. C e ne fut qu’à cette condition qu’A -
pelle obtint d'être placé au rang de fes difciples.
Par les foins de Pamphile, la peinture beaucoup
plus honorée qu'elle ne l'étoit avant lu i ,
fut mile à la tête des arts libéraux ; & il fit rendre
un édit formel qui l’interdifoit abfolument aux enclaves.
P A N N AR D , ( Charles - François ) mort ea
17^4, âgé de foixante-quatoize ans.
Ses vers & fes pièces de théâtre refpîrent l'enjouement
& le plaifir ; mais , jamais ce poëte ne
fit rougir les grâces qui raccompagnèrent jufqu'au
tombeau. Il lût allier l'efprit & le fentiment, la
décence S; la volupté. Il arma quelquefois la gaîté
des traits de la fatyre j peignit, en badinant, les
moeurs de fon fiècle ; tk dans le temps que fa
mufe facile & légère le berçoit fur un lit dé rofes,
il en faifoit fentir les épines aux fpeëlateurs , qui
1 rioient de leur piqûre.
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