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maifon paternelle pour aller demeurer avec leurs
epoux. Audi nè mettent-ils point leur bonheur à
avoir des enfans males, ils n’ afpirent qu'à avoir des
filles., qui leùrprocurent des gendres qui deviennent
l'appui de leur vieilleife.
Si un arabe, époufe une fille, il fait égorger un
chameau ou deux, félon fes facultés, pour faire le
feliin des noces, & donne tant à la fi lie ..Si quelque
temps après, quelque proche parent de cette fille,
qui ëtoit abfent lorfque le mariage s’ eft fait, revient,
&,n:e l'approuve pas, il paye au marié l’argent qu’il
a donné à fa,parente, le chameau qu'il a tué, 8c
l j mariage eft rompu, quoique confommé.
M. de Valois dit avoir appris de M.de Varîllas,
qu’en 1287 dans le comté d’Armagnac, il fe fit un
mariage pour Fèpt ans, entre deux perfonnes bien
nobles, qui fe réfer voient la liberté de le prolonger,
au bout des fept années s’ils s’accommodoient l'un
de l'autre. Le contrat portoit encore, qu'en cas que
lé terme expiré ils viïaffent à fe féparer, ils par-
tageroient également moitié par moitié, les enfans
de l'un 8c de l'autre fex-e, qui feroient provenus
de leur mariage pendant l'efpace des fept années,
& que fi par hazard le nombre s'en trouvoit impair
, ils tireroient au fort à qui des deux le-
furnuméraire échéroir. ■ On dit que ce contrat de
mariage eft dans la bibliothèque du roi.
Il y a une efpèce de mariage reçu en Allemagne,
par lequel le mari donnant., à fa femme la main
gauche, au lieu de la droite, en ftipulant par
une condition expreffe de fon mariage, qu'il ne
la prend pas pour femme d’une -condition égale ,
les enfans qui en proviennent, ne prennent ni
le nom, ni les armes de. la maifon, & n'ont
pour tous droits fucceffifs, que le don que.lè,
mari fait à fa femme le jour de fes noces5 parce
que les enfans, quoique légitimes en effet, font
réputés bâtards à l'égard des effets civils.
On a dit que le mariage étoit le tombeau de
l’amour. Un homme de condition s'étoit marié par
inclination. Quelqu'un, qui le connoiffoit, contoit
dans une compagnie , que depuis qu'il étoit marié,
il ne couchoio plus avec fa femme.
Un mari difoit à fa femme, qu’il connoiffoit un
homme qui n’ étoit pas marqué au front, & vous
le connoiffez auffi , ajouta-t-ii; elle rêva, chercha;
non en vérité, dit elle, je ne le connais pas.
On s’étonnoit qu’un mari , dont la femme étoit
d’une grande naiffance , & paffojt pour avoir
beaucoup de mérite, s’en fût féparé. Il répondit,
en montrant fon foulier : « Vous voyez bien qu’ il
» eft bien fait; mais vous ne voyez pas ou il me
»» bleffe.
Il y a plus de maris qui aiment leurs femmes,
que de femmes qui aiment leurs maris ; & je crois,
dit-un auteur moderne, en avoir trouvé la raifoo
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dans l’amour que tous les hommes ont en général
pour la liberté.. Lés femmes dépendent de leurs
maris, 8c les maris ne dépendent point de leurs
femmes. Ajoutons à cette penfée, que la plupart
des difeuffions qui s'élèvent entre un mari & une
femme, viennent le plus fouvent de ce que celle-
ci veut fortir de l’état de dépendance où la nature
Tr mife.
Une dame vertueüfe fut priée par une
autre dame, de lui apprendre quels fécrets elle
avoit pour conserver les bonnes grâces de fon
mari. C ’eft, lui répondit-elle, en faifant tout ce
qu’il lui plait, & en fouffrant patiemment tout ce
qui ne lui plaît pas. .
Un prince défirent d’avoir le portrait d’une femme
qui étoit très-belle. Le mari ne voulut jamais y
confentir. Si je lui donne la copie , difoit ce mari
prudent, il voudra enfuite avoir l ’original.
Un homme qui fe fit faire un lit de noce magnifique,
difoit qu’il l'étreneroit avec celle qu’il
avoit époui-ée ; quelqu'un lui dit qu'il aimeroit
mieux avoir l'étrene d'une femme, que l’ étrene
d’un lit. Moi auffi, dit le mari y mais je n’afpire
pas à une chimère.
Un bourgeois de Meudon, maltraitoit extrêmement
fa femme qui étoit fort jolie. On en porta des
plaintes à M.deDefeuquieres, qui envoya chercher
le mari brutal. Celui-ci fe défendit le mieux qu'il
put.; & comme il difoit avec emportement à M.
Dtfeuquières, que s'il connoiffoit la méchanceté
de fa femme, il ne le condamneroit pas; un voifin
qu’ il avoit amené avec lui, s’approcha, & lui
dit doucement par-deffus l’épaule :« Compère ,
» il y a raifon par-tout ; on fait bien qu’il faut
» battre une femme, mais il ne faut p as j’affom-
» mer 5». On loua le voifin de fon bon jugement,
& on renvoya le mari3 à qui on recommanda de
i s’y. conformer à l'avenir.
Une demoifeile étoit defiinée par fa mère à
époufer un homme qu’elle aimoit; mais fon père,
marin, franc & brufque, après s’ être fignalé contre
les anglois, vint détruire le bonheur dont elle
fe flattoit de jouir; il arriva avec un de fes amis,
auquel il avoit auffi promis fa fille. En le préfen-
tant à la jeune perfonne, il lui dit: — « Tu as
» vingt-ans , il te faut un mari y en voici un que
» tu épouferas mardi prochain, parce qu’il faut
« que nous partions enfcmble jeudi » .— Le ton
impérieux du père jetta la confternation dans la
famille , qui fe crut obligée d’obéir. Le jour des
noces arrivé, les futurs vont à l’églife ; l’amoureux
s’y étoit auffi rendu, & pleuroit dans un
coin. La jeune fille, au-lieu de répondre oui au
curé, lui dit naïvement : j’aimerois mieux l’autre.
— Le père accourt en colère, & demande où eft
cet autre; on lui montre, il va a lu i, le prend
brufquement par la main, le conduit a fa fille, &
confent qu’on les mariée
Un jeune homme qui avoit, comme on dit, mange
fon bien en herbe, ne voyoit plus de reffource que
dans un mariage. Il étoit près d’époufer la fille d'un
riche fermier, lorfqu’un de fes amis lui dit: je te con-
nois, tu mangeras le château, tu mangeras la charrue,
tu mangeras les boeufs. Il eft trop vrai, répondit le
jeune prodigue 9 je n’aurois pas plutôt mangé les
boeufs, qu’il ne me reliera que les cornes : & il
«e fe maria point.
Un amateur confidéroit les fept facremens peints
par le Pouffin, & trouvoit beaucoup à critiquer
dans le tableau qui repréfentoit le mariage. Je vois
bien, s’écria cet amateur, qui n’étoit peut-être pas
content de fa femme, qu’il eft niai aîfé de faire
un mariage qui fo.it bon, même en peinture.
Mademoifelle Beauval, e'poufe. d’un comédien
de ce nom, fe maria d’une manière fingulière.
Son père formant oppofitiôn à fon mariagéy elle
fit cacher fon amant fous la chaire du curé, & ,
à la fin du prône, elle déclara, devant Dieu & ,
devant les hommes, qu’elle prenoit Beauval pour '
fon époux. Beauval fortit de deffous la chaire, &
en dit autant : ainfi ils fe dirent mariés, finon par ‘
je curé, au moins fous fes yeux.
Un homme d’ un certain âge, s’eft marié, il y a
quelque temps, de la façon la plus fingulièce. Las
d’avoir été la dupe du fexe, & voulant pourtant,
comme t’on dit , faire une fin, s’avifa , un jour
qu’il étoit dans une nombreufe-fociété, où fe
trouvoient plufieurs femmes à marier, de demander
un chapeau. Il mit des billets blancs &. un billet
nôir. « Celui-ci, dir-il, doit gagner. » On le quef-
tionna envain fur le prix attaché à cette loterie,
& fur l’objet de ce qui paroiftoit un badinage. Les
dames tirèrent à fon invitation. Le billet noir fortit
enfin; alors l’homme s’écria: Meilleurs, voilà ma
femme; il fut agréé & devoit l'être; car il jouiffoit ;
d’une fortune confîdérable. Quelques jours après
on célébra leur hymen, 8c l’on s’amufa fort à la
noce.
Une jeune demoifeile aux pieds des autels ,
étoit fur le point de contracter l’engagement fo-
lemneî de fa liberté, lorfqu’un incident des plus
extraordinaires y mit un obftacle invincible. « Je
53 ne puis, dit le jeune homme, confentir au
mariage, qu’ on n’ajoute trente mille livres à la
» dot promife. »Lepère de la demoifeile, étourdi
du procédé, mais craignant de mortifier fa fille,
par un refus qui.tourneroit à fa confufion, ton-
fentît à l’augmentation dé la dot. Le notaire qui
étoit préfent, ajouta au contrat cette nouvelle
claufe. La fille gardoit pendant ce temps le filence
le plus profond, elle ne le rompit que lorfque le
pretre ayant commencé la cérémonie , lui 'demanda
fon contentement. « N on, monfieur, dit-
elle, je ne confentîrai jamais de mè donner à un
homme qui a voulu m’acheter à prix d’argent, & qui
vient me marchander daps uq lieu confacré à la.
Encyelopédiana.
[ prière & au culte de la religion. » La mère pleine
I d’admiration des fentimëns généreux, 8c de la
fermeté de fa fille, la prend entre fes bras, Ttm-
braffe 8c lui dit : « O u i, tu es ma chère fille, je
, ” ne puis qu’applaudir à ta façon de penfer : la
« dot que je t’avois donnée, 8c les trente mille
« livres qu’on vient d’exiger, feront pour un
». autre plus digne de te pofféder; » Et dans Tînt?-
tant chacun fe fépàra.
Un peintre faifoit un tableau de l’hymen pour
un jeune amant : Je veux qu’il foit accompagné
de toutes les grâces, lui difoiccet amant paflîonné,
fou venez-vous fur-tout que l’hyrnen doit être plus
: beau qu’Adon's. 11 faut lui mettre en main un flambeau
plus brillant: en'core que- celui de l’amour.
Enfin , faites un effort d’imagination, je vous
payerai votre tableau à proportion que le fujtt
en fera gracieux. Le peintre qui connoiffoit fa h-
i béralité, n’oublia rien pour îe fatisfaire, & lui
; apporta le tableau la veille de fes noces. Nette
jeune amant n’en fut point fatisfair. I f manque ,
dit-il, à cette figure, certain air gai, certains agré-
raens, certains charmes; enfin, ce n’efî point-là
! l’idée que j’ ai de l’hymen. Vous l’avez fait d’une
beauté médiocre ; vous ne ferez, que médiocrement
récompenfé. Le peintre, qui avoit au.ant
de préfence d’efprit que de génie pour la peinture , '
prit fon parti dans -le moment. Vous avez raifon,
lui dit-il, de n’être pas content de la beauté de
mon tableau, il n’eft pas encore fee; ce vifage eft
embu; & pour vous parler franchement, j’emploie
mes couleurs de manière que ma peinture
ne pavoît rien dans les premiers jours- Je vous
rapporterai ce tableau dans quelques mois, 8c pnur
lors vous me le payerez félon fa beauté ; je fuis
fûr qu’il vous paroîtra tout autre : adieu, mor-
fieur , je ne fuis pas preffé d’argent. C e peintre
remporta fon ouvrage; notre jeune amant fe maria
le lendemain ; 8c quelques mois s’écoulèrent
fans que le peintre parût. Enfin il reporta le tableau
; notre jeune époux fut, furpris en .le voyant.
Vous me l’aviez bien promis, lui dit-il, que le
temps embelliroit votre peinture; quelle différence !
je ne la feconnois plus : j'admire l’effet du temps
fur les couleurs, & j’admire encore plus votre
habileté ; cependant je ne puis m’empêcher de
vous dire que c e vifage eft un peu trop gai, ces
yeux un peu trop vifs ; car enfin des feux de
l’hymen doivent paroître moins brillans que ceux
de l’amour ; ce font des feux folides que ceux de
l’hymen ; d’ailleurs, l’attitude de votre figure eft
un peu trop enjouée, un peu trop libre; & vous
lui avez donné un certain air de badinage qui ne
caraûétife pas tout‘-à -fa it........C e n’eft pas-là
l’hymen enfin. Fort b ienm on fieu r , kii dît le
peintre, ce que j'avois prévu eft arrivé; l’hymen
eft à préfent moins bien dans votre idée que dans
-J mon tableau, c’étoit tout le contraire il y a trois J mcùs ; ce u’eft point ma peipture qui a changé, c’eft
N o n a