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cations , & le connôiffant capable d'une réfbîutîon
funefte , elle fe: hâta d’employer tous les moyens
pour la prévenir} mais quels motifs pouvoit-elle
employer? La tendrefi'e qu’il, avoir pour elle & pour
lés enfans, n’étoit propre qu’à porter fa douleur au
comble} il n y penfoit qu’ avec des tranfports qui
reffembloient au dernier défefpoir. D ’un autre côté,
la feule idée de recourir à l’ affiftance de fes proches
j tourmentoit mortellement un homme-fier,
qui n’avoit jamais eu befoin des fecours de per-
fonne. Il étoit d’ailleurs incertain de l’obtenir ,
& le refus l’eût fait mourir plus cruellement que
Cous les fupplices. Ajoutez la honte de .décheoir
aux yeux de toute la ville g lui qui y tenoit un
des premiers rangs: Enfin-., il né parloir' que de fe
donner la mort 5 & lorfque fön époufe, qui étoit
continuellement à le veiller, ,1’exhertoit à prendre
des fentimens plus modérés, il né lui répondoit
qu’ en la preffant elle-même de fe délivrer de la
vie à fon exemple3 & d’infpirer la. même réfolu-
iùtion a leurs en fans. C ’eff de lui-même qu’on
tient ce détail- Il a avoué que fa patience fut pendant
quelques-jours-à l’extrémité , ou plutôt qu’il
étoit abfolument abandonné: de la raifon. Une idée
qui vint a fon- cpaiife,. &• gu.elle lui exprima avec
les^ plus tendres larmes de l’amourrendit pref-
qu’en un moment la force & même le. calme à-fon
efprit.
« Tout n’eft pas, dcfefpere y lui dit-elle , jJai de
33 la fanté j & nos cinq, enfans emont aufFu Cunb
» tons la ville-où nous, fommes, pour aller de-
33 meurer à Paris-} no.us n’y ferons connus de per-
33 fonne ; & nous .travaillerons,.vos enfans. & moi
« à Vous faire vivre- honnêtement. Elle ajoura ,
I que fi fon travail ne fuffifoit pas , elle fe ré-
33 duiroit à demander fecrérement l’ aumône pour
« fournir à fon entretien ». Il rêva quelques moyens
à cette prqpofîtion & prenant Ton parti
■ avec une confiance digne de tout ce q'ù’ii a Tait
depuis : No n , lui dit-il, -je ne vous 'îaBaifferai
*3> point à cette, indignité} -mais, puifque vous êtes
•33 capable de.tant de courage, je Tais ce ctii nous"
33 refte à faire: ‘ Mon défefpoir ne venôit'que dé
ma tendrefi'e & de ma compaffion pouf- vous 4'
II parut plus tranquille après ce difcours 5 toute
fa famille le devint comme lu i, & fans être fauves
de la misère,, ils retrouvèrent la paix dont ils ne
jouifioient plus depuis long-temps.
r II ne perdit pas un moment- pour recueillir les
débris de fa fortune 3 qui ne confiftoient plus que
dans les meubles , dont- la. plus grande-partie fut
même arrêtée par quelques-créanciers} à peine fit-
il cent piftoies de ce qu’il eut de refie } enfuite il
'quitta fecr-f cernent la ville avec fa, famille. Au lieu
de prendre le chemin de Paris , comme fon époufe
s’y attendoit, il prit-celui d’iine province voifine,
& dès le premier bourg où il fe crut inconnu, il
quitta fes habits pour en prendre d’autres d’une
étoffe fort vile 5 il fit faire la même choie à fon époufe
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“Sc à fes enfans. «< Puifqu’ il a plu à la providence,
33 leur dit-il, de changer notre condition,il faut
33 porter la marque du fort auquel nous fommes
33 condamnés} tâchons aufii d’en prèndre les ferv-
33 timens 33. Ayant continué fa route, il arriva dans
un grand village, qui lui parut,propre au deffein
qu’il avoir médité. Il- y loua une cabanne dans
l’endroit le plus écarte avec un petit champ &
quelques arpens de vignes 5 il y mit des meubles
conformes au lieu. « Vous m’avez offert, dit-il à
» fa- femme, de travailler avec vos enfans pour
3* mon entretien} il n’eft pas jufte que je'vive du
33 travail d’autrui. Nous travaillerons chacun de
33 notre côté ;pour notre fubfiftance. Mes .fils parta-
|| geront mon travail , & vous ferez partager le
33 vôtre à vos filles >3. Voyant quelques larmes qui
coûtaient de fes Vëux : «■ Si je crôyois, ajouta-t-il,
.33 que ces.larmes marquaient quelque, répugnance
>■ pour le genre de vie que je vous fais embraffer,
33 }e vous offrirois à mon tour de vous procurer
’i une vie plus .douce dans une ville où je pourrois
>3 vous envoyer d’ici les petits profits de mon tra-
» vail} mais je vous connois trop bien pour croire
» .que vos propres peines foient celles qui vous
33 touchent} foyez sûre que vous n’avez aucune
33 raifon de vous affliger des miennes } je fens que
33 je puis être heureux dans la condition où nous
33'femmes. Nous avons_ moins de commodités,
» mais nous aurons moins de befoins, ».
Il employa ce qui lui reftoit d’argent à fe pourvoir
de 'laine & de toile pour occuper fes‘filles,
& d’inftrumens propres a cultiver .la terre pour
fes fils & pour lui-même. Il prit un' païfan en fa
maifon pour leur en montrer l’ufage. Quelques
jours "d’exercice lui firent fut-monter toutes les
difficultés. L’exemple continuel de leur père &
de leur mère, leur infpira une forte d’émulation
qui n’a pu fe refroidir. Us vivent entr’ eux dans
une paix & dans une;union admirables. Quoiqu’ils
aient peu. de communication avec leurs voîfins,
leur fonceur & leur civilité n’ont pas laifie.de les
faire aimer'. C ’ eft chez eux que lés habitans du
village prennent.les.-o.uvr âges dé laine' qui font en
ufage à la campagne} le profit qu’ils en tirent fuffi-
roit feul pour la vie* fobre dont ils ont contrarié
l ’habitude. Ils fe promènent les jours de fête? ,
lifept & s’amufent innocemment. Lé père a proposé
plufieurs fois à Tes deux fils , âgés de. plus de
trente ans, de prendre le parti des armés, ou de
chercher quetau’autre voie de fortune } ' ils 'pr.otef-
tent que rien n’eft capable de leur faire quitter leur
cabane aufii long-tems eue leur père , leur mère &
leurs foeurs peuvent avoir befoin de leurs fecours.
C ’eft du curé m-ême dont on a fu toutes les
particularités de cette hiftoire.
ADULTERE. Sous Tempereur Théodore, une
femme convaincue d3adultère. fut livrée à la brutalité
d« quiconque youtait l’outrager.
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I lycurgûe puniffoit un homme convaincu i< M -
père comme un parricide.
• Les Locriens lui crevoient les yeux.
Autrefois les Saxons brûloient la femmzadul-
père, & fur fes cendres ils elevoient un gibet ou
périffoit fon complice.
Canut, roi d’Angleterre, ordonna que dans un
cas à’adultère l’homme feroit banni , & que la
femme auroit le nez Sc les oreilles coupes.
B F c h e z les Juifs on lapidoit les deux coupables.
. î-• Au royaume de Tünquin , la femme adultéré
èftjettée a un éléphant qui l’enlève avec fa trompe
«r ïo ail. nied. iufcu’a ce qu elle foit fans
En Mingrelie, quand un homme furprend fa femme
en adultère , il a droit de contraindre le galant a
payer un cochon, & d’ordinaire il ne prend point
d’ autre vengeance } le cochon fe mange entr eux
trois.
Dans les îles Mariannes, fi une femme efk^on-
vaincue que, fon mari lui eft a dultéréelle le fait
juftice à elle-même, en 1 apprenant a toutes les
femmes du village , qui fe donnent un rendez-
vous. ! Elles s’y trouvent la lance à la main, &
le.'Chapeau de leurs maris -fur leurs têtes. Dans
çet équipage elles s’avancent vers la maifon du
mari-dont on fe plaint', elles défolent fes terres,
arrachent fes grains , & font par-tout du dégât.
Elles fondent en. Jte fur la maifon, & fi le mari
n’à pris la fuite , elles l’y attaquent & l’obligent
à ^’abandonner. Si c’eft la femme quia fait une
infidélité à fon mari, il peut s’ en venger fur l’amant,
& même lui ôter la vie 5 mais il ne lui eft pas permis
de maltraiter fa femme, il ne peut que la
quitter.
; C e n’eft point un déshonneur chez les Turcs
à un mari dont la femme eft convaincue d’adultère^
la honte retombe fur les parens de la femme.
La peine dé Y adultère fe réduit, parmi nous pour
la, femme, à la perte de 1? dot & de toutes lès
conventions matrimoniales , & à être reléguée
dans -Tin monaftere, encore le mari a - t - il, pendant
deux ans , la liberté de la reprendre^
Augufte , épris des charmes de l’époufe d’un
ami particulier du philofophe Athenodore, renvoya
chercher, dans une litière couverte, pendant
que le fage étoit au logis de Ton . ami. Le mari &
la;Temme furent également conftemés } mais ils
n’avoientpas le courage de réfifter à l’empereur. Le
philofophe s’ offrit à les tirer d’embarras 5 8 t, prenant
les habits de la dame, lorfque la litière fut
venue , il y entra en Ta place, & fut porté dans
!a chambre de l’empereur. C e prince ayant levé
les rideaux de la litiere, fut bien furpris. d’én voir
fi#tir, l’épée à lg main, Athêtwdore 3 doiiî il tef-
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pe^oit la vertu. « Eh quoi \ Céfar 3 lui dit 1e fage 9
33 vous ne craignez pas que quelqu’un n’imagine >
33 pour attenter à votre v ie , l’artifice que j’em-
33 ploie innocemment ? 33 Augufte, furpris des dangers
ou fes defirs impétueux pouvoient l’entraîner,
reélifiaTon coeur, & l’accoutuma bientôt à n’aimer
que ce qui eft honnête.
Une dame ayant demandé audience à Jean III
roi de Portugal, & l’ayant obtenue, lui dit : Sire,
, votre, majefté auroit-eile pardonné à mon mari,
s’il m’avoit' fiirprife .& tuée en adultère ? .Après
que le roi lui eut répondu, qu’ en ce cas, il auroit
pardonné a fon mari, elle ajouta : tout va donc
bien, fire } .parce qu’ayant fu que mqn mari étoit
avec une autije ■ dans, une des maifons de ma campagne.,
T’y fuis allée avec deux de mes efclaves ,
à qui j’ai promis ta liberté s’ils rrr’ afliftoient dans
mon entreprife } & après, avoir ? ou la porte,
je les ai furpris h: lès ai tués tçus les deux d’un
coup de poignard. Je vous demande, fire, le
même paraon que vous n’euflîez pas refufé à mon
ma<I, fi f eufie été convaincue cm même crimè.
Le ro i, étonné de fa réfolution, lui-pardonna.
Une femme difoit qu’ elle avoir pris de l’ eftime
pour un homme qu’on fàvoit qu’elle aimoit avec
pafiion. Un plaifant.lui demanda, madame: combien
de fot^ vous a-t'il eftimé ?
A F FEC TA T IO N . L ’afetfation eft le vice ordinaire
aux gens qu’on appelle beaux parleurs. C ’eft:
une manière trop recherchée , trop étudiée de s’exprimer.
Les différons exemples àîaffectation que
nous allons offrir, prouvent qu’il y en a' de. plus
d’une efpèçe.
Voiture, écrivant à Mademoifelle Paulet, qu’il
s’ eft embarqué fur un vaiffeau chargé de fucre ;
lui dit que s’il vient à bon port, il arrivera confit,
& q'ue s’il fait naufragé, il aura du moins la con-
folation de mourir en eau douce.
Le même auteur écrivoit à Goftard qu’il vouloir-
s’abftenir de recevoir de fes lettres 3À caiifé qu’on
étoit en carême , & que pour un temps de pénitence,
çé ‘ oient de trop grands feftins : pour vous j
ajoutait-il, vous pouvez, farîs ferupuîe, recevoir
ce que je vous envoie, à peine ai-je de quoi vous
faire une légère collation. Je ne vous fervirai que
des légumes.
Balzac écrivoit à un homme affligé. Votre
éloquence rend votre douleur vraiment contai
gieufe} 8ê quelle glace , j e ne dis pas de Lorraine,
mais* de Nôrwège & de Mofçovie, ne fondioit
à la chaleur de Vos belles larmes.
Voici Une affeftatioji férieufe. ’
Le célèbre avocat Lemaître, dans fon plaidoyer
poiir une fille dt-favoûée,'dit que fon père a été
pour elle un eiçl d’aijrain, & fa mère une terre
de for.
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