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pendant cet intervalle* une lettre par laquelle oft
îui donnoit avis de fe défier de Philippe comme
d'un traître* à qui Darius avoit promis mille talens
& fa foeur en mariage. Quelle fituation pour un
prince malade ! Alexandre cependant n'en parut
point troublé 5 mais après avoir reçu entre fes mains
J e breuvage* il préfente la lettre à fon médecin j
& les yeux attachés fur lui * il yuide la coupe fans
Ce troubler. Le remède agit fi puiffamment fur le
malade * qu’il perdit d'abord connoiffance, & qu'on
eut tout lieu de foupçonner du poifonj mais une
guérifon prompte & en quelque forte miraculeufe,
fendit bientôt Alexandre plein de force & de fanté
à fon armée.
Avant la bataille d’Arbelles * fi fatale à l'empire de
Perfe, Darius avoit fait offrir une partie de fes états
& fon alliance à Alexandre * I'avertiffant de fe défier
des caprices de la fortune. Parménion confulté fur
ces propofitions * répondit qu’L les accepterait * j ' z ï
étoit Alexandre : & moi * fi. j'étqis Parménion * lui
fépartit le conquérant.
La mort du malheureux Darius maffacré inhumainement
par fes perfides fiijets * fit verfer à
Alexandre des larmes fmcères-, quoiqu'elle le rendît
fnaître de tous fes états. Il auroit pu borner là fes
conquêtes $ mais fa paffion toujours plus ardente
pour la gloire l'entraîna vers les Indes * où il défit
i^orus , le plus grand & le plus vaillant roi de ce
pays. C e prince , en préfence de fon vainqueur *
ne perdit rien de fa fierté. Comment, lui demanda
Alexandre * veux - tu que je te- traite ? ■>-— En roi.
Charmé de cette réponfè, le conquérant ordonna
qu'on prît grand foin du roi vaincu* lui rendit
'fon royaume * & l’aggrandit par fes nouvelles conquêtes.
Un macédonien conduifoit un mulet chargé d'or
pour Alexandre. Le mulet était fi fatigué * qu'il
ne pouvait plus ni marcher* ni fe foutenir. Le
muletier prenant alors la charge * la porta avec
beaucoup de peinp un affez long efpace de chemin.
L e roi qui le vit accablé fous le poids * lui dit :
s* Prends courage, mon ami * & porte cette charge
9» chez, çoj* car je te la donne ».
C® prince * dans le cours de fes conquêtes * envoya
fouvent des préfens magnifiques à Olympias
fa mère qui étoit reftéeen Macédoine» mais il ne
voulut jamais fouffrfc qu'elle fe mêlât des affaires
du gouvernement. Cette princeffe s’en plaignoit
èn des termes fort durs contre fon fils * & cherchent
toutes les occafions de mortifier ceux auxquels
Alexandre avoit donné fa confiance. Antidater
ayant écrit un jour à ce prince une longue
lettre où il dévoilait les intrigues d'Olympias* le
roi * après l'avoir lue* fe contenta de dire : « An-
» tip^ter ignore qu'une feule larme d’une jïiçre
efface dix mille lettres comme celle-là,
Alexandre-le -grand ^ invinçibfe çn tout ce qu'il
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entreprenoit * étant en fon voyage de la conquête
des Indes j Taxiles* un des rois du pays, vin J
au-devant de lu i,Je priant qu'ils n'euffent point dc|
guerre enfemble : fi tu es * lui dit ce prince, moindre
que moi * reçois des bienfaits de moi : & fi tu es
plus grand • que j'en reçoive de toi. Alexandre ad.
mirant & louant fort la façon grave* jointe à |J
êourtoifie de cet Indien * lui répondit : pour le"
moins * faut-il que. nous combattions tous deuil
de cela* à favoir lequel de nous deux fera plus de;
bien à fon compagnon ; tant ce généreux monarque
eût été martyr de céder à un autre en bonté,'
douceur & courtoifie.
PlutarqutM
«* O ! Athéniens * fi vous faviez ce que je fouffrJ
» pour être loué de vous * difoit Alexandre « ! I
Xenocrates* philofophe* refufa d'Alexandre trenttf
mille éeus qu il lui avoit envoyé* en don *. difanta
qu'il n'en avoit pas affaire. Comment * répliquai
Alexandre * n'a-t-il pas. un ami. Quant à moi* les|
richeffes de Darius me peuvent à peine fuffire à
départir entre mes amis.
Comme fes courtifans l'animoient contre un homè
me qui blâmoit toutes fes allions * il fe contenta de|
dire : cefi le fon des rois d'être blâmés * meme quant :
lie fe condiùfent le mieux.
On dit à Alexandre que plufîeurs de fes foldatil
avçient fait le complot de s'empâter de ce qu'ili
trouveroient de plus riche dans les dépouilles des|
perfes : tant mieux 3 dit - il * ctfi une preuve qu'm
ont envie de fe bien battre.
Alexandre étant à l'article de la mort* fes do|
meftiques * après avoir reçu fes derniers ordres,!
lui demandèrent où étoient fes tréfors ? « V qus les!
» prouverez * leur dit-il * daps la bourfe de mes
» amis ».
Je lai fie , dit-il * mon empire au plus digne *
je prévois que mes meilleurs amis célébreront mil
funérailles les armes a la main.
Alexandre - le - Grand mourut à Babylone * 1^
l'âge de trente ans ou environ, après en avoir,.-
*égné treize. Il avoit fait un fi grand nombre (kg
conquîtes * que l’on difoit communément qu'il en|
avoit fait plus que de pas. C e prince pleuroit fouv_
vent * lorfqu'il entepdoit dire qu'il y avoit encore
plufieurs mondes * & qp'il n’avoit pas pu achevej
d'en conquérir un feul.
Alexandre étoit l'ami des arts & le proteéteu?
de ceux qui les cultivoient $ il donna pris de deux
millions à Ariftote , pour faciliter fes expérience^
phyfiques. Son fiècle vit fleurir les Diogène , le* ,
ryrrhon * les Protog|ne * les Apejïe* les Praxis
telle * les Lyfippe. Staturate * fameux architecte,
propofa à ce héros de » tailler le mont Atos en
forme humaine * & d'en faire, une ftatue où il P l i
été tepréfçnté pottaot dans \mç main une ville
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peuplée, de dix miüe habitans, & dans l’autre un
fleuve dépofant fes eaux à la mer.
La Motte a fait fut Alexandre les vers fai-
vans.
ÎL Le fameux vainqueur de l’Afie
I" N’étôit qu’un voyageur armé,
I Qui, pour pafler fa fantaifié,
Voiilut voir en mourant l’univers alarmé :
De bonnerheure Ariftote. auroit dû le convaincre
Que le grand art des rois eft celui de régner.
Il perdit tout fon temps à vaincre,
Et n’en eut pas pour gouverner.
: ALEXANDRE SÉVÈRE * empereur romain *
fut le fucceffeur d'Héliogabale. ||
, Alexandre ne fouffrit jamais que lés offices qui
donnoient pouvoir & jurifdiction fuffent vendus j
»» c'eft une néceffité* difoit-il * que celui qui acheté
*> e*» gros* vende en détail».
c« Un certain Vetronius Turinus s'étoit infinue
dans les bonnes grâces de l'empereur. Il en abufa
pour mettre à contribution tous ceux qui follici-' :
tôient des places ou des penfions. Souvent même
il fe faifoit payer pour des fervices qu'il n’avoit
pas rendus. Dans les procès il lui-étoit très-ordinaire
de recevoir de l'argent des deux parties.
Alexandre 3 inftruit de cet odieux manège , ne crut
pas indigne de fon rang de tendre un piège, à l'avidité
de cet infidèle miniftre * pour acquérir contre
lui une preuve évidente & palpable * Quelqu'un
* de concert avec l'empereur * demanda publiquement
une grâce î il implora fècrètemént
l'appui de Turinus. Celui-ci promit de parler de
l'affaire, & n’en fit rien. La grâce ayant été obtenue*
Turinus prétendit qu'on lui en avoit obii-
gayon * & il exigea une certaine fomme qui lui
fût comptée en préfence de témoins. Alors l'empereur
le fit accufer. Turinus ne put fe défendre *
ni dàfconvenir d'un crime prouvé par le témoignage
de ceux mêmes qui étoient intervenus dans
la négociation. Comme Alexandre vouloir en faire
un. exemple*, il adminiftra encore aux juges la
preuve d'un grand nombre de trafics également
odieux , dont l’accufé s’étoit rendu coupable , &
qui étoient demeurés inconnus , parce que l'on
n'avoit ofé attaquer un homme dont le crédit ef-
frayoit. Après ces éclairciffemens , Alexandre
compta que fa févérité ne pouvoit être blâmée :
& pour proportionner le fupplice au crime * il ordonna
que Turinus feroit attaché dans la place
publique à un poteau , au pied duquel on amaffe-
roit dubois verd & humide* qui * étant allumé, ne.
pouvoit produire que beaucoup de fumée. Turi-
rçus mourut ainfi. étouffé;* pendant que le; crieur
public répétait à diverfes reprifes & à haute voix
çes paroles : «Celui qui a vendu de la fumée eft
puni parla fumée »,
Encyclopédiana%
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C et empereur aimoit la fociété des gens d'efprit
& des favans : pourquoi ne me demandez-vous rien ,
leur difoit-il * aimez-vous mieux vous plaindre en fe-
cret que.de m avoir obligation ?
Alexandre vivoit avec fimpîicité * & fa maxime
étoit que la majefiê de l'empire fe foutient par la.
vertu * & nonj>ar une vaine oftentation.
1 ALLUSION. C e mot formé du latin * ad ludere,
\jouer fur * eft effectivement un jeu de penfées ou
1 de mots.
Un abbé de qualité repréfentoit au père de la.
Çhaife * qui avoit la feuille des bénéfices * que depuis
long-temps il lui demandoit un bénéfice :
Votre heure n'eft pas encore venue* lui dit ce
» Jéfuite., Elle viendra *'lui répartit l’abbé * quand
» il vous plaira* car vous gouvernez le foîeü ». On
fait que le foleil étoit l’emblème de Louis X IV .
Un autre abbé gafeon demandoit depuis long-
téms un bénéfice au même père de la CHaife. Un
jour que ce bôn prêtre fe promenoir appuyé fur fa
canne, fuivant fa coütume-, l ’abbé vint l'aborder
* &!e fbi!ieita de nouveaù. Le jéfuite qui l'avoit
âeurré depuis longrtems de belles efpérances * lui
annonça qu’il n’y avoit rien à faire pour lui. Ah!
mon père *-répartit auffi-tôt l’abbé dans fon accent
gafeon , j ai été un grand fot de me fier à
vos prÔmefies* & ma mère avoit bien raifen de.
me dire qu'il ne falloit jamais s'affeoir fur une
clniie qui n'avoit que «trois pieds. Le gafeon fâi-
'; foie aÜufion, comme l’on voir * au nom du jéfuite,
& à la néceffité où il étoit de s’appuyer fur une
canne.
Quoi s! fille de David , vous parlez à ce traître ?
C e vers fut appliqué à la Balicourt qui caufoit ’
avec M. d‘e> Thibouville dans le foyer de la comédie
* avant de jouer Athalie * où elle faifoit le
rôle de Jofabet.
Madame la ducheffe de Modène* fille de M. lé
duc d’Orléans, régent * étant venue à Paris après
un long féjour en Italie, affifta * en arrivant *.
à une des repréfentations de Jephté * opéra qui
étoit alors dans fa nouveauté. Le public * enchanté
dé la revoir’, témoigna fa joie par les plus vifs ap-
'plaudiffemens, auxquels la princeffe parut infini-
ment fenfible. Les acclamations redoublèrent j &
la, princeffe laiffa couler des larmes de joie , lorf-
qu’on prononça ces mots, qui -faifoient allùfion
aux bords de la Seine où elle avoit pris naifftnee.
Rivages’du Jourdain où le ciel m ’a fait naSrre, &c.
La reine * monfieur, madame * & M. le comte
d’Artois opt honoré , le • ï 3 Janvier 177^* l'opéra
de leur préfence. Gn jouoir Iphigénie* deM^Gluck.
I Au divertiffement du fécond aéte * quand Achille,