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ces les mieux défendues, il ne perdoit pas plus
de monde que les affiégés.
En 1677, Louis X IV ayant avec lui fon frère
& cinq maréchaux de France , faifoit le fiége de
Valenciennes. Vauban dirigeoit toutes les opérations.
Le roi tint un conftil de guerre pour attaquer
les ouvrages de dehors. C ’étoit Tufage que
ces attaques fe fiffent toujours pendant la nuit.,
afin de marcher aux ennemis fans être apperçu,
& d’épargner le fang du foldat. Vauban propofa
de faire l’ attaque en plein jour. Tous les maréchaux
xie France fe-récrièrent contre cette proportion
: Louvois la condamna. Vauban tint ferme ,
avec la confiance d’un homme certain de ce qu’il
avance. « Vous voulez , dit-il , ménager le fang
du foldat : vous l’épargnerez bien davantage
quand il combattra de jour fans confufion &
fans tumulte , fans craindre qu’une partie de
nos gens tire fur l’autre , comme il n’arrive que
trop fouvent. 11 s’agit de furprendre l’ennemi j
il s’ attend toujours aux attaques de nuit •• nous
le furprendrons en effet 3 lorfqu’ il faudra qu’é-
puifé des fatigues d’ une veille a il foutienne les
efforts ‘de nos troupes fraîches. Ajoutez à cette
raifon , que s’il y a dans cette armée des fol-
dats de peu de courage 3 la nuit favorife leur
timidité} mais que , pendant le jour, l’oeil du
maître infpire la valeur, & élève les hommes au-
deffus d’eux-mêmes «g Le roi fe Tendit aux rai-
fons de Vauban 3 malgré Louvois & cinq maréchaux
de France. Les moufquetaires , par leur valeur
, s’emparèrent dé la contrêfcarpe, tous les
ouvrages furent emportés en plein jou r, & la
ville capitula lorfqu’on s’y attendoit le moins.
( Siècle de Louis X IV .)
j Au fiége de Cambrai qui fuivit celui de Valenciennes
, Vauban n’étoit p2S d’avis qu’on attaquât
la demi-lune de la citadelle. Du M e tz , brave
homme 3 mais chaud & emporté , perfuada au roi
de ne pas différer davantage. Ce fut dans cette
conteftation- que Vauban dit au roi : Vous perdre%
peut-être a cette attaque tel homme qui vaut
mieux que la place'. Du Metz l ’emporta} la demi
lune fut attaquée & prife : mais les ennemis étant
revenus avec un feu épouvantable, ils la reprirent,
& le roi y perdit plus de quatre cens hommes
, & quarante officiers.. Vauban, deux jours
après, l’attaqua dans les formes, & s’en rendit
maître fans y perdre- que trois hommes. Le roi
lui promit qu’une autre fois il le laifferoit faire.
Vauban étoit au fiége de Namur au commen-
ment de l’ar..ée 1703 , il donnoit ordre à des
réparations néceffaires lorfqu’ il apprit que le roi
l ’âvoit honoré du bâton de maréchal de France.
C e citoyen , zélé pour le fervice de l’état, s’étoît
lui-même refufé; quelques années auparavant à
cette élévation. Il craignoit que cette dignité empêchât
qu’ on ne l’employât avec des généraux, du
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même rang, & n’occafionnâtdes difficultés contraires
au bien du fervice. Vauban âimoit mieux
être plus utile, & moins récompenfé.
En 1706 la Feuillade avoit été chargé du fiége.
de Turin. Comme cette opération étoit importante
& difficile, Vauban offrit de fervir comme
volontaire dans l’armée „ & uniquement pour
donner fes confeils à la Feuillade. Ce jeune homme
qui avoit peu de talent & beaucoup d’orgueil,
le refufa , & dit audacieufement : Tefpere prendre
Turin a la Coehorn ; c ’étoit le nom du directeur
général des fortifications des Provinces-Unies,
& le rival de Vauban. Cependant la Feuillade
s’y prenoit fi mal, qu’il ne fut pas plus, avancé
après deux mois , que le premier jour. Louis X IV
confulta fur ce fiége Vauban, qui offrit encore
d’aller conduire les travaux. Mais , monfieur le
maréchal, lui dit le roi, fonger-vous que cet emploi
eft au-dejfous de votre dignité? Sire, répondit
Vauban , ma dignité eft de fervir l’état.
Je bifferai le bâton de maréchal de France à la
porte, & j’aiderai peut-être le duc de la Feuillade
à prendre la ville *>. Ce vertueux citoyen
fut rêfufé, parce que l ’on craignit de donner
un dégoût au général qui étoit gendre.de Cha-
millard , miniftre de la guerre. Turin avoit été investi
le 13 mai, on ouvrit la tranchée la nuit
du 2 au 3 juin , mais le fiége fut levé le 7
feptembre.
Vauban, que la dignité de maréchal de France
fembloit avoir rendu inutile, s’en confola avec
fes favantes oifivetés ; c’étoit le nom qu’il donnoit
à des écrits qu’il avoit compofés fur les fortifications,
fur le commerce & l’agriculture.
Son projet d'une dixme royale a été fouvent réimprimé.
Cette dixme , fuivant le fyftème de fauteur
, devoit être levée en nature de fruits dans
tout le royaume au profit du roi, & devoit tenir
lieu de toutes les autres impofitions. C e projet
avantageux , mais qui fouffroit bien des difficultés
, n’a pas été adopté.
L’académie des fciences, lors de fon renouvellement
en 1699, avoit demandé Vauban pour
un de fes honoraires } 8c qui méritoit mieux cette
place qu’un homme qui avoit rappellé du ciel
les mathématiques pour les occuper aux befoins
des hommes? La mort Je furprit lorfqu’il étoit
prêt de finir un ouvrage fur les fortifications :
plufieurs de nos places, lors de la campagne de
1706 , ne s’étant pas défendues comme il au-
roit fouhaité, il vouloit défendre, par fes confeils
, toutes celles qui feroient attaque’es à l’avenir.
V A U C A N S O N , mort en 1783 âgé d’environ
70 ans.
Vaucanfon naquit méchanicien } étant enfant,
il
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il orna une chapelle que fa mère lui avoit donnée
de petits anges qui agitoient leurs ailes, 8c de
prêtres automates qui imitaient quelques fonctions
eccléfiaitiques. Lorfque cet homme industrieux
revint à Paris, après trois mois d’abfence, ;, il profita d’une maladie cruelle 8c longue pour
s’occuper de fon fiuteur. Sans aucune correction, !■
fans aucun tâtonnement, fa machine toute entière
réfulta de la combinaifon des pièces qu jl
avoit fait exécuter en fortant de fon Ut. N ofànt ;
avoir de témoins de Ion premier effai, il écarta
même, fous prétexte d’une commiffion, un an- ,
cien domeftique qui lui étoit attaché depuis long- •
temps, mais celui-ci avoit vu des préparatifs » : il épioit le fecret de fon maître} il ne put donc ;
fe refoudre à obéir. Caché près de la porte il ;
écoute avec attention. Bientôt il entend les^ pre- j
miers fons de la flûte : à l’inllant il s’élance ;
dans la chambre , tombe aux genoux de Vau.- j
canfon, qui lui paroît alors plus qu’ un homme, j
8c tous deux s’embraffent en pleurant de joie, j
Vaucanfon inventa 8c exécuta dans fa jêuneffe , j
un automate qui jouoit à la fois du tambourin j
& du galoubet, comme les fucceffeurs de nos j
anciens troubadours. Enfuite il fit deux canards ;
qui croaffoient, barbotoient, mangeoient , âl- j
loient chercher le grain, le faififfoient dans l’auge. '
■ Ce grain éprouvoit dans leur ettomac une forte j
de trituration , il paffoit enfuite dans Les in,tel- j
tins. C e n’étoit pas la faute de Vaucanfon fi ]
les ^nédecins avoient mal deviné le méchanifme
de la digeftion , ou fi la nature opéroit fes fonctions
par des moyens d’un autre genre que ceux :
qu’il pouvoit imiter. Ses machines étoient des !
preuves fuffifantes de fon génie. Il fit de fes j
tares talens un ufage plus utile. Confulté par
le gouvernement, dans une difcuflïon bu l’on \
faifoit valoir l’intelligence peu commune que de- !
voit avoir un ouvrier en étoffe de foie , il re- '
pondit par une machine avec laquelle un âne j
exécutoit une étoffe à fleurs. Il avoit quelques i
droits de tirer cette petite vengeance des ou- j
vriers de Lyon qui, dans^ un voyage qu’ i l 'f it j
dans ce pays , le pourfuivirent, à coups de ;
pierres, ayant oui dire qu’il cherchoic à fim- j
plifier les métiers.
Au milieu de ces travaux utiles , Vaucanfon {
./uivoit en fecret une idée , à l ’exécution de la- •
quelle Louis X V s’intéreffoit ; c’étoit la conf-j
truâion d’un automate dans l’intérieur duquel
devoit s’opérer tout le méchanifme de la circulation
du fàng} mais les lenteurs qu’éprouva
l’exécution des ordres du Souverain, dégoûtèrent
notre fayant académicien.
Ce favant illuftre conferva toute fon activité
jufqu’ au dernier moment de fa vie. Il s’occu-
poit encore quelques jours avant de mourir,
à faire éxécuter la machine qu’il avoit inventée
E ncyclopcdiana, .
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pouf compofer fa chaîne fans fim « Ne perdez
pas une minute, difoit-il à fes ouvriers} je ne
vivrai peut - être pas affez long-temps pour expliquer
mon idée en entier ».
V AU G E L AS ( Claude Favre de ) né l’an 158 ;,
mort' en 16$o.
Voiture qui étoit fort ami dé Vauge la s , le
railloit quelquefois fur le trop de foin qu'il em-.
ployoit à fa traduction de Quinte-Curfe. Il lui
difoit qu’ il n’ auroit jamais achevé, que pendant
qu’il poliroit une partie, notre langue venant â
changer , l ’obligeroit à refaire toutes les autres :
à quoi il appliquoit phifamment ce qui eft dit
dans Martial de ce barbier qui étoit fi longtemps
à faire une barbe, qu’avafit qu’il l'eut
achevée , elle commençoit à revenir.
Eutrapelus Tonfor3 dum circuit ora Luperci
Expungitque gênas , altéra barba fubit.
Ainfi, difo't-il, altéra üngua fubit. Au refte
cette- tradu&iôn reçut de grands applatidiffe-
mens } 8c c’eft à fon fujet que Balzac dit que
l’Alexandre de Qüime-Curfe étoit invincible ,
& celui de Vaugelas inimitable.
Le card'nal de Richelieu , ayant fouhaité que
l’ acade'mie-françoife travaillât tout de bon à un
dictionnaire 5 on lu: témoigna que funique
moyen d’avancer ce travail , étoit d’en charger
principalement M. de Vaugelas , & de lui faire
rétablir pour cet effet par le roi une penfion de
deux mille livres dont il n’étoit plus payé. Le
cardinal ayant goûté cet expédient, Vaugelas
l’alla auffitôt remercier. Le miniftre le voyant'
entrer dans fa chambre s’avança vers -lui, 8c
lui dit : eh bien , monfieur, vous n’oublirez pas
du moins dans le dictionnaire le mot de penfion :
non, monfeigneur, répondit Vaugelas, & encore
moins celui de reconnoiffance.
Vaugelas difoit qu’une mauvâife raifon fait
ordinairement mpins de tort qu’un mauvais mot,
parce qu’il n’y a que les gens à réflexion qui
connoiffent la fauffeté d’un rayonnement'; au
lieu qu’ un mauvais mot eft remarqué de tout le
monde.
Vaugelas fe forma fur l’hiftoire romaine de
Cqeffeteau, & ne vouloit prefque point reçe-
yoir de phrafe qui n’y fut employée. Balzac dit
à ce fujet, qu’au jugement de M. de Vaugelas
j il n'y avoit point de falut hors l’hiffoire romaine ,
i .non plus que hors de l’églife romaine. Il lut
i dans la fuite les traductions de d'Ablancouit,
; & il les prit pour, modèles de la üenne., ^
V A Y E R , (FrançoisLa Mothele) b : en i;8 8 ,
mort en 1672-
A a a a a a