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L'année fuivante ou joua fur l'ancien théâtre
italien une comédie en trois aftes & en profe,
intitulée : le f-èm ede anglois ou Arlequin , prince du
Quinquina.
' . On en fit alors un nouveau fecret que l'on vendit
une grolfe Comme à Louis.XIV. Tout le monde
depuis en à eu connoiffance & en fait, ufage.
La sens itive èft une plante fort connue, par la
propriété qu'elle a de donner des marques de fen-
lîbilité & prefque. de vie , quand on la'touche.
M M . Dufay & Duhamel fe font livrés à une étude
particulière des-phénomènes de cette plante, &
ont configné dans les mémoires de,l'académie royale i
des fciences , pour l'année- 1736 , la fuite curieufe
des expériences qu'ils ont faites à ce fùjet 5 c'eft
fans doute ce qui a fait dire à Voltaire :
L e fa g e D u f a y p a rm i fe s p lan t d iv e r s ,
V é g é t a u x r a i f tm b lé s d es b o u t s d e l ’ u n iv e r s ,
M e d ir a - t - il , p o u r q u o i l a te n d r e fe^ifitive
S e f l é t r i t fo u s n o s m a ins rio n te u fe & fu g i t i v e .
Un$ princeffe qui connoiffoit la vertu de ce
fimpîe, fe promenant dans un jardin où il y ,en’
avoir, fit accroire à fes filles d’honneur-qui l'ac-
compagnoient, que cette herbe ne fe retiroit que
lorfqu'une femme ou une fille qui n’étoit pas vierge,
en approchoit.
Pour preuve de ce que je vous dis, ajouta cette
dame, c'eft qu’elle va fe retirer de moi qui fuis
mariée, fi j'en approche ; ce qui arriva en effet \
& étonna beaucoup les filles.
Mais elles le furent bien plus , lorfqu’une d’elles
«’étantapprochée par l'ordre de la princeffe, elles
virent la planté fe retirer. On fe doute bien, qu'aucune
des autres ne voulut tenter Inexpérience.
Il y a dans les Indes une efpèce de fenfîtive,
qui non-feulement s'incline ; quand on approche
d'elle quelque corps étranger, mais fuit çnçofe
exactement avec fa tige le cours du foleil, comme
les héliotropes.
Un philofophe du Malabar devint fou, pour n'avoir
pu expliquer les Angularités de ce végétal,
trait-qui rappelle le conte qu'on a fait fur Arif-
tote,-qui fe précipita , dit-on , dans l'Euripe, parce
qu'il ne put pas expliquer le flux & le reflux..
Le précepteur d'Alexandre étoit trop -éclairé
& trop, fage pour fe tuer de chagrin de n’être pas
suffi inftruit que la nature elle-même fur les premières
caufes.
Hia s -t a a -T omchom. Tel eft le nom de la
plante la plus fingulièie qui croiffe à la Chine-
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Ce nom lignifie que pendant l'été cette plante
eft une h.rbe, mais que quand l'hiver arrive /elle
devient un ver. Erî effet, fi on la confidère de
près j rien ne préfente mieux un ver, long de neuf
lignes , de couleur jaunâtre.
^La tête , le corps, les yeux , les pieds, les deux
cotés du ventre, paroiffenç très-bien formés.
Cette plante croît au - Thib e t, & eft fort#are.
Ses vertus ^pnt à peu-près les mêmes que celles
du ginfeng, avec cette différence que fon fréquent
uuge ne caufe pas d'hémorragie comme le ginfeng 3
elle fortifie & rétablit les forces perdues.
On prend cinq dragmes de cette racine toute
entière avec fa queuej on en farcit le ventre d'un
canard domeftique, qu'on fait cuire à petit feu.
Quand il eft cu it, on en retire la, drogue, dont
la Vertu cftpuffée dans la chair du®canard. -On en
mange foir & matin pendant dix jours. Ce.remède
n'eft en ufage^qu à la, cour de Pékin, à caufe de
la rareté extrême de cette précieufe racine.
. P L A T O N , philofophe grec, mort l'an 348
avant Jefus-Chrift,* à l'âge de 8x ans.
Socrate y le maître de . Platon , ne l'appelloit
point autrement que le cigne de l'académie.
L’académie étoit un gymnafe environné d’arbres,
& fitué fur les confins d'un dés fauxbourgs
d'Athènes, atnfi appelle d'un nommé Acadcmus
ou Ecadémus, citoyen d'Athènes, qui en étoit propriétaire.
C ’eft dans ce lieu que Platon & fes .difciples
tenoient leurs affemblées pour converfer fur des
matières philofophiques : origine du nom ciTcadé-
miciens donné aux philofophes qui fuiVojènt ' la
doctrine de Socrate & -de Platon.
Cette do&rine & celle d'Ariftote furent en
quelque forte deux religions que les hommes pro-
fefsèrent, jufqu’à ce qu’une lumière plus pure vînt
les éclairer.
Platon n’avoit négligé aucuns des moyens d'accroître
fes connoiffances. 11 voyagea en Egypte,
pour profiter des lumières des prêtres de ce pays,
& des hommes illuftres en tout genre qu’il prp-
duifoit alors. *.
Il parcourut la grande Grèce pour converfer
avec les'trois plus fameux pythagoriciens de ce
temps là , & pana en Sicile pour voiries merveilles
de cette ville & fur-tout les eixibrâfemens du mont
Ethna.
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Platon ne fe mêla point des affaires publiques,
niais il ne fut pas moins utile aux fociétés politiques
en leur formant des magiftracs fages & vertueux.
Dion , Pithon & Héraclide qui avoient appris
dans fon école à;, détefter la tyrannie, en affranchirent
le premier la Sicile, -les deux autres la
Thrace.
Denis, tyratT de Syracufe, lVppella à fa cour ,
& Platon fe rendit à fes follicitat'.ons dans 1 efpe-
rance de contribuer au bonheur des fyraeufains,
mais l’adulation s’oppofa aux progrès de la philo-^
fophie, & Platon s’en retourna en Grèce avec le*
chagrin de n’avoir pu faire un homme d’un tyran,
8c la joie de ne plus vivre avec de lâches flatteurs
qui'en Taifoient un monftre.
A fon retour il paffa à Olympie pour voir les
jeux. Il fe trouva logé avec des étrangers de dif-
tinôlion. Il mangeoire à leur table , paffoit avec eux.
les journées entières , & vivoit d'une maniéré tres-
fimple Sc fort unie, fans jamais leur parler ni de
Socrate , ni de l’âcadémie & fans leur faire con-
noître de lui autre chofe finon qu'il s'appelait
Platon. . "
Ces étrangers s'eftimoient heureüx d'avoir rencontré
un homme fi doux, fi affable & d'une fi
bonne fociété ; mais, comme il ne parloir que de
chofes fort ordinaires , ils ne crurent jamais que
ce fût ce philofophe dont la réputation faifoit tant
de bruit.
Les jeux finis, ils allèrent avec lui à Athènes
ou'il les logea. Ils n’y furent pas plutôt arrivés,
qu ils preffèrent leur hôte de les mener voir ce
fameux philofophe qui portoit le même nom que
lui, & qui étoit difciple de Socrate. Le philofophe
leur répondit en riant : le voici. Les étrangers
fijrpris,fe firent de fecrets reproches de n’avoir '
pas'difeerné tout le mérite de ce grand homme
à travers “les voiles de la fimulicité & de la mode
ftie dont il fe couvroit, & l’en admirèrent encore
davantage.
Ce philofophe. ne pouvoit fouffrir la vénalité
des magiftratures. « C ’eft, dit-il j comme fi dans,
un navire on fÉfoit quelqu'un pilote, ou matelot
pour fon argent. Seroit-il poffible que la règle fut
mauvaife dans quelqu'autre emploi que ce fût de
la vie, & bonne feulement pour conduire une république
»}
Les hommes, continue Platon, ne connoîtront
point le b o n h e u r a t a n t que les p h i l o f o p h e s ne/'é-
gneront point, ou que ceux qui régnent' privés
d’une forte d’infpiration divine, ne feront pas phi- $
lofophes- •
P L A' . 7T
La vertu de 1;homme politique , félon Platon,
confifte à diriger fes penfees & tes adtions au bonheur
de la république.
Il diftinguoit deux fortes de paflions ; les paf-
fions fauvages & féroces j & les paflions douces.
La volupté, la douleur j la commifération font
du nombre de ces dernières, elles font de ia nature
de l’homme ; elles ne commencent a etre
vicie'ufes quen devenarft extefliées. Les paflions
fauvages 8c féroces ne font pas dans la nature ;
elles naiffent de quelque dépravation particulière}
telle eft la mifanthropie.
Donne*, tout à l’homme excepté la vertu, vous
n’aurez rien fait pour fon bonheur.
Il défiriiffoit T’amitié une bienveillance réciproque
qui rend- deux êtres également foicneux l’ un
de l’ autre > égalité qui s’établit & qui’fe conferve
par la conformité de moeuts.
Platon, jouit d’une fante’ confiante & d’ une longue
vie', récompenfe xie fa frugalité. Le perfe Mi-
.thridate lui éleva une ttatue, Atiftote un autel. On
confa’cra par la folemnité le jour de la nainance,
& l’on frappa des monnoies a fon effigie.
On rendit même, de fonvivant, hommage a fon
lavoir. Le poëfe Antimachùs ayant raffemblé un,
jour quantité de perfonnes pour lire en leur prt-
fence une piètre qu’ il avoit corripofée, & voyant
que fes auditeurs i’avoient quitté à la refeve de
Platon-.« Je ne laifferai pas, dit-il, de continuer
ma le&ure, parce que Platon vaut tout feu 1 un
■ auditoire ».
Platon a été furnommé l’Homèref-des philofophes.
Dans les fujets élevés qu’il traite , il a 1 eiv-
thoufiafme de ce poète épique. Quelquefois auffi
il s’eft montré un autre Anacréon & badine avec
l’amour. On connaît les petits vers paflionnés qu’il
fit pour Agathis, & que Fomenellè a rendus dans
Tes dialogues - - •
L o r fq u ’A g a t h i s , p a r un b a ife r d e flam m e ,
- C o n f e n t à m e p a y e r d e s m a u x q u e j’a i f è n t i s ,
Su r m e s lè v r e s fo u d a in je fe n s v o l e r m o n ame
Q u i v e u t p a fle r fu r c e l le d’A g a th is .
• Timothée, général athénien „fut invité à fouper
chez Platon. Le repas étoit frugal , mais déî:cat
& bien entendu. Une gaieté douce animoit les
convives j on-traita plufieurs points de morale très-
intéreffans. Timothée -étoit enchanté. La fat i s faction
fecrette qu’ il éprouvoit étoit bien au-deffus
de la joie bruyante qui régnoit dans les grands
repas qu’il donnoit fouvent à Tes officiers. Un
concert délicieux termina le feftin. Le général for-
tit plein d’ un contentement intérieur, qu’il n’ avok