
Il fe montra toujours l'ennemi. déclaré des J
tyrans, & pourfuivit avec vigueur quiconque
faifoit paroître dans fa conduite qu'il afpiroit
au pouvoir fouveraln. Un agrigentin l’avoit in-^
vite à manger chez lui. L ’heure du repas étant
venu, il demanda pourquoi on ne fervoic pas;
c'eft* dit le maître de la maîfon, quon attend
le miniftre du confeil. Cet officier arriva en effet
quelque temps après, & on le fif ro* du
feftin. Il fe comporta d’une manière fi infoîente
pendant le repas , qu’Empêdocte foupçonna^ qu’il
y avoit entre ce roi du feftin & celui qui Tavoit
invité, quelque complot pour rétablir la tyrannie.
Le foupçon étoit bien fondé, puîfqu Empé-
docle ayant fait appeller le lendemain ces deux
hommes devant le confeil* ils furent condamnés
à mort.
C e philofophe s'étoit familiarifé avec toutes
les iciences, & fes connoiffances dans la phy-
fique lui firent faire bien des miracles aux yeux
des agrigentins ignorans. A l'exemple d’Apollon
& de Pythagore, il fe fervit quelquefois de
la mufique comme d'un remède fouverain pour
les maladies de l’ efprit, & même pour certaines
maladies du corps. Il étoit logé dans la ville de
G é la , chez fon ami Anchitus, lorfqu un jeune
homme en fureur & livré au défefpoir vouloit
tuer cet ami, parce qu’en qualité de juge de
la ville, il avoit condamné à mort le père de
ce jeune hommç. Empêdocle tâcha de lui calmer
l’efprit par fes difcours, & n’y réufliffant
point , il effaye d’unir les fons harmonieux de
fa lyre au langage mefuré &ç cadencé de la poë- ;
fie. Il remarque les modulations qui font le plus •
çî’impreffion fur le coeur du jeune homme , les
emploie à propos 9 & parvient enfin a 1 attendrir.
Il faüva air.fi la vie à fon hôte , & fe fit même
un ami dû jeune homme, qui devint dans la fuite
un de fes plus fidèles difciples.
Empédocle donna dans la Sicile les premiers préceptes
de la rhétorique, & il fe fervit utilement
de fen éloquence pour réformer les moeurs &
la vie licencieufe dés agrigentins.' Il leur reprochoit
fouvent leur fureur de t>âtîr comme s’ils
dévoient toujours vivre * & leur empreffement
pour les plaifirs, comme s'ils euffçnt du mourir le
même jour.
C ’eft cet homme fi fiige, fi ^élé pour le bonheur
de fes concitoyens, que quelques auteurs
nous repréfentent comme un fou & un ambitieux,
qui accablé de vieilleffe fe jetta dans le gouffre du
mont Etna, afin, difent-ils, dé papef pour un
Pieu.
EMPRUNTEUR. Quelqu'un a dit : Voulez-
yous vous débaraffer de certaines perfonnes ? pre-
jez-leur de l’argent,
Un homme ayant prêté une femme confïdd*
rable à un de fes amis, celui-ci fut peu exaét *
la lui rendre, il fuyoit fon cre'aneier * qui l’ayanc
rencontré lui dit : «« Ou remeftez-moi mon ar^
» gent, ou rendezr-mot mon ami. »
Deux auvergnats étoient couchés dans la même
chambre : l’ un dit à l’autre Gros Pierre —•
Eh bien ! —-Dors-tu • =*= Pourquoi ? —• C ’eft
que fi tu.ne dormais pas, je t’emprunterois un
écu. —— Je dors.
EM U LA T IO N . Plus innocente que l’envie®
plus fage que l’ambition >, l'émulation eft toujours
un bien ; elle ne nous excite qu’à fuivre de bons
exemples, & qu’à îmiteE ce que nous voyons de
bon dans les autres*
! Dans fa jeuneffe * Thémiftodè n'aimoit que le
vin & la débauche i mais lorfque Miltiade eue
remporté la fameufe victoire de Marathon, té-
i moin des applaudiflemens qu'on donnoit a ce
grand homme, il fentit naître dans fon ame une
noble émulations Depuis ce moment, 1 amour de
la gloire, comme un feu que rien ne peut éteindre,
embrâfoit fon coeur , & k Hévoroit nuit & jour.
Souvent il difoit à fes amis t «« Les trophées de
» Miltiade m'empêchent de dormir. » , ^
Un roi de Lacédémone vouloit détruire une
ville rivale de Sparte ; les. Ephores s’y^ opposèrent
: « Confervez, lui dirent-ils, la pièrre fur
w laquelle s’aiguife Vémulation de nos jeunes
» gens. » .
Deux officiers romains, nomme's Varênus &
Pulfio, fe difputoient fans^ ceffe le pri:x de la
bravoure, & chacun vouloit être préféré à fon
rival. Les Nerviens, peuples des Gaules, atta-
quoient le camp des romains. Au plus fort de
l’attaque, Pulfio défie Varénus : « Voici, dit-il,
» l’occafion de décider nos anciennes querelles ;
» voyons qui de nous deux fera preuve d’une
» plus grande valeur. » En même temps, il s’é lance
hors des retranchemens, & va fondre fut
un gros d’ennemis qui étoient très-ferrés. Varê-
nus, piqué.d’ honneur, le fuit à peu de diftance^
Pulfio tue d’abord un des nerviens> mais bientôt
jl eft enveloppé. Varénus court à lui la
dégage ; mais il fe trouve, le moment d’après »
dans le même péril d’où il vient de tirer fon
émule, & e ft, à fon tour, dégagé par lui. Ainfi
les deux rivaux fe durent mutuellement la vie,
& la gloire de la vaillance demeura encore ip-
çlécife entre eux.
EN FAN T . L’auteur d’Emile a cité ces deux
tours d’adreffe, l’un d’un petit garçon, autre
d’ une petite fille, auxquels on avoit défendu de
demander rien à table. Le petit garçon, que 1 ou
avoir crueljeiqent oublié qui craignoit de dç-*
fobéir, s'avifa de prendre un peu de fel : c’é-
toit afiez faire entendre qu’il défiroit de la viande.
La petite fille étoit dans une circonftance différente,
elle avoit mangé de tous les plats, hormis
d’un feul dont on avoit oublié de lui donr-
lier & qu’elle convoitoit beaucoup. O r , pour
obtenir qu’on réparât cet oubli, fans que l’on
pût l’acufer de défobéiffance, elle fit en avançait
fon doigt, la revue de tous les plats, difant
tout haut a mefure qu’elle les montroit : J'ai mangé
de ça, j'ai mangé dé ça : mais elle affeéla fi vi-
fiblenient de palier, fans rien dire, celui dont
elle n’avoit pas mangé, que quelqu’un s en ape
rce v an t, lui d it, & de cela, en avez-vqus
mangé ? Oh 1 non, reprit doucement la petite
gourmande, en baiffant les yeux. Si ce tour-ci
j)arolt plus fin, c’eft qu’il eft une rufe de fille,
1 autre n’eft qu’une rufe de garçon.
Les traits des enfans, & fur tout des enfans '
princes, font beaucoup de plaifir. M. le dauphin
àlla voir Louis XIV fon père ; il demanda un
fauteuil : le roi lui fit donner un pliant, & le
gronda. Le foir comme il difoit fon credo, &
qu’il vint à cet endroit, qui efl'afiis a la droite
<!* f on pere, il demanda à la maréchale d elà
Motte, fa gouvernante : Eft-il affis dans un fau-
teliil l
Un évêque demandoit à M. de Vermandois,
amiral de France, quel âge il avoit : Cinq ans,
}w *eP°ndit l'enfant : Montrez-les moi, lui dit
-J^veque, on peut montrer ce qu’on a : M. de
Vermandois lui dit : Montrez-moi les vôtres, je
vous montrerai les miens.
^J^EANT G ÂTÉ. Une dame d’efprit avoit
un ms, & craignoit fi fort de le rendre malade
en le contredifant, qu'il étoit devenu un petit
tyran, & entroit en fureur à la moindre réfif-
■,tance quon ofoit faire à fes volontés les plus
bifarres. Le mari de cette dame, fes parens, fes
amis lui repréfentpient qu'elle perdpic ce fils chéri}
tput etpit inutile. Un jour qu’elle étoit dans fa
chambre elle entendit fôn fils qui pleuroit dans
la cour j il ségratignoit le vifage de rage, parce
qu un domeftique lui refufoit quelque chefe qu'il
vouloit. Vous êtes bien impertinent, dit-elle à ce
Valet, de ne pas donner à cet enfant ce qu’il vous
demande j obéiffez-lui tout à l’heure. Par ma fo i,
madame, répondit le valet, il pourroit crier juf-
qu a demain qu’il ne l'auroît pas. A ces mots, la
dame devint furieufe & prête à tomber en convulsions
y elle court, & paffant dans une falle où
étoit fon mari avec quelques-uns de fes amis, elle
Je prie de la fuivre , & de mettre dehors l'impudent
qui lui réfifte. Le mari , qui étoit auffi foible
pour fa femme, qu’elle l'étoit pour fon fils, la
luit en levant les épaules, & la compagnie fe met
la fenêtre, pour voir de quoi il étoit queftion.
Encyclopedinna.
Infolent, dit-il au valet, comment avez vous la
hardieffe de défobéir à madame, en refufant à
I enfant ce qu'il vous demande ? = En vérité,
monfieür, dft le valet, madame n'a qu’à le lui
donner elle-même -y il y a un.quart-d’heure qu’il a
vu la lune dans un fceau d'eau, & il veut que je
la lui donne. A ces paroles, la compagnie & le*
mari ne purent retenir de grands-éclats de rire $ la
dame elle-même, malgré fa colère, ne put s’empêcher
de rire auffi, & fut fi honteufe de cette
fcène , qu'elle fe corrigea , & parvint à faire un
aimable enfant de ce petit être mauffade & volontaire.
Bien des mères auroienj befoin d'une pareille
aventure.
ENFANS TRO U V É S . Tous les enfans trou-
vés en Efpagne font déclarés nobles & reconnus
pour tels; car, difent les efpagnols, il vaut
mieux reconnoître un enfant roturier gentilhomme,
que de rendre un gentilhomme roturier.
ENNUI. Des dames qui étoient dans, une af-
femblée où la converfation ne leur plaifoit pas 8c
ou 1 ou bailloit beaucoup, fe dirent l’une à l’autre*
il pleut ici de Y ennui à verfe.
J’ai toujours remarqué qu'on ne s*ennuye jamais
davantage qu’après les plaifirs : Y ennui qui
fait qu'on le^ recherche eft toujours plus fuppor-
table que celui qui les fuit.
Il y a des perfonnes qui craignent fi fort Y ennui
que là feule crainte de l'éprouver eft un ennui
pour elles.
Ce fommeil fatiguant de rame,
N é de la gêne & du loifir,
De nos jours ufe plus la trame
Que la douleur & le plaifir.
Desmahïs.
EN SEN AD A . Enfenada, miniftre d’Ëfpagne,
s’appeloit, de fon vrai nom , Zenofoma da Silva.
II paffa du comptoir d'un banquier à la place de
miniftre , & prit par modellie le nom à?Enfenada i
en fo i riejt.
ENTER R EM EN T . Un homme, abandonné
des médecins , fit venir un juré - crieur pour dif-
pofer fon enterrement. Après avoir examiné combien
il falloit pour la cire , combien pour la tenture
: Tene% , dit-il, je vous donnerai cinquante
écus , & je ne me mêlerai de rien.
Toute une famille affemblée pour un enterre-
ment, comme Je convoi fortoit, un laquais de la
maifon vint dire d'un air très-affligé : MeJ/ieurs ,
voila Monfieür qui fort.
- M . . . . avoit acheté une terre, où il fit bâtir,
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