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àimoit beaucoup. Un jour qu'il de voit recéŸoir
une forame de douze cents livres à là campaghe ,
il monte achevai , & Muphty ne manque pas de
l’accompagner. Cet animal eft témoin de tout :
il voit que M. P . .. . compte 8c recompte l'argent
, qu'il enferme dans un Tac avec foin , 8c
qu’il remonte à cheval d'un air fatisfait.
Muphty prend part à la joie de fon maître, il
s’agite j, il faute autour de lui , 8c jappe pour le
félicite^.' Vers le milieu du chemin , M. P . . ..
eft obligé de mettre pied à terre , il attache fon
cheval à un arbre , 8c paffe derrière une haie : en
s’éloignant , il fe rappelle que fon argent eft relié
fur le cheval 3 8c que le premier venu pourroit
s'en emparer ; il va prudemment prendre le fac ,
le pôle à côté de lui au pied d'un buiffon , où il
s'arrête quelque temps ; enfuite il n’y penfe plus ,
fe lève, 8cfe dilpofe à partir.
Muphty qui obfervoit tous fes mouvemens 8c
qui le Tuiyoït pas à pas , s'apperçoit de cette diffraction
, il court au fac , effaie de le foulever, ou
de le traîner avec fes dents ; ce poids étant trop
lourd il retourne à-fon maître 8c s'accroche a
fes habit pour l'empêcher de monter à cheval : il
crie, il mord: M. P... n’y fait aucune attention,
repouffe fon chien, "8c part.
Le chien s’étonne de ce que fes avis ne font
pas mieux écoutés j il fe jette au-devant du cheval
pour l'empêcher d'avancer j il aboie jufqu’à
ce que la voix lui manque:enfin, fon zèle l'emporte
, il fe jette fur le cheval 8c le mord en cinq ou
lîx endroits.
C'eft alors que M. P . .. commence à craindre
que fon chien ne foit enragé. Dans certains efprits,
les foupçons fe changent bientôt en certitude. On
traverfe un ruiffeau. Muphty, quoique tout h ale-
tnt, continue décrier 8c de mordre, 8c dans
l'excès de fon zèle , il ne longe point à fe défal-
térer. Ah ! mon malheur eft donc certain , s'écria
M. P . . . , mon chien eft enragé > s’il alloit fe
jetter fur quelqu'un !... il faut le tuer ! . . . .
Un chien qui m’étoitfi fidèle !... Mais fi j’attends,
il pourroit bien me mordre moi-même.... Allons
, c'eft un devoir.... Il prend un piftoîet,
vife & lâche le coup en détournant les yeux; le
chien tombe, & le débattant fe tourne vers fon
martre, 8c femble lui reprocher fon ingratitude.
M. P... . s’éloigne en frémilTant, il fe retourne,
8c Muphty agite fa queue en le regardant,
comme pour lui dire le dernier adieu. M. P... au
défefpoir, eft tenté de defcendre pour chercher
quelque remède au -coup qu'il a porté, un refte
de frayeur l'arrête j il continue triftement fa route,
livré à des regrets , à des remords8ç pourfuivi
dé l’image de Muphty mourant; il ne fait comment
expier ce trait de barbarie* il donneroit
pour qu'il fût poffible de le réparer j 8c -il
a N i
maudit mille fois fon voyage. Tout-à-coup cette
idée lui rappelle celle de fon fac j il voir qu'il ne
l'a plus , il fe fouvient de l’endroit où il Ta laiffé ;
c’eft pour lui un coup de lumière : voilà l’explication
des cris 8c de la colère du malheureux
Muphty. 11 retourne à toute bride chercher Ton
argent, en déplorant fon injuftice : une trace de
fang qu'il apperçoit le long du chemin le fait frif-
fonner, 8c met le comble à fa douleur , il arrive
au pied du buiffon, 8c qu’y trouve-t-il ?...
Muphty expirant, qui s’étoit traîné jufques-là ,
pour veiller du moins fur le bien de fon malheureux
maître, 8c pour le fervir jufqu’au dernier
inftant.
Un gros chien , chaffé de différentes maifons,
fe vint un jour réfugier fous la chaife du prince
d’Orange , tandis qu'il étoit à table. Le prince le
chaffa plufieurs fois , 8c le fit chaffer par fes gens ;
mais le chien ne manquoitf jamais de revenir à
l’heure des repas , 8c prenoit fi bien fon temps ,
que Maurice le trouvoit toujours à fes pieds, 8c
que las de le rebuter, 8c faifant réflexion à la
confiance de cet animal, il défendit qu’on le renvoyât.
Le prin,ce lui donne lui-même à manger,
le chien le carreffe, 8c ce nouveau courtifan accompagne
par-tout fon maître fans l’importuner.
Il demeure à la porte de fa chambre, 8c ne fuit
le prince que lorfqu’il en fort, 8c qu'il va hors
de fon palais : il marche à côté de fon carroffe ,
8c Ton eût dit qu’il étoit un de fes gardes. Cela
plut tellement à Maurice, qu’il prit ce chien en
amitié, lui donna l’entrée jufques dans fon cabinet
, 8c lui légua en mourant une fomme dont
il fut entretenu pendant fa vieiüeffe, qui fe prolongea
affez.
C hienne. On a rapporté dans le journal
économique du mois de Mai 176 ƒ, un exemple
finguîier de la fenfibilité d'une chienne pour fes
petits. Un particulier avoit dans fa meute une.
cAie/zree qu'il aimoit beaucoup,'8c qui aVoit le privilège
de manger 8c de dormir dans le fallon.
Cette chienne ayant mis bas , il prit le temps qu’elle
étoit abfente pour noyer fes petits dans un étang
voifîn. La chienne étant revenue quelque temps
après, fut fort inquiette de ne plus les voir. Elle
fut les chercher , 8c les ayant trouvé noyés, elle
les apporta les uns après les autres aux pieds de
Ton maître, 8c lorfqu'elle fut au dernier, elle le
regarda fixément. ,8c mourut fur-le-çhamp.
C heval. M. de BouffaneUe, capitaine de cavalerie
, fait mention, dans fes Observations militaires
3 imprimées à Paris en 1760 , qu’en 17^7,
un cheval de fa compagnie , hors a âge, très-
beau, 8c du plus grand feu, ayant tout-à-coup
lés dents y fées au point de ne pouvoir plus mâcher
le foin 8c broyer l’avoine , fut nourri pe: •i
dant deux mois, 8c l’eût été davantage,fi. on l’eût
a n t
içardé ,par les deux chevaux de droite 8c de gauche
Squi mangeoient avec lui 5 que ces deux c gçg
Itiroient du râtelier du foin qu iis machoient, -8c
Nettoient enfuite devant le vieillard* quils en
jmfoient de même pour l'avoine , qu ils broyoïent
»bien menue, 8e mettoient enfuite devant lui. U elt
Ici, ajoute l’auteur, Je témoignage d une cora-
ipagnie entière de cavalerie, officiers âc cavar
I C igognes. Les cigognes font aflèz communes
en Flandre, où elles percHInt fur les plus hauts
[clochers. Après la bataille de Denain, 8e avant que
fia nouvelle pût en être arrivée à Paris, quatre
fcigognes parurent fur la tête de quatre ftatues qui
[■ font au coin de la lanterne dû dôme. Les inva-
ilides dirent qu'il y avoit eu sûrement une bataille
en Flandre, d’où le bruit avoit fait fuir les cigognes 3 18c plufieurs préfagèrent de l’endroit ou elles s’é-
j voient arrêtées , que nous avions gagné la bataille.
[Plufieurs perfonnee dignes de roi, qui vivoient
I encore en 1756 à Thôtel, avoient vu cette efpèce
; de phénomène..
ï C ouleuvres. On a vu à Paris, en 176 6 3 dans
un des fpeélacles du boulevard , une femme qui
avoit accoutumé plufieurs couleuvres à venir à fon
commandement, à former, par leurs entrelafïe-
mens différentes figures, à fe jouer autour de
fon cou 8c de fes bras. On les voyoit la flatter,
lui obéir, s’éloigner 8c accourir avec une com-
plaifance fingulière. Les fpeélateurs pouvoient
auffi les prendre, les toucher, lèscarreffer : elles
étoient comme des animaux familiers 8c domefti-
,-ques.
Elé phant. Un foidat de Pondichéry, qui avoit
coutume de donner à un éléphant une certaine me-
fure d’arac, chaque fois qu’il touchoit fon prêt,
ayant un jour buplus que de raifon, 8c fe voyantpour-
fuivi par la garde, qui vouloit le conduire en prifon,
fe réfugia fous Téléphant 8c s’y endormit. Ce fut en
vain que la garde tenta de l'arracher de cet afyle.
L'animal reconnoiffant défendit fon bienfaiteur ,
8c vint à bout d'écarter les foldats. Le lendemain!,
cet homme, revenu de fon ivreffe, frémit à fon
réveil de fe voir couché Tous un animal d'une grof-
feur fi énorme. U éléphant, qui peut-être s'apperçut
de fon effroi, le careffa avec fa trompe pour le
raffurer, 8c fembla lui faire entendre qu'il pouvoit
s’en aller.
Un éléphant maltraité par fpn cornac , c’eft-
à-dire, fon conducteur, -s'en étoit vengé en le
• tuant. La femme du cornac prit fes deux enfans
8c les jetta aux pieds de l'animal furieux, en lui
difant : « Puifque tu as tué mon mari, ôtes-moi
33 aufll la vie, ainfi qu'à mes enfanjs ».. .
IJ-éléphant parut touché de regret, porta avec
fa trompe le plus grand des deux enfans * le mit
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fur fon cou, T adopta pour fon cornac, 8c n’en
voulut point fouffrir d'autre.
L'empereur Domitien voulant donner une fête
aux romains, fit dreffer une troupe èt éléphant pour
danfer un ballet. Un de ces animaux fut corrigé
pour n'avoir pas bien retenu fa leçon , 8c Ton remarqua
que la nuit fuivante il la répétoit dç lui-
même au clair de la lune.
Un homme qui avoit un éléphant fort bien dreffé,
lui donna un chaudron pour le faire raccommoder.
Le maître gronda fon éléphant x après lui avoir fait
voir que le chaudron étoit encore troué, 8c le
renvoya chez l'ouvrier. Pour cette fois l;e chaudron
fut bien raccommodé. Cependant Y éléphant avant
de le reporter , alla à un puits tirer de l'eau * êc
s'affûta par lui-même que le chaudron ne la laif-
foit plus échapper.
GRENOUiLLE.Le règne animal offre, en Amérique,
les diverfîtés les plus étonnantes. L'oifeau-mouche
8c Ja gr£/z0üwf/£-taureau font auffi remarquables l'un
que l'autre, le premier par fa petiteffe extrême, le
fécond par l'énormité de fa groffeur. Voici ce que
M. Kalu , fuédois , en dit dans fon voyage dans
l'Amérique feptentrionale. Vers^l'automne, auffi-
tôt que l’air devient un peu froid, ces grenouilles
fe cachent dans Ja bourbe, 8c y paffent l’hiver
dans Tengourdiffement. Au printemps , lorfque
l'ajr fe réchauffe, elles fortentde leurs retraites, 8c
croaffent. Leur croaffement reffemble exactement
au beuglement d'un taureau, ou à celui d’un boeuf
qui feroitenroué. Leur voix, eft fi forte, que detix
hommes , qui parleroient enfemble très-haut fur le
bord d'un fcffé où il y a de ces animaux , ne
pourroient pas s'entendre. Ce qu’il y a de plus
incommode , c’eft que ces grenouilles croanent
toutes enfemble , s’arrêtent par intervalles * 8c
recommencent enfuite. Il paroît qu’elles ont un
chef j car auffi-tôt que Tune de ces grenouilles
fe met à croaffer, toutes les'autres en font au-^
tant, 8c quand la même vient à ceffer, toutes les
autres fe taifent. Le lignai du- filence eft un fon
dur 8c fort, qui reffemble au mot poop. Ces animaux
font affez filencieux pendant le jour, à moins
que le ciel ne foit couvert : ils croaffent pendant
la nuit; 8c fi le temps eft calme, on les entende
un mille 8c demi de. diftance. Lorfqu ils croaffent,
ils font près de la fur face de Teau,, fous les buif-
fons, 8c la tête hors de l’eau. On peut les prendre
facilement, avant.qu'ils s’aperçoivent- qu'qn les
approche : auffi-tôt qu'ils ont la- tête fous l'eau,
ils fe croient cachés, quoique leurs corps foient
à découvert. Quelquefois ces grenouilles s'éloignent
dé l’étang î mais au moindre danger elles y
rentrent à grands fauts, car une grenouille de cette
efpèce, dans toute fa vigueur, franchit près de
treize verges par faut. Voici un fait qu’on a raconté
au voyageur que j'ai cité, 8c qui eft arrivé
dans le temps que les fuédois vivoient avec h»