
Sameuil a donné cette aujre irïfcription pour
l’amphithéâtre des écoles de chirurgie de Paris.
A d cezdes hominum prifca ampfiitheatra patebant ;
Ut difcant longum vivere nojlra patent.
Le cirque offroit dans Rome un champ libre au carnage*
Le nôtre enfeigne à l’homme à prolonger fon âge.
D IS T R A C T IO N . La difiraftion nous fait te-,
nir tant de difcours déplacés, & commettre
tant d’attions ridicules, qu’on ne peut être trop
en garde contre cette abfence d’ efprit. Ménalque,
dit la Bruyère, fe trouve par hazard avec une
jeune veuve ; il lui parle de fon défunt mari,
lui sjemandê comment il eft mort. Cette femme
à qui ce difcours renouvelle fes douleurs, pleure*
fanglotte, & ne biffe pas de reprendre tout le
détail de la maladie de fon époux,qu’ elle conduit
depuis la veille de la fièvre qu’il fe portoit
bien , jufqu’ à I l’agonie. Madame , lui demande
Ménalque, qui l’avoit apparemment écoutée avec
attention , n avie^vous que celui-là ?
On peut tout dire en notre langue, en évitant
les termes naturels qui bleffent notre déli-
cateffe, & leur en fubftituant d’autres .qui font
détournés , contre lefquels on ne fe révolte
point. Une dame qui avoir une colique ên hiver
, parce qu'elle avoit fouffert le froid , ap-
-peloit fes fréquentes évacuations, des^ fruits de
la faifon. Un homme qui étoit milrait revint à
lu i, lorfqu’el’.e parla des fruits de la faifon, &
lui demanda fi elle en mangeoit fouvent'.
Un négociant auquel on faifoit, figner l’extrait
b.iptiflaire d’un de fes enfans, ligna, Pierre &
compagnie»
Un fecrétaire du roi fart diftraic, dînoit avec
un maître des requêtes & fa foe u r , qui étoit
une jeune veuve. Cette dame vint à fe trouver
mal. Le feqrétaire du roi fit entendre qu’il regardait
cet accident comme un figne de grof-
iéfle. N o n , monfîeur, répondit le maître des
requêtes, ce n’eft point le mal que vous dites,
il y a trois ans que ma foeur eft veuve y je vous
«demande pardon, madame, reprit l’homme dif-
trajt.i je croyois que vous étiez- fille.
Une jeune dame étant en compagnie avec
fon rçiari, racontoic les adreffes dont un galant
s’étoit fervi pour s’introduire la nuit dans la
chambre d’une femme qu’il aimoit, en l’ab-
fence dé fon époux ; mais ajouta-t-elle, comme
ils étoient enfemble fort contens l’un de l’autre,
voici le mari qui revient frapper à la porte :
or imaginez Y embarras ou j e fus alors. . . . La'
vérité qui venoit de lui échapper jetta le mari
dans un bien autre embarras. '
Le comte de Brancas étoit fi diftrait, quétant
verfé dans un foffé il s’y établit fi bien j
.qu’il demandoit à ceux qui alloienc le fecourir,
ce qu’ils défiroient de fon fervice.
DIVOR CE . Séparation qui doit être un be-
foin prouvé, ou qui n’eft qu’un fcandalepermis.
Les anciens romains avoient trois fortes de divorces
i la .première étoit appelée répudium, qui
fe faifoit par le mari, fans le consentement delà
femme. Le premier qui le fit fut Spurius Corbilius,
cent ans après la fondation de Rome , parce que
fa femme étoit ftérile. C. Sulpicius répudia la
fienne, parce qu’ elle étoit fortie de la maifon en
cheveux, & fans voile fur la tête. Ç . Antiftius, la
fienne , pour l’avoir vu parler fecrettement à une
femme libertine. Sempronius, la fienne, pour être
allée voir les fpectacles publics, fans qu’il en
fût rien $ & C. Céfar répudia Poppéa pour le feul
foupçon qu’il eut de Clodius , lequel fut trouvé
habiiléen femme à la folemnité que Pompée avoiç
célébrée en l’honneur de la déeffe Bone.
Le fécond s’appeloit divorce, parce qu’ il fe fai-
foic du confentement de tous les deux.
Et le troïfîème .s’appeloit féparation3 qui fe
faifoit félon la volonté du prince, & dépendoit
de fon arbitre.
Les romains furent plus de cinq cents ans fans
avoir aucun divorce ; enfuite ils fe relâchèrent
tellement, que le mariage n’eut plus de con-
fiftance, & telle femme corhptoit fes années par
le nombre de fes maris, Caton répudia fa femme
Martia pour un an, en faveur d’Hortenfius, à
qui il la maria, ou plutôt à qui il la prêta pour
ce temps-là.
Le divorce eft permis chez les chinois, 8£*parmi
toutes les raifons qui peuvent faire ceffer le
mariage, en voici une bien fingulière : une femme
qui rempliroit fa maifon de fumée, ou qui ef-
frayeroit le chien,du logis par l’excès de fon
babil, feroit fujette au divorce.
- DOGE. Le Doge de Gènes étant venu à Versailles,
pour faire réparation au nom de la république
dé quelque hoftüité, un courtifan qui lui fàifoiG
voir toutes les beautés de ce palais, lui demanda
s’il n’ étoit pas. étonné : oui répondit le Doge3 je le
fuis beaucoup , mais cejtde me voir ici.
D OM CAR LOS. On n’ a jamais .fu la véritable
câufe de la mort de Dom Carlos, fils de Philippe
I l , que ce père dénaturé fit mourir, en fe
couvrant du manteau de la juftice ^ on rapporte
feulement l’anecdote Suivante, que l’ efpagnol qui
étrangla ce princè, par ordre de l’empereur, lui
cnoit ; Calla calla Setior ; todo que fe ha^o ês por
*> fdbieri. Taifez-vous, taifez-vous, Monfeighcur j
» tout ce qu’on fait eft pour votre bien ».
Le cardinal de Spinofa ne pleura pas la mort
de cet infortuné, qui le haiffoit mortellement;
Dom Carlos prenant un jour fon éminence par
fon rochec, lui dît; « Quoi ? Petit curé, tu as
» ï’aüdace de tç jouer à moi, en empêchant que
» Cifneros , le comédien, vienne me divertir ? Par
la vie de mon père -3 il faut que je te tue ».
Peut-être Teut-il fait, fi ce prélat ne lui eût
échappé des mains.
C e prince, étoit d’une -hutùeur li bizarre que
fon cordonnier lui ayant fait des bottes trop étroites,
il les fit mettré en pièces & fricaffer, & les
donna à manger au malheureux ouvrier.
D OM IN IC A IN , f DoménicoZampièri, dit le)
né à Bologne l ’an x 5-81., mort en 1641.
H entra dans Fécole des Carraches. Ces grands
maîtres., pour entretenir l’émulation parmi leurs
élèves, propofoient fouvent des prix. Louis Car-
rache étoit un jour fur le point d’en décerner un,
lotfque le Dominicain, généralement méprifé par
fes çamarades, s’ayança d’un air timide, & pré-'
fentaTon deffm erétremblant, & avec cette mo-
deftie que nous avons vu plufieurs fois accompagner
le vrai talent. Peu s’en fallut que les autres j
élèves o’éclataffent de rire de fa témérité. Le Car-
rache examina fon travail,' & lui adjugea le prix.
Ses camarades continuèrent cependant à ne
lui croire aucune d i f p o f i t i o n } & comme il tra-
vailloit avec beaucoup de lenteur, ils fe moc-
quoient de lui, & l’appelloient le boeuf. Annibal
.Carrache leur entendant prononcer cette injure,
leur dit un jour que ce boeuf tracerait f i bien fon
f ilo n , qu’il rendrait tres-fertile le champ de la peinture.
Annibal Carrache, s’étant un jour introduit
dans fon attelier, fans en - ê,£i;e apperçu , fut extrêmement
furpris.de lui voir le vifage enflammé,
l ’air menaçant & les yeux étincçlans de colère.
Le Dominicain travailloît alors au fameux tableau
du martyre de Saint-André, & il peignoir
un des bourreaux,.
Il faifoit cet ouvrage en concurrence avec le
Guide. Les deux ta'bkaux ayant été placés & découverts,
le procédé d’une bonne' vieille, qui
vint les contempler, acheva de faire connaître celui
auquel on devoir donner la préférence. —-
« V o y e z , dit-elle à un jéuhe! enfant qu’elle te*
noit par la main, & auquel elle montroiï le ta-'
b4eau du Dominicain'. » voyez avec quelle fureur
=• ces bourreaux lèvent le bras pour flageller ce
» Saint} remarquez, mon enfant, avec quel air
» barbare cet autre le menace ; remarquez com-
» me celui ci lui ferre fortement les pieds avec
» des cordes} admirez la confiance de ce vénéta-
ft ble vieillard à fouffrir tant de tourmens, 8c
» voyez comme fa foi fe découvre dans la ma-
»^nière dont il lève les yeux-au ciel ». — - En di-
fant ces paroles, .la bonne femme répandit quelques
larmes, &c pouffa de profonds foupirs: s’é tant
.enfuite retournée vers le tableau du Guide,
elle le regard1*, pe prononça pas un feul mot, 6c
s’en alla.
Un des amis du Dominicain, voulant lui per-
fuader de ne pas tant finir fes ouvrages, & d’être
plus expéditif} — — ce Vous ne favèz donc
» pas , lui dit-il, que j’ai un maître extrêmement
» difficile à contenter? .C’eft mcù-même».
Le Dominicain ayant fait; un tableau qui fut
applaudi par une cabale toujours acharnée à ra-
bailîer fon mérite, s’écria : — « J’ai bien peur
que mon tableau ne vaille rien, puifque mes en-
» nemis ên font l’éloge ».
Son fameux tableau de Saint-Jérôme, que l’on
regarde à présent comme l’un des chef-d’oeuvres
de la peinture,-le rendit la viétime d’une injufte
cabale, fufeitée par un cardinal qui protégeoit
d’autres peintres. Il n’y avoit dans Rome qu’une
voix pour décrier ce chef-d’oeuvre, quand il parut
} & le Dominicain n’en reçut que cinquante
écüs. ’
Le cavalier Bernin, a dit fouvent qu’il demandoit
pardon à Dieu de n’avoir ofé alors déclarer
publiquement ce qu’ il penfoit du mérite de ce
tableau, dans la crainte de fe brouiller avec l’éminence
qui le décriait.
Les per fée utrons multipliées de fes ennemis,
causèrent tant de chagrin à cet illuftre & malheureux
artifte, qu’ il tomba dans une langueur mortelle,
^ ne fit que traîner des jours douloureux:
ne fe croyant point en sûreté dans fa propre
maifon, au fein de fa famille, il préparoit lui-
même fa nourriture dans la crainte qu'on ne l’em-
poifonnât.
D O M I T I E N , empereur romain, fils de
Vefpafien, né l’an y 1 de Jéfus-Chrift, mort aftaf*
fine le 18 feptembre 46 âgé de 45 ans. r
^ C e prince, incapable de toute forte d’appliai-
tion, portoit la parefife & l’indolence jufqu’à
paffer journellement des heures entières à enfiler
des mouches dans fon cabinet, avec un poinçon
d’or très-aigu. Un certain Vibius Crifpias 4 qui 00
demanda un jour s’il y avoit quelqu’un avec l’empereur,
répondit affez plaifamment : Non,.// ri y
a pas même une mouche.
Domkien meprifa affez le fénat pour l’affcmbler,