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cette famille-là , je n’ en ai pu venir à bout : ce
n’eft pas ma faute ».
Dans une fédition, un homme d’une exceflive
groffeur îfe préfenta pour haranguer. Tous les
mutins qui s’étoient affemblés fe mirent à rire.
« Vous riez de ma groffeur, leur dit-il; h vous
voyiez ma femme , elle eft encore bien plus groffe
que moi. Cependant quand nous fommes d’accord,#
nous tenons fort bien tous deux dans le même
lit ) mais lorfque nous nous querellons , fa.maifon
n’eft pas affez grande pour nous contenir ». A cette
morale, les efprits fe réunirent, 8c la fédition fut
appaifée.
On a vu de tout temps, l’incertitude de la paternité,
être l’objet de la plaisanterie. Un ancien
philofophe voyant, dans un chemin public, un
jeune étourdi qui jettoit des pierres à tous les paf-
fans, lui dit : prenez garde à ce *que vous faites j
car vous pourriez, fans le favoir^ bleffer votre
père.
Un efpagnol paffant un jour à fec le Mança-
narès , petite rivière de Madrid*, & voyant combien
le fupérbe pont que Philippe II y a fait bâtir
e ft inutile , dit plaifamment qu’il falloit vendre le
pont pour avoir de l'eau.
Un voyageur du comté de Kent, qu’ un orage
aVoit tranfî de froid , arrive dans une hôtellerie
de campagne. & la trouve fi remplie de monde
qu’ il ne peut approcher de la cheminée. Que l'on
"porte vite a mon cheval un cloyere d'huîtres, dit-
il à l’hçte. — A votre’ cheval, s’écrie celui-ci ,
croyez-vous qu'il veuille en manger ?— . Faites
ce que j’ordonne „ répliqua le gentilhomme : à ces
mots tous les affiftans volent à l’écurie & notre
voyageur fe chauffe. « Monfieur, dit l’hôte en
revenant, je l’aurois gagé fur ma tête , le cheval
n’en veut pas . . . . . . En ce cas , répond le voyaf;
eur qui s’^toit bien chauffé , il. faut donc que je ;
es mange.
M. le cardinal de L . . . demandoit un jour à
M. de T -----pourquoi il fe portoit fi bien , &
que lui il étoit toujours valétudinaire: C ’eft , mon-
feigneur, que vous avez fans ceffe votre chapeau ,
dans votre tête , & que j’ai la tête dans le mien.
11 n’étoit pas encore cardinal dans ce temps-là.
Un homme gourmand. & malhonnête , mangeant
à table d'hôte où l’on fervic deux perdrix
rouges, en prit une, commença par en détacher
l ’aîle & retint le refte fur fon afljette dans l'intention
de la dévorer toute entière. Un des convives
, m é c o n t e n t ' d’nn tel procédé , efcjmote avec
a d r e f f f e ce friand gibier, & dit en éclatant de rire :
«« Monfieur , fouffler n’eft pas jouer : vous pouviez
en prendre deux fie vçusn’en ayez pris qu’une.
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Très-fatigué à force de glilfer fur le pavé de
Paris , & fe trouvant d’ailleurs fort éjoigné de
• fa demeure , le chevalier de C . . . . rencontrant
M. B . . , . , fameux dentifte , mollement aflis dans'
fon caroffe, cria au cocher d’arrêter, attendu
qu’il avoit un grand mal de dents. — « La douleur
que j’éprouve eft fi vive , dit-il enfüite au maître,
que les forces me manquent, & je fuis prêta
m’évanouir. Si vous retournez chez vous, donnez*
moi une place dans votre caroffe , afin de m’y
conduire bien promptement ».
Le chirurgien^, touché de compaflîon , & dans
l’efpoir d’être récompenfé , fait? alfeoir à côté de
lui le prétendu malade , & donne ordre à fon cocher
de retourner au logis, & de redoubler de
vîteffe. Ils étoient dans le fauxbourg Saint-Antoine
, & le dentifte demeure près du palais-royal.
Le chevalier de C . . . . , ,defcendant leftement
de voiture, dit en riant à l’opulent dentifte : —
« Mille remercîmens, monfieur, de votre com-
plaifance ; le plaifir de votre compagnie & celui
de me trouver tout de fuite dans ùn quartier ou
m’appelle une affaire preflée, me ‘guérit de tous
mes'maux. . . —— Et il s’échappa avec la rapidité
de l’éclair..
Un cavalier fort bien fait avoit époufé une fille
fort laide , mais fort riche : on lui fit des reproches
fur fon mauvais choix % * Né vous en étonnez
pas , répondit-il , je l’ai prife au poids , fans
çonfidérer la façon pour laquelle je n’ai rien donné.
Un italien, jaloux de fa barbe, faifoit de grandes
dépenfes pour la conferver & l’ajufter ; le cardinal
Campége lui dit : « A la fin votre barbe vous
coûtera plus que la tête ne vaut ».
Les chanoines de Chartres ayant perdu leur
procès contre leur évêque , par le crédit de madame
de Mainténon, l’un d’eux dit : « Comment
aurions-nous gagné ? Nous avions contre nous le
roi, Ta dame & le valet
„ Les plaifanterie-s ne feront-jamals tort à un
ouvrage où il y aura des •beautés vraies. On de-
mandoit dernièrement à un homme de cour fon
fentiment fur la tragédie du roi .Lear. « C ’eft un
monftre,' répondit-il, dont la tête & les pieds
font hideux, mais dont le corps eft beau v.
• Un médecin célèbre d it, en parlant de la même
pièce : « Malgré tous les traits fublimes dont e l l e
eft remplie, je crois qu’elle fe reffent un peu de
la maladie du roi Léar.
Un fermier des gabelles avoit fait bâtir un palais
; un de fes amis, à qui il le faifoit voir, remarqua
dans un grand veltibule une niche vuidc
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qui attendoit une ftatue. D ’où vient, lui dit-il,
que vous ne rempliffez pas ce vuide ? Je voudrois,
3it le financier, y placer quelque ftatue allégorique
qui me convint. Eh bien, lui dit fon ami,
faltes-y mettre la femme de Lot changée en ftatue
de fel*
Un homme épuifé de plaifir, étoit obligé de
garder le lit. Un de fès amis vint le vo ir , 8c app
e r t en entrant dans la chambre du malade fa
maîtreffe qui en fortoir. Il demanda au malade
• comment il fe -trouvoit : « La fièvre fd it- il, vient
‘de me quitter ». Effectivement, répond l’ami, je
Lai rencontrée comme* elle, fortoit de chez vous.
Un curieux avoit lu le fe ir , dans un traité de
la phyfîonomie , #que ceux qui ont la barbe large,
portent le fighe* d’ étourderie. Il voulut voir la
fienne au miroir avec *une bougie. Malheureufe-
ment il en brûla la moitié, 8c il écrivit aufli-tôt
fur la marge'délivre : pour celui-là, il eft éprouvé.
M. te Camus difoit de certains moines gour-
1 mands fort révérentieux, que c ’étotent des cru-
! ches qui ne fe baifioient que pour s’emplir.
Une femme qui n’étoit pas des plus fages, mai«
qui avoit le fentiment v i f , enundoit un homme
'l qui, dans la. colère , lâcha ce mot que le dévot
| Neptune n’acheva pas.' Ah ! s’ écria-t-elle., peut-on
dire ce mot-là en colère !
• Un chanoine d’Angers ayant invité plufieurs
| perfonnes à dîner un jour maigre, fon valet lui
dit qu’il venoit du marché , & qu’il n’y avoit, plus
d’ autre poiffon qu’un faumon qu’il n’avoit ofé
1 prendre, parce qu’un confeiller l’avoit retenu. Le
3 chanoine lui donnant fa bourfe pleine , lui dit :
j cc Tiens , . retourne j* achette** moi le faumon 8c
|t le confeiller».
•
PLANTES Singulières. La nature, admirable
dans fes productions, a fes. tréfors dans chaque
1 pays. On cultive à préfent, dans le jardin d’Edim-
1 bourg, le miracle des végétaux. On lui a donné
J le nom At plante mbuvante. Tous les curieux s’em-
9 preffent de venir voir ce prodige. Les habitans,.
| fuperftitieux , attribuent à la plante mouvante des
i vertus & des qualités extraordinaires. Le iy juin
I77<j>, elle avoit iy pouces de haut. Ses mouvemens
, qui offrent beaucoup de fingularité, ont
commencé vers le milieu du mois de mai. Ils proviennent
d’une force interne, au lieu que ceux de
la fenfitive dépendent d’une impulfion d’une
caufe externes. Les opérations de notre plante fin-
\ gulière font dérangées par un coup de vent un peu
r fort, qui en arrête fur le champ les mouvemens
& les agitations.
La plante mouvante a fes feuilles partagées en
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trois. L’extrémité de la feuille eft fort large, &
par les différentes pofitions qu’elle prend durant le
jour, on voit qu’elle fuit affez le cours du foleil.
Ses mouvemens les plus remarquables font collatéraux
8s ne s’accordent pas toujours exactement,
avec le mouvement de cet aftie. Cette motion des
deux côtés oppofés de là feuille, eft particulière,
& affez conftamment uniforme.
Entre Iefieuve du Jourdain & Jéricho, qui eft
vis-à-vis du mont Abarim, il y a une vallée nommée
Ba'ras , où l’on trouve une plante de même
nom, qui paroît toute de feu pendant la nuit 8c
que l’on prendroit pour un flambeau.
Q u in q u in a . Voici l’abrégéhiftorique de cette
plante : il y avoit long-temps , que le hafard avoit
procuré aux indiens la découverte de la vertu fébrifuge
de l’écorce de quinquina, lorfque les eu*
ropéens arrivèrent dans leur pays.
Us la cachèrent long-temps aux efp'agnols, leurs
vainqueurs , qu’ils- déteftoient alors. C e ne fut
qu’en 1640. que les efpagnols en apportèrent ea
Europe.
C e remède, quoique certain, fut quelque tempes
fans avoir grande vogue.
La vice-reine ayant été attaquée d’une fièvre ppv1
niâtre, le Corrégidor de Loxa lui en. envoya.
Elle en fut guérie 8c en diftribua beaucoup. O»
nomma alors le quinquina, la poudre de la com-
tejfie.
Vers l’année 1649, le procureur-général des
jéfuites de l’Amérique pana* en Europe 8c fe ren^-
dit à Rome, où il invita tout fon ordre à donner
de la réputation à ce remède, dont il avoit apporte
une provifion.
Chacun d’eux guériffoit les fièvres comme par
enchantement. Dès-lors le quinquina changea de
nom : on l’appella la poudre des peres. Les anglois
l’appellent encore aujourd’hui la poudre jésuitique ,
the jefuit’s powder. *
Quelques médecins ne connoiffant pas fuffifam-
ment la vertu de ce nouvéau remède , s’ élevèrent
co'ntre fon ufage ; on en fut encore d®goûté»par
fon prix e^ceffif, car les jéfuites le vendoient fort
cher. *.
Ce fut alors qu’on vit paroître les brochures
intitulées, /h/zértfilies du quinquina , réSurréel ion du
quinquina.
En 1Û79, le chevalier Tallot, anglois, à forte
de prêcher l’utilité de ce fpécifique , & même
d’exagérer fes vertus , en fir revivre l’ufage.
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