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éperdùement amoureux de mademoiselle de Beuf-
kow. Elle étoit dans fa dix-huitième année , belle,
douce , & née avec une fenfibilité extrême. Son
amant, dans Tige vainqueur de vingt-un ans,
étoit aimé autant qu’il aimoit, • & le jour étoit
nommé pour les rendre heureux : c é toit le 20 Juin
Ï770.
Les troupes pruffiennes font toujours prêtes à
entrer en campagne , & le 17 Juin, à dix heures
du foir , le régiment du comte reçut ordre de
partir à minuit pour la Siléfie. Il étoit à Berlin,
& fa maîtreffe à un château à quatre lieues de la
ville. Il partit donc fans la voir , 8çil lui écrivit du
premier endroit où Ton s’arrêta, qu’il lui étoit
impoffible de vivre Tans elle , qu’il . Ia prioit de. fe
fuivre inceflàmmentV & que le mariage fe feroit
dans la Silélie. L’officier manda en meme , temps
au frère de la demoifelle, qui étoit Toi? -intime
ami, de plaider fa caufe avec fes. pareris. Elle
part donc accompagnée par ce frère & par la nière
de fon amant. Jamais le fable de la'Prufle n’a paru
fi pefant qu’à cette charmante fille •; mais enfin le .
voyage finit, 8c elle arrive à la ville d’Herfiadt,
c ’etoit le matin , & jamais , m’a dit fon frère, mes’
veux n’ont vu de femme plus jolie que ma foeur ;
l’exercice du-voyage avoit ajouté à fon éclat, &
fes yeux peignoient -ce qui fe paffoit dans fon
coeur. Mais, ô perfpe&ives humaines , que vous
êtes' trompeufes ! que le moment dè la félicité
touche fouvent au malheur ! La voiture eft arrêtée
dans la rue pour lailfer palfer des foldats
qui, s’avançant à pas lents ,' portoient dans leurs
bras un officier bleffé. Le tendre coeur de la jeune
perfonne fut=touché- du fpe&acfe î elle ne foupçon-
noit guère que ce fût Ton amant.
Les fourageurs autrichiens étoient venus près de
cette yille, & le jeune comte étoit forti pour les
jrepoüfier. Brûlant de fe-diftinguer , il s’ élance avec
ardeur devant fa troupe, 8c tombe la viétime de fa
malheureufeimpétuofîté.
Peindre la fituation de cétte fille infortunée, fe-
ïoit infulter au coeur & à l’imagination de tout
leéteur fenfiblë. Son amant eft placé dans fon lit ,
fa mère eft à fes pieds , & fa maîtrefle lui tient la
main. « O , Charlotte;, s’écrie-t-il, en ouvrant un
» oeil mourant ». Il voüloit parler j mais fa voix
eft rompue, il fond en fermes. Son accent avoit
percé l’ame .de fa maîtreffe, elle perd la raifon.
m Nont, je ne te furvivrai pas, dit-elle, en fefai-
» fiffant d’une épée ». Onla défarme , 8c l’officier
pîpurant fait ligne avèc la main; qu’on l’approche
dé lui. Quand elle 'yint., il lui ferre lé
bras, & après deux pénibles’ efforts pour parler , il
dit: avec unfangîot : « vis , ma Charlotte , pour
» confoler ma mère, & il expire ». ;ô malheur!
Dans fe troupe qi\i fifecette Toftie fi> fatale au jeune j
amant, il n’yfeut-que deux hommes -'blelfés , 8ç 1
lui feul de tué. Quand je pariai par Berlin, en .
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1779 > la demoifelle n’avoitpas encore recouvré |J
raifon.
Un feigneur étranger entendant une maître® -
qu’il idolâtroit, vanter la,beauté d’une étoile $
lui dit « ne me la demande pas , car je ne pourroiT;
»--te la donner »....
Un amant qui avoit une maître ffe. à .qui il nian-
quoit un oeil,. fe fit borgne pour lui' reftembler|
ori: jugera d’abord que cét amant /n’étoit: ’ pointé
françois ; mais efpàgnol. Ë|
Si l’on en croit un de no,s poètes , il eft un moye|
de cpnnoître xm amant fincère. Plût à Dieu qngj
fon feçret fût bon. .
Beautés qui , dans la fleur de l’âge,
_ Craigne?:', un tendre engagement :
Voulez-vous d’u n ,amant. volage
Distinguer un fidèle amant ;
g L’un .flatteur 8c. plein d’aflurance , ■
-Vous peint vivement fon ardeur *
. L’autre foupire , & fon filence
Eft un éloge pour fon coeur.
Ecoutons: plutôt les confeils que donne auf
amans heureux le naïf Ea Fontaine.
Soyez-vous l’un à l’autre un monde toujours beau,
Toujours divers, toujours nouveau,
Tenez-vous lieu de t o u t , compte« pour rien le,'reflet
J’ai quelquefois aimé; je iTaurois pas alors
Contre le louvre & fes tréfbrs,
Contre le firmament & fa. voûte célefte,
Changé le bois, changé les lieux
Honorés par les pas, éclairés par les yeux
De l’aimable & jeune bergère 5
Pour q u i, fous le fils de Cythère ,
Je me vis engagé par nies premiers fermens.
AMASIS. Amajis, de fïmple foldat, devint
roi d’Egypte, vers l’an 5-69 avant J. C . Il -gagna!
le coeur de fes fujéts par la douceur & la fâgeflif
de fes loix, parmi lefquelles on en a remarqué une
qui preferit a chaque particulier de rendre .compte
tous les ans à un magiftrat de la manière \ dont!
fubfiftoit.
AMAZONES. C e mot, dérivé dû grec, lignifie
privé d'une mamelle. Les Amazones étoient'
des femmes courageufes & guerrières , qui fon-jj
dèrent un empire dans l’Afie-mineure, fur les côtes|
de la mere noire.
Il n’y avoit point d’hommes parmi ellésjpour i?*|
propagation de leur efpèce ; elles alloient cherche!
dçs étrangers, elles tubient tous les enfansmâ!e>|
qui leur naiffoient, '&■ rètrarichoiént''âüx filles Bl
mammelle droite , pour les rendre plùs propres J|
.tirer de l’are. Les Amazones étoient - forcer
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de refter vierges jnCquà ce qu’ elles euffent tue
trois ennemis de l’état.
Le mot d‘amazones a été donne aux femmes j
guerrières. Il yen avoit beaucoup dans les armees ■
des premiers califes.
Parmi nous les femmes ont adopté , pour aller ;
au bal ou à la campagne, un habillement qu’elles -j
appellent le coftume des amazones.- Elles portent le j
chapeau d’homme, une véfte à peu près dans le j
goût'.des nôtres, des fouliers plats, & ne con-.
fervent que les jupons de femme. Cette bigarrure
affez,piquante infpira le couplet fuivant au galant
abbé' de Lattaignant. Il eft adreffé à une femme
vêtue en amazone.
■■■■woe L’autre jour l’aimablè Baronne,
iL Etant vécue en amazone,
Fit naître un plaifant différend1
| | | Entre les dieux de la tendrefiè :
Vénus la vouloit pour amant,
d |. L’amour la vouloit pour maîtrefte.
Lorfque le célèbre capitaine Dérar combattoit '
en Syrie contre les généraux de l’ëmperèur Hérâ-
clius, du temps du calife Abubecre , fucceffeur de
Mahomet, Pierre, qui commandoit dans Damas,
avoit pris dans fes courfes plufieurs mufulmanes
avec quelque butin, il les conduifôit à Damas :
parmi ces captives étoit la foeur de Dérar lui-même.
L’hiftoire arabe d’Avalkedi dit qu’ elle étoit
parfaitement belle , & que Pierre en devint épris ;
il la ménageoit dans la route,, & épargnoit de trop
longues traites à fes prifonnièrës. • Elles campoient
dans une vafte plaine fous des tentes, gardées par;
des troupes un peu éloigneês. Caulah , c’étoit
le nom de cette foeur de Dérar , propofé à une de
fes compagnes, nommée Oferra, de fe fôüftraire
à la captivité ; elle lui perfuade, de mourir plutôt
que d’ être les viétimes de là lubricité des chré-
tfens j lé même enthoufiafme mufulman faifit toutes
ces' jfçmmes ; elles s’arment ’ deis piquets ferrés de
leurs „tentes , de leurs couteaux, efpèces de poignards
qu’elles portent à la Ceinture', 8c forment*
un cercle fe ferrant les unes contre les autres/’
P?ur:$PP°fer; leurs armes à l’ ennemi.
Pierre ne fit d’abord qu’en rire ; il avance, vers
cçs femmes , il eft reçu à grands coups dè bâtons
fe t t fe j il balance long-temps à ufer delà force :
^ &,les fabres étoient déjà levés,
lqrfque Dérar arrive , met les grecs en fuite , dé-
, & toutes les captives.
«c La célèbre comteffe de Montfort, eh Bretagne,
svétôit vértueufe ( dit" cfArgentré ) outre tout
» naturel de fon fexe j vaillante de fa perfonne
“ .a,ut£nt que nul, homme j.eUe, montoit à cheval,
raf n’°^ mieux'que nul'écuyer; elle com-
»» battoit a la main , elle couroit, donnoit parmi
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’ » une troupe d’hommes d’armes, comme le plus
» vaillant capitaine ; elle combattoit par mer & par
» terrç tout de même affurance ».
On la voyoit parcourir l’épée à la main fes états
envahis par fon compétiteur, Charles de Blois.
Non-feulement elle foutint deux affauts fur la brèche
d’Hennebon, armée de pied en cap ; mais
elle fondit fur le camp des ennemré, fuivie de cinq
cents hommes, y mit le feu , 8c le réduifît en
cendre.
Marguerite d’Anjou, femme, de l’infortuné
Henri V I , roi d’Angleterre, combattit elle-même
dans dix batailles pour délivrer fon mari.
En 1472 , quand l’armée bourguignone affié-
geoit Beauvais , Jeanne Hachette, à la tête de plu-
‘fieurs femmes, foutint long-temps un affaut, ar -'
raclaa l’étendard qu’un officier des ennemis alloit
i arborer fur la brèche , jetta le porte-étendard dans
le fode, 8ç donna le temps aux troupes du roi
d’arriver pour fecoürir la ville.
Cette amazone a mérité à fon fexe une diftinc-
tion* flatteufe. Le jour de l’anniverfaire de ce fa-.,
meux fiège, les femmes & les filles de Beauvais
: ont le pas' fur le.s hommes à la proceffion.
Mademoifelle de la Charfe , de la maifon de la
Tour-du-Pin-Gouvernet, fe m it, en 1693 , à la
tête des communes en Dauphiné , & repoufla le s .
Barbets qui faifoient une irruption. Le roi lui donna
une penfîon comme à un brave officier.
' AMBASSADEURS. On diftingue deux fortes
d’ ambajfadeurs 3 les ambaffadeurs ordinaires, & les
amhajfadeurs extraordinaires.
Il n’y a pas plus de deux cents ans que les princes
fe font envoyés des ambajfadeurs ordinaires ,
quiréfident chez les puiffancees étrangères qui leur
font alliées. Avant ce temps, toutes les grandes
affaires fe négocioient par le miniftère tfamhajfa-
\deurs extraordinaires.
Les femmes ont quelquefois été honorées du
.titre & 'des fonctions d’ambafladrices. Madame la
[maréchale de Guébriant eut cet avantage. L ’hif-
jtoire fait àufli mention d’une ambaffadrice en- :
voyée par le roi de Pérfe vers le'grand-feigneur.
La dignité d’ambajfadeur eft très-ancienne,
puifqu’on lit au livre des rois; que David fit.la
guerre aux ammonites pour venger l’injure faite à
Les ambajfadeurs.
Alexandre fit paffer au fil de l ’épée les habitans
dé T y r , pouf avoir infulté fes ambajfadeurs.
■ Voltaire .nous-.a tracé les devoir?» des ambajfadeurs,
dans ,ces vers de fa tragédie de Brutus.
Les vrais ambajfadeurs .interprètes des loix,
Sans les déshonorer» lavent fervir leurs rois;