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l ’inftru&'on de tous les hommes de fon fiée le ,
mais même pour la pôftérité ; quJil doit écrire fes
fcntences & les mettre fur ie papier , afin de les
faire paffer. dans le coeur des hommes préfens-,
abfens & à venir.
Il employait beaucoup l'ironie dans fes difcoürs,
.comme un moyen de piquer l-amour-propre de,
fes adverfaires.
Il fonda un école de morale, & il enfeigna la
vertu tirée de la loi naturelle & indépendante de
tout culte, de toute croyance furnajurelle.
Sa do&rine arma les. prêtres degfon paya, & il
fut accufé par Mélitus ■ d’-athéifmè.
Il convainquit les honnêtes gens de fon innocence;
mais des juges corrompus,, gagnés par
les préjugés du peuple, & par l'orgueil deschefs,
le condamnèrent à mourir.
Il lui eût été aile de fe juftifier & de fefativer ;
il préféra de mourir, & but lepoifon de la ciguë
avec une forte d’ indifférence : >1 attendit la fin de
fa vie en differtant fur l’immortalité de l’ame.
Quelques pères de l’égiife difent de ce fage qu’il
fut martyr de Dieu. Eralme étoit tenté, de s’écrier,
en lifant le récit de fa mort : O faint Socrate !
prie^ pouf nous.
SO LD A T . Le fimple foldat, confondu dans
la foule, voit rarement fes belles actions, éclairées
par la gloire, & c’eft une raifon de plus pour
les admirer lorfqu’tlles viennent à. notre connoif-
lincé.
Si vous voulez procurer à la patrie de bons dé-
fenfeurs, a dit l'ami des hommes , n’aviliflez pas
les g ns de guerre.. Les Suédois ayant en 1741 3
déclaré la guerre à la Rtiflie;on propofadansl-'af-
femblée des éta s , de condamner lés contrëban^
diers, à être enrôlés pôur la vie. Et que déviendira
la dignité du nom de foldat ? dit un depiité de i’or-
dre des payfans. Ce m-jt plein d’élévation ; arrêta
la promulgation de la loi.
Louis X V , palTnt devant- les gr-enadierS'à cheval
, dit au lord Stanley qui éto:t à fa portée :
» Milord ». vous voyez les plus bravés gens de
» mon royaume : il n’y en a pas tin qui :ne fort
» couvert de bleffures , lçJord. répondit Sire,
» que doit penfer votre majefié, de ceux qui les
» ont bit fies ? Ils font tués, repartit un grêna-
» dîër.-»
Le grand, Çondé, parlant de l’intrépidité de
que’ques foldats, difoit, qu’étant devant une placé
cù il y avoit une pâli »fade à brûler, il fit promettre
cinquante louis, à qui féro t affez brave pour faire
léuliir ce coup ch- mai#. Le péril étoit fi-apparent,
que la récompenfe ne tentait point. Mon feigne ur ,
lui dit un foldat plus courageux que les autres, je
s o t ;
vous quitte des cinquante louis que vous me pro*
mettez ; fi votre alteffe veut me faire fergenc de
ma compagnie : le prince qui trouva de la géné-
rofité dans ce foldat, de préférer l’honntur à l’a;>
gent, lui promit l’un & l'autre. Animé par le
prix qui l'attendoit à fon retour, il réfoi ut d’affronter
une mort fi glorieufe : il prend des flambeaux,.
defeend dans, le fbflTé , ya à la paliflade , &
la brûle, malgré une grêle de moufquetene, dont
il ne fut que légèrement bleffé. Toute l’armée témoin
dé cette aétion , le voyant revenir , crioit
vivat 3 & le combloit de louanges ; quand il s'ap-
perçut qu’il lui manquoit un de fes piftolets ; on
promit de lui. en donner iin,autre, non, dit-il, il
némè fera point reproché que ces marauts-là profitent
de mon pifioiet. Il retourne fur fes pas, ef-
luie encore cent coups de moufquet, prend fon
pifioiet, & le rapporte.
SOLLICITEUSE. Une duchefle avoit au parlement
un procès , qui devoit être bien-tôt rapporté.,
E lé alla voir un c-onfeiller, qu’on lui dit être
fon rapporteur» & qu’elle ne connoiffoit point.
Elle entre chez lui,'& trouve dans i’annchamhrçfpr
fon pafiagé un gros, chat., qui, par des mouvemens
flattvürs , fe.i.bloii l'inviter à le carrefîer ;ce qu’eiîe
fit, quoiqu’elle eut une averfion naturelle pour ces
a imaux là- Elle lui palïa deux ou trois fois la main
Cur ia tête, & leiflatta, Dansee moment le confeiller
averti de la vifite de la dame, parut, & demanda à
1$ duchtfle, ce qui ui procuroit l’honneur d*. 11 voir
fhez lui : vous,êtes mon rapporteur, lui dit-elle,
&' je viens vous r£c mmander mon affui e : madame
,■ lui' répondit i l , vous' avez pris le change.
J'ai un frère concilier au parlement comme moi,
& c’elt lui qui efi chargé du rappejt de votre
procès. Comment donc , s’ écria la- duchefle d’un
air chagrin , ’en fortanc avec- préçipitati ■ >n , 'Vous
nêtes pas mon rapporteur, & j ‘ai carrêjfé votre
:chat b %
Une comtefle affez belle , pour prévenir en faveur
d’un mauvais procès le juge le plus aufière,
fut fplliciter p ur un colonel, contre un marchand,
Çe , marchand çtoit tflors dans, le cabinet
dejon ju g e , qui trouymt fon affairé fi claire & fi
jufté, qu’ il, ne.;put s’empêcher de” lui promettre
gain de çaufe. A l’infia.nt même, la charmante
çorntefiê pa,ûit dans i’apîich^mbre , le juge courut
au devant 4’eilè ; fon abord, fon air, fçs yeux , le
fon de fa voix , tant de charmes: enfin le follici-
terent fî bien , qu’en ce premjer moment, il fut
plus homme que juge , fie il promit à la comtefle,
■ que lé colonel^gagoicpoft fa ca|ufe. Voilà le.juge engagé
des deux êôtés. En rentrant dans fon cabinet
"il tiouva îe marcbànd défoté : je l’ai vûè , s’écria
le pauvre hommîe hors de lui-même, m Ifai vûe,
celle qui follictte.contre moi, qu’elle eft belle i ah !
monfieur, mon procès eft perdu ! mettez-vous en
.ma place, répondit le juge.encore tout interdit,
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3! fe pu lui refufer ce qu’elle me demancloit ? En
difanc cela, il tira d'une bourfe cent piftoles ;
c'étoit à quoi pouvoient monter toutes les prétentions
du marchand , & les lui donna ; la comtefle
fç,ut la chofe, & comme elle étoit vertueufe juf-
qii’au fcrupule ; elle craignoit d'avoir trop d'obligation
à un juge fi généreux , & lui renvoya fur
l'heure les cent piltoles. Le colonel, aufli galant
que la cointefîe étoit fcrupuleufe, lui rendit les
cent pilloles. Etainfi chacun fit ce qu’i! devoit
faire : le juge craignit d’être injulle , la comtefle
craignit d’être reconnoiflante , le colonel paya, &
le marchand fot payé.
SOLON , l ’un des fept Cages de Grèce, Ôc !é-
gifîateur d'Athènes, né dans cette ville, vers l’an
É39 avant. Jéfus-Chrift.
Solon fewtoit bien le vice de fa fégiflation ; &
lorfqu «n lui demandoit fi les loix qu’il avoit données
aux Athéniens, croient ies meilleures , il fe
cont*ntoit de répondre, *> qu'il leur avoit donné
» les meilleures de celles qu’ils pouvoient fup-
» porter ».
Le voeu de ce légifhteur , étoit que les fautes
& les crimes des magiftrats fuffenr punis fans délai
; mais que les pei.ies dues au gens du peuple
biffent tardives. » On eft toujours maître, difoit-
» il, de punir ceux-ci, & le retardement peut
» rendre impoflible la punition des premiers ».
Une loi fage, & qui devoit accoutumer les
Athéniens à fentir les maux les uns des autres,
comme membres d’un même corps, étoit celle
qui permettoit à tout le monde d’époufer la querelle
de quiconque aura été outragé. On lui de-
mandoit un jour, quelle ville lui fembloit la plus
heureufe ; il répondit, que » c’étoit celle dont les
»citoyens étoient fi unis,qu’ils fentoient l’injure
» faite à un d’eux aufli vivement, que s’ils l’a-
» voient reçue eux-mêmes ». Pour rendre encore
les citoyens plus fenfibles aux maux publics, il
décerna la peine d’infamie, & le ban'ffement contre
çeux qui, dans une fédition, fe tiendroient
tranquilles.
Ce légfllateur, pour bannir l’oifîveté de fa république
, avoit chargé l’aréopage de veiller fur
les arts, de demander à chaque citoyen, compte
de fa conduite, & de punir ceux qui ne travaille
n t point. Aufli du temps de Solon ne voyoit-on
point dans Athènes de ces malheureux, 'qui en
mendiant, déshonorent leur ville.
«e le marier , relufoient à 1 état le fecours de leu
poftérité. Si une héritière avoir un mari impu-flant
" ‘uj étoit permis d’afloder à fon lit le parent di
*uari qu’elle aimoit le mieux. C ’étoit la putmioi
^ue le légiflateur avoit impofée à ceux q u i, con-
Encyçlqpédianai
noiflant leur foiblefle, époufoient des héritières
pour jouir de leurs biens.
D’autres difpofitions prouvent encore, que
Solon regardoit la réforme des moeurs, comme
la principale bafe d’une bonne lég-flatioo. Il ne
porta aucune loi contre les facriléges, ni contre
les parricides, » parce que difoit-il, le premier a
» été inconnu jufqu’ici à Athènes ; & la nature a
» tant d'horreur du fécond, que je ne crois pas
.» qu’elle puiffe s’y déterminer ».
Solon avoit pour maxime, qu’on ne doit point
! eftimer un homme heureux avant fa mort ; ma-
; xime, dont Créfus reconnut la vérité. Solon qui
empl:>ya plufieurs années à voyager &c à s’inftruire ,
| s’étoit rendu à la cour de ce prince, qui chercha
i à l’éblouir par une magnificence étudiée, Créfus
lui ayant un jour fait voir toutes fes richeffes , lui
demanda d'un air fatisfait, s’il avoit jamais connu
d’homme plus heureux que lui. » Oui, prince ,
» lui répondit le fage, & c’eft un nommé Tellus ,
» fimple citoyen d’Athènes, qui, après avoir vu
» fa patrie toujours floriflante , & fes enfans gé-
» néralement eftimés, eft mort en combattant
»pour fapatrie ». Créfus, furpris de cette réponfe,
demanda à Solon, fi du moins après ce Tellus , il
avoit connu un autre homme, dont le bonheur
fût égal au fien. Solon répondit, » qu'il pouvoit
» encore lui citer deux frères nommés Cléobis,
» & Blton qui avoient été un parfait modèle d’a-
» mitié fraternelle , & qui avoient eu pour leur
» mère la pitié la plus tendre. Un jour de fête,
» comme elle devoit aller au temple de Junon ,
»> dentelle étoit prêtrefle, fes boeufs tardant a
» venir , Cléobis & Brton fe mirent eux-mêmes
» au joug, & traînèrent le char. Cette mère ravie
»» de joie , pria Junon d’accorder à fes enfans ce
» qui étoit le plus avantageux aux hommes. Après
» le facrifîce , ils allèrent fe coucher, au milieu de
» leur fommeil, ils terminèrent leur vie par une
>» mort douce & tranquille, non moins célèbre
» que celle des plus grands capitaines ». Eh quoi,
reprit Créfus, vous ne me compterez donc pas
au nombre des hommes heureux r » Roi de Lydie,
» s’écria Solon, Dieu nous a donné à nous autres
» |*recs, un efprit ferme & fimple , qui ne nous •
» permet pas d’eftimer ce qui n’eft qu’éclatant, :
« ni d’admirer un bonheur , q.ui peut n’être que
*> paffager. Celui-là feul nous paraît heureux de
» qui Dieu a continué la félicité jufqu’au dernier
» moment de la vie ; car le bonheur d'un homme*
» qui vit encore, & qui flotte au milieu des écueils
« de cette vie, nous paroît auffi incertain que ,1a
*> couronne, pour celui qui court dans la carrière;
» Ne vous y trompez pas, grand roi, on trouve
» dans une fortune médiocre beaucoup d’hommes
» heureux ; & ils ont cet avant ge fur les riches ,
» qu’ils font moins expefés aux revers de la for-
» tune. & peuvent moins contenter leurs delirs,
S f f f f