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& que de jeunes, étudians ont eu la malice, ou
la fottife, d’écrjre leurs noms fur les ouvrages
de ce peintre j gâtant ainfi les figures de beaucoup
de tableaux , fans rnê,me en épargner les
vifeges.
Dans la repréfentation de la nativité de notre
fçigneur , tableau qui fe voit à Bologne , Louis
Carrache fait adorer le fils de Dieu, encore dans
la crèche, par faint Charles Borromée,
On voit aufli à Bologne , dans la cathédrale,
une annonciation , peinte par Carrache , qui n'a
point donné à fon fujet la décence convenable :
la vierge eft dans une attitude équivoque, 8c l'on
diroit, qu'avec les deux mains, l'ange va lui découvrir
la gorge*
C a r r a ch e ( Auguftin,,) né l'an
Auguftin Carrache ne pouvoit vivre fans fon
frère Ànnibal, & ne pouvoit le fouffrir lorfqu'il
étoit avec lui.. Leur émulation, qui dégénérait
fouvent en jaloufie, les féparoit, les brouilloit,
k s raccommodoit, occafionnoit entre eux de violentes
querelles 5 ils fe défiroient, fe chériffoient,
abfens l'un de l'autre, Sc fe déteftoient quand
ils étoient enfemble.
Peu de temps avant fa mort, Auguftin Carrache
fe retira chez les capucins de Parme. Un jour,
pendant quç les religieux étoient à l'office , il peignit
un Chrift ; ouvrage très-eftimé que l'on conserve
ayeç le plus grand foin.
C a r r a c ije (Annibal) né l'an ij6 o .
C e t artifte & fon père , revenant un foir de
la campagne, furent volés en chemin, fans pouvoir
fe défendre. Annibal courut porter fa plainte
chez les magiftrats, & y. deffina. fi bien le portrait
des voleurs, qu'on les reconnut Sc qu'ils
furent arrêtés.
Annibal excelloit aufli dans les portraits chargés
, ou de caricatureî il donnoit à des animaux,
Se même à. des vafes,.la.figure d'un homme qu'il
vouloit tourner en ridicule. Un de fes élèves
étoit plus occupé de l’envie, d'avoir une parure,
élégante, que du foin de s'inftruire de la peinture
î Annibal le repréfenta d'un air fi fa t, le
portrait exprimoit fi ' bien les défauts de l'original
, que lé jeune homme en perdit fon goût
pour les ajuftemens trop recherches.
Annibal vivoit en vrai philofophe, dédaignoit
le luxe Sc les trop grandes fociétés, toujours
nuifibles aux artiftes , puifqu’ elles leur font perdre
un temps précieux. Aufli blâmoit-il avec
raifon la conduite d’Auguftin fon frère., qui pafToit
une grande partie de fa vie dans les antichambres
& dans la compagnie des princes 8c. des
C A R
cardinaux, 8c qui s'habilloit avec tant de magnificence,
qu'il avoit plutôt l'air d'un riche gentilhomme
, que d'un peintre. Annibal, l'ayant
un jour apperçu à la promenade, marchant fièrement
avec des perfonnes de la première qualité ,
feignit d'avoir à lui faire part de quelque chofe
d'important; Se le tirant à l'écart, il lui dit à
l'oreille : — • « Auguftin, fouviens-toi que tu es
*> fils d'un tailleur ».
Afin de luirappeller fon origine d’une manière
plus fenfible, dès qu'Annibal fut de retour, il prit
un papier, deflina fon père avec des lunettes fur
le nez , qui enfiloit une aiguille ; Sc il mit au bas
le nom d'Antoine, qui étoit celui du bon-homme.
Non content de cela , il repréfenta encore fa
mère dans le même deffein, qui tenoit une paire
de çifeaux. Cette peinture expreflive ne fut pas
plutôt achevée, qu'il fe hâta de l'envoyer à fon
frère, qui étoit pour lors dans le. palais d'un
prince.
On voit ^qu'Annibal n'étoit point ébloui du
.faite qui environne les grands, Sc l'on fent qu'il
devoit peu briguer l’honneur de ramper à leurs,
pieds. Le cardinal Borghèfe étant venu un jour
lui rendre vifite, il s'efquiva par une faulfe-porte
de fa maifon, laiflant à fes élèves le foin ae recevoir
cette éminence.
On louoit beaucoup, devant Annibal Carrache,
le groupe de Laocoon, chef-d'oeuvre de fculp-
ture antique : cet artifte ne fembloit prendre aucune
part à la converfation. Comme on parut
étonné de fon filence, il prit un crayon, toujours
fans rien dire, Sc demna le fameux groupe
fur l'une des murailles de la falle, aufli exactement
que s'il l'avo.it eu devant, les yeux : par
ce moyen, il en fit le plus bel éloge.
Il dit un jour à' fon frère Auguftin, qüi fe
piquoit de faire de bons vers Sc le railloit fur
fon peu d'efprit; « — les poètes peignent avec
» les paroles, Sc les peintres parlent avec le
» pinceau. » ——
Annibal avoit mal parlé des ouvrages du Jo-
féphin, qui -, voulant fe venger de fa critique ,
luipropofa de mettreTépée à la main; mais An-
nibal prit un pinceau, Sc le montrant à fon rival *
il lui dit : « C'eft avec ces armes que je vous
» défie Sc que je veux tâcher de vous vaincre
• Le cardinal Farnèfe , qui aimoit Annibal Car-
ra'che, fe, voyoit tous les jours blâmé par des
gens qui ne pouvoient comprendre qu'on pût ef-
timer un artifte encore vivant : ce cardinal , ne
gagnant rien par des.difputes , employa la rufe.
Il fit faire en fecret plufieurs tableaux au Car?-
rache y qui fut déguifer fa manière ; enfuite'
il répandit le hruit qu’il attendoit quelques
morceaux précieux qu'on devoit inceflamment
lui envoyer de divers endroits de l'ft'alie. Le
Carrache
C A R
Carrache ne manqua pas d’enfumer fes tableaux
afin de les rendre plus refpeétables en apparence 5
Se il les mit dans une caifle, comme s ils avoient
fait un long voyage. Après tous ces préparatifs,
on annonça que les tableaux fi long-tems attendus
, étoient enfin arrivés. La foule des curieux
court aufli-tôt avec empreflement pour les voir :
chacun les attribue au maître qu il préconife
davantage, Sc tous fe réunifient pour faire convenir
le cardinal, que fon moderne favori peut
beaucoup fe perfectionner en étudiant avec foin
le goût de ces anciens artiftes. Le cardinal feignit
de fe rendre ; mais après s'etre diverti de
leur entêtement , il cefla.de fe contraindre, Sc
leur déclara que ce qu'ils mettoient fi fort^ au-'
deflus du Carrache, Sc qu'ils alloient jufqu a lui
propofer pour l'objet de fes études, etoit cependant
l'ouvrage de Carrache même.
Cependant cet artifte n’eut pas toujours a felouer
des procédés de fon Mécène : charge de peindre
la galerie Farnèfe, il fe mit à cet ouvrage,
avec un -zèle Sc une application qu'on ne . feu-
roit décrire. Après s'être adonné pendant huit
années de fuite à ce grand travail il fe flattoit
de recevoir une gratification confidérable 5 Sc ne
reçut qu'une fournie modique de cinq mille.livres >
un efpagnol, qui gouvernoit l'efprit du car-,
dinal , l'ayant perfuadé que l’artifte auroit
lieu d'être content. On mit en compte tout ce
qui lui avoit été fourni pendant qu'il logeoit dans
le palais Farnèfe 5 on évalua jufqu'àja moindre
dépenfe. Gfette ingratitude , ou plutôt cette ef-
pèce d’infulte du cardina, fitune^fi viveimpreflion
fur l’efprit d’Annibal, qu'une noire mélancolie
le conduifit au tombeau.
C e n'eft pas l'intérêt qui le rendit fenfible à
ce traitement indigne, puifque, lorfqu'on jetta
les yeux fur lui pour les peintures d’une des égli-
fes de Rome, il en abandonna l'exécution à l ’Al-
bane , l'un de fes élèves, Sc voulut qu'il en eût
feul le profit.
Si mal recompenfé de l'ouvrage qu'il avoit le
plus foigné , Annibal éprouva le dernier découragement
j la palette Sc les pinceaux lui tom-
boient des mains, lorfqu'il effayoit quelquefois
à fe remettre au travail. Voyant approcher fa
dernière heure , il déclara qu'il vouloit être enterré
à côté de Raphaël, afin que fes cendres fe
trouvafient unies avec celles d’un_peintre qu'il avoit
tant eftimé.
( Anecdotes des beaux Ans.
C A R 2 2 ;
élevé fur le train au devant du carrofe. Mais en
Efpagne la politique l’ en a déplacé, par un arrêt
, depuis qu'un comte duc d'Olivares fe lut
apperçu qu'un fecret important dont il s etoit
entretenu dans fon carrojfe , avoit ete entendu
Sc révélé par fon cocher. En conféquence de cet
arrêt, les cochers efpagnols occupent la place
l'occunent nos cochers dans nos carroffes de
Les carrojfes font de l’invention des françois ;
on n'en comptoit que deux fous François I , l un
à la reine-, l'autre à Diane, fille'naturelle de Henn.
I I ; l'ufage s'en multiplia tellement, que lors de
l’enregiftrement des lettres - patentes de Charles
IX pour la réformation du luxe, etii 363 , lu parlement
arrêta que le roi ferpit fupplie de défendre
les coches par la ville : en effet les magiftrats
n’avoient point fuivi cette nouveauté 3 & *f°n-
tinuèrent jufqu'au commencement du dix-feptieme
fiècle, â aller au palais fur des mules.
Quant auxvoitutes publiques , ce fut fous Louis
X I V , qu'un nommé Sauvage connut le projet d.en
établir j & comme il demeura rue faint-Martin,
à rhôtel faint-Fiacre, ces voitures prirent le nom
de fiàcre qu elles ont confervé.
C A R T E L .
Cartel de Franpois de Vivonne de la Châtaigneraye.
, Sire , ayant appris que Guy - Chabot a été
dernièrement à Cûmpiegne , ou il a dit que quiconque
avoit dit qu'il s étoit vante d avoir couché
avec fa belle-mère, étoit méchant, & malheureux;
fur-quoi, Sire, avec votre bon plaifir
& vouloir , je réponds, qu’il a méchamment menti
, & mentira toutes fois & quantes qu il dira ,
qu’en cela j’ ai dit Chofe qu’ il n’a pas dit ; car il
m’a dit plufieurs fois , & s’ eft vante d avoir couché
avec fa belle - mère.
François D's V iv o x n z .
Cartel de Guet - Chabot de JarnaCt
' Sire, avec votre bon plaifir & congé , je dis
que François de Vivonne a menti, de l’imputation
qu’il m’a donnée, de laquelle je vous al
parlé à Compiegne ; & , pour c e , Sire , je vous
fupplie très - humblement qu’il vous plane nous
oàroyer le champ à toute outrance.
G u y - C h a b o t ,
CARROSSE. Dans prefque toute l’Europe,
les carafes font tirés par des chevaux. En Efpa-
on fe fert de mules ; dans une partie de l'Orient
on y attele des boeufs Sc quelquefois des rennes,
mais c’eft moins un ufage qu’une oftentation.
Le cocher eft ordinairement placé fur un fiège
Encyclopédiana,
Serment de François de Vivonne.
M o i, François de Vivonne , jure fur les feints
évangiles de Dieu, fur la vraie croix Sc fur la
foi du baptême que je tiens de lu i, qu a bonne
Sc jufte caufe, je fuis venu en ce am p pour