
«ie qui le flattale plus*ce qui attira toute fa complair
e 6 * fut la découverte de la peinture encauftique.
U n paflage de Pline 3 mais trop court pour développer
clairement le procédé de cette peinture* lui en
fit naîtreTidée. Il s'aida du fecoursdë la chimie* 8c
i^rut avoir trouvé le fecret de fubftituer la cire à
fhuile dans l ’emploi des couleurs* & de la faire
obéir au pinceau. 11 fe flatta d’avoir évité les
luifans de la peinture à l’huile- * & de rendre
les tableaux moins fujets aux împreffions du
teins.
L’ érude de l’ antiquité lui fervoit en quelque
forte de délaffement à fes autres recherches *
& ce favant diftingué nous a laifle un recueil complet
d’antiquités égyptiennes * étrufques * grecques
*. romaine s & gauloifes* en 7 volumes in-
4° 3 ornés de plus de 800 planches.
Quelques jours avant fa mort * il s’ôccupoit
encore du projet' de faire graver les antiquités
romaines qui fubfiftent dans nos provinces méridionales.
Mignard l’architeétc en avoir autrefois
exécuté les defleins-par ordre de M . Colbert*
& ces defleins avoient été recouvrés par
M. de Caylus. Dans fa dernière maladie * il recommanda
la perfection de ce projet à M. Mariette *
dont le.zélé & le goût pour les arts lui étoient
bien connus.
Le-comte de Caylus vit un jour* fur le bqrd
d’ un foffé * un rufte qui dormoit d’un profond
fommeil. Près de cet homme * étoit un enfant
dejdouze ans* qui * d’un oeil attentif* confidé-
foitfon cara&ère de tête 8c. fon habillement pit-
torefque. Le comte s’approche avec affabilité &
lui demande à quoi il penfe : «Moniteur * dit l’en-
» fant, fi je fayots bien deffiner , je voudrois faire
, cet h'omme. — Faites-ie toujours * voilà dés ta-
» blettes * un crayon ». L’ enfant encouragé * trace
l’objet de fon mieux , 8c à peine a-t-il fini fa
tête * que le comte l’embraffe * 8c s’ informe de
fa demeure * pour lui procurer un fort plus
heureux.
Dans les promenades que le comte de Caylus fai-
foit prefaue toujours feul, il s’amufoit quelquefois
à demander lamonnoye d’un écu aux pauvres qu’il
tencontroit. Quand ils étoient allés la chercher *
il fe cachoit pour jouir de l’embarras où ils feraient
à leur retour : peu après il fe montrait * prenoit
plailir à louer le pauvre de fon exa&itude * &
le recompenfojt en doublant la, fomme. Il a dit
pîufîeutS fois à des amis : « Il m’eft arrivé de
» perdre mon écu } mais j’étois fâché de ne
» pas avoir été dans le cas d’en- donner un
» fécond ».
. C ÉL IBAT . L ’homme eft né pour la fociétçj
& quoiqu’il s’en trouve fouvent de fort danger--
reufes“* ce n’ eft pas pour cela une raifon de fe
\ouer à refter fe,ul. C e n’ eft pas la fociété qu’il ]
faut fuir * ce n’eft que la mauvaise fociété j Yi
difficulté eft de diftinguer la bonne. A cet égard,
les femmes ont plus d’embarras que les homines >
pour ne pas fe laifler abufer dans leur choix.
£ Les loix des Lycurgue excluoient des emplois
civils 8c militaires ceux qui s’obftmoiçpt à vivre
dans le. célibat 5 ils étoient même expofés.à être
fouettes tous le$ ans par les femmes * au piecl
de la ftatue de Jqnon * 8c expofés à mille plai*
fanteries.
Augufte parut toujours fort oppofé au célibat
& porta les plus févères ordonnances contre les
célibataires, rendant des jeux auxquels l’empe-'
reur affiftoit * les chevaliers romains le prefsèrent
d en adoucir la rigueur. Augufte * pour toute
réponfe * fit venir les enfans de Germanicus * qui
etoient en allez grand nombre * quoique ce prince
n eût encore que vingt-quatre ans 1 il en prit plu-
fieurs dans fes bras * mit les autres fur les genoux
de leur pere* & réprima par ce fpeéïacle touchant
des plaintes inconfidérèes.
Lorfque Camille fut cenfeur* il nota d’infamie
-ceux qui avoient.vieilli dans le célibat. Il penfoit
que c’étoit une des premières loix de la nature 3
de donner l’être comme on l’a reçu * & que nos
parens * en élevant notre enfance * nous impo-
foient^ l’obligation de rendre un jour à d’autres
les mêmes foins.
CENDRES ( mercredi des ). On queftîonnoît
un turç revenu d’Europe * fur les chofes remarquables
qu’il pouvoit avoir vues. A Venife* répondit
il, prefque.tous les habitans - deviennent
fous pendant un certain temps de l’année : ils
courent déguifés par les. rues } & cette extrava^
gance augmente enfin au point que les eeclé^
fiaftiques-font obligés de l’arrêter. Parmi -les religieux
* il y a des fa vans exorciftes * qui font
venir, les malades un certain jour ( le mercredi
des cendres )} 8c auffi-tôt qu’ils leur ont répandu
un peu de cendres fur la tête'* le bon, fens leur
revient* 8c chacun retourne à fes affaires.
On ne s'attendrait pas de trouver dans Virgile
des vers qui puîlfent s’appliquer au jour des cén- '
dres. En voici deux très-beaux * tirés du quatrième
livre des géorgiques :
Hz motus animorum atque h&c certamina tanta *
Pulveris■ exigui jaclu comprejfa quiefeent.
} Ne diroit-on pas que Virgile fâvoît que fes
cendres dévoient fuccéder au carnaval.
Ninon Lenclos difoit qu’au lieu des paroles
dont on fe fert * en donnant les cendres y il falloir
dire : I l faut quitter fes amours * i l faut quitter
fes amours. . <
On rapporte qu’un capucin prêchant à Dijon
1<^ jour des cendres * cita gravement les deux vers
de Virgile ci-deflus * & les appliqua à la céréfïtonîe
qui fe pratique à l’ églife ce jour-là * difaftt
que la réflexion qu’on doit faire fur ce qu’ étant
poudre, on retournoit en poudre * eft capable
d’appaifer tous les mouvemens déréglés de l’ame *
& tous les combats de la chair contre l ’efprit.
Le pape Boniface V I I I , faifant la cérémonie
de donher les cendres , les jetta aux yeux de
Porchetto Spinola* archevêque de Gênes , grand
gibelin } 8c -changeant les paroles* lui dit : Mémento
homo * quia gibellinus es * 6* cum gibellinis
in cinerem reverteris.
A Rome * le premier jour de carême * quand
le pape reçoit des cendres * le cardinal qui les lui
donne * fupprime par refpeél le mémento homo *
quia pulvis es.
; CENTENAIRES. On a de tout temps fait
une attention fingulière aux hommes privilégiés*
qui ont. franchi les bornes ordinaires de la vie humaines
& l’on a foin aujourd’hui par-tout de les faire
connoître exa&ement. Tels font les deux Anglois
Pair 8c. Jenkins * Macrobes modernes , dont la
prodigieufe vieillelfe eft encore pour bien des
gens un problème. Toute la tradition d’Angleterre
àttefte l’âge de Guillaume Parr, qui vécut
environ un fiécle 8c demi s 8c dans un des journaux
de Londres * on trouve , en faveur de Jenkins
* le témoignage que nous allons rapporter
fidèlement.
« Quand je vins demeurer à Bofton ( dit Ma-
» derribifelle Saville ) * on me conta diyerfes par-
» ticularités de l’âgé avancé de Henri Jenkins.
Je fus long-tems à en douter * jufqu’ à ce qu’un
» jour il vint chez moi demander l’aumône.\ Je
» le priai de me dire fincèrement fon âge. IL fit
» une petite paufe * après laquelle îl me dit qu’il
.»avoit cent foixante-deux ou cent foixante-trois
?> ans. Je lui demandai quels rois il avoir vus j
p|f§ me nomma entr’autres Henri VIII. Je lui de-
» mandai encore quelle étoit la chofe la plus éloi-
• » gnée dont il avoit confervé le fouvenir. Il me
» répondit que c’étoit le champ de bataille de
.»j Flowden. Je voulus favoir où étoit alors le
» roi * & quel âge lui Jenkins avoit. Il me dit
.si que le roi étoit alors en France} que le comte
*3 de Surrery commandoit les troupes * & que lui
» Jenkins avoit alors dix ou douze ans«} à telles1
» enfeignes qu’il fut envoyé à Nort - Halleton *
, »3 avec un cheval chargé de fléchés, & que de
,» çet endroit on envoya un autre garçort plus
,33 âgé* pour les conduire à l’armée. Toutes ces
, 33 réponfes s’accordent en effet avec les hiftoirés
33 du temps. On ufoit alors d’arcs & de fléchés :
»3 c’ étoit le comte de Surrery qui étoit général,
» & Henri VIII étoit à Tournay. On remarquera
33 de plus * qüe Jenkins * ne fâchant ni ire ni
33 écrire * n’avoit pu s’inftruire * dans les livres *
*> de ces circonftances. Il y avoit auffi dans la
33 même paroiffe quatre à cinq vieillards de cent
»3 afls eu environ * qui convenoient unanimement
>3' d’avoir toujours vu Jenkins * depuis qu’ils le
33 connoiffoient, dans un âge fort avancé. Jen-
33 kins m’ ajouta qu’il avoit été fommelier de mi-
» lord Conyers , qu’il fe r.ippelloit fort dif-
33 tinôiement d’avoir vu l’abbé de l’abbaye de<
» Fontaines ,* avant la deftru&ion des monaf-
» tères ».
Henri Jenkins mourut en décembre 1670* à
Ellerton , dans le comté d’Yorck. La bataille
de Flowden s’ eft donnée le 9 feptembre 1 y 13 *
& il avoit alors douze ans } d’où il s’enfuit
qu’il a vécu cent foixante-neuf ans * c ’eft-à-dire *
feize ans plus que le vieux Parr. Ainfi , c’eft
l’homme qui a vécu le plus long-tems après le
déluge. Les cent dernières années de fa vie , il
fit le métier de pêcheur. Il fe fouvenoit d’avoir
rendu témoignage à la chancellerie S: .dans d’autres
tribunaux, depuis cent,quarante ans. il ailoit
à pied aux affifes .d'Yorck* & en l ’a vu nager
à plus dé cent ans. Il exifte une procédure, dans
laquelle on ^trouve la dépofition de Henri Jenkins
* faite, en i 66f * comme témoin * âgé alors
de plus de. cent cinquante-fept ans.
En 1743 * on a érigé un monument à ce merveilleux
vieillard * -8e la dépenfe s’en eft faite par '
la voie de foufeription. Voici l’infcription qii’on y
a mife :
Que le marbre ne rougifîe point de fauver de
l’oubli la mémoire de Henri Jenkins * peri'onnage
d’une naififance obfcure* mais dont la vie a été
mémorable : car s’il n’a pas été partagé des biens
de la fortune * il a. été enrichi des dons de la
nature. Il a été heureux * fi ce n’eft par la variété
de fes plaifîrs * du moins par leur durée. Si
le monde améprifé fon état abjeét* la providence
l’a favorifé * en-lui donnant les jours d’un patriarche*
pour apprendre aux hommes le prix de
la tempérance &' d’une vie laborieufe. II. a vécu
l ’âge furprenant de cent foixante-neuf ans. Il a
été inhumé en ce lieu , le 6 décembre 1670* 8c
fa mémoire a été illuftrée en 1743.
.. En 17(39, Jacques-Marc Donald , âgé de cent
dix-fept ans 8c deux mois * mourut à un-mille
de la ville de Cork. 11 avoit fept pieds deux
pouces, de hauteur * mangeoit à chaque repas
près de quatre livres d'alimens folides , 8c buvoit
à proportion des liqueurs fortes * fans que fa
raifon en fouffrît. Ses membres étoient beaucoup
trop gros pour fa hauteur : un bracelet ordinaire
. auroit pu lui fervir d’anneau. Il avoit dans fa
jeuneffe été expofé* pour de l’argent* à la curio-
fité du public ; mais cette façon de vivre l’obligeant
à la retraite * 8c fa fanté exigeant de l’exercice*
il s’engagea dans les grenadiers* 8c fervit
depirs 168 y * jufqu’en 17 16 , qu’il revint dans
j fon village * ou il travailla à la terre* en journées
* jufqu’à l’âge de cent quatorze a^s.