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^ui ne manqueront pas, vu fon bon coeur, de les
ui redonner fur le champ. L ’expédient plut à fon
efninence > il fallait peu de chofes pour calmer
les remords. Il fit la donation j mais il fut deux
jours fort en peine, parce que le roi qui i’avoit
acceptée ne diloit mot. Ma pauvre famille ! s’é-
cr.oit-il dans fon lit devant 'meflieurs Colbe’r t ,
Rofe & d’autres perfonnes ; ah! ma pauvre famille
n aura pas de pain. M. Colbert chercha a le raf-
furer, & lut rapporta enfin au bout de trois jours
la donatioff du roi qui le remettoit en poifetfion
oe fes richelfes immenfes. ( Mém. de L‘ abbé de
Choijy.)
Le cardinal fit fon teftament, où il difpofa de
tous fes biens, laifia des fommes confidérables
pour la fondation du collège des quatre nations.
Il donna encore.en mourant des preuves de cet
efprit de rufe qui fai foie le caractère de fa poli-
tique j car il fit dire à plufieurs perfonnes qu’ il
s étoit reffbuvenu d’ elles dans fon teftament,
quoiqu il n en fût rien, Il fe promettoit fans
doute, s’ il recouvroit la fanté , fe faire un mérite
auprès de ces perfonnes dé ce vain relfou-
venir.
Le marquis de la Fare rapporte dans fes mémoires
, que le card-nal Ma^arin , difoit qu’il
vouloir tellement multiplier la dignité'de duc &
pair, qu’il ferpit honteux à un homme de qualité
de j*êtré, & honteux de ne l’être pas. Dans le
temps de fa dernière maladie, M. Brayer, fon
médecin, fans prendre garde à la conféquence
que ce miniftre en pouvoir tirer, lui dit qu’il
paroiffoit une comète dans le ciel. C e miniftre
peofa qu’on croÿoit que ce phénomène annonçoit
fa mort. Dans cette idée, il dit : 1a comète me
fait trop d’honoeur..
Le cardiml Maçarîn, racontant un jour comme
en fa jeuneffe il avoir commandé une compagnie
de cavalerie, le maréchal de Grammont lui dit :
cc Votre Eminence s’eft fait grand tort de quitter
» cette profrffion-ià, car aflîire'ment elle feroit
M à préfent meftrerde-camp de cavalerie »,
Louis X IV , encore enfant, fouffroit avec .impatience
le fafte du cardinal Ma^rin^ & le
voyant venir avec un groupe de courufans, il s’écria
: « Voilà le grand turc qui pafie «.
Le cardinal Ma^arin fe foucioit peu de ce
qtFoh difoit, qu'on écrivoit, qu’on entreprenoit
meme cor tre lui. Un feigneur fe juftifiant par
de bonnes raifons, d’une entreprife que le cardinal
lui imputent avoir faite, fur fa perfonne ; il
lui.dit : ^ Voyez-vous, monfieur, il n’y a pas
de fi mauyaife caufe pour la defenfe de laquelle
on ne puifte trouver quelque couleur. Je me
fouviens d'avoir oui un prédicateur qui faifoit
J’apologie de Judas, en repréfentant qu’il étoit
intendant des finances & maître d’hôtel de Jéfws-
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Chrift} de forte que voyant qu’il 'manquait dé
fonds pour faire fubfifter la compagnie des Apôtres
, il penfa que les juifs fouhaitoient avec paf-
fiori de prendre fon maître, & que s’il le livroit,
le trahiffoit, cê feroit un bon parti pour avoir
de l’argent, d’autant plus qu’il croyoït que fon
maître auroit le pouvoir de fe tirer de leurs
mains, puifqu’ il s’étoit déjà tiré de plus méchans
pas que celui-là, & que cependant il feroit fubfifter
la compagnie ». Après quoi le cardinal fe
tut, laiflant faire l’application de ce détour pour
autorifer une trahi fon, à celui qui s’exeufoit de
celle dont il lui faifoit. reproche.
Le cardinal Ma\arin ayant envie d’acheter une
maifon de plaifance pour Moniteur, frère du roi,
jeta les yeux fur celle d’un gros partifan, lîtuée
a Saint Cloud, qui étoit d’une étendue immenfe,
& d’une grande beauté : aufli revenoit-eüe à près
d’un million à celui qui en étoit le p Æfifeur.
Le cardinal l’y fut voir un jour, & admirant la
magnificence de cette maifon, il dit au partifan :
« Cela doit vous coûter au moins douze cents
» mille livres ». Le partifan, qui ne voulut pas
qu’on connût fes richefies, répondit au cardinal
qu’il n’étoit pas a fiez opulent pour mettre Une
fomme fi confidérable pour fes plaifirs. « Combien
donc, reprit le cardinal, cela peut-il vous coûter ?
je parirois que c’eft au moins deux cent mille
écus.—-Non, monfeigneur, dit le financier ; je
ne fuis pas en état de faire une fi groffe dépenie.
Apparemment, dit le cardinal, que cela lie vous
coûte que cent mille écus ? » Le partifan crut
devoir fe borner à ce prix, & convint que cela
lui coûtoit cette femme. Le lendemain matin, le
cardinal Ma^arin lui envoya trois cent mille livres,
& lui écrivit, que le roi fouhaitoit faire i’acqui-
fition de cette maifon pour Monfieur : celui qui
étoit porteur de la lettre & de l’argent, étoit un
notaire qui avoir en main un contrat de vente
tout dreffé , que le partifan fut obligé de figiier.
Le cardinal Ma^arin difoit du président le Coi-
gneux : il eft fi bon juge, qu’il enrage de ne pouvoir
condamner les deux parties.
On vint annoncer à Louis X IV , que le car-*
dinal Mandrin, venoit de rendre fon ame à Dieu i
un courtifan répondit : « Sire, je doute qu’il l’ait
» accepée ».
M E CEN E , ( Caius Cilnius Mæcenas) miniftre
& favori de l’emperenr Augufte, mort vers l’an
huit, avant notre ère chrétienne.
Mécène ufoit envers Augufte de cette noble
franchifequi annonçoit toute l’élévation'de l’ame
du favori, & ce quio’eft pas moins glorieux, pour
le prince, il fe plaifoit à entendre la vérité de 1
bouche de fon miniftre. « N ’abufez pas de votr
» .putlfance, difoit Mécène à Augufte , 8e a
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* croyez pas la diminuer en y mettant des bornes-
» Rien ne vous eft impoflible : mais plus votre
» pouvoir eft grand, plus vous devez avoir foin,
* de* ne vouloir que ce qui eft jurte & c° i™ '
», venabïe. Si quelqu’un vous rapporte qu’on a dit
» du mal de voas , il ne faut pas y ajouter .fo i,
» ni vous venger > car n’offenfant perfonne , &
,a faifant du bien à tout le monde,, il vous feroit
» honteux de penfer que quelqu’un fût capable
» de vous faire injure. Les méchans font ks feuls
» que le témoignage de la confcknce doit porter
»» à croire ces rapports ; 8e il eft ïnjufte de tirer
» vengeance des difeours auxquels on a donné
W ftljet 4* ÿ.:
Lorfque cet empereur étoit indifpofé , il
logeoit dans la maifon de fon favori. C ’étoit
a fiez l’ ufage des anciens, de fe faire tranfporrer
chez leurs amis pour recouvrer la fauté- On ne
pouvoir marquer plus d’eftirae pour la tendre
amitié. ,
Quoique Mécène fût le favori du prince, fa
mode.ftie & fa modération, -lui avoient gagné le
coeur des courtilans. Le peuple romain le ché-
riffoit, & lui donna plufieurs fois des marques
publiques, de la part qu’il prenoit à fa fanté.
Horace, dans fa vingtième ode du livre premier,
fait mention que ce miniftre bien- aimé, étant
allé au fpè&acle, au fortir d’une grande maladie,
tous les fpe&ateurs fê levèrent, & lui marquèrent |
par des applaiidiffemens réitérés, la joie que leur ■
caufoit fa convalefcence.
Ses efclaves ne foupiroient point après la liberté,
en fervant un maître fi doux. Un certain
Meliffus, de condition libre, avoir été expofé
dans fon enfance, à caufe de la méfintelligence
de fes parens. Etant tombé heureufement'pour
lui entre les mains d’un homme dont il reçut une
bonne éducation , il devint habile grammairien ,
& fut donné en cette qualité à Mécène. Il le
rendit agréable à fon maître ,«qui le traita plus en
ami qu’en efclave. Quelque te'mps après, la mère
de Meliflus revendiqua fon fils, & fou tint; en
mettant la main fur lu i, fuivant l’ancienne formule
, qu’il étoit né libre *. mais MelifTis préféra
fon état préfent aux droits de fa naiffince. Mé-
cénas, quelque temps après, l’afFranchit, & le
mit au rang de fes amis.
Mécène avoit raffetnblé dans fa belle maifon,
lîtuée fur l’Efquilin , tout ce que la nature &
l’art pouvoient fournir de plus agréable j mais
fage épicurien , il préféroit la volupté qui naît du
fentiment & de la reflexion aux plaifirs des fins.
On l’accufe néanmoins de n’ avoir pas toujours fu
réfifter aux charmes, des belles dames romaines.
Un citoyen de Rome, ayant invité Mécène à
foup.er, & s’appercevant qu’ il commençoit à jetter
de tendres regards fur fa femme, eut la complai-
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fance de faire fembiant de dermtr. Un domef-
tique, croyant fon fommeil véritable, voulut en
profiter, & boire du vin au buffet. « Malheureux ,
» lui dit fon maître , ne vois-tu pas que je ne dors
» que pour Mécène ? »»
On voyoit dans fes jardins, fuivant l’üfage des
anciens, un petit temple de Pnape.. Les poètes
qui venoient faire leur cour à Mécène, écrivoient
fur les murailles de ce temple des vers licentieux,
& bien dignes de la divinité du lieu. Mecene en
fit faire un recueil qu’il publia fous le titre^ de
Prïapées. Ce protecteur dès mu fes, avoit lui même
compofé plufieurs ouvrages en vers & en profe.
On cite de lui la tragédie d’OCtavie , la vie d Auv
gufte', une hiftoi.e des animaux, un traite des
pierres précieufes, un autres intitulé Promethée ^
dont les feuls titrés ou ^quelques tragmens font
venus jufqu a nous ; mais Dion nous a confervc
en entier le difeours que Mécène fit a Augufte *
lorfque ce prince mit en queftion, s’il retiendroit
ou abdiqueroit l’autorité fuprême.
L ’époufe de Mécène s’appeloit Terentia. C è-
( toit une des plus belles femmes de fon fieclc^,
1 & des plus capricieufes. ^ La divsfion regnoit
fouvent entre elle & fon époux. Ils faifoient de
fréquens divorces qui ne duroient point. Le.
foible mari ne pouvoit vivre avec elle & fans^ elle.
Auflî Séneque difoit de Mécène , qu il s étoit
marie mille fois , & n’avoit jamais eu qu un©
femme.
MÉDECINE. Rien n’étoît plus fim^ie que 1*
médecine dans fes commencemens. L hiftoite raconté
d’EfcuLape^ qu’ il n’avoit à fa fuite lorfqu il
alloit par le pays, qu’un chien & une chevre p
fe fervant de la langue de 1 un pour les ulcérés *.
6c du 'lait de l’autre pour les maladies de poitrine.
Les babyloniens, dit Hérodote, ne fe fervant
point de médecin, font porter les malades dans
les places publiques, afin que k s paflans qui les
voient, & qui-ont eu une maladie femblabîe à
la leur, ou qui en ont vu quelqu’un malade, leur
donnent confeil, & les encouragent à pratiquer
ce qu’eux-mêmes, ou d’autres ont pratiqué avec
fuccès en de femblables cas. Le même auteur
ajoûte, qu’ il n’étoit permis à perfonne de pafter
auprès des malades fans s’informer de leurs maladies.
Strabon dit la même chofe , non-feulement
des babyloniens, mais encore des portugais
& des égyptiens.
Hippocrates , dit Pline, fut le premier qui
réunit la médecine difperfee» & la rçduifit en un
corps, Çhryfippe lui fucceda, qui décruifit tout
ce qu’il avoit inventé. Erafiftrate en fit autant à
la doClrine deÇhryfippe. Les Empyriques vinrent
après, qui formèrent une médecine toute d:fk>
rentef fe divifèrent en plufieurs feCtss. Hcrp»>