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ceux de fa fuite étoient une bande de fripons.
Son alteffe , craignant fagement les fuites de cette
découverte, revint, par des routes détournées,
leprendre fon tripot à Paris.
Sept grecs' étoient aux aguets depuis longtemps
pour trouver l’occafion de duper un banquier
de Lyon, qui étoit .arrivé à Paris, & qui
avoit. la réputation d'aimer le jeu ; mais celui-ci
le tenoir fur fes gardés. Ces meilleurs ayant fu
Je jour de fon départ pour Lyon par la diligence ,
jugèrent qu’il n’y avoit plus de temps à perdre 3
ils arrêtèrent fept places. Ce banquier fe trouva
donc embarqué avec fept grecs, qui feignirent
de ne point fe connoître, & qui fe donnoient
l ’un pour colonel étranger 5 l’autre pour un fei-
gneur qui voyageoit incognito s pour fon plaifîr.
Celui-ci étoit le .parent d’unminiftie; celui-là
d’un duc & pair, & ainfi des autres. Le banquier,
ne tenoit prefque point de place dans la voiture,
tant il étoit petit auprès de gens d’une fi grande
confîdération : il ne s’étoit trouvé de fa vie en. fi
bonne compagnie. Le foir les grecs demandèrent
des cartes , & jouèrent entr’eux, fans mettre de
la partie le lyonr.ois, q u i, s’ennuyant d’ être .Ample
fpe&ateur, pria qu’on lui permît d’y prendre
part. On y confentit par politeife > & trèspoli-
ment, on lui enleva, en différentes féances, tout
fon argent comptant & toutes fes lettres de change.
O n étoit à la dernière, lorfqu’on arriva à Lyon*
.& ces meilleurs cherchèrent un autre banquier qui
•voulut faire avec eux le voyage de Paris dans la
diligence.
JEU DE MOTS. Allufion fondée fur la reflem-
blance.des mots. Ceux qui veulent en ufer, doivent
avoir foin de les aflaifonnet du fel de la
Inalignité.
Une coquette dit à un jeune homme qu3elle
-jTaimoit point & qui lui parloit d’amour : vous
mourrez debout.t fi vous ne couchez jamais qu’av
e c moi.
Le père Porée,\qiri profelïoit avec tant d’éclat
Ja rhétorique au collège de Louis-le-Qrand, rencontra
un jour un magiftrat qu’il avoit loué dans
une de fes harangues : le célèbre jéfuite s’inclina
pour le faluer 3 celui - ci ne lui rendit point le
Jàlut. « Mon frère, dit le père Porée au religieux
» qui l ’accompagnoit , voila un magiftrat bien
•5 droit ».
On difoît du temps du maréchal d'Ancre & du
père C o ton , qu’il falloit fe défaire de l’encre &
du coton.
Un jeune homme fortant d’un concert, demanda
à un de fes amis , homme d’éfprit,
» comment il avoir trouvé la mufique? — j>àf-
r> fable. — Et les fem m e s— pailécs.
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Un moine, pour avoir audience de Sixte V ,
ayant forcé la garde , ce pape vint au-devant de
lui, & au iieu de lui demander de quel ordre
êtes-vous ? il lui demanda, de quel déforûre êtes-
vous ?
Un financier fort dur difoît, dans une .compagnie
, que fa terraffe avoit été emportée par le
débordement de la Seine 5 elle ne vous coûtera
pas beaucoup à rebâtir, dit un plaifant 5 car tout
le monde vous jette la pierre.
Un gros avocat à face ronde, bon rejoui,
intrépide mangeur, médiocrement riche, faifeit
une cour aflidue à une veuve qui âvcit de la
fortune', mais qui ne vouloit pas fe.remarier par
rapport à fes enfans. Elle avoit éconduit plufiéurs
fois^le perfonnage. «« Vous n’y penfez. pas, lui
» dit le' légille importun, je ne vous demande
; » que part d’enfant », Le précepteur du petit
fils de la veuve, inftruic de la prétention de
notre homme, en profita très-bien, comme on
va le voir. La veuve donna un grand dîner de
l famille, où l’avocat fut invité. L’inûituteur étoit
! aufli de la fêté. Le jurifconfulte, qui avoit la
réputation d’être • le . plus grand gourmand de
France, joua le fobre à table. Après les premiers
fervices, on lui propofa l’aîle d’un poulet
gras. Il fit beaucoup de façons pour l’accepter,
! «« Allons donc, monfieur, lui dit le précepteur,
» en mettant l’aîle fur fon afliette, allons donc,
i » vous badinez 3 ce n’eft - là qu’une part d’en*
» fant».
L’opéra jFatpié 9 étoit d’abord intitulé le Lan*
gage des T Leurs. On demanda fi l’on trouvcroi*
beaucoup de pehfées. dans le langage des fleurs,
«e Jepuis repondre, dit gaiement hauteur, (M . de
» Saint-Marc), qu’ au moins on n’y trouvera
» point de fouets », ‘r
L’établiffement de l ’Enfant-Jéfus, & Tordre
admirable de cette maifon, avoit donné à la
cour &.à la v ille, la plus grande idée de M. Lan-
guet, curé de S, Sujpice. Un jour M. le cardinal
de Fleury lui propofoit de le faire fur-intendant
général de tous les hôpitaux. M. Langue*
répondit à cette éminence : « Je Pavois toujours
» bien d it, monfeigneur, que vos bontés me
» conduiroient à l’hôpital ».
L’abbé de CléramFault, qui étoit extrêmement
contrefait j ayant été nommé pour 'fuo*
céder dans l’académie françoife à la Fontaine.
« On a dit qu'il falloit un Efope pour remplacer
» la Fontaine ».
Un pcëte voyant arriver un critique à la !
première repréftntation dnnè comédie, jù i dit :
« Ma foi, monfieur, les comédiens devroie.il
» veus rtluftr la porte un Jour comme celui-
Sb ci Pourquoi, cela ? — 1 « C ’eft que vous
» vous faites un jeu d’emporter la pièce ».
Le chevalier de ** liloit de mauvais vers dans
une pièce fort froide en hiver, à M . le comte **
fon ami, qui géloit tout en l’écoutant, & lui
demanda enfuite fon avis. « Ma f o i l u i dit le
» -comte, s’il y avoit plus de feu dans tes vers,.
» ou plus de tes vers dans le feu , nous n’au-
» rions pas fi froid ici ».
Un officier général du plus grand mérite, fk
de la plus grande réputation, co mm an doit dans
une bonne place : il avoit coupé la rivière qui y
palfoit. Les ennemis fe difpofoient à attaquer
cette place. Leur armée étoit au defîous fur le
bord de cette rivière. Il n’y avoir pius d’eau-
Leur cavalerie en fouffroit, & leur général fut
réduit à envoyer un trompette au commandant
delà place, pour le prier de lui donner de l'eau.
Il répondit qu’on lui en demandoit de trop loin;
mais que fi .ee général vouloit d’excellent vin
de champagne, il lui en offroit. Le général prit
cette réponfe pour une raillerie. Il renvoya le
trompette pour dire au commandant, que s’il
ne lui donnoit de l’eau, il bruleroit toute/ la
ville avec fes bombes, & qu’après le fiége, il
acheveroit de briller ce que les bombes auraient
épargné , qu’il mettroit enfin ie feu par-tout.
Dites-lui, reprit le commandant, qu’il n’y.penfe
pas, & que lorlqu'il me menace du fe u , il
m’avertit de garder l’eau pour l’éteindre.
On s’elt égayé, à l’exemple des auteurs comiques,
fur le compte des marisridicules. Un
mari appclloit toujours fa femme ma divine.
Cette fadeur qui déplaifoit généralement , "fit
dire à quelqu’un qui connoifloit bien cette femme :
ion mari a bien tort de l ’appeler ainfi; car, foit
fût entre nous , il n'en eiL point de plus humaine.
Un jeune homme qui avoit diffipé en très-
peu de temps fa fortuné qui étoit confidérable,
tomba malade, il fut faigné. Il prie fon médecin
de voir fon fang. Celui-ci -le regardant, dit :
« Vcila du fang qui eft bien verd. — — Il peut
» bien être verd, répondit le malade, j’ai mangé
» mon bled en herbe.
L ’abbé Boudot bon littérateur, & très-verfé
dans Ihiftoire de France, étoit ami de Crébillon
le fils : fort haut de taille cela n’empêchon
pas que dans les maifons où ils fe trouvaient,
Crébillon n’aiguifonnât Tabbé. Un jour, celui-
ci , pouffe à bout, dit à Crébillon : « Tais toi ;
» ton père étoit un grand homme, & tu n’es
» qu’un grand garçon ».
Les treforieirs de France; foutiennent .qu’ils
firatemifent avec la chambre des comptes, Un
maître des comptes dit : il eft vrait mais ce font
nos frères lays.
Un jeune avocat, qui plaidoit une affaire criminelle,
dit naïvement : « Meilleurs, le jour de la
» querelle fut une belle nuit ».
Une jeune veuve étoit la mairrefTe du marquis
d'Ancre, L’idole de la cour de France fous
Louis XIII. Des dames, qui fa voient que cette
veuve vepoit de perdre fon mari1, trouvaient
mauvais qu’elle n’eiït point de voile. Mefdames,
répondit un feigneur, un vaiffeau qui eft à l’ancre,
n’a que faire de voi'e.
Une princefte du fang palfoit. par une ville
de province ; tous les corps s’emprélTèrent de
l’aller complimenter. Celui de Télcélion n’étoit
repréfenté qjue par trois membres. « Madame,
» lui dit le chef de cette jurifdidiion , nous
» fommes dans ce moment une preuve fenfible
» de cette vérité fic ré e , beaucoup d’apptlés
» '& peii'd’élus. Notre devoir eft de prononcer
» furie fait des tailles, nous certifierons à
» tout le monde que la vôtre eft des plus élé*
» gantes ».
M. Linguet en fe déchaînant contre l’im-
mortel ouvrage du président Montefquieu, difoît
à tout propos, qu’il avoit aprofondi L ’ejprit des-
Loin ; cela peut-être, lui répondit on ; mais vous
n’avez aflurement pas aprofondi les loix de
l'efprit.
Après la défaite de Pompée, dans les plaines
de Pharfale 3 Nonius difoit : « Ayons bon con-’
» rage, nous avons encore fept aigles. — Cela.
» feroit bon, répondit Cicéron, fi nous avions
» à combattre contre des geais ».
Benferade allant voir un lieutenant - général
des armées du roi, le trouva .au ht malade, &
apperçyt quelques remèdes, qui îndiquoient que
les faveurs empoifonnées de Vénus , étoient la
fou u ce de fa maladie. « Comment! dit Benfe-
» rade, vous ne vous contentez pas d’avoir été
» mis fi fouvent dans les gazettes, vous voici à
» préfent dans le mercure galant ».
Le comte de Maref étoit à la guerre avec
le grand C ondé, il fut battu dans une aciion 5
fur cela on dit : mare vidit & fugit.
Deux prédicateurs prêchoient dans la même
églife, dont l’un avoit une voix très-forte.
Quelqu’un dit que la différence entre le prédicateur
du matinj & celui du fou , étoit que lè
premier prêchoit fort bien, & le fécond bien
fort.
Monfieur Camus , ayant entendu prêcher
monfieur^Godèaii fur la grâce, dit : j’ai entendu
un ferraon de la grâce, prononcé de bonne
C e c c i