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cier, aluni appetens b fui profufus: avide du bien
a autrui , & prodigue du lien.
Un financier qui s’enrichifiToit aux dépens du
roi , fut exclus des emplois. On a bien tort, dit-il,
de me chaffer: j’ ai fait mes affaires, j’aljois faire
celles du roi.
FINESSE. Louis X IV ayant permis au comte
de Grammjpnt qui a voit été. difgraeié , de revenir
à la cou r, lui montrqit un jour Verfaiîies :
« Grammont, lui d it- il, réconnoiflez-vous cet 33 endroit? Il y avoit là un moulin à vent,». Sire,
répondit Grammont, le moulin ny efi plus, mais
le vint y efi encore.
Louis X IV faifant là revue de fes gardes-fran-
çoifes'& fùilfes dans la plaine d’Oûiüe, un payfan ,
- ce village qui avoit femé des pois fur une
piece de terre qui lui appartenait, la trouva ce
jour-là couverte d’un bataillon de fuiffes, qui foulèrent
fous leurs pieds les pois du payfan ; celuidi i
que la curiofite de voir le roi avoit amené fur ce
champ, fut bien étonne quand il vit le boulever-
Fement de fes pois ; il imagina une rufe pour avoir
un dédommagement de la' perte qu’il faifoit, &
cette rufe lui retifïit'. Il Te mira crier à tue-tête :
miracle, miracle 7 Qu’ avez-v o us, Bon-homm e , 1 ui
d:t un officier, à crier miracle ?’ Le*payfàh, fans
répondre, continua à crier, miracle, miracle ! Ce
qui étant venu jufqu aux oreilles du roi, fa majefié
fit venir ce paÿfm, & lui demahda elle-même
pourquoi il crioit ainfi miracle. .C’eft, dit-il, fire,
que j’avois femé des pois fur cette pièce de terre,
( en la montrant au roi ) & il y eft venu des
Suiffes. Cette, ingénieufe faillie plut fi fort au roi
Louis X IV , qu’il fit généreufement dédommager
le payfan.
La courtifane Phryné fe trouvant dans un
feftin avec plufîeurs femmes, & jouant à un jeu
dans lequel toutes étoient obligées de faire!ce que
l'une d'elles faifoit, trempa fa main dans un bàffin
d eau fraîche , & s en frotta le vifàgé par deux
fois , ce qui la fit paraître encore plus belle. Les
autres qui étoient fardées , l'ayant imitées, perdirent
par la tout leur coloris j & ne parurent
que vieilles & ridées.
Le vieux comte de Bedfort, qui1 fut 'enfiiité
créé duc j fe trouvant un jour à la.Coür fut oblige 1
de fe retirer chez lui1 pour des affaires particulières
très-preffées, & promit au roi de revenir
avant midi. Le temps s'écoula fans qu'il revînt;
le roi le demanda plufîeurs fois & parut fâché de
fa lenteur. Le comte arriva enfin , au moment
que la pendule fonda une heure, Si s’apperçevant !
que le roi étcit en colère, il courut à la. pendule
& la brifa d'un coup de canne. « Que faites-vous,
•* lui dit le roi, & que vous a fait cette pendule ? '
» Ce qu'elle m 'a fa i t , reprit le comte, votre
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» majefié en efi témoin: elle vient de frapper la
» première ». Le roi fount & oublia que le comte
s etolt fait attendre.
FLATERIE. Louis X IV venoit de gagner une
bataillé. Son fils, M. le duc du Maine, lui dit :
“ “ r,e„> Ie ne k fa' jamais qu'un ignorant, fi mon
» maître me donne congé toutes les fois que vous
» gagnez quelque viétoire ».
Cambife délirant époufer fa foeur, ce qui éteic
défendu par les lois du royaume, voulut avoir
1 approbation des gens de loi pour s'autorifer
dans demande ; il leur demanda, d’un air fé-
VcrV ' S 1 s ne trouv° jei1t point de loi qui permît
; au ,frei'e d’époufer fa foeur ? Ces jurifeonfukes
craignant fon indignation, répondirent : que cette
loi n etoit peint écrite ; mais qu’ils, en trouvoiént
une autre qui permettoit aux rois de faire ce qu’ils
trouveraient bon. Par cette réponfe ils détournèrent
là colère du roi, fans violer les lois du
royaume.
Antipater,. roi de. Macédoine , vouloit exiger
de Phocion, l’un des plus grands hommes de la
grèçe, quelque chofe d’injufte. « Prince, lui dit il
» avec une noble hardieffe, vous ne pouvez pas
» m’avoir en même-temps pour flatteur & pour
» açni ».
Un marchand avoit acheté cent mille écus, la'
fameufè perle appelée la pélégrine. Philippe IV ,
auquel le marchand fut préfenté, lui demanda
pourquoi il avoit donné*tant d’argent.pour une
perle. Je fongeois, répondit-il, cju’il y avoit dans
le monde un roi d’Efpagne qui me rachèterait. -
Le monarque, flatté de cette réponfe qui témoin
gnoit la grande idée que Ton avoit de lu i, fit
compter au marchand quatre cens mille livres pour
cette perle.
FLÉCHIER (,Efprit ) né en 16 3a , mort à
Montpellier en 1710^ ,
t Le duc de Montaufier, homme d’une vert«
févère & gouverneur du grand Dauphin , pror ■
duifit Fléchier à la cour, & ce fut pour l ’inf-
truélion de^ ce prince que Fléchier con}pofa la
vie de Théodoïe. On a rapporte la connoiflànce
,que M. de Montaufier fit de l’abbé Fléchier à
cette circonftance. Ce feigneur qui allo.it prendre
les eaux, demanda à M. de Caumartin, un
homme de lettres qui pût i’amufer pendant fon
voyage. On lui donna l’abbé Fléchier, & ils
partirent. Le premier jour, Yabbé Fléchier .ap-
plaudiffoit à tout ce qu’avançoit M. de Montaufier
qui difoit tout bas & d’un air fâché :
Voila-mes flatteurs. L e lendemain., l’abbé Fléchier
qui avoit connu le. cara&ère de ce leigneur ne
cefia de le contredire. C e fut alors que M. de
Montaufier prît du goût pour lui & fe chargea
de fa' fortune.
Lorfque Louis X IV nomma Fléchier à l.’e'vê-
ehé de Nifmes, il lui dit ce N e foyrz pas
» furpris fi j’ai récompenfé fi tard votre mérite :
■ « j’appréhendois d’être- prive du plaifîr de vous
» entendre, fi je vous faifois évêque. »
C e prélat étoit allé paflfer quelques jours chez
la marquife de Tairas , à une lieue de Ni fines. Il
la quitta pour aller célébrer les fêtes de la Pentecôte
dans fa cathédrale. U ne faifoit que d’ arriver
lorfqu’on l’engagea d’ aller annoncer à cette
dame la perte qu’elle venoit de faire de fon mari.
Il la trouva au bas de fon efcalier, & après les
complimens d’ufage, il lui demanda où elle al- i
loit ? A l'a Mejfe, répondit la marquife : « Vous
fe êtes donc chrétienne, madame, répliqua le
33 Prélat ? Eh bien, ajouta - t - il, le marquis de
35 Toiras a été tué à l’armée : allons prier Dieu
33 pour le repos de fon ame. » Cette manière,
ferme d’annoncer une mauvaife nouvelle eut
l’effet que l’on pouvoit defirer.
Par loit - on au célébré evêque de Nifmes , !
,( Fléchier ) de l’excès de fon zèle &de fes charités,
le vertueux prélat s’écrioit : » femmes nous
-s» évêques pour rien ? »
^FLEURI, C Le cardinal de ) mort en 1 7 4 ;,
dans fa quatre-vingt-dixième année.
Voici comme le roi de Pruffe peint ce miniftre :
L’ adrefie de l'ancien évêque de Fréjus , précepteur
du roi de France , fit exiler le duc de'
Bourbon. Lé précepteur devint premier minillre
cardinal. Les premières fonctions de fon mi-
niftère furent de foulager le . peuple d'impôts
qui i’accabloient ; il fit autant de bien aux finances
du to i, où il mit l'économie, que de mal
au militaire fur-tout à la marine, qu'il né- i
gligea. Soupie , timide, rufé , -il conferva les
vues d’un prêtre dans les fondions d'un minillre.
FOI. ( bonne )=> Si la vérité & la bonne-Foi
» étoient perdues, difoit ordinairement le roi Jean.
» il faudrait les chercher dans le coeur & dans la
» bouche des rois. «
Marins, arrivé d’Afrique, où il avoir efluyé
les derniers malheurs, étant, venu comme un mi-
fèrable fugitif, fe réfugier auprès du conful Cinna
qui, accompagné de Sertorius, foutenoit la guerre
civile en Italie , Sertorius confeilla à Cinna de
ne pas recevoir un homme tel que ce capitaine,
qui n'étoic propre qu'à rainer leurs affaires par
fes cruautés & fes volences, & qui voudrait
avoir dans l'armée , la principale autorité. Cinna
lui répondit que fes râifons étoient très-bonnes ;
mais qu'il avoit honte de r'ejettet Marins, après
l’avoir appèlé lui-même, & lavoir follicité de
venir dans fon armée. Sertorius , l'interrompant:
alors, lui fit cette admirable réponfe : » Jecroyois
qut Marius etoit venu de fou prop-e mouvement en
Italie ; c eft pourquoi dans le cônfeil que je vous
donnois, je n'avois égard qu'à ce’ qui me paroif-
foit utile. Mais, puifque c’eft vous-même qui
1 avez fait venir, il ne vous eft pas même permis
de délibérer. Le feu! parti qui vous relie,
c eft de le recevoir : la bonne - fo i ne fouffre ni
raifonnement, ni incertitude, é -
M. de Turenne , paffant une nuit fur les remparts
de Paris, tomba entre les mains d’une troupe
de voleurs qui arrêtèrent fon carofife. Sur la pro-
mefife qu'il leur fit de cent louis d’o r , pourcon-
ferver une bague d’une prix beaucoup moindre,
ils là lui biffèrent; Si l'un d'eux ofa bien aller,
le lendemain, -chez lu i, au milieu d’une grande
compagnie , lui demander à l'oreille l'exécution
de fa parole. Le. vicomte fit donner l’argent, 3c ,
avant de raconter l'aventure, biffa le temps au
voleur dè s'éloigner, en ajoutant qu’il falloir être
inviolable dans fes promefïes , Sc qu’un honnête
homme ne devoit jamais manquer à fa parole,
quoique donne’e à des fripons mê.me.
S. Louis, prifonnier des farrafîns, étoit con-
avee ces infidèles de leur payer deux cens
mille livres pour f i rançon. Philippe de Mont-
fort fut chargé de compter cette fomme aux vain-
queurs. Mais il eut 1 adrefife de les tromper, en
leur retenant dix-mille livres; & , charmé d’une
fourberie qui pouvoit être fort avantageufe dans
J état de difette où fe'trouvoit l’armée, il vint
en inftmire le roi. Le religieux monarque , pénétré
'd ’indignation aux paroles du comte, lui
fit une Julie & fevère réprimande de. cette action
qu il appeloit perfidie, & lui commanda de
la reparer a 1 iniiant. « No n , dit-il, malgré le
danger où font expofés mes jours à toute heure,
je ne partirai point que les deux cens mille livres
ne foient payées. Quel triomphe feroit-ce pour
les mfijeles, de voir un roi chrétien perfide
& parjure! «
Le P. de Lauriere, Francifcain Portugais,
ayant été pris par les Indiens * avec plufîeurs
officiers, demanda qu’on le. îaiffâr partir, pour
aller traiter luï-meme de l’échange des prifon-
niers. Le roi de Cambaye paroifloit inquiet du
retour :.le religieux détacha fon cordon , & le
lui mit en main, comme le gage le plus affuré
de fa foi. Sur cetre unique affurance, onlelaiffa
partir. Sa négociation fut infruélueufe ; & il reîî!?
V ^ nS 8 1 ^ers* ro* ^ut ^.frappé de cette
fidélité, Sc il conçut une fî haute opinion d’un
peuplé qui produisit des hommes capables d*
cet a&e de | vertu , qu’il renvoya tous les pri-
fonniers fans rançon.