enthoufiaftes d’Ariftote » il cite encore , dans fes t
dialogues , un célèbre profefleur de philofophie, j
qui ayant entendu la description du télefcope,
u’ii n’avoic jamais v u , ne Ht pas difficulté de
ire que l'idée en étoit prife d’Ariftote ; & fur le
champ ce profefleur produifit le livre, & montra
un endroit où cet ancien philofophe explique
pourquoi Ton apperçoit du fond d'un puits les
étoiles en plein jour. Le profefleur difoit aux
affiftans : « Voyez-vous ici le puits, c'eft le tube
» du télefcope. Les vapeurs groffières ont fourni
•» l'invention des verres. Ici la vue eft fortifiée,
» parce que les rayons font plus épais & plus
w obfcurs, en panant par les verres»». Galilée
comparoit ces fortes de gens aux alchymiftes, qui
s’imaginent que les anciens ont connu le fecret
défaire de l'or , & qu’ilell caché fous l’enveloppe
des fables & des fixions des poètes.
Galilée foutint, contre l'opinion du philofophe
g re c , que les vîteffes du corps étoient proportionnelles
au poids. Il chercha d’abord à détruire
cet axiome de l'ancienne philofophie, par le
raifonnement } mais que pouvoient opérer les
meilleurs raifonnemens fur des efprits prévenus ?
Galilée eut recours à une expérience qu'il n’étoit (
pas poffible de démentir en préfence des perfonnes .
les plus diftinguées de Pife, où il étoit profefleur}
il laifla tomber du dôme de L’églife des corps de
pefanteur très-inégale, mais prefque de même
volume, & tout le monde vit qu'il n’y avoit prefque
pas de différence au temps de leur cnûte. D ’ autres
expériences, & principalement celle qu’il fit fur
deux pendules de même longueur, & chargées de
poids très-inégaux . qui faifoient leurs vibrations
prefque dans le même temps , le mirent en droit
de conclure que la différence de la chûte des corps
dépend de la réfiftance de l’air, & en général du
milieu dans lequel ils tombent. Ainfi les corps en
tombant dans le vuïde, quoique de pefanteur très-
inégale, doivent tomber en temps égaux. Pour
récompenfer Galilée de toute cette belle théorie,
on le chaffa de Pife & de Padoue où il s’étoit
retiré. Il paroiffoit un peu dur à tous les vieux
doàeurs de ces univerfités, d'avouer, fur la fin
de leurs jours, qu'ils étoient des ignorans.
fe difoient-Hs à eux-mêmes, en fait plus que
nous : donc il nous méprifej & ce fut le motif
de toutes les perfécutions que Ton fufeita contre
lui.
Comme les partifans d’Ariftote défefpéroient de
pouvoir combattre avec avantage un homme qui
avoit pour lui l’expérience & la force du raifonnement,
ils cherchèrent à le traduire à un tribunal
où l'on ne raifonne pas. On le déféra à l’inqui-
(îtion de Rome en 1 6 1^ GaliléeXôutenoh, d’après
Copernic, le mouvement de la terre autour du
foleil. Mais dès l’an i 6 u , le tribunal de l'inquifi-
tion avoit rendu un décret contre le fyftême de
Copernic, abfolumcnt contraire, fçlon ce tribun
a l, à la faune écriture. Galilée, dont on n6
pouvoit s'empêcher de refpeéter les talens, reçut
d'abord un ordre de ne plus foutenir fon fyfiême,
ni de vive voix, ni par écrit. On lui fit même
promettre quM n’y penferoit plus} Galilée promit
tout, & ne fint r en. II publia en 1651 des dia-«
logues pour écabï r que le foleil étoit fixe au milieu
des planètes, & que la terre, ainfi que les autres
planètes, fasfoic fa révolution autour du foleil,
deux vérités reconnues aujourd’hui comme incon-
teflables. L'inquifition le cita de nouveau. On lui
rappella fes pfomeffes. Il répondit d'abord avec
fermeté} mais fon courage fembla l'abandonner
lorfqu'il fe vit condamné par un décret du i z
juin 165 5 , ligné par fept cardinaux. Le décret
portait qu'il, feroit emprifonné, & qu'il réciteroit
les fept pfeaumes pénitentiaux une fois chaque
femaine pendant trois ans, comme relaps & coupable
d'avoir enfeigné un fyfiême abfurde& faux
en bonne philofophie , & erroné dans là f o i , en tant
quil eft abfolument contraire a la fainte écriture.
Galilée eut la foiblefle de fe fôumetttre à ce
jugement ridicule , & les genoux en terre il demanda
pardon à ï’âge de 70 ans d’avoir foutenu
une vérité, & l'abjura, les mains fur l'évangile ,
comme une abfurdité , une erreur , & une heréfe9
Au moment qu'il fe releva, agité par le remords
, d’avoir fait un faux ferment, les yeux baiffés vers
la terre, il dit en la frappant du pied : Cependant
elle remue, épur Jimove•
Les cardinaux inquifiteurs, contens d'avoir humilié
un fi grand homme, voulurent bien lui pet*
metttre de relier dans les états du duc de Florence,
où il eut en quelque forte pour prifonla
petite ville d’Arcetri, & for. territoire. Sa vieilleffe
fut affligée par une autre dilgrace ; il perdit la vue
trois ans avant fa mort. Les ouvrages de cet
homme célèbre ont été recueillis à Florence en
1718 , en trois volumes in-4*. Il avoit laiffé plu*
fieurs manuferits que fa femme abanndonna a la
| diferétion d'un moine ignorant, fon confefleur,
qui les livra aux flammes.
GARDES-MALADES.
La ville d’Aix-la-Chapelle offre un erablifle-
ment dont les autres villes pourroient profiter.
On y voit un couvent de religieux nommés
Alexiens » fondé exprès, afin de fournir aux bourgeois
de cette ville des gardes-malades dans leurs
maladies. Il y a un autre couvent pareil de reli-
gieufes, deftinées au même fervice pour les per*
fennes de leur fexe. De tels établifferaens feroient
très utiles à Paris} mais il ne faudroit pas qüè
ces gardes-malades paffaffent les bornes de leur
état, & né fe mêlanent pas, comme font la plupart
d'aujourd'hui, de changer les remèdes des
médecins, & d’en ordonner ae leur chef, qui le
plusfgùyen;fonttrès-nÿifiWes. T -,
GARJaIOK g
GARRTCÎC, ('David) célèbreaéleurangions,
né en 17 18 , mort en 1779.
Pour bien entendre l'anecdote qui fuit, il faut
fe repréfenter Garrick comme l’aéteur le plus
étonnant de fon fiècle, par la facilité avec laquelle
il favoit arranger & décompofer les mufcles de
fon vifage, & faire prendre à fa phifîonomîe le
caractère propre au rôle qu’il vouloic rendre.
Lorfque feu Néricault Deftouches fut envoyé à
Londres par la cour de France, il y vit Garrick,
alors fort jeune, qui, dans une pièce, rempliffoit
le perfonnage d’ un vieillard de 90 ans} & ce célèbre
poète fut tellement frappé de la vérité de
fon jeu, 8c du ton de caducité qu’il avoit fu donner
à l'enfemble de fes traits, que, caufant avec
lui dans fa loge après la repréfentation, il ne-
pouvoit encore fe perfuader que c’étoit le même
aéteur qu’il venoit d’admirer fur la fcène.
Le comédien Garrick & le peintre Hogarth,
étoient tous deux intimes amis du célèbre Fielding :
ce dernier venoit de mourir, fans qu’il eût été
poflible de l’engager à permettre qu’on fît fon
portrait. Peu de temps après fa mort, on publia
une édition complette de fes oeuvres. Hogarth eft
le premier à regretter que le portrait de fauteur
n’en orne pas le frontifpice, & fait part à Garrick
de fon chagrin à ce fujét. Celui-ci, le lendemain,
entre dans l’attelier de fon ami, au moment de
fes plus fortes occupations. « Je viens d'imaginer,
»» lui dit-il, quelques fituations théâtrales que je
»» voudrois effayer : indiquez-moi un endroit où -
« je puiffe me recueillir ««. Hogarth, fans fe déranger
de fon travail, lui montre de la main une
petite pièce dont la porte donne dans l’attelier.
Garrick y entre, ôc le peintre continue fon ouvrage.
Quelques înftans après, ce dernier entend
une voix qui prononce diftin&ement, Hogarth..;.
D ’abord il y fait peu d’attention} mais la même
voix fe faifant entendre pour la fécondé fois, il
friffonne involontairement. Ilne croit certainement
pas aux rèvenans.... toutefois, il ne peut fe diffi-
muler que c'eft le fon de la voix de feu Fielding
qui vient de frapper fes oreilles, La frayeur le fai-
fit, & fes rapides réflexions, qui fe fuceèdent les
unes aux autres,'ne peuvent le raffurer. Enfin,
une troifième fois, la même voix articule avec
force : «« Hogarth, . . . . n'es-tu pas las de me faire
» attendre? Prends tes crayons} viens ic i} je n'ai
* que .quelques inftans à te donner »>. Le trouble
qui .agite Hogarth confond fes idées : il oublie
que c'eft dans ce cabinet- qu’il a relégué Garrick.
11 prend les crayons & vole avec précipitation
ou ces accens l’appelent. Quel prodige! C ’eft
Fielding qu’il voit : ce font fes traits, fon air, fa
coeffure, fa démarche}.en un mot, c'eft fon ami.
Hogarth étonné, effrayé, intéreffé, ému, déffine
a la hâte : le peintre s’applaudit de là vraifem-
blance. Il ne fort dé fon erreur que quand l’ouvrage
achève , il échappe ap comédien un-éclat
&Hçyclopediana9
de rftequi décompofe fon vifage, & en fait dif-;
paroître les traits empruntés, pour reftituer à leur
place ceux de l’inimitable Garrick.
C'eft ce deflin original qui eft à la tête des
oeuvres de Fielding.
^ Garrick a obtenu, de la part des maire & éche-
vins & bourgeois de la patrie de Shakefpear, un
honneur qu'il doit à fon mérite particulier, & à
la vénération que les anglois cohfervent pour le
père de leur théâtre. Quelques-uns des principaux
officiers de la ville de Stratford-fur-Avon, dans
le Warwick-Shire, fe rendirent chez lui il y a
quelques années, & lui remirent, de la part de
la bourgeoifie, une. boîte fingulière par la matière
& par le travail} elle étoit accompagnée de la lettre
fuivante:
Monfîeur.
« La ville de Stratford-fur-Avon a la gloire
». d’avoir vu naître dans fon fein l'immortel Sha-
»» kefpear} elle auroit voulu joindre celle de comp-
»» ter au nombre de fes citoyens celui qui honore
» fi parfaitement h mémoire de ce grand homme,
» par la fupériorité avec laquelle il rend fes chefs-
« d'oeuvre. Les maire, échevins & bourgeois de
»» cette communauté s'empreffent de joindre un-
« foible témoignage de leurs fentimens, aux ap-
»» plaudiflemens que le public accorde depuis long-
» temps à vos rares talens} ils vous prient de re-
» ce voir des lettres d'aflbeiation à leur commu-
» napté,,qu'ils vous envoient dans une boîte faite
» de bois du mûrier que Shakefpear a planté de
»» fa propre main } ils fe flattent que vous leur
» ferez l’honneur de les accepter. Signé, W . Hunt,
» fecrétaire de la ville, par ordre des maire, éche-
»» vins & bourgeois »».
La même ville a établi une fête en l'honneur
de Shakefpear, laquelle fut célébrée dans le mois
de feptembre, & aura lieu tous les ans. M. Garrick
en a accepté l’intendance, à la prière particulière
de la communauté. L ’année de l’ouverture de la
fête , on dédiera, à la mémoire de Shakefpear,
un édifice élégant , auquel on donnera le nom de
Shakefpear’Shall. C'eft une foufeription qui en a
fourni les frais.
Le célèbre Garrick, qu'on a nommé le Rofdus
de l'Angleterre, peut nous rendre vraifemblable
ce que l ’on rapporte de plus furprenant des pantomimes
anciens. L’auteur des lettres fur les ballets
qui a.vu jouer à Londres cet excellent a&eur^
: nous fait un tableau très-pathétique de la manière
dont il rempliffoit, dans une tragédie, le rôlè d’ un
tyran, qui, effrayé de l’énormité de fes crimes
meurt déchiré de remords. Le dernier aéie de
cette tragédie n^toit employé qu’à peindre les
regrets & la douleur. L’humanité triomphoit des
meurtres & de la barbarie. Le tyran, fenfible à
fa voix, déteftoit fes crimes g qui devenoient, par