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qui implorèrent la clémence de leur maître ,_fe ran-
'’ erentVous (es drapeaux, allèrent avec lui taire une
frruption i'ur les terres des Maures, & s’emparèrent
de Lisbonne , que le roi vainqueur fit démanteler ,
avant que de rentrer heureux de triomphant clans
i'es étais. Mais, tandis qu’il failbit avec tant de fucccs
la guerre en Portugal, don Ferdinand Gonçalez, toujours
irrité de l’outrage que la fille avoit reçu , fe
mit à la tête des troupes Caftillanes, & fituneirrup-
îion dans le royaume de Cordoue. Cette invafion
étoit encore plus avantageufe à Ordogno , ennemi
irréconciliable du roi Maure de Cordoue , qu_à Ferdinand
lui-même : cependant, comme ce leigneur
n’avoit pas été autorilc à lever des troupes, ni a taire
des aétes d’hofiilitc (ans te conlémemeni de fon fou-
veraln, celui-ci n’eut pas plutôt mis fin à fon expédition
de Portugal, qu’il concluifit lui-même (on
armée Cur les frontières de Caftille , rélolu de punir
le comte de cette invafion, qu’il traitoit de nouvelle
révolte. Ferdinand Gonçalez, effraye de l orage qui
le menaçoit, alla té jetter aux pieds A'prdogno J II,
avoua (a faute , demanda grâce , l obtint, 6c avertit
le roi des difpofitions du Ibuverain de Cordoue, qui
fe préparoit à fondre fur la Caftille. Ordogno promit
de fecourir les CalUlIans, U bientôt après , envoya
au comte des troupes, avec lefquelles il battit les
Mahométans, & remporta fur le roi de Cordoue
une viêtoire mémorable. Ce fut par ces fcrvices
que le comte Ferdinand Gonçalez répara lés fautes
paffées , & gagna la confiance à'Ordogno I I I , qui,
alla nt de Léon à Zamora , tut attaqué en route d’une
fl violente maladie, qu’il en mourut vers la fin du
moisdejuin,en95 5 , après un régné glorieux (au divorce
de (bn époufe près ) de cinq ans & cinq mois.
O rd o g n o IV , roi d’üviédo & de Léon.
d'Efpagne.) Ce fouverain ne vécut pas comme il
méritoft de vivre , mais il mourut comme il devoit
mourir , de mifere 6c couvert d’opprobre. C ’étoit,
fans contredit, le plus méprifable des hommes, 6c
U ne dut le trône qu’au caprice & à l’ambition d’un
feigneur faêlieux qui, peu content d’avoir boule-
verlé l’ctat, voulut achever encore de l’opprimer ,
en plaçant la couronne fur la tête ^Ordogno, fils
d’Alphonlé le moine , & qui n’avoit pour toutes qualités
qu’une infolence révoltante , des moeurs très-
corrompues 6c beaucoup de cruauté. A peine Ordogno
Ul fut mort, que don Sanche fon frere fut
proclamé roi par les grands du royaume : mais don
Sanche n’avoit ni la capacité, ni la valeur aftive de
fon prédéceffeur; 6c le comte Ferdinand Gonçalez,
qui avoit fufeité tant de troubles , toujours animé
dudefir de fe rendre indépendant, fit tant par fes
intrigues, fes cabales, fes dénonciations, qu’il aigrit
les grands 6c le peuple contre don Sanche , q u i, à la
vérité, étoit, dans ces fâcheufes circonllances, fort
au-deflbus de fon rang. Les difeours du comte firent
im tel effet, & le mécontentement général fut porté
fl loin , que le foible Sanche, craignant les plus
terribles événemens, prit la fuite, 6c alla fe réfugier
à la cour du roi de Navarre, fon oncle. Le trône de
Léon , vacant par cette fuite honteufe 6c précipitée
, ce royaume tomba dans la confufion de
l ’anarchie, 6c le comte Ferdinand Gonçalez s’affranchit
, comme il le defiroit, de l’hommage qu’il avoit
été jufqu’aiors obligé de rendre aux fouverains de
Léon. Ses vues étoient remplies, mais fon ambition
n’étoit pas fatlsfaite ; 6c , peu content des défordres
qu’il avoit occafionnés , il afpira à l’honneur de
régner fur Léon, fous le nom de celui qu’iljugeroit
à propos de mettre en la place de Sanche. Perfonne
n’étoit plus capable de remplir le projet de Gonçalez
que le pervers Ordogno qui n’avoit ni principes,
ni moeurs, ni connoitfances, ni talens , mais
.qtii promit à fon bienfaiteur le dévouement le plus
O R D entier ù toutes fes volontés ; & la première de ces
volontés fut d’obliger Ordogno d’époufer donna Ur-
raque, femme répudiée d’Ordogno 111, & qui, par ce
moyen , fut pour la fécondé fois élevée au trône de
Léon. Quelques dommages que les grands euffent
foufferts pendant les troubles de l’anarchie, ils la pré-
féroient encore aux maux bien plus confidérables
qu’ils craignoient d’éprouver fous le régné de ce
nouveau fouverain; aufii ne fut-ce que torccincnt
qu’ils confentirent à le rcconnoître pour roi. Leurs
craintes n’étoient que trop fondées, & le vicieux
Ordogno fe conduifit avec fi peu de décence, 6c
commit tant d’injuftices , de vexations, que les peuples
lui donnèrent le furnom de mauvais. Cependant
Sanche, en proie à une cruelle hydropifie , ôc ne
trouvant point de remedes qui le foulageaffent,
alla, par les confeils du roi de Navarre , fon oncle ,
à la cour du roi de Cordoue , où on lui faiCoit efpé-
rer qu’il troùveroit d’excellens médecins. Le roi de
Cordoue lui fit l’accueil le plus diflingué; 6c , par
l’habileté de fes médecins maures, il guérit de (on
hydropifie. Les grands de Léon , informés du féjour
de Sanche à Cordoue , lui firent favoir qu’ils étoient
excédés de la tyrannie 6'Ordogno ; 6c que s’il vouloir
fe montrer à la tête de quelques troupes , toutes
les villes du royaume lui ouvrirolent leurs portes ;
6c en effet, Sanche , fécondé par Abderamme 6c. le
roi de Navarre , n’eut pas plutôt paru fur les terres
de Léon, epOrdogno iV , abandonné de tous, fe
crut trop heureux qu’on voulût bien lui laiffer la
liberté dont il profita pour s’enfuir dans les Afiuries.
Gonçalez , pendant fon abfence , voulut faire quelque
réfillance, mais il fut battu 6c fait prifonnier.
Ordogno , averti que les Afiuriens v.ouloient aufii
l’arrêter & le livrer à don Sanche, fe fauva ; 6c ,
fuivide fa femme, fe retira à Burgos.Les habitans de
cette ville reçurent avec refpeâ donna Urraque,
mais ils ne voulurent point donner afyle à fon époux,
qui, ne fachant que devenir, accablé de terreur,
alla fe réfugier chez les Mahométans d’Arragon , où
il vécut couvert d’opprobre, très - miférable , 6c
également méprlfé par les infidèles 6c par les chrétiens.
(Z. C .)
§ ORDRE , ( Mctaphyfiqut. ) Mefun di tordre*
M. WoKf femble être le premier qui ait entrepris,
avec quelque fuccès, de répandre plus de jour lur
l’ontologie ; 6c la plupart des définitions qu’il donne,
quoique nominales , ne lailfent pas d'être affez conformes
aux réglés de la logique. Sur tout la théorie
qu’il donne de Vordre 6c de la perfection , e(t fort
lumineufe 6c fufceptible de bien des applications,
quoiqu’il ne l’ait pas pouffée au dernier dégré de
précifion auquel elle devroit être portée. La définition
qu’il donne de Vordre eft nominale , en ce qu’il
fait confifier Vordrs dans la reflémblance de ce qui
eft fimultané 6c fuccelfif. On voit bien que cette
définition a été trouvée par voie d’abftraCtion de
quelques cas particuliers ; car on la retrouvera, par
exemple , dans Vordre d’une bataille ,dans celui d’une
bibliothèque , dans l’arrangement d’un jardin , d’un
palais , des orgues, &c. J’ai trouvé cependant que
l’idée de reffemblance qui entre dans cette définition
, ne femble indiquer qu’une certaine efpece
éiordre, 6c nommément celle où il y entre de la (ym-
métrie 6c de l’eurithmle , & où on a principalement
égard à la difpolition fimplement locale des parties,
en tant qu’elles occupent, par exemple, le milieu,
les extrémités, les places ^de devant, de de(fiis ,
d’en-bas, de derrière , de côté, &c. ou en tant que,
relativement à leur plus ou moins de reifemblance,
on les range dans certaines clalfes, &c. On voit bien
que tout cela peut fe faire dans plufieurs cas, indépendamment
de la liallbn que les parties peuvent
avoir entr’elles, C ’eft ainfi, par exemple, que dans
O R D tous les animaux, les membres qui font d’un côté,
fc trouvent encore de l’autre ; au lieu que les membres
qui Icmt uniques , occupent le milieu. Voilà
un ordre qtiî eft (ymmétrique, & q u i, envilbgé (bus
ce (cul point de vue , eft fimplement Ibcal. 11 eft
bien vrai que , tout local qu’il eft, les loix de l’équilibre
6c d’autres vues fort elfentielles, le rendenr
nccelfaire , de (brte que ce n’eft pas la fimple beauté
de la (ymmérrie qui a porté le Créateur à établir
cet ordre dans la ftriifturc des corps des animaux 6c
des hommes ; 6c c’eft à quoi les poètes , les orateurs
6c les aitiftes, qui prennent tant de foin de {"ordre
local ou de l’arrangement (ymmétrique de leurs ouvrages
, pourroieni quelquefois avoir plus égard.
Le beau doit encore offrir du réel.
Il y a ime autre efpece (.{"ordre qui ne doit point
être examiné fuivant les regies de la fymmetrie , 6c
oil il n’eft pas queftion d’une fimple reflémblance
fenllble on extérieure , mais de liaifons bien plus
réelles. Tel eft l’arrangement des moyens pour parvenir
à quelque but ^u’on fe propofe ; 6c c’eft fur-
tout dans ce fens qu’on dit que tout ce qui fe fait,
doit l'e faire avec ordre. C’eft' dans ce (éns aufii, que
tout ce qui fe fait dans la nature , fe fait avec ordre,
mais avec un ordre fi compliqué 6c bien fouvent fi
peu fymmétrique , qu’on croiroit n’y trouver que
les effets du hafard.
Comme en philolbphie il eft très-e(fentiel de
dlftinguer les deux efpeces 6'ordre dont je viens de
parler , nous pourrons appeller la fécondé efpece
{'ordre UgaL, tout comme nous avons appellé la premiere
Vordre local, ou bien nous emploierons les
termes à'ordre de Uaifon 6c àlordre de vraifenihlance
parce que c’eft par-là que ces deux efpeces fe diftin-
giient : elles peuvent lé trouver enfemble dans un
même objet; mais il arrive bien fouvent qu’on
trouve l’une fans l’autre. Et fi le défaut à'ordre de
reifemblance devoit être nommé h.afard, comme en
eifet c’eft la feule définition valable qu’on puilfe
donner de ce terme, non - feulement on pourroit
dire qu’il y a du hafard dans le monde , mais qu’il
y en a même dans la géométrie. Car en extrayant,
par exemple , la racine quarrée du nombre iz au
moyen d’une fuite décimale , 3 , 46410, 16151 ,
3 7 7 5 4 ,5 8 7 0 5 .4 8 9 16 ; 8 3 0 1 1 ,7 4 4 7 3 , 3S856,
Ï0507,62067 , 12561 , 1 1613 , 95S90, 3S660 ,
33817 , 60007 , 41622 , 92773 , 51449 , 7 15 13 ,
48, &c. il eft clair qu’il y a dans ces nombres un
ordre de liaifon, 6c que chacun y occupe néceflaire-
ment fa place ; mais il eft également vrai auftî,
qu’il n’y a abfoliiment point à'ordre de reflémblance,
6c qu’ils fe fuccedent comme jettes au hafard. Tous
les chitîres s’y rencontrent autant de fois l’iin que
l’autre ; & cela aurolt également lieu , s’ils avoient
été jettes au fort ou produits au hafard. Auffi le
calcul des probabilités y eft parfaitement applicable,
quoique {" ordre àt liaifon qui règne dans ces nombres,
ait vme nécelfité géométrique ; & cela me paroît
mériter d’autant pTus d’attention , que fans la déférence
qu’il y a entre ces deux elpeces à'ordre, les
calculs de probabilité ne feroient gucre applicables
aux cas oii on les applique depuis qu’ils ont été inventés.
Mais retournons à nos définitions.
L’ufage que M. V o lt f & les lùcceüéurs ont fait
de la définition de l'oré/d qu’il a donnée, c’eft que
non-(éulement on en a déduit plufieurs pvopolîcions
qui peuvent être d’ul'age ; mais on a encore tâché
d indiquer le plus 6c le moins qu’il peut y avoir dans
cliifcrens ordres, lis ont établi que {'ordre eft d’autant
plus grand, qu’il y a plus de reifemblances , 6l qu’il
s y trouve plus de parties reftémblantes. Avouons
que cette conféquence , à ne la cor.fidérer que phi-
lolophtquement , parole (é>rt naturcdle ; il n'y eft
queftion que de partie*, & de reflcmblunccs. Mais
Tome If^.
O R D en métaphyfique, il s’en faut de beaucoup que tout
ce qui eft défigné par un même nom , folt aufii homogène
que le géomerre le demande : il y a là encore bien
à trier. Feu M. Baiimgarten, qui, parmi les philofo-
phesallemands, s’eftacquis beaucoup de célélirité , a
donne dans fa Métaphyfique des principia maikejeos in-
tenforurn, où il traite, d’une façon afléz (émhlable, la
plupart des idées métaphyfiques. Voici en propres
rennes ce qu’il dit de Vordre : Ordo rninimiis e f rninima-
inconjunclione identilas. Ergo quo rnajôr cfl conjunclio-
jiis iderititas , hoc major ju ordo, donec Jit maxiniiis, iibi
maxima conjunclionis ideniicas, ià t f nbipluritna maxi-
rna loties tantiimqne conjunguncur codem modo , quoties
quantumque pojfunt. On peut dire que cela nourroic
pafler pour la vie commune, oit-il ne s’agit que d’efti-
mer en gros le plus ou moins à'ordre qu’il y auroit en
certains cas. Il me femble cependant que l'identité
n’admet point de dégrés intenfifs, 6c qu’ainli Ij major
identilas doit être eftimée par le nombre des chofes
identiques; 6c de cette nràvàtrQ,\d.rnirùrnaidencitasç{ï.
l’identité de deux chofes à l’égard d’un (éul attribut.
Mais quand même on accorderoit tout cela , nous
fommes encore aftéz éloignés de la mefure de {'ordre.
Nous allons voir que pour y parvenir , il faut une
toute autre méthode ; 6c que , bien loin de s’arrêter
à ces (ortes de généralités qui renferment les cas
les plus hétérogènes , il faudra marcher pas à pas ,
afin d’aller du plus fimple au plus compofé , 6c de
mefurer chaque efpece à'ordre de la façon qu’elle
doit être mefurée. Je ne dirai pas jufqu’où je poufferai
CCS recherches ; mais je croirai toujours avoir
franchi le pas le plus difficile, en ce que j’aurai franchi
le premier. Je dirai donc que c’eft fur-tout à
{'ordre àQ reifemblance, qui eft purement local, que
je m’attacherai dans cette addition. II eft plus fen-
fible que {'ordre de liailon , q u ia , outre cela, des
principes plus nécclîaires eft d’une toute autre nature.
Ainli, toutes les fois que je parlerai de {’ordre, c’e(f
{'ordre de reifemblance qu’il faudra entendre, à moins
que je ne défigne exprefiément {'ordre de liaifon. Ce
qui étant préfuppoié, je dirai .que {'ordre le plus
fimple c’eft {'ordre linéaire , en ce qu’il n’a qu’une
feule dimenfion locale. Telle eft, par exemple , une
fuite d’arbres qui bordent une allée ; telle eft une
fuite de colonnes ou d’arcs qui foutiennent un aqueduc
; telle eft la mélodie d’un air qu’on chante , 6c
tel eft encore chaque difeours qu’on prononce. En
tout cela , comme dans une infinité d’autres cas ,
Xordre , qu’on peut appeller ordre de difcuffîon , eft
fimplement linéaire. Voyons niaimenant ce qu’on
doit y confidérer.
Qu’on fe figure une fuite d’objets rangés en ligne
droite , ou , pour parler plus généralement, en (lic-
ceffion linéaire : fi ces objets lontabfolument reflém-
bians les uns aux autres, il eft indifférent lequel fera
le premier, le fécond, &c. 6c toute la différence
qu’on pourra encore faire, regarde les intervalles
qui pourront féparer les objets. Ces intervalles pourront
être égaux ou inégaux , & il eft clair que dans
ce dernier cas, la fymmetrie demande des rapports
qui admettent beaucoup de variations, (ui-wmt les
différentes vtJes qu’on pourra fe propofer. Mais ü
les objets ne font point abfolument femblables, leur
différence entrera pareillement en ligne de compte ,
6c encore en ce cas, les réglés de la (ymmétrie pourront
être applicables : je me borne ici à en faire
mention. Il refte encore un autre point qui n’eft pas
du reffort de la fymmétrie ; c’eft le rang ou la dignité
que les objets qu’il s’agit de ranger, pourront avoir,
& qui demande un arrangement qui y foit conforme.
On (ait que ce cas a lieu dans plufieurs folcmnités,
où il fc forme des procefiions qui doivent être arrangées
fuivant le rang ou la dignité des perfonnes : il
s’y mêle quelquefois des bizarreries gothiques , 6c
Y ij