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rcufîVi'> les foldats Te féparent err deux troupes,
du ht Tune feint d’ êcre hollandoife. Elles marchent
par différens chemins , & compaflent fi
bien leur marche, qu'elles fe rencontrent à la vue
du fort. Elles parodient fe charger avec beaucoup
ci’animofité bc de vigueur : les faux hollando.s
plient., plufkurs fe laiifent tomber comme morts,
le refte prend la fuite vers le fort, priant en flamand
qu'on leur fauve la vie. On leur ouvre la
porte 5 ils s'en rendent les maîtres, introduifent
leurs camarades, & font un butin immenfe.
Pendant le fiège de Turin-, en 1706, par les
françois, le duc de Savoie fit entrer dans la place
des munitions qu’il confia au courant de la rivière
, après les avoir enferme'es dans des peaux.
Une partie de chaque peau étoit pleine de vent,
& l’autre partie contenoit prccifément le poids
néecifaire, pour que ces peaux pufient fe Contenir
entre deux eaux.
Dans la dernière guerre contre l'Angleterre,
une frégate angioife s'étant approchée à la vue de
Calais, fie les fignaux de détrefle, pour attirer
quelques bâcimens & fe faifir de la chaloupe & des
matelots qui venoient généreufement à fon fe-
cours. C et indigne ftratagème trouva des cenfeurs
& des vengeurs même parmi la nation ennemie.
En effet, de pareilles rufes outragent la nature,
& tendent à empêcher les effets d'une charité fe-
courable.
Vieiileville etcît à Toul en 15p . Son caractère
ne lui permettant pas d'être oifif, il forme le
projet de furprendre Pont-à- Mouflon. Un efpion,
qui joignoit beaucoup d'intelligence, de fint-fle,
d’aftivité, à un air de bonne foi & de fimplicité
capables d'en impoferaux plus foupçonneux, eft
l'infirument dont il fe détermine à fe fervir. Cet
homme, vil & adroit, qui étoit parvenu par des
voies très-fingulières à gagner la confiance d'AI-
phonfe d’Arbolongua efpagnoi, & de Fabrice
Colonne, romain, commandant pour Charles-
Quint dans la place, les avertit un jour que Vieil-
Jcville doit partir le lendemain, à la pointe du
jour, pourGondé fur la Mozelle, & qu'il n'amènera
avec lui, pour fon efeorte, qu’environ
cent vingt chevaüx. Aufli-tôt Fabrice prend les
armes, fort de la ville à la tête de trois cent chevaux
d’élite, & s'avance fur le chemin que devoit
tenir Vieiileville.
T'officier françois paroît en effet avec les forces
jqu'on lui fuppofoit. Se. voyant chargé par Fabrice,
il recule, 'au petit pas, jufques à un bois où il a
placé fes embufeades. Elles tombent toutes ? la
fois fur Fabrice, lui tuent prefque tous ùs gens,
& le fout lui-même prifonnier. A l’inftant, Vieib
leville-fubflitue les enfeignes des ennemis aux fien-
nes , & 'prend la route de Pont-à-Motifîbn. Pour
mieux tromper les impériaux, il fe fait précéder
par fon confident Saligny, qui porte fa cornette,
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fes banderolles, fes armes, & fait retentir tous
les lieux de ces mots agréables : Vittoire ! Vieille-
ville efi prifonnier ,* Fabrice L'amène avec quarante
françois.
La rufe réuflit. Aux premières apparences de
fuccès, d’Arbolongua fort de la ville, & , trompé
par la vue de fes drapeaux, fe livre à Vigillevillc,
qui le force de prendre fa propre cornette, & de
concourir à la iurprife de fa place, en criant, victoire
! De cette manière«, les françois entrent fans
r.fiflance dans Pont à-Mouflfon. Don Alphonfe,
malgré tous les foins que prennent les vainqueurs
t pour le confoler,-donne les marques du plus violent
défefpoir, & eft trouvé mort le lendemain
dans fon lit.
Les efpagnols chafles deMaëftrich en i n f par
les hab tans, étoient reftés les maîtres de W ich,
foible partie de la place, féparée de l'autre par la
Meufe. Les vaincus, humiliés d’un affront qu'ils
ne pouvoient attribuer qu'à leur négligence, cherchèrent
à le réparer fur le champ. Il n'y avoir
d’autres obftacles que quelques canons placés fur,
le pont, qui joignoit les deux villes. Ils s’avi-
fent, pour éviter ce danger, de mettre devant
eux les femmes de Wich. Avec ce rempart, ils
entrent fur le pont j & couverts de ces étranges
boucliers, ils font feu fur les citoyens qui, ne
pouvant fe défendre fans tirer fur leurs parentes,
ou du moins fur des femmes de leur parti* quittent
leur polie, fe réfugient dans leurs maifons >
& abandonnent le champ de bataille aux efpagnols.
Ceux-ci, par ce ftratagème, fe trouvèrent maîtres
de la ville fans avoir enuyé aucun rifque.
Les françois afliégeoient Turin en 1640, & ils
étoient eux mêmes alfiégés dans leur camp par les
efpagnols. Comme la difette des vivres étoit très-
grande dans la ville, un des ingénieurs de l ’armée
efpagnole imagina de mettre dans des mortiers
d'une nouvelle efpèce, des bôulets creux & remplis
de farine, qui, étant pouflfés par une plus
forte charge qu’à l’ordinaire, paflbient par-deflus
la tête des aftiégeans, & alloient tomber dans la
ville. Mais ce fecours, plus ingénieux qu'utile,
fut bientôt abandonné, parce qu'il fourniffoit peu
&! trop chèrement.
Les anglais avoient fait en 1694 des armemens
confidérables pour détruire les villes maritimes de
France. Après avoir ruiné Dieppe, ils fe portèrent
vers le Havre. Ceux qui commaiîdeqr dans la place
, s'àvifent de faire des amas de bois à quelque
diftance de la ville , à deffein d'y mettre le feu &
d'y attirer les bombes. Cet arrangement eft à peine
exécuté, que le bombardement commence à neuf
-heures du foir, & continue toute la nuit. Les
monceaux de bois ayant été allumés à propos, les
uns après les autres, toutes les bombes font lancées
de ce cô,té-là. 11 n'y a que celles qui font en-^
voyées par des canoniers peu intelUgeits,» qui
tombent
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tombent dans la place, où il y a à pe'ne cinq ou
fix maifons endommagées. L’amiral Berckley,
trompé par les apparences,. fe retire le lendemain,
bien convaincu qu’il, ne laiffe qu'un tas de ruines,
cù il avoit vu la veille une ville floriftante.
Pierre I afliégeoit Derpr, ville d'Eftonie en
1704. Pendant ce fiège, il intercepte une lettre,
qui lui apprend que les alfiégés attendent de moment
en moment un fecours qui doit fe jetter dans
Ja place. Il ordonne aufli-tôt à trois ou quatre de
fes régimens de prendre des uniformes & des drapeaux
fuédoîs. Le corps prétendu fuédois attaque
les tranchées j les rufles, après les avoir défendues
quelque temps, s’enfuient : la garnifon ne fe
doutant point du ftratagème fort pour achever la
déroute* alors les vainqueurs & les vaincus fe
réunifient, fondent avec impétuofité fur des .gens
qui ne font pas préparés à les recevoir, & en font ;
un grand cartuge. Le petit nombre de ceux qui ,
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rentrent dans la ville ne fe trouve pas en état de la
défendre, & eft obligé bientôt après de capituler.
R U Y T E R , amiral hoilandoîs, l’homme le
plus habile & le plus redoutable qu'on ait encore
vu fur les mers, a plufieurs fois fauve fa patrie.
L'Efpagne, pour prix de fes fervices, lui donna
le brevet de duc pour lui & pour fa pôfférité.
L’expédition n’en fut faite qu’après fa mort, &
fes enfans le refusèrent par une modeftie bien refi*
peétabledans un état républicain, où le titre de
citoyen eft préféré à tous les titres d’honneur des
monarchies. Ruyter avoit commencé par être valet
& moufle de vaifleau; blefle à la bataille d'A-
goufte, il mourut en 1676.
Louis X IV eut allez de grandeur d’ame pour
être affligé de fa mort^ On lui repréfenta qu’il
étoit défait d’un ennemi dangereux } il répondit
qu'on ne pouvoît s?empêcher d’être feofible à U
mort d’un grand homme«-
Eneyclopédiana. O o OOO