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griffes du plus acharné, il Pavoit portée au
ciel en triomphe.
Cette prétendue aventure du roi Dagobert fut
peinte derrière fon tombeau dans la magnifique églife
qu’il avoit fait bâtir à fon bienheureux protecteur.; j
D AGUESSEAU .( Henri François ) , né à
Limoges en 1668. ■.
XI fe lia d'amitié des fa jeuneffe avec Racine j
& Boileau, & , à leur exemple, fit fes délices
de cultiver les lettres, & même la poëfie.
M .Daguejfeau, dit Voltaire, étoit le plus
favant magiftrat que jamais la France ait eu ,7
poffédant la moitié des langues modernes de 1
iJEurope, outre le latin, le g re c , & un peu
d'hébreu ; très - inltruic dans l'hiftoire , profond;
dans la jurifprudeoce, . & cé qui eft plus xare, .
éloquent. Il fut le premier au barreau qui parla
avec forcé & pureté à la fois-: avant lui on
faifoit des phrafes.
• Quelques traits épars nous feront connoître
cet homme, illultre dans les différentes périodes de
f i vie. Il fut reçu avocat, général à l’âge de
vingt deux ans. Il parut d'abord avec tant d'éclat
dans cette placé, que le célèbre Denis Talo
n , alors préfident à mortier, nejput s'cmpê-'
cher de dire : Qu i l voudrait finir comme ce jeune
homme comment oit*
Ori difoit de M. Daguejfeau qu’ il penfoit en
phllofophe '& qiiil pàrldit en orateur.
Quelqu’un confeilloit à l’illuftre D a g ue jfeau ,
» alors procureur général, -de prendre du repos :
» Puis-jè me repofer, dit-il i tandis'que je fais
» qu’il y a des hommes qui fouffrent 1 . . »
Après la mort.du chancelier Voifin en 1717»
M. le duc d’Orléans, régent, adreffant la parole
à plufieurs feigneurs, voulut abfolument
qju'on lui dît qui feroit. chancelier. Celui que
votre altefte royale voudra, dit l'un d'entr eux ;
mais tout Paris nomme M. Daguejfeau. Ce ma
giftrat fut appelé fur le champ , à l’âge de quarante
huit ans, à cette première charge du
royaume^ fans en avoir fôllîeité aucune, quoiqu'il;
ffit fouvent affuré .du fûcçès. A Dieil ne
plaift , difoit-il quelquefois , que j 3occupe jamais
la place d’un homme vivant*
L e nonce Quirini allant à Frêne voir le chancelier
Daguejfeaus »c'ell ici, dit le prélat, que
».■ & forgent les armes contre la cour de Rcme }
» non, monsieur, répliqua le chancelier y ^maisf
» les boucliers ».
Un intendant écrivit air bas d’un , pîacet _une
ordonnance en crayon ; ©fi en appela au confeil j
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M. d’Agueffeau dit en riant : ~C’efi une affaire ce
terminer avec de la mie.de pain.
On ne doit pas oublier cette repartie îngé-
nieufe qu'il fit, étant chancelier, à M. de la Pey«.
ronie, premier chirurgien du ro i, lors du fameux
procès entre- les médecins les chirurgiens. « ML _
« .de ]a Peyronie follicito'it vivement, & prioit
» M. Dague.fféaù d'élever un grand mur, un mur
» d'airain , difoit-?!, entre le Corps de la méde-
»f ç'ine Sc celui dé là chirurgien Mais , f i nous'
» élevons ce mury lui’demanda l’illuftre magiftrat,
>> dé quel côte faudrait-il mettre le malade ? »
D A N CH Ë T ,i ( Antoine,) né à Riom en 16 7 1 ,
mort à Paris en 1748 ; !ou il s’ét’oit fait aimer autant
par fon caradère qu'eftimer par fon efprit.
Il ne fe permit jamais un feul vers fatyrique >
quoiqire poète outragé. Un de fes rivaux l'ayant
. infujté dans une fityre fanglante , Danchet fit en
réponfe une épigramme très-piquante, i'epvoy*.
à fon ennemi, & lui déclara que perfonne ne la
verr.oit, 'mais qu’ il vouloit feulement lui montrer
; combien il étoit facile & honteux d’employer les
armes de la fatyre. .
Danchet fut un jour confulté 'par un 'jeune-
poète fur une petite, pièce qui commencoit ainfi:
Mai fo n qui renferme£ mon aimable maîtrejfè l
Rebuté du mot maifon, il dit au jeune homme r
Annobliffez vos expreffions;.mettez Palais. « Eh t
>3 monfieur, ma maîtreffe eft à l’hôpital ” . ; Anno-
bliffez-donc vos amours, répliqua YiVement Danchet.
Son prologue des jeux fécnlaires dans l’opéra
d’Héfione, peut être comparé à celui d’Amadis.
On a retenu ces beaux vers imités d’Horace :
Père des faifons & des jours
Fais naître en ces climats un fiècle mémorable; .
Puifle à fes ennemis, ce peuple redoutable
Etre à jamais heureux & triompher toujours.
Nous avons à nos lo ix aflërvï la viéèoire;
. Aufii loin que tes feux nous portons notre gloire t
Fais dans tout l’univers craindre notre pouvoir-
1 Toi qui Vois tout ce qui refpire >
Soleil , püiflè-tu ne-rien voir
; De fi puiitant que cet empire !
C e ft dans ce prologue quo’n trouvées cou-,
plet fi cruellement parodié par Rouffeaù pour'
infultèr -Danchet lui-même &' d’autrcS gens de
lettres;
Que l’amant qui devient heureux-.
En devienne encor plus fidèle 1
- Que toujours dans les mêmes, npeuds
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Il trouve une douceur nouvelle !
Que les foupirs & les langueurs
Puiffent feuls fléchir les rigueurs
De la beauté la plus févère !
Que l’amant comblé de faveurs
Sache les goûter & les taire !
L é portrait de ce poète a été gravé avec ees
vers :
Si l ’honneur de briller àu théâtre lyrique ,
Si des fuccès heureux fur la fcêne tragique,
Danchet, affranchiflbient de l’éternelle nuit,
On te verroît jouir encore dé la v ie ,
Et joindre le bon coeur avec le bel e fp r it,
Qui ne fe trouvent pas toujours de compagnie.
D A N C O U R T ( Florent Carton^, fieur ) na- j
quit à Fontainebleau en 1661, le même jour que
le grand Dauphin. Le père Delarue, jéfuite ,
fous lequel il fit fes études, voulut procurera fa
fociété un jeune homme dont la vivacité & la
pénétration promettoient beaucoup,; mais.l'eloi-
gnement du difciple pour le cloître rendit inutiles
tous les foins du maître. Dancdurt aima mieux
fe livrer au barreau, qu'il abandonna bientôt pour
le théâtre. Il fut non-feù!ement grand acteur,
fur-tout dans les rôles de jaloux, de financier,
d'hypocrite, de mifanthrope, mais encore auteur
diftitigué.
Voltaire dit de ce poète : « Ce que Regnard
» étoit àfpégard de Moliere dans la haute co-
» médie , le comédien Dancouri l'était dans la
33 farce ».
Son dialogue eft léger, v i f , rapide, plein de •
gaîté & de faillies, La facilité que Dancdurt avoit
dans fes ouvrages, il la portoit dans la fociété.
On difoit de Dancourt, qu'il jouoit noblement
dans la comédie & bourgeoifement dans le tragique.
Racine, qui n’aimoit point cet auteur , ayant
entendu le libraire Brunet qui crioit : Meffieurs,,
voilà le théâtre de M- Dancourt : Dis fon échafaud
, répliqua Racine.
Lorfque.Dancourt fe fentit malade, & proche
de fa fi i y d fit fairq fon tombeau, & l'alla voir
avec la même tranquillité que s'il eût été deftiné
pour un autre.
Ce comédien avoit été chargé, par fes confrères
, de porte» auxadminirtrateurs de l’hôpital
le quart des piuvres. Il s’acquitta de cette com-:
miffiot^j & fit aux adminiftrateurs un très-beau*
difcouis. L'archevêque de: Paris & le préfident de
Harlai étoient à la tête du bureau. Dancourt s’ef-
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força de prouver que les comédiens , par les fe-
cours qu’ ils 'procuroient à l’hôpital ; méritoienc
d’être à l’abri de l’excommunication. Son éloquence
ne fut pas heureufe. M. de Harlai lui répondit :
» Dancourt, nous avons des oreilles pour vous
» entendre, des mains pour recevoir les aumônes
» que Vous faites aux pauvres , mais nous n’avons
» pas de langue pour vous répondre «.
Le père de la Rue fermonant fon ancien difciple
fur ce qu’ il avoit embrafté la profeffion de comédien
: « Ma fo i, mon père, lui dit Dancourt, je
» rie vois point, que vous deviez tant blâmer l’état
•»j? que j’ai 1 pris ; je fuis comédien d'U ro i, vous
« êtes comédien du pape; il n'y a pas tant de
»- différence de votre état au mien
Dancourt mourut en 1716» .
DAN ÈS ( Pierre ) , né à Paris l'ah 1497,
mort en 1577.
Dunes fut un digne élève du favant Budé,
& remplit pendant quelque temps une chaire
de profeffeur en langue grecque,, que François
premier lui donna au collège royal. Il fut envoyé
par ce prince , en qualité d’ambafiadeur
au concile de Trente. Un jour que Nicolas
Pfeaume, évêque de Verdun, parloit. avec force
contre certains abus qui regnoient dans la daterie
& dans la chancelerie de la-cour de Rome au
fujet des provifîons des bénéfices, un évêque
Italien, regardant les François avec un fourire
ame-r, dit en latin ces mots équivoques : Gal-
lus cantat. Utinam, reprit fur le champ Da-
nes, ad galli cantum Petrus refipifeeret J Palla-
vicini, qui rapporte cette repartie célèbre, ajoute
qu’elle fervitcomme d’un aiguillon, pour engager
les pères du concile à travailler férieufement à
la réformation de .la discipline eccléfiaftique.
Henri II choifit Danés pour être précepteur
du dauphin, François II. Ce.tte place & fon
faveur l’élevèrent à l’évêché de Lavaur. Ayant
été député à Paris par lé clergé de fa province,
on voulut lui afligner, pour les fraix de ce
voyage, rnille ou douze cens livres ; mais il les
refufa, en difant que le revenu de fon évêché
lui fuffifoit ; que c’étoit la moindre chofe qu’il
pût faire pour fon églife, & pour celles qui en
étoient voifin'es , que d’entreprendre quelques
voyages pour leur rendre fervice.
Ce digne prélat, qui avoit été marié, &
étoit devenu veuf avant que d'entrer dans les
ordres, ayant appris dans fon djocèfe la mort
. de fon fils fe retira dans fon cabinet pendant
une demi-heure; & étant revenu joindre la
L compagnie d’un air tranquille: « Je viens de
:» recevoir la nouvelle de la mort de mon fils 5
fl !» les pauvres ont gagné leur procès *v