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Il dit de lui-même.
D’une humeur affez douce 8e d’une ame allez ronde,
Je crois n’avoir point d’ennemi}
E t je puis aliurer, qu’ami de tout le monde,
J’a i, dans l'occalion, trouvé plus d’un ami.
C e vers que M. Favart, Ton ami, a fait fur
Pannard, le caraétérife très-bien :
Il chanfonna le v ic e , 8e chanta la vertu.
PAN TOM IM E S . Rome , fenfible aux beautés
de Fart que déployèrent à fes yeux les plus ex-
cellens pantomimes , n’en étoit que plus févère
pour ceux qui fe montroient inférieurs au tableau
qu'ils vouloient peindre; Un pantomime qui , à la
fin du rôle d'OEdipe , étoit fenfé s'être crevé les
yeux , manqua de mettre dans Tes mouvemens le
caractère de fafîtuation. Tu vois encore, lui crièrent
les plaifans du parterre i & l’aéteur fifflé
n'ofa plus reparoître.
Voici un fait qui paroîtra incroyable; il eft
rapporté par Hérodote , hiftorien un peu fuf-
peÀ. Un roi voulant marier fa fille , plufieurs
princes difputèrent cette conquête. Il en parut un
fur les rangs fupérieurement verfié dans l’art des
pantomimes. Jaloux de montrer fes talens, il fe
furpaffa lui-même. Après avoir repréfenté différentes
chofes avec les mains, il fe mit fur la tête,
& élevant les pieds en l'a ir , il peignit, par des
mouveraens de jambes , & opéra autant de merveilles
qu’il en avoit faites avec les mains. Ces
rares talens cependant empêchèrent le roi de lui
donner fa fille , foit que le monarque crut que le
genre pantomime fe permettoit trop de licence ;
foit qu’il jugea qu’il ne convenoit point à un
prince d’exceller dans un art fi frivole.
Un enfant, affiliant à une pantomime de Xam-
ligu-comique , s’écria tout-à-coup : Maman , maman
y pourquoi ces chevaux-la ont-ils des fouliers
comme moi ?
Quelqu’un prenant beaucoup de plarfîr à la re-
•réfentation d’une pantomime de Nicolet, dit à fon
Voîfin: Cefi comme aVopéra. — Oh! c'efi bienpis,
dit l’autre en feignant de ne pas entendre, fa pen-
fée , c*ejt bien pis.
PAPE. Après la nomination d’un pape, un cardinal
s’approcha dufaint-père & lui dit à l’oreille:. ;
« Vous voilà élu pape , voici la dernière fois que j
vous entendrez la vérité; féduit par les refpeéts,
vous allez bientôt vous croire un grand homme.
Souvenez - vous qu’avant votre exaltation vous
m'étiez qu’un ignorant & un opiniâtre. Adieu, je
vais vous adorer ». ,
P A R
PARASITE. C e nom qui fe prend aujourd’hui
en mauvaife part, étoit chez les anciens un titre
honorable. On voit dans Diodore de Sinope, que
les Bardes des Celtes , qui étoient les poètes de
nos anciens gaulois, les fuivoient à la guerre pour
décrire leurs allions héroïques, & qu’on les appel
loit, par honneur, leurs parafîtes.
M. de Montmaur, fameux parafite, contre lequel
tant d’écrivains fe font déchaînés avec une
efpècede fureur, entendoit bien raillerie. Ménage
eft un de ceux qui l’a le mieux fatyrifé. Il fit la
métamorphofe de Montmaur en perroquet : Bon,
dit Montmaur, je ne manquerai pas de vin pour
me réjouir , ni de bec pour me défendre. Comme
on louoit beaucoup cette métamorphofe : ce n’eft
pas merveille , dit Montmaur, qu’un auffi grand
parleur que Ménage ait fait un bon perroquet.
Un de ces agréables, dont l'état dans Paris
eft de vivre aux dépends d’autrui, fe trouvant à
table trop-éloigné de quelques fruits fort beaux,
& qui lui faifoient grande envie , voulut prendre
une poire avec la pointe de fon couteau. Notre
parafite eut la mal-adrefle de cafter une affiette de
prix. « Parbleu, monfieur, lui dit le maître de la
maifon, on peut piquer l’affiette, mais il ne faut
pas la caffer ».
PARIS finguliers. Un anglois étant à Paris, paria,
; il y a quelques années, qu’il fe promeneroitle long
; du pont-neuf pendant deux heures , offrant au public
des écus defix livres à ving-quatre fous pièces,
& qu’il n’épuiferoit pas un fac de douze cents
[ francs. Il fe promena criant à haute voix : « Qui
veut des écus de fix francs tout neufs à vingt-
quatre fous ? Je les donne à ce prix ». Plufieurs
; paiîans touchèrent, palpèrent les écus , & con-
[ tinuant leur chemin, levèrent les épaules, en dr-
; fant ; ils font faux:, ils font faux. Les autres fou-
riant , comme fupérieurs à la rufe, ne fe don-
noient pa$ la peine de s’arrêter ni de regarder,
j Enfin une femme du peuple en prit trois en riant,
| les examina long-temps & dit aux fpeélateurs :
«Allons je rifque trois pièces de vingt - quatre
fous par curiofité ». L’homme au fac n’en vendit
pas davantage pendant une promenade de deux
heures, & gagna amplement la gageure.
M . Shaftoe, qui avoir parié mille guinées qu’il
feroit .faire à un homme vingt-neuf milles en
vingt-neuf jours fucceflifs, fur vingt-neuf chevaux
, a gagné fon pari, quoiqu’il fut arrivé au
coureur plufieurs accidens.
Le même Shaftoe a parié qu’il feroit cent milles
en quatre heures, avec le nombre de chevaux
qu’il lui plairoit.
Autres paris
Les anglois font des gageures fouvent fur les
P A S [ P A S 7 33
chofes les plus originales. Ce fera de faire traîner
y pendant un certain temps, une voiture par
des chiens ; de faire foutenir a des oies une marche
fui vie de plufieurs lieues ; de faire faire à un
cochon une lieue & demie par heure.
II n’y a pas long-temps qu’un homme de dif-
t’néfcion paria une très-grofle fomme qu’il feroit
un mille de chemin en marchant fur les pieds &
les mains, & qu’ il arriveroit plutôt au but qu’un
cheval qu’on feroit marcher à reculons.
P A S C A L , (Blaife) né l ’an 162$, mort le 18
août 1661.
Lorfque fes premières Lettres provinciales parurent,
les jéfuites, tout-puiffans alors, firent faire
les plus grandes perquifitions pour découvrir l’auteur.
Cependant, Pafcal continuoit d’y travailler dans
une auberge où il étoit logé à Paris rue des Poi-
rées, vis-à-vis la maifon des jéfuites.
Un d’eux, en liaifon avec un neveu de Pafcal,
nouvellement arrivé d’Auvergne, & qui étoit venu
loger avec fon oncle, fut le voir;
Le jéfuite parla des Provinciales : « on attribue
lui dit-il, les petites lettres à votre oncle ». Le
neveu feignit de n’en vouloir rien croire.
Pendant la belle converfation du jéfuite, dans
la chambre même où on l’avoic reçu, il y avoit
fur le lit quinze exemplaires des Provinciales encore
tout mouillés.
Pafcal publia fort jeune un traité des ferions
coniques ; & à l’âge de dix neuf ans il avoit étonné
le monde favant par l’invention de cette machine
d’arithmétique fi fingulière , connue fous le nom
de la roulette, par le moyen de laquelle , fans
plume & fans jettons, fans favoir même aucune
règle d’arithmétique , on fait avec une fureté infaillible
toutes fortes d’opérations.
Pafcal difputoit un jour fur quelque point de
mathématiques avec un homme fort ignorant, &
qui croyoit néanmoins les pofféder. « Vous verrez,
dit Pafcal, qu’il y a aeux mathématiques.
On conferve préeieufement dans la bibliothèque
de faint Germain-des-Prés tous les papiers informes
où les penfées de Pafcal étoient écrites.
On a pris foin de les coiler l’une à côté de l’autre
dans un livre de papier blanc , fort proprement
relié.
Jîeurs écrits pour les curés de Paris, contre YAp<
bogie des cafuiftes, en un traité de Y Equilibre de
liqueurs, & en quelques autres fur des matière
de phyfique & de mathématique.
Les jéfuites eurent affez de crédit pour faire
fupprimer les éloges de Pafcal & d'Arnauld dans
le livre des Hommes illustres de Perrault ; fur quoi
on cita ce paffage de Tacite : Pr&fulgebant Caf
fu s 6* Brutus eo ipf> quod eorum effigies non vifc-
bantur. Mais ces éloges y ont été rétablis depuis^1
PASQUIN ADES. Sorte de fatyres, ainfi nom»
mées à Rome, d’un nom d’une llatue appellée
Pafquin, à laquelle on les attachoit. Cette llatue,
qui eft antique , eft mutilée & placée dans un carrefour
de la ville. On croit communément qu’elle
prit fon nom d*un tailleur, bouffon du quartier,
dont la boutique étoit un bureau de nouvelles,
de bons mots, & de traits fatyriques. La llatue
de Marforio , à laquelle on attachoit les réponfes
à ces fatyres, fert aujourd'hui de fontaine dans
Une des ailes du cspltole. Quoiqu’on n’affiche plus
de libelles près de ces llatues, le nom de paf-
quinades néanmoins eft toujours relié à ces fortes
de fatyres.
La fignora Camilla, foeur de Sixte V , & qui
avoit autrefois fait la leflive, étant devenue prin-
ceffe, on vit le lendemain Pafquin avec une
chemife fale : Marforio lui demandoit la raifon
d’une fi grande négligence. « C ’e ft, répondoit-
i l , que ma blanchiffeufe eft devenue princeffe ».
Un pape qui portoit une vigne dans fes armes
avoit obligation de fa fortune à un prince avec
lequel il agifloit fort mal. Cela donna lieu à une
pafquinade qui fut affichée dans Rome à l’endroit
ordinaire : Plantavi vineam & fecit labrufcas : j’ai
planté la vigne , elle n’a produit qu’ un raifin fau-
vage. Le pape , piqué au v if , promit une récom-
penfe conndérable à celui qui découvriroit l’auteur
de cette fatyre. Le lendemain on trouva affiché au
même endroit : lfaïe , chap. 40.
Un pape ayant employé lestréfors de leglife,
i faire bâtir de grands palais , les pauvres qui
fouffroient extrêmement, en murmurèrent, & l’ on
trouva écrits fur les portes de ces palais : Die ut
lapides ifii panes fiant.
Un eccléfiaftique qui avoit plus d’orgueil que
de mérite , venoit d’être élevé au cardinalat. Marforio
fut repréfenté tenant les armes de ce nouveau
cardinal, avec un grand chapeau. Pafquin,
faifant fa fonction de cenfeur public, lui difoit :
voilà un grand chapeau pour une bien petite tête.
L’ archevêque de Paris, François de Harlay,
ayant agi avec beaucoup de zèle contre l’autorité
du faint-fiège, dans l’affemblée du clergé en
1682, il parut à Rome une médaille, repréfen-
tant ce prélat à genoux aux pieds du faint-père.
Pafquin étoit debout, qui difoit à l’oreille de fa
fainteté : poenitebit fed non erubefeet : il fe repentira
mais ne rougira pas. Cetti efpèce de prédiction