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» ne pouvoir pas vous faluer quand je vous rencontre
». «. Que voulez-vous , madame, répondit
3» naïvement Y abbé s j’allume mon flambeau au fo-
» leil & je l’ éteins dans la boue ».
L 'abbé de . . . qui étoit fujet, faute de mémoire,
à refter court en chaire, venoit de fe faire peindre.
On trouva le portrait fort reffemblant, & quelqu’un
dit : Il n’y manque que la parole. Ne voyez-
vous ■ : pas , répartit auffi - tôt un railleur , que
M. Y abbé eft repréfenté prêchant ?
Dans un chapitre de province, un jeune abbé
fut tenté de fe aéguifer un foir pour aller au bal,
& fut affez foible pour fuccomber à la tentation.
Tous les chanoines en furent inftruits, & délibérèrent
fur la peine qu’ils dévoient infliger au coupable.
Ils s’en remirent après de longs débats, à
la décifion de leur doyen. « Meilleurs, dit-il à
» fes confrères : remettons - lui ces petites efca-
». pades , il s’en laffera comme nous ».
Un abbé fut mis à la baftîlle pour avoir paru longtemps
dans le monde fous des habits de femme.
Quelques avantures d’éclat le trahirent, &rla cour
informée de fa conduite , le fit enfermer. Il s’oc-
cupoit dans fa prifon à faire des vers malins, 8c
le plus fouverit contre les perfonnes les plus ref-
pedtables. Un de fes amis l’étant allé voir , lui
demanda à quoi il paffoit le temps ? A compofer
des chanfons , lui répondit le prifonnier , cela
m’amufe. Voulez-vous que je vous en dife une
que je fis hier. En même temps il lui chanta quelques
couplets , que fon ami trouva fi hardis qu’il
lui dit : Es-tu fou, mon cher abbé,. de compofer
de pareilles chanfons ? Crois-moi, change d’amu-
fement ? car tu pourrois bien t’en repentir.. . . Fi
donc , interrompit Yabbé, tu ny. penfespas. Qu'ai-je
d craindre ? Ne fuis -je pas payé d’avance.
Le roi François I jouant un jour à la paume
avec un abbé s fut tellement piqué d’un coup de
^renvoi, qu’il s’écria, dans fon impatience î h*abbé,
je te donne à tous les diablesj & moi, lire, je
vous donne à tous mes moines , qui font bien
d'autres compagnons.
« L 'abbé Brigalier avoit infruéhieufement dépenfé
beaucoup d’argënt pour être initié dans les myf-
tères de la magie? condamné à refter dans fon
ignorance, il prétendit à force d’adreffe au moins
pafler pour magicien. Un jour une dame de la cour
ui le Croyoit fort habile, ayant acheté une pièce
’ étoffe rouge pour une verte , s’adreffa à lu i, afin
qu’ïl fa changeât en la couleur qu’elle défîroit. Le
changement le fit fous les yeux de la dame, qui
ne s’apperçut pas de la fubftitution d’une autre
pièce T'étoffe, & qui par fes éloges commença la
réputation de Y abbé.
Mademioifelle de Montauban, dont cet abbé était
aumônier, fe plaifolt à tous fes tours, & en par-
ioit férieufement au comte des Chapelles, homme
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de beaucoup d’efprit, 8c très-peu crédule, qui,
• avant'que de croire ,-demandoit à voir. L’abbé fe
defendoit d’opérer , ce qu’il appelloit modefteinenc
1 fes merveilles, par rapport à 1 interdidion dont il
étoit menacé de la part de fon archevêque. Cette
excufe en effet très-valable^, piqua la curiofîté du
comte, qui promit le fecret le plus inviolable.
U abbé 3 d’accord avec mademoifelle de Montaubaft
pour tromper le comte, n’oppofoit plus qu’une
Foible réfîftance, lorfqu’une jeune demoifelle, auflï
du complot, entra dans la chambre toute en pleurs,
& a travers fesfànglots, proféra: mademoifelle,
je fuis défèfpérée, mon petit oifeau vient de mourir.
Eh bien , répondit mademoifelle de Montauban ;
il n’eft pas queftion de pleurer? ne voilà-t-il pas
monfîeur Y abbé qui le reffufcitera ? Il a déjà fait
des chofes auffi furprenantes. N ’a-t-il pas l’autre
jour changé un poulet en un coq d’inde ?
Uabbé Brigalier dit formellement qu’il n’en fe-
roit rien? & puis, ajouta-1-il,, eft-ce .qu’il eft
poflible de refiufciter un oifeau qui eft mort. Prefle
cependant par les deux dames , il promit de les contenter
, 8c demanda une urne pareille à celles où
les anciens confervoient les cendres des morts, 8c
comme il ne s’en trouva pas, il fe fervit d’une boîte
de confitures, après l’avoir fait fcrupuleufement
examiner par le comte des Chapelles. L’oifeaumort
fut placé dans la boîte, qui liée avec un ruban noir,
fut placée dans un petit tour qui répondoit dans
un couvent de religièufès avec lequel mademoifelle
de Montauban avoit communication par fà chambre.
On tourna le tour du côté des nones, qui,
d’intelligence, fubftituèrent une pareille boîte eft
il y avoit un oifeau vivant, & renvoyèrent l’ouverture
du tour du côté de mademoifelle de Moti-
tauban. 'L’abbé marmota quelques paroles, fit plu-
fîeurs lignes, ouvrit la boîte > & au grand étonnement
du comte, en laiffa envoler le petit oifeau.
Dès le foir même on fit au fbuper du roi l’hiftoire
de la réfurreftion du moineau, & le comte des
Chapelles attefta qu’il en avoit été le témoin.
L e même abbé Brigalier étant à Lyon, avoit
promis à plufieurs dames & des cavaliers de leur
faire voir le diable. Embarraffé pour tenir fa pro^
méfié, il rencontra un petit gueux, qu’il emmena
chez hii, & l’ayant habillé grotefquement , il le
plaça derrière un tableau qui repréfentoit.Ie diable.
La compagnie arrive, fe place, Yabbé commence
fes grotefqtres cérémonies, & lorfque la crainte
commence à s’emparer des vifagas , le petit diable
pouffe le tableau, faute à travers le quadre, fait
quelques tours dans la chambre 8c fe fauve à la
faveur d’une tapifierie par une porte dérobée. Longtemps
les fpe&ateurs ont cru avoir vu le diable ,
& tout Lyon afiuroît alors que Y abbé Brigalier avoit
un commerce intime avec le diable.
ABBESSE. Une àbbeffe étant curieufè de voir
madame la palatine de Bavière, abbejfe de Mair-
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buiffon. mais inquiète fur la çjrétëance & 'ƒ ra5? J
fit demander fi la droite lut.feroit donnée Depuis
que je fuisreligieufe , dit madame la Palatine,
- S ‘ ■ : la droite m if. ne cannois ni ni la gauche que pour
A B C . ou abécé ? c’ eft le livret contenant la
combinaifon des lettres de l’alphabet pour ap-
prendre à lire.
C ’eft, dans un autre fens, tout commencement
ou les premiers élémens d’une fcience , dune
affaire.
Remettre quelqu’un a Ta b c.j c’eft 1 obliger a recommencer
de nouveau ce qu’il a mal fait.
Renvoyer une perfonne a. l’a b c ? c eft la traiter
d’ignorante. ^
On a dit que f u i t d l la fcience de bien fies
gens qui s’en croient davantage.
Un prince ayant choifi pour fon bibliothécaire
un homme qui favoit à peine fon a. h. c. : C’eft ,
dit une femme de qualité , le férail du grand fei-
gneur quon a donné à garder h un eunuque.
ABCÈS. Un cardinal étoit réduit prefqu’ à l’extrémité
par un alc'cs à la gorge, qu’on ne pouvoit
crever. Un linge qui étoit dans fa chambre fe faifit
de fa calotte rouge qu’il mit fur fa tête, & fep ré-
fenta ainfi coëffé devant le cardinal, qui fit un fi
grand éclat de rire que l‘aids creva & qu’il guérit.
On raconte la même guérifon d’Erafme : il prit
tant de plaifir à la leéture des lettres connues fous
le titre Epiftofs obfcurorum virorum qu’ un rire fou
lui prit & lui fit crever un abcès fort dangereux
qu’il avoit au vifage. Bayle dit, à cette occafion,
que c'eft une des preuves du profit qu’on peut tirer
de la leâure.
A B D A L L A , jurifconfulte mufulman du VII*
fiècle ; il difoit qu’un dofteur devoit lailfet à fes
difciples quelque point de la loi à éclaircir, & qu’il
devoit fouvent répondre je ne fais point.
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» fente maintenant ». Abdalmalek fut auffi furpris
que troublé de ce difeours , 8c commanda fur
l’heure même que l’on démolit ce ,château pour
en détourner le mauvais augure.
A BDICAT IO N . Les abdications volontaires les
plus célèbres dans l’hiftoire moderne, font celles
de l’empereur Oharles-Quint, de Chriftine, reine
de Suède , de Philippe V , roi d’Efpagne', & d«
Viftor Amédée I I , roi de Sardaigne.
Lorfque Charles-Quint fit abdication de la couronne
d’Efpagne etL faveur de Philippe II. ^ Mon
» fils , lui dit l’empereur, je fais aujourd’hui une
» a&ion dont l’antiquité fournit peu d’exemples,
» je ne compte pas avoir dans la fuite beaucoup
» d’imitateurs ».
Dans ce moment Charles-Quint ne prévoyoit pas
qu’il fe repentiroit de cette a&ion, avant la fin de
l’année ? c’eft ce qui lui arriva.
A B D O L O N IM E . Abdolonime , dépendant
fort éloigné des anciens rois de Sidon, avoit
prefqu’oublié la noblefle de fon origine, il vivoit
ignoré, 8c cultivoit fon champ pour fournir à fa
fubfiftance. Après la défaite deStraton, Alexandre-
le-Grand avoit confié à Epheftion le foin de donner
à Sidon un nouveau fouverain. Deux fidoniers
après avoir refufé la couronne, vinrent trouver A l-
dolonime dans fa retraite ? dépouillez,lui dirent-ils,
ces vêtemens vils & groffiers, c’ eft vous qu’on
a choifi pour roi de Sidon? n’oubliez jamais que
c’eft votre indigence vertueufe qui vous a placé
fur le trône. Alexandre fit paroître le nouveau fouverain
chargé des marques de fa dignité. Je vou-
drois bien favoir, lui dit- il, comment vous avez
fupporté la pauvreté ? Plût aux dieux, lui répondit
Abdolonime , que je puiffe porter la couronne avec
autant de force que j’ai fupporté la misère : mon
induftrie laborieufe a fourni à tous mes befoins ?
8c tant que je n’ ai rien poffédé, j’ai trouvé l’abondance
dans la modération de mes defirs.
L’ hiftoire gardé le filence fur la manière dont
Abdolonime régna fur fes fujets.
ABDALMALEK. Le califc Abdalmalek, fils
de Mahomet , étendit fon empire vers le midi ,
en fe rendant maître de la Mecque, où Abdalla.
fils de Zobaïr, s’étoit cantonné, 8c défit enfuite
Mafaab , frère du même Abdalla. Il étoit dans!le!
château de Coufa , lorfqu’on lui apporta la tête
de Mafaab , qui avoit été défait oc tué par fes
troupes. Un de ceux qui étoient près de fa personne
, lui dit alors : c« Je fais maintenant ré-
» flexion à une aventure qui me paroît fort fin-
» gulière ? c’eft que j’ai vu apporter dans ce même
33 château la tête d’Houflain, fils d’A li, à Ob-
» cidallah qui 1 avoit défait ? celle d’Obcidallah à
» Mokhtar fon vainqueur ? celle de Mokhtar à
» Mafaab, & celle de 'Mafaab qu’ on yqus pré-
ABEILLE. (Gafpard) , né à Riez en Provence
eh 1648, mort à Paris en 1718. Cet abbé compofa
des tragédies , des comédies, & des opéra ? des1
odes, des épîtres , mais rien n’ eft refté de fes ouvrages
que ce vers qu’une prir.crife difoit à une
autre, dans la tragédie d’Argelie-.
Vous fouvient - i l , ma feeur ^ du feu roi notre père?
CommeTaétrice héfitoît à répliquer, il s’éleva
une voix du parterre qui’ répondit pour elle :
Ma foi3 s’il m’en fouvient, il ne m’en fouvient guère„
On en peut dire autant de toutes les pièces. Le
principaf talent de Yàbbé Abeille étoit d’amufeu fes