C A L
La trahifon l’arma de fes noirs artifices;
Il fu t, par Tifiphone , endurci dans les v ic e s ,
Il refpire le meurtre, il blefie en careflant,
II défend le coupable, il pourl’uit l’innocent.
De fes traits empeftés l’atteinte eft incurable ;
L’afFreufe calomnie eft fon nom redoutable. '
Craignez d’être furpris par cemonftre trompeur,
Fuyez de fes complots la cruelle noirceur.
Penchez vers l’accufé » tâchez de le défendre,
E t ne jugez perfonne avant que de l’entendre.
Les athéniens vouloient forcer Démofthènes à
accufer un citoyen. Jamais ce grand orateur n’y
voulut confentir, voyant que le peuple.mur-
muroit contre lui , il fe leva & dit : « Athéniens,
33 je ferai toujours prêt à vous donner des con-
» feils utiles ,- au rifque même de vous déplaire $
» mais jamais , pour gagner vos bonnes grâces ,
» on ne me verra calomnier perfonne ».
Henri IV écouta avec modération , toutes les
horreurs que d’Orléans , auteur de libelles incendiaires,
avoit écrites contre lu i, mais quand il
eut entendu les Calomnies qu?il avoit inventées
contre fa reine fa mère , il haufîa les épaules, 8c
ne~dit que ces mots : « Ah le méchant ! le mé-
» chant ! mais il eft venu en France fous la foi.
» de mon paffe-port, 8c je ne veux point qu’il ait
» de mal». Il le fit aufïl-tôt mettre en liberté ».
La calomnie eft l’arme favorite du lâché 8c du
vindicatif hypocrite qui voudroit qu’on lui fçut
gré de fa modération 3'parce qu’il n’ alfafïine pas
lui-même fon ennemi.
Un quaker , eft - il dit dans un apologue, paf-
fant par un grand chemin, fon cheval marcha fur
un chien qui lui mordit la jambe , & faillit à démonter
le cavalier. Celui - ci lui dit froidement :
Je ne porte point d'armes , je ne tue pas 3 mais je
te donnerai mauvaife renommée. Là-deffus ayant ap-
perçu des gens qui travailloient près delà dans les
champs, il fe mit à crier : Au chien enragé !. au chien
enragé ! Dans l’inftant le chien fut afîbmmé.
Les loix polonoifes contre les calomniateurs, .
font très-rigoureufes. Celui qui eft convaincu de
calomnie, doit en plein fénat fe coucher à terre,
fous le ftale , 8c entre les- jambes de celui qu’il a
aceufé injuftement, 8c dire' à haute voix, qu’en
répandant en public telle 8c telle çhofe contre celui
qui eft au-defliis de lui , i l a ménti comme un :
chien ; cette confeflion publique achevée, il faut j
qu’à trois diverfes fois , il'imite la voix d’un chien j
qui aboyé. Il eft heureux qu’.en France cette loi
n’ ait pas lieu. Quelle longue fuite d’aboyemens
on entendroit dans la plupart dçs cercles, des fo-
ciétés & des-villes!
C A LM E T , bénédi&in, né en 1672 / mort en
1757. Rien de plus utile, dit .Voltaire, que fes
C A M
compilations fur la bible. Les faits y font exa&s ,
les citations fidelles. 11 ne penfe point, mais en
mettant tout dans un grand jour, il donne beaucoup
à penfer.
CALPRENEDE (Gautier- Coftes de l a ) , né
à Cahors, en 16 12, mort en 1663. Il eft auteur
de romans for-t longs 8c fort ennuyeux; cependant
il étoit amufant dans fa converfation , & con-
toitfortplaifamment. La reine fe plaignant un jour
à fe's femmes-de-chambre , de leur peu d’afliduité
auprès de fa perfonne ; elles lui répondirent ,
» qu’il y avoit dans la première falle de fon ap-
» partement , un jeune homme qui donnoit un
» tour fi agréable à fes hiftoriettes , qu’on ne
» pouvoit fe lafler de T écouter ». La reine voulut
auflil’entendre, & lui accorda une penfion.
; C AM A R D . Un grand feigneur camàrd ayant
donné l’aumône à un pauvre ; Dieu .vous conferve
la vue ! lui dit ce miférable. — Pourquoi fais-tu
cette prière ? — Eh ! monfieur, fi votre vue s’af-
foiblilfoit, comment pourriez - vous porter des
lunettes ?
C AM A R G O ( Marie-Anne Cupis de). Elle-
naquit à Bruxelles, le août 1710, d’une famille
’ noble, originaire de-Rome, qui a donné, à cé
qu’on aflure , plufieurs cardinaux à l’églife , 8c
entr’autres , Jean - Dominique de Cupis de Ca-
margo, évêque d’Oftie, doyen du facré collège.
L’aïeul de mademoifelle de Camargo , tué au
fervice de l’empereur, laifîa un fils au berceau,
8c très - peu de . bien j ce qui obligea la rrtere de
cet enfant de lui faire acquérir des talens, tels que
la mufique 8c la danfe , qui puflcnt fuppléer à ce
qui lui manquoit du côté de la fortune. Il époufa
par la fuite une' demoifellè fans bien ; 8c c’ eft de
ce mariage que naquit notre célèbre danfeufe. Elle
reçut en naiflant, ces dons heureux que l’on perfec-
donne, mais qu’on ne donne pas ; & l’ on dit
qu’ étant dans les bras de fa nourrice , entendant
fon père jouer du-violon, elle fut animée par des
mouvemens fi vifs , fi gais, fi mefurés, qu’on
augura dès lors qu’elle feroit un jour une des plus
grandes danfeufes de l’Europe.
: Lorfqu’elle eut atteint l’âge de dix ans , la prin-
ceffe de Ligne 8c d’autres dames de la cour de
Bruxelles , firent les frais de l’envoyer à Paris ,
avec fon père , pour y recevoir des leçons de
danfe , de mademoifelle Prevoft, dont les grâces
la vivacité, la légéreté, la cadence , charmoient
la cour 8c la ville. Elle profita fi rapidement de fes
leçons , qu’en moins de trois mois, elle retourna
à Bruxelles, pour être la première danfeufe de
l ’opéra de cette ville.
Le fieur Péliflier entrepreneur de celui de ’
Rouen, fur la réputation de cette jeune perfonne
,
fonne, offrit à fon père des avantagés fi confî-
dérables, qu’il l’engagea avec fa fille pour fon
Ipeétacle ; mais cet opéra ne pouvant fe foutenir,
le direéleur fut obligé de l’abandonner , 8c fes
débris enrichirent celui de Paris, de trois grands
fujets ; favoir: des demoifelles Péliffier, Petitpas,
& Camargo ; celle-ci préfentée par mademoifelle :
Prevoft, débuta- la première , par les caractères
de la danfe. Jamais fpeétacle ne retentit d’ autant
d’applaudiflemehs qu’en reçut la débutante. Il ne
fut plus queftion, pendant la vivacité del’enthou-
fiafme du public, de parler d’autre chofe, dans
les fociétés , que de la jeune Camargo : toutes- les
modes nouvelles portèrent fon nom ; 8c un jour
madame la maréchale de Villars vint à elle, auprès
du baflin des Tuilleries, avec tant de bonté ,
que tout ce qui étoit à la promenade s’attroupa
autour d’elle, 8c remplit le jardin du bruit des
battemens de mains 8c des cris de joie.
Des fuecès fi diftingués déplurent à la demoi-
felle Prevoft, qui voulut humilier fon élève eh
l ’obligeant d’entrer dans les ballets ; ce qui occa-
fionna l’aventure fiiivante. La jeune élève figurant
dans une danfe de démons, Dumoulin, furnbmmé
le diable, qui dey oit y danfer fêul, ne s’y trouva
pas 3 lorsqu’on vint à exécuter fon air. La jeune
danfeufe, tout hors d’elle-même, voyant que
cette entrée n’ étoit pas remplie, s’élança de fon
rang, danfa de caprice -, 8c tranfporta les fpeéta-
teurs d’admiration. Ce trait acheva de la brouiller
avec la demoifelle Prevoft, qui refufa de lui
fairir danfer une entrée que madame la ducheffe
avoit demandée. Le célèbre Blondi, la voyant en
pleurs, de ce refus , lui dit : «c Quittez , made-
» moifelle, quittez cette dure & jaloufe maîtreffe,
» qui vous fait éprouver tant de mortifications, je
» veux être votre maître : je ferai l’entrée que
» madame la ducheffe demande^ 8c vous la dan-
» ferez mardi prochain ». Les progrès de mademoifelle
Camargo^ , répondirent aux foins de ce
grand danfeur.
Elle réunit bientôt, par les leçons de fon nouveau
maître, la noblefle 8c le feu de l’exécution,
aux grâces, à la légéreté, & à la féduifante gaieté
qu’elle avoit fur le théâtre. C e dernier caractère
lui étoit fi naturel, qu’elle l’infpiroit aux plus
mélancoliques. C ’eft ainfî que la repréfènta le célèbre
Lancret, dans le beau portrait qui a comblé
de gloire ce grand peintre, 8c au bas duquel, M.
de la Faye a mis ce quatrain :
Fidèle aux lo ix de la çaderiee ,
Je .forme; au gré de l’art, les pas les plus hardis ;
Originale dans ma danfe ,
Je peux le difputer aux Balons, aux Blondis.
En 1734, mademoifelle Camargo quitta l ’opéra,
y rentra fix ans après , 8c danfa dans les fêtes
grecques 8c romaines, ouvrage imaginé pour la faire
Eneyclopédiana.
paraître dans tout fon éclat. Le public , qui la
retrouva toujours la même , la' revit aüffi avec la
même admiration, les mêmes applaudiflemens.
Elle eut la penfion du roi, qu’avoit eu mademoifelle
Prevpft; 8c en i‘y f i , qu’elle renonça au théâtre,
jufqu’à fa mort, arrivée en 1770, elle vécut
en bonne 8c honnête citoyenne, regrettée de
toutes les perfonne? de fon voifinage, comme un
exemple de modeftie , de charité 8c de bonne
conduite.
~Sa conformation é to it, fans contredit, la plus
favorable à fon grand talent. Ses pieds , fes jambes
, fa taille, fes bras 8c fes mains, étoient de
la forme la plus parfaite. Son cordonnier fit la
plus grande fortune dans fon état, par la vogue
que lui donna notre danfeufe; toutes les femmes
vouloient être chauffées à la Camargo.
Sa danfe, perfe&ionnée par le fond de l’art,
étoit le réfultat des principes qu’elle avoit reçus
de mademoifelle Prevoft, 8c des Prieur, Blondi
8c Dupré. De leurs manières différentes , elle s’en
étoit faite une propre à elle; aufli, exécuta-t-elle
tous les genres poflîbles dans la danfe noble, les
menuets, les paffepieds, mieux que mademoifelle
Prevoft; 8c elle y conferva ce je ne fais-quoi de
piquant, qu’elle avoit pris de fà maîtreffe, ainfi
que dans les entrées dépure grâce , les javottes ,
les rigaudons, les tambourins, les loures, tout ce
qu’on appelle les grands airs, étoient dans leur
cara&ère , par la variété des pas qui y étoient propres
Onconnoît les vers de M. de Voltaire, fur mademoifelle
Sallé 8c mademoifelle Camargo.
Àh ! Camargo , que vous êtes brillante !
Mais que Salle, grands D ieu x , eft raviflante !
Que vos pas font légers ! &'que _les fiens font doux!
Elle eft inimitable , & vous êtes nouvelle :
Les nymphes fautent comme vous;
Mais les grâces danfent comme elle.
CAM BR AI. En la reine mère, Louire
de Savoye , 8c Marguerite d’Autriche, gouvernante
des Pays - Bas , fe rendent à Cambrai, où
elles rédigent les articles d’un traité de paix entre
François I 8c Charles-Quint ; 8c ces deux monarques
y- accèdent, 8c les lignent. C e traité fut
appellé la paix des dames ; les' alliés y furent presque
comptés pour rien -, ce qui fit dire à André
Gritti, doge de Venife : « la ville de Cambrai eft
» le purgatoire des vénitien s ,où les empereurs
» 8c les rois de France, leur font expier les fau-
: » tes qu’ ils ont faites , en s’alliant à eux ». C ’é-
toit aufli à Cambrai, que Louis XII 8c l’empereur
Maximilien avoient fait une ligue pour le ren-
verfement de la république de Venife.
CAMIL LE. C e romain, connu par fes vertus
militaires 8c civiles , fut nommé dictateur,
E e