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chaîne autour de leurs armes, en mémoire de cette 3
■ a&ion.
Louis accordoît Ton eftime à tous ceux qui fe
dîliingùoiert dans leur état ; mais il vouloit qu'ils
appriiime à n’en point roug'r. C e prince fai foie
fo Avens a.ffeoîr à fa table un marchand , nommé
maître. Jean.. Ce marchand, fe’duit parles bontés
du ro i, s’avifa de lui, demander des lettres de
nobleffe. C,e prince les lui accorda} mais lorfque
ce rduvi.au noble, parut devant lui 3 d affeéta de
ne pas le regarder. Jean , furpns de ne pas
trouver-le même accueil, s’en plaignit. «Allez.,
33 mordieu r le gentilhomme, lui dit le roi, quand
33 je vous fai fois affeoir à ma. table , je vous re-
33 gardois comme le premier de votre condition}
» pais aujourd’hui je ferois injure.aux nobles , fi
» je yous accordais la même faveur », ’ j
■ C’eft à ce prince qu’on attribue estte bifàrrerie,
d’avoir donné un canonicat à un pauvre prêtre
■ cu’il trouva endormi dans une égl fe, afin, di-
foic-il, de démentir le proverbe quL dit, que le
bien ne..vient point en dormant.
Louis fouilla ces traits de bienfaifance par des
?€les d’un'defpotifrne c r u e l s fupèfftitrèux. Trif-
tan , prévôt de l'hôtel, étoit le rïuniftre aveugle
Ik barbare de cts cruautés que Seyffei & quelques
autres écrivains appellent les juftices foudaines du
roi. Ce prince étant un jour à table apperçut
a côté d’un moine 5 qui étoit venu le voir dîner,
un capitaine qu’il hailJbit. Le roi fit un ligne dé
l ’oeil au prévôt Triftan. Celui-ci, accoutumé à ce
langage, & croyant-qu’il s’agiffoit de-la %ërt: du
moine, commanda à fes fatellites de fe faifir de
lui au fortir du dîner, de le coudre dans un fac &
de le ietter dans la Seine. Cependant le capitaine
-qui s’étoit auflî apperçu du ligne de ce prince &
.qui s’en méftoit, étoit monté à cheval, & s’étoit
.éloigné le plus promptement qu’il lui avoit été
.ppliib’e. Le roi le fut, & le lendemain demanda
à Triftan pourquoi il n’avoitTpas"exécuté l’ordre
qu’il lui a voit donné par figue ? « Sire, répliqua
Triftan , notre homme éll; déjà bien loin. — Bien
loin, reprit le roi, on l ’a. vu hûr n Anr’ens-
— Gn fe méprend , dit hardiment Triilan ; je
vous le garantis y Ere ; c’cft.à Rouen 8c non
pas à Amiens, s’ il a toujours nagé. — De qui
parles-tu? dit encore le n i ; — Hé! du moine,,
répondit Triftan, que vous rnê" montrâtes-miér ;
•j! fut au (fi tôt mis dans un fac &- jette dans-1’êau.
— Comment l ie moine , dit Lôuis-%■ eh ! pâquè-
Dieu ! qu'as- ru fait ?. C ’étr.îc le meii'eur moine
de mon rojgume. Il faut lui frire dire demain
une douzaine de meffes de requiem, & nous
ferons déchargés d’autant. Je n’en voulois qu’au
capitaine Picard y qui'étoit à côté dé lui ».' Dans
d’autres occafîons femblableS, Louis (e contèntoit
de baifer fa petite vierge de plomb & de ltïi demander
patdon,
Ce pnV.ce craignôit tant la mort, que dans Ie$
prières qu’il ordonnoit continuellement , il ne
vouloit pas qu’on demandât à Dieu autre chofe
pour lui que la fanté. Ayant fait un voeu à faint
E um p e , comme le prêtre joîgnoit la fanté de
l’anve à celle du corps, Louis lui dit : » N ’en de*
» mandez pas tant à la fois ; il ne faut pas fe
*» rendre importun. Contentez- vous de deman-
» d e r , par les mérites de ce faint, la fanté du
» corps-»;.
Cottier, “premier médecin du ro j, abufoit de
l’état de ce prince & ne lui partait qu’avec la dernière
arrogance. Le roi s’en plaignoit quelquefois;
mais le foible monarque regardant ce médecin
comme l’ arbitre de fa vie , n’ofoit le chagriner.
L ’audacieux Cottier lui dit un jour : « Je
» fais bien qu’ un matin vous me renverrez comme
» Vous renvoyez les autres ; mais je jure Dteù qüë
» vous ne ferez pas en vie huit jours après ». Le
roi effrayé redoubla fes carefies nè refufa jamais
rien à fon tyran , pourvu qti’/7 chaffât le fantôme
épouvantable de la mort, au nom de laquelle il fe
couloit entre fes draps.
Le roi', dans fes derniers momens, dit qu’il
efpéroitquepar la dévotîon qu’il âvoit à la Vierge ,
il ne mourto t que le famedi ; circonftar.ce qui fut
remarquée , parce que l’évènem.enfcîa jullifia.
LOUIS X I I , roi de France , furnommé le Père
du peuple , né en 1462, mort en 1515.
Louis parvenu au trône par lé chemin de l’ad-
verfité , y fit régner avec lui les vernis d’un,
ben roi.
Louis X I I avoit un livre , dans lequel étoient
infentes les perfennes l.s plus difhnguées dé
chaque province& à côté du nom, les dons ,
grâces ou privilèges qu’il peuvoit leur accorder.
Venait-il; à vaquer quelqu’emptai honôtabjë'î ou
important , il leur en envoyoit les- provifiorts*-
fan« quelles euftent la peine devenir en cour;; ni
de les demander.
Un homme de la cour dern-andoit à Louis, la
confifcarton des bie. s d'un riche bourgeois d’Orléans
, qui, s’éfoit déclaré ouvertement contre ,çe
pripce avant fon avènement m. trône..,« Je n’étpij»
jj pps. fon.roj., répondit-il',. lorfeu’il nva pftpjfté,
» En le devenir t , je fuis devepu fon père. Je .dois
»/.lui pardonner & le défendre »»..
C e pçince affiez généreux pour oublier les injures
faites au duc d’Orléans, étoit -aiilfi trop ami
de la jiiftiee pour récompcnfer quelques fervices
par une-reconriclTiHce aveugle. Le lieutenant , de
la prév-ôté d’Orléàns ; qtii/lui avoit' été ut-de dans
plufieurs occafioris, crût que c’étoit un titre füffi-
, faut auprès du nouveau monarque pour"obtenir
toutes fortes de grâces. Ce lieutenant étoit ac-
eufé de eoneuffion , & Louis n’étant encore que
due d’Orléans s’étoit employé’ en fa faveur. Maïs
lorfqu’il fut fur lé trône, il répondit à ceux qui
imploroient fes bontés pour cet officier :« Je l'ai
protégé tant que j’ai pu librement le faire; mais
aujourd’hui je ne dois pas ôter à la juftice fon
libre cours. C ’eft une dette que j’ ai contractée en
devenant roi : je ve'ux m’en acquitter envers mes
fujets ». .
Louis, après avoir réglé & policé fon royaume ,
diminué les impôts, réprimé les.excès des gens; de
guerre, établi plufieurs tribunaux de juftice- qui
lui parurent néedfairès au bien public, 'tourna fes
vues fur l’ Italie; il avoir des droits à exercer fur
le' Kd.ilan.cs & fur le royaume dé Naples. Il en fit
àifém'e'nt là conquête. Mais ce piinç-é y qui1 aÿ’oit
fait paroîtrê tant' d’ardeur pour ' Cotfqiiér'if çès
états y montra' uhef ind.frérencè plus q'uAhéfqjqüè-,
lorfqu’ii vit q'u’ iLhe pOhrroït les corïfefver qü’ en
chargeant trop fort peuple. II perdit lé royaume ;
de Naples par la' perfidie de Fèrdirfând; rci d’ Éf-
pagoe, fon allié..! C ’ tft cé même Ferdinand qui
répondit au fecr<écaice jQyiotana ^qui, luj-rdifoit que ;
le roi de France Je■ plaignait de< ce qu’il j’avort
trompé deux fpjs: îù'Deirx fois, reprit Ferdinand! i
» Pari Dieu, il en a bien menti j l’ivrogne; je l’ai
» trompé plus, de, dix >>*
Louis X I I avoit dit âu roi des romains, én fe
plaignant de la tfahifon de Ferdinand : Si votre ’
be'aurpère'a fait une p e r f id e je : ne veux pas; lui
refférabler : & ;j’ àime beaucoup mieux avoir perdu
un'royaume .que^je faïiràr bien recon^èrif
qhe nôrt pas l'honneur qui ne fe peut janfiàïs recouvrer
,*i ? *
Plufieurs traits rapportés par les hiftorien$ prouvent
que. Louis X I I ne manquoit-pas dé couragé
& de réfolution, Ayant à fe plaindre de la république
d e . y - p n i f i p ' e n ;!49;8rTur le. territoire
de/qetie répi3rbliiqüe:,-,îÔç fit contre: les vénitiens.
les première?, hoitiljtés.. Comme, il paroifterij
déterminé ili..agir vivemeM , & à fecqpder l’ardeur
que..montroient fes..troupes, un de fes^généraux
lui fit obfervér qu’il avoit affaire à 'des .ennemis
très-fages, contre lefquels il tàlloit agir avec précaution.
« Je leur donnerai, dit-il;,; vtant de fous à
» gouverner, qu’aven tqiu^ ieur fageJïe iis ^n'eq
» viendront pas & bouc». .
Durant la batailje, L&uis; fe porta toujpurs dans
1 es endroits oifle danger et-ôit le plus grand.jQuejT
qpes courtifans , obligcs,,par hohnçur de le fuivye,
& Voülaht baehéf' leur poltronnerie fous le'motif
louable de Vejllér;à'là confervatïon du prince, ils
lui fjrènt âpp.eccevoir lès périls où il s’expofoît. Le
fO;.i ,‘qui détnêla le principe de ce zèle, fe contenta
de leur rèyçn'dçè v « Que ceux qui ont petit > fè
>> ^mèttênt1 a1 couVert derrière moi h. ( Brantôme ).
L e s g a f e o n s , A i r q u i r ô u l o it p r i r t e i ^ i e m e n t le
f u c c è s d e là j o u r n é e , a t t a q u e i e n c m o l l e m e n t :
Lôuis en étant averti, s’approcha d’êiix. Dès qu’ il
fut à leur portée , la TrémoiHe le montrant de la
main, cria aux fpldats : Enfans, le. roi vous voit.
A ces mots les gafçons qui pàroifloient rebutés,
firent les plus généieux efforts , Se fe rendirènt
maîtres d’un pofte très long terrtp's difputé. Ce coup
de vigueur détermina la vrâoire en faveur des
franchis. L ’Alviane, qui commandoit l’armée véni*
tiennei, ayant été pris, fût' conduit au camp. Louis
chercha à lui reridre.fa captivité moins doulouieufe
par toutes fortes de bons traitemens. Mais ce
général, plus aig^i par 1 humiliation de fa défaite
que touché de l’hurnanité de fon vainqueur, ne
répondit aux. démonftratronS les» plus confolanres
que; par; une fierté-, brufque &;dcdaigneufe. Louis
fer-contenta de Le .renvoyer au quartier où l’on
gardoit lés ,p.i:ifonn;erSib« :Ii .vaut mieux lé laitier-,
» ditftil.; je m’emporteroisr, & je ferois fâché. Je
m l’ai vaincu ; il faux me vaincre moi-même ».
Lorfque Louis X I I alloit à la, guerre , il ayott
toujours- à fa"^“fuite..des , officiers d.e confiance;,
charges,; mênre eh paysèmiehii, d’empêéher le
défôrdfë , & dë1 r'épàfér le' dom'magé lorfqü'rl âvoit
| été fait. Ces principes" d'tîheySrobité âUftèrè furent
fur tout remarqués aarès la prife de Gènes, qui
pÿçît fecoué le .jÔhhMés ffançois. Leur 'avanr-
garde âyant pillé Ouéfqùe-s mai fon s du fauxbourg
de‘ faint" Pierre d’Afèna, le ro i, quoique'perfo'nne
ne fe plaignît, j -renvoya des commiMaires pont
éy^lher îà^é rte^e avoir.été pris-, & eu
femettrelé montant eh argent.“f ‘
• Des faclests ayohenî lancé quelque* traits ;con?
ne. Louis XIJ. On e-xhoiltoit c% j^ia prince- à les
puhir ?» .Nôn.j, djc-i'l., ils rn-e rendent-»jyftice ;
»» ilsnaçcroient (kgRcs d^entt^îclreda -vérité.,-Mais>
» àjnuta-.t-il, iqu’ils, ne s’émancipent pas.;iufqu’ à
>?. jnfuihër la reine à .ni) i*Hon^f«ut d’aucune autrç
» ) çgrje me fâch#rois ferois pendrq
:Çe pripce^,; ipfonçér.jq^i’ùn/.gerttjilhomme conir
m,enfal de fa maifon,. - avoit. maltraité un; payfan ,
ordonna qu’on retranchât le pain à cet officier.,
& qu’on ne.lui fei vît que du ,vin & de la viande,
i Le gentilhomme s’en p'aignit au foi qui lui demanda
fi leS.mets, qu’mon luivfery.oit ne fiiffifqiqnt pas ?
^ ’N o n , fiife , puisque je pain ; eft eflentiel ; à. la
1 iajvjç; — Et pourquoi dony / reprit le roi , êtes^-
»» vous aïïez peu raifonnable, pour maltraiter ceux
» qui vous -le mettent à la m a i ç .
, Ç e prince en chemin pour fe rendre à Bayonne,"
logea, dans un petit village nommé 1 Efperon Ii fut
furpris d’y trouver. .une grande & niagnifiqueimair
fon: bâtie fur je.gr2.nd* chemin. Elle apparreno.it au
bîjjie ou magiftrat-jdu lieu qui pqur un
I homme très-riche. Ce magiftràt s’étant. prel#nte
devant le r o i c e orince lui demanda Comment il
1 étdit parvenu à amaffer :des: riche (Tes dans un pays
. aufliftérile que- Je fieni Sire, - lui répondit naïves