
782 P R I
deux champions mettent l'épe'e à la main, fe
battent, & après que Tun des deux a été blefle,
ils s'expliquent mutuellenièrit.
C ?eft une tradition - pafmi les Viei-ilek femmes ,
de lafuifle, que-faine Bernard tient jè diable enchaîné
dans quelqu'une dés ’ montagries qui en-1
vironnent l'abbaye de Gliirvaux : &:c’feft'fur cette
tradition qu’eft fondée la coutume qiront les
maréchaux du pays, de frapper tous les lundis,
avant que de fe mettre en bèfôjgné, trois coups
de marteau fur l'enclume, comme pour racoutrer
la chaîne du diable , afin J qu'il np puiffe s'échapper.
Le peuplé, a été long-temps per’fuadé que le
vendredi étoit un jour finiflre , néanmoins ce jour
tant calomnié âvoitd’illuttres parcifans. Sixte-Quint
âimoit Je vendredi avec paifion, parce que c'é-
toit le jour de fa promotion au cardinalat, de
fon élection à la papauté & de fon couronneqient.
Fran’çois I afliiroit. que tout lui réufliffoit le
yehdrédi. Henri IV aimoit ce joui- de préférence j
parce que ce-fût un vendredi qu'il vit pour la
première fois la belle marquïfe de Verneuil, celle
de toutes fes maitrefîes qu‘il aima le plus, après
Gabriellé.
^ PREROGATIVE. Les députés de la ville
d'Orléans avoient joui de temps immémorial,
par une prérogative très-ancienne, du droit de ne
boirequ'afii«à quelque fête qu'ils fe trouvaient,
fût-ce même devant le roi.. Henri IV , informé
de ee privilège qui lui parôifloit ridicule, imagina,
pour le faire ceffer, de faire ôter tous les fièges
de la falle d'audience où il devoit recevoir ces
députés i qu'il fit appeler enfuite : Us le haranguèrent
fort long-temps, & s'interrompant par
intervalles, reg'ardoient de tous, côtçs , le jroi
n'ignôroit point la caufè de leur étonnement, il
ordonna, fuivant l’ufage, qu'on leur yersât à boire.
Les députés, feandalifés de l'infraéfcion , voulurent
refufer; le roi leur dit qu'il prétendoiYêtre obéi.
Les députés s'a^iréht alors à terre & bû’rent.
« Ventre fainç-grisl dit Henri IV , ils font plus
fins que moi j réponde« à ma bonne ville dOr-
Iéans que jë n'entends point enfreindre le privilège
de fes députés ; auflî bien n'eftril pas en
ma puiflànee de faire ôter ces fièges-là ».
-Un membre.de l’académie dë Châlons en ra-
Contoit un jour toutes les prérogatives, & finit
par dire qu'elle étoit Ja fille ainée de Vacadémie
françoife. Voltaire qui l’écoutoit, lui fépondit :
« A (Tu rément, c’éft une bonne fille, & qui n'a
jamais fait parler d'elle ». !
PRESEANCE. U efl rare qu’il s’élève en Turquie
des conteflations entre les différents corps
de l’état. Si néanmoins iLen furvient, le defpote
P R E
la térmîne .en un inftant pour éviter la fermentation
que cela pourroit occafionner parmi les
efprits. Les gens de guerre & les gens- de loi,
s étant difputé. la préféance dans un jour de cérémonie
, le grand feignëur, pour les mettre d'accord,
déclara que la maih gauche feroit déformais
la plus honorable parmi les -gens de guerre,
& la droite parmi les gens loi ; ainfi, quand ces
deux corps marchent enfemble, chacun croit être
dans Ja placé d’honneur.
Deux dames de la cour de Charles V, ayant
eu unexrife fort vive au fujt t de la préféance dans
une cérémonie publique, & voulant faire régler
leurs-rangs par l’empereur, il leur promit d'af-
femblër .à ce fujet tous fes cônfeils, & décida
que la plus folle des deux pafîeroit devant.
Au fervice de la reine-mère de Louis X IV ,
il s'éleva un différend entre le parlement & le
elèrgé ; le parlement prétendoit la préféance, parce
m m alloit én corps > au lieu que le clergé
n y étoit que-par députés, Cependant le clergé
l'emporta, M. Lamoignon, premier préfident, fit
une févçre .réprimande au grand maître des cérémonies,
auquel il dit par deux fois : « Saintot,
apprenez à.faire votre charge,-vous n’y entende*
rien ».
Le prince Gueméné dit après le fervice à
MM. du parlement ; « Meilleurs , pardonnez au
pauvre Samtot, ignorance n’eft pas crime. Si
vous perdez vos rangs à la mort des reines,
vous favez - bien les regagner à la minorité des
rois «.
Les médecins ont eu autrefois un procès avec
les praticiens, fur là préféance', le juge demanda1
aux parties , quel rang obferve lé voleur & le
bourreau, lorfqu'ils vont au lieu du fupplice?
On lui répondit tout d’une voix , queTe voleur
marchoit devant & le bourreau derrière. « Eh
bien 1 prononça-t-il, que le praticien prenne le pas*
& que le médecin yienne après ».
A T'a Semblée de Lubeck, en i 6$ i, Moro-
fini» ambaffadeur de Vënife, étant affis dans une
falle du palais, vit venir de loin trois ambafîa-
deurs des éle&orats, qui dévoient pafler devant
lui > il prévit qu'il y auroit une conteftation à qui'
fefalue«oit le premier; il ©ta fon chapeau & le
mit fur fes genoux : les électoraux le voyant découvert
, crurent qu'ils ne pouvoient fe défendre
de le faluer en. paflant devant lui, à quoi il répondit
par une inclination fefpe&ueufe. Ces trois
ambaffadéurs fe vantèrent d'avoir été falués les
premiers, mais Morofîni les prit pour dupes, car
fi ne s'étoit pas découvert'pour les faluer, mai*
bien pour ne les pas faluer; telle étoit la politique
d’alors.
P R I
A l'aflemblée de Soiffons, tenue en 17; 3, pour
terminer la-guerre de Bohême , lors du m: ni itère
du cardinal de Fleury, il s eléVa une difficulté
à-peu-près pareille ; c’etoit pour déterminer les;
rangs, & aflîgner lés places à chacun des députés,
ce qui n’étoit'point facile > la politique ne fe
trouva point en défaut, car on fit faire par ordre
du roi ( Louis X V ), une table ronde j ainfi chaque
miniitre plénipotentiaire pouvoit dire avoir la
première place.
Il y eut en 1610, une difpute au' parlement de.
Paris, pour la préféance, entre les pairs laies .&
les pairs eccléfiaiiiques. Le duc de Môntbazon,
dit aux évêques, de.Beauvais & de Noyon, qu’ il
leur cederoit, pourvu qu’ à la première bataille
ils voulurent être les premiers aux coups.
Pierre Tarin, rééteur de l'univërfité, étant à
un a&e de phjjofophie, dit à des évêques , qui
lui difputoient la préféance : « Terra hoec quàm cdn~
culcatis, illujlrijfimi ecclejioeprincipes 3 mea efl, nec
patiàr meam dïgnitaterri hic a vobis contaminari.
Cette terre fur laquelle vous marchez ell de.mon
territoire, illullres princes de l’eglife, & je ne
fouffrirai point l'avillifîement de mâ dignité». Il fit
caffer l'aéte. Le droit èxifie toujours. |
Pr év en t io n .U ripeintre de portraits, que l’on
accufoit de ne pas bien falifir la refifemblance, voulut
s'affurer un jour fi le reproche qu'on lui faifoiti
étoit fondé. Il annonce à plufîeurs perfonnes &à fe s
amis qu’il a fait un portrait qu'ils connaflent tous,
&qui le difpute au naturel pour la refletnblance.f
On vient voir fôn tableau, on le critique , & la ;
prévention agiffant, on trouve qu'il n'a point faifi
jês- traits de fon original. Vous vouisl trompez dit
alors la tête du tableau, car c ’eft moi-même. En
effet c’étoit un ami qui s'étoit prêté au projet
du peintre, en plaçant fon vifage dans la toile
d'un cadre ajufté à cet effet.
• C'efl: le fujet du Tableau parlant, comédie
lyrique, repréfentée avec fuccès par.les comédiens
italiens.
PRIERE UNIVERSELLE ou formulaire d'o~
xaifon pour le genre humain ; par Pope.
D. O . M.
Père de l’univers, toi que tous les peuples adorent
fous les grands noms de Jéhovah , de Jupiter
& de Seigneur !
Suprême & première caufe, qui caches ton
adorable effence à mes yeux ^ & ne me fais connaître
que mon ignorance & .ta bonté.
Donne-moi, dans cet état d'aveuglement, de I
difcerner le bien du mal, & de laiffer à la liberté^
P R I 7.83
humaine fes droits, fans porter atteinte à tes faints
décrets.
Enfeigne-moi à craindre, plus que l ’enfer, ce
que'la confcien.ce me défend. & à préférer au
ciel même ce qu'elle m'ordonne.
Que je ne refufe aucune des grâces que tu m’ accordes.
Tés faveurs' ne.doivent pas retourner vers
toi : ies recevoir, c’éft t'obéir.
N e permets point;cependant que je renferme
tés bienfaits dans l’enceinte bornée de la terre,
& que je te regarde comme étant feulement
le Dieu de Thomme, tandis que des milliers de
mondes m'environnent de toutes parts.
Que cette foi blé main n’ait pas la témérité de
lancer tes foudres, ni de tracer les arrêts de
condamnation contré ceux que je. croirai, tes' en-
nemisi'
Si je'marçlje dans les Entiers de la vérité,
aide-moi à y marcher,; & fi je m'égare, daigne
me ramener' dans le bon chemin.
Préfervê-m.QÎ..' du "fol orgueil" & du murmure
infolent : que je fois auflî content de ce "que ta
fageffe refufe, que de ce qu'accorde ta bonté.
Apprends-moi à fentîr les maux, d’autrui, &
à cacher la faute que je vois. Ufe envers moi de
la même miféricorde dont j'aurai ufé envers les
autres.
Quelque petit que je fois, à tes regards, c'efl
pourtant ron fouffle, qui m’abîme. Ah! veuille
être_ mon.guide, foit que je vive ou que je meure
aujourd'hui.
Que je mange mon pain en paix jufqu’ à ce
jour. T u fais fi ,, de tout ce qu'il y a; fous le fo-
le il, quelque chofe me convient, ou non ; & que
ta volonté foit faite.
Père de l'univers j'aüquel l’eîpace entier fert
de temple, & dont la terre, la mer & les cieux
font l ’autel, écoute le concert de louanges que
tous les êtres entonnent en ton honneur ,
& que l'encens de leurs prières parvienne jufqu’à
toi.
gPiR-iERE. Un des amis d’Arlatto Piovano, curé
d'Italie , le pria dé lui donner un formulaire depriè-
res. Il lui répondit : il faut réciter en fe levanr un
pater & un ave, & faire .enfuite cette prière :
cc Seigneur Je fus, préfervez - moi d'un bourgeois
ruinq, d'un pauvre enrichi, de la confcience
d'un.partifan , des quiproquo dçs. apotiquaires ,
des &c. des notaires , de tous ceux qui eu