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fous lèfquëls font compris tous les autres, le froment
, le riz , le millet , la fève 8c une autre ef-
pàce de mill qu’on appelle Cac-leang.
C e furent là les préparatifs : le vingt-quatrième
jour de la lune fâ majefté fe rendit avec toute la
cour en habit de cérémonie , au lieu deftiné à
offrir au Chang-ti le facrifiee du printemps , par
leqiiel on le pri^de faire croître & de conferver
les biens doÆterre. C ’èft pour cela qu’il l’offre
avant que de mettre la main à la charrue.
L’empereur faerifia , & après le facrifiee il descendit
arec les trois princes & les neuf préfidens
qui dévoient labourer avec lui. Plufieurs grands
feigneurs portoient eux-mêmes les coffres précieux
qui renfermoient les grains qu’on devoit femer j
toute la cour y affifta en grand filence. L ’empereur
prit la charrue & fit 3 en labourant 3 plufieurs allées
& venues : lorfqu’il quitta la charsie , un prince
du fa&g la conduifît & laboura à fon tour , ainfî
du refte...
Après avoir labouré en différens endroits , l’empereur
fema les différens grains. On ne laboure
pas alors tout le champ entier 3 mais les jours fui-
vans les laboureurs de prôfeffion achèvent de le
labourer.
^ Il y avoit. cette année là quarante-quatre anciens
laboureurs 3 8c quarante-deux plus jeunes.
La cérémonie fe termina par une récompenfe que
Tempereur leur fit donner.
A cette relation d’une cérémonie qui eft la plus
belle de toutes 3 puifqu’elle eft la plus_i.!tile 3 il faut i
joindre un édit au même empereur Yont-Chin.
Il accorde des récompenfes 8c des honneurs à quiconque
défrichera des terreins incultes 3 depuis
quinze arpens jufques à vingt vers la Tartarie ; car
il n’y en a point d’incultes dans la Chine proprement
dite 3 8c celui qui en défriche quatre-vingt
devient mandarin du huitième ordre.
Que doivent faire nos fouverains d’Europe en
apprenant de tels exemples? admirer & rougir3
lùais fur-tout imiter. Voitaire.
AGRIPPINE fit mourir l’empereur Claude fon
époux, 8c affura l’empire à Néron fon fils. Comme
on lui difoit que ce monftre lui donneroit la mort j
n importe 3 dit cette mère ambitieufe, pourvu qu il
régné. Néron la fit maffacrer dans fa chambre3
l ’an 59 de J. C . Comme un centurion lui portoit un
coup fur la tête : frappe plutôt ee fein , lui dit
Agrippine 3 puifquil a. donné le jour à Néron.
AGUERRE 3 comteffe de Sault. Elle fut réfifter
au duc de Savoie, qui vint la trouver à Aix.
Elle entend, un des conjurés envoyés par ce duc,
qui dit à fes camarades : Que n’exécutons - nous
notre ordre ? Trappeç 3 leur dit la Comteffe 3 je n’ai
pas le coeur ajfes^ bas pour demadderla vie-, 8ç sa*-
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dreffant à des magiftrats qui s’approchoient : &
. vous , pères de la patrie 3 leur dit - elle , vous,
dépofitaires de tautorité fupreme, vous foujfre£ quun
audacieux s’élève un trône au milieu de la Provence!
Cependant les affaffins â’ibord interdits la chargent
de fers. Alors elle feint d’être malade , & fe met
dans un lit. Une femme de fa fuite trouve le moment
de prendre fa place,. & trompant les gardes
par fes plaintes , elle donne le temps à la comteffe
de fe déguifer en favoyard avec une barbe longue,
toufue 3 & de s’évader avec fon fils habillé en
payfan. Les marfeillois la reçurent & la défendirent.
AIGUILLES difcriminales. Les modes chan-
geoient à Rome moins fréquemment que parmi
nous. Les aiguilles difcriminales fervirent, pendant
long-temps , à diftinguer lès femmes mariées d’avec
les filles. Celles - ci portoient leurs cheveux frifés
fur le front, lès femmes au contraire les féparoient
fur le devant de la tête , 8c les aiguilles difcriminales
fer voient à cette féparation.
A JM A N T . Un grand médecin , auffi très-habile
en chirurgie , fut un jour appellé chez un malade
qui s’étoit fait entrer une paille de fer dans l’oeil.
Elle étoit fi petite 3 que les inftrumens les plus fins
n’y pr 'noient point : le médecin défeîpéroit de pouvoir
réùflir. Sa femme ne put voir fon embarras
fans rir€. Elle voulut parier avec lui , qu’elle afloit
fur le champ guérir le malade. Fabrice Hildan >
car c’eft lui-même qui eft ici l’aéteur & l’hiftorien 3
fut furpris de çette promeffe. Ils vont enfemblé
chez le malade 3 qu’ils trouvèrent très- inquiet &
très -fouffrant. La nouvelle Agnodice ne s’en épouvante
point : elle dit à fon mari qu’il ouvre l’oeil 3
8c ait foin de tenir les paupières écartées. Alors
elle tire de fa poche fon inftrument : c’étoit. un
aimant bien monté 3 qu’ elle promène le plus près
qu’ elle peut de laffurrace de l’oeil : on vit , quelques
inftans après , la paillette de fer s’ élancer vers
l’aimant. On devine bien que l’opératrice ne. refta
pas muette. Pour Fabrice, il avoua que. fans fa
femme il n’auroit pas eu la moindre idée de cette
heureufè reffource î & tous furent contens. ( Fabr.
Hildanus 3 cent. c. ).
AISANCE. Où règne une aifànce' honnête 3
fruit du travail 8c de rinduftrie, là foi ordinairement
les bonnes moeurs.
A J U S T E M E N S . A Surate, ville des Indes
Orientales 3 les danfeufes , qui font des filles dévouées
au public 3 8c qui font voeu de débauche 3
ce qu’ elles obfervent très-régulièrement 3 ont un
ajuftement particulier.
C ’eft une efpèce de corfet 3 pour conferver leur
fein 3 qui Contribue beaucoup à leur beauté. Elles
l’enferment dans des étuis faits exprès d’un bois
très-léger j joints enfemble, & bouclés par derrière
, ce qui contient leqr fein , 8c l’empêche de
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groffir , & cependant les étuis font fi polis, fi bril-
lans & fi élastiques 3 qu’ils fe prêtent à tous les
Hiouvemens du corps 3 fans applatir ni offenfer le
tiffu tendre de la chair. Es font couverts d une
feuille d’or ou d’argent doré j elles y ajoutent des
diamans , fuivant leur faculté , & cet ajuftement eft
une des parties les plus magnifiques -de leur toilette.
ALARIC l 3 roi dés- goths, mort vers l’an 420.
Ilfréduifît Rome à l’extrémité. Je feus en moi 3
difoit-il, que'que chojè qui m'excite a mettre Rome
en cendres. Il fe laiffa pourtant toucher par les
prières des romains , en exigeant d’eux tout ce
qu’ils avoient de plus précieux, 8c comme ils lui
demandèrent ce qu’il vouloit leur laiffer : fH.la vie.
, ALB ANE. François l’Album étoit né à Bologne
en 1 578. Il eut pour fécondé éponfe, une femme
,d3une grande beauté dont il eut douze enfans
auffi beaux que leur mère. L’ étude des belles-lettres
avpit contribué à lui donner des idées agréables 3
8c pour peindre Vénus & les amours, il n’eut qu’à
copier fa famille. On a reproché à ce peintre, plein
de grâces, de charmes 8c d’enjouement, que les
têtes'de fes tableaux fe reffembloient prefque toutes,
nous venons d’en dire la caufe. Albane jouit pendant
quatre-vingt deux ans d’une vie heureufe, &
mourut en 1666.
, A LB E , ( Ferdinand Alvarez de Tolède, duc
HI général efpagnol, né en 1508, mort en 1 j8 i.
Lés gantois s’ étant révoltés en 1 $-39, l’empereur
Charles-Quint délibéra fur le traitement qu’il fe-
roit aux rebelles, & voulut favoir le fentiment du
duc d’Albe. L’inflexible duc répondit : qu’une ville
rebelle devoit être ruinée. L’empereur , fur cette rés.
porïfe, lui ordonna de monter au haut d’une tour,
pour qu’il pût voir de là la grandeur de Gand. Lorfqu’il
en fut defeendu, Charles-Quint lui demanda
combien- il croyait qu’il fallut-de peaux d’Ffpagne
pour faire un gand de cette grandeur. Le duc , qui
s’apperçut qu’on a-voit été bleffé de fa févérité ,
garda le filence.
Lors de la journée dé Mulberg en 1547, le duc
ÜAlbe fit des prodiges de valeur. Quelques hif-
toriens ont dit qu’il parut pendant l’aélion un phénomène
fingulier dans le ciel. Le roi de France,
Henri I I , ayant demandé au duc à’Albe la vérité
du. faitj é>ire3\m répondit le général Efpagnol en
riant : j ’étois f i occupé de ce qui ƒè 'pa jfoit fur ta terre,
que je n ai pas remarqué ce qui paroi jfoit au cie .
- En 1^68 , les habitans des Eays-Bas., aieris de
ce .qü’ôn, atteiitoit continuellement à leur liberté
& de cé qu’on vouloit -gêner leurs opinions , pa-
roiffoient difpofés à prendre les armes. î hilippe ïî
roi d’Efpagne, envoya le duc &’AP è pour les'con*
tenir. Ce choix annonça les plus erandes barbaries.
Dom Carlôs, fils de Philippe , en fut fiperfuadé’
qu i! dit en colère & le poignard à la inain, à ce
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général : « je te porterai ce fer dans le fein, plutôt
» que de fouffrir que tu ailles, comme un ennemi,
« ruiner des provinces qui me font fi chères «. Il
fe jetta en même temps fur le duc, qui ne parvint
que difficilement à fauver fes jours.
-Lès premières démarches du duc à’Albe confirmèrent
l’opinion qu’on avdit de lui. Il fit périr fur
un échaftaud les comtes d’Bgmond & de Hornes.
Comme quelques pérfonnes lui paroiffoient étonnées
de ce qu’il avoif fait tomber fa févérité fur
les têtes les plus illüftrés , il leur dit : que peu de
têtes de faumons valent mieux que plufieurs milliers
de grenouilles-,
Après la prife de Harlem en 1 573 , le duc à!Albe
. quitta les Pays-Bas. Il y avoit commencé fon ad-
miniftration en faifant conftruire à Anvers une citadelle
qui avoit cinq baftionS. Par une vanité juf-
qu’alors inconnue, il en avoit nommé quatre de
fort nom & de fes qualités, le Duc, Ferdinand,
Tolede, d’Albe. On donna au cinquième le nom
de l’Ingénieur. Il n’y étoit fait nulle mention du
roi d’Efpagne. Loffque cette citadelle fut achevée.,
l’orgueiileux duc , qui avoit remporté de grands
avantages fur les confédérés, y fit placer fa ftatue.
Il étoit repréfenté avec un air menaçant, le bras
droit étendu fur la ville. A fes pieds étoientla no-
bleffe 8c le peuple, qui profternés , fembloient lui
demander grâce. Ces deux ftatues allégoriques
avoient des écuelies pendues aux oreilles & ^es
bèfaces au cou , pour rappeller le nom de gueux
qu’on avoir donné aux mécontens. Elles étoient en-
toürées de ferpens, de Couleuvres & d’autres fym-
boles qui défignoient la fauffeté, la malice 8c l’avarice,
vices reprochés par les Efpagnols, aux vaincus.
Toutes les figures, ainfi que le piédeftal, étoient
de bronze, & l’on s’étoit fervi pour ériger ce monument
, dés - canons vqüi avoient été pris à la bataille
de Gemmingen. On lifoit au-devant du piédeftal
, cette infeription faftueufe : « A la gloire
» de Ferdinand Alvarez de Tolede , duc d’AIbe,
33 gouverneur "général de la Flandre, pour le rai
d’Efpagne : pour avoir éteint les féditions , chaffé
33 les îebelles, mis en sûreté la religion , fait ob-
33 ferver la juftic.e, & affermi la paix dans ces pro-
?= vinces ».
ALBFRONI. Ju'es-Alberoni j né à Plaifance en
1 (3Ô4, d’un p,ère; jardiniercultiva comme lui la
terre, jufau’a* l’âge de quatorze ans. La première
place qu’il obtint fut celle de clerc-fonneur à la
cathédrale de Flaifance. On le fit prêtre. Son évêque
lui donna l’ intendance de fa maifon & un ca-
nonicat dans fon églife. .Quelques — temps après
avTnt obtenu un bénéfice plus confidérable, le
poète Càmpiftron, qui avoit été volé , fe réfugia
chez lui. Al>é’'oni l’accueillit avec beaucoup d’humanité,
l’habilla, &lui prêta même de l’argent pour
aller à Rome. C e petit événement fut Foriginé de
fa fortune. Càmpiftron, Secrétaire du duc de y en*