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qu’on les a tonjeurs faits, nous eft prcfenté par îes
petits mui'cles inférieurs de l’oreille : on croit que la
membrane du tympan ert étendue par l’aflion du
petit mufcle de la trompe d’Euftache, quand on
veut bien entendre de foibles fons languilfans, de
meme qu’on étend 6c on relâche la peau d’un tambour,
pour le battre plus doucement ou plus fort.
Il y a eu meme quelqu’un qui a imaginé que cette
membrane s’accordoit aux différens fons en fe mettant
à l’unilïon, 6c ofcillant de meme que les corps
fonores, pour tranfmettre par ce moyen les fons ,
de l’air extérieur jiifqu’aux nerfs de cet organe,
dans les plus internes cavités de l’os. Et il paroît
réellement que quelque choie de l'emblable doit
arriver, parce que l’on peut, fi l’on veu t, entendre
des Ions, que l’on n’entendoît pas auparavant, 6c
quand la membrane eft relâchée on ne lent que peu
o.i rien. On examina à la fuite de cela l’oi-fice des
petits mufcles qui entourent cette membrane , $c
on crut enfin que fes mouvemens étoieni réellement
-animaux 6c fpontancs.Mais le long & conllant ufage
Jîe les laÜlant pas mettre en oeuvre en d'autres cas,
ils fe rendent inutiles à de nouveaux mouvement. Il
eÜ vrai que l’on peut régler la refpiration comme
l ’on veu t, la rendre plus vite , plus lente , 6i meme
la lupprimer ; mais il faut fe fouvenir que l’on apprit
des premiers jours de la vie à refpirer dilferemment
en difFcrentes circonftances, 6c non pas toujours
dans le feiil cas de l’opprelîion de la poitrine. On
chante, on parle, on Ibuffle, onl'uce, on fonne,
& mille autres chofes en modulant, & modifiant la
refpiration. De-Ià vient aulfi que l’on ne lait pas
faire féparément certains mouvemens des doigts en
fens contraire ; mais on fe lert comme l’on veut des
bras 6c des jambes. Les mouvemens ufités deviennent
fl néceflaires qu’on ne peut plus les changer
quand on le voudroir. Peu des gens favent tourner
en haut les prunelles fans élever les paupières, ou
mouvoir les fourcUs différemment : on ne lait pas
mouvoir non plus les mufcles intercollaux d’un feul
•côté de la poitrine, & le diaphragme même ne peut
être abaiffé d’un feul côté , malgré qu’un feul nerf
frénique, quand il eff ftimulé, n’irrite que de fon
côté ce mufcle, qui par-là peut ctreconfidéré comme
double.
On peut à préfent accommodertoutesces raifons
notre matière. Nous nous femmes accoutumes à
dilater nos prunelles , quand la lumicre étoit tbible ,
0:1 pour bien démêler de petits objets, & à la rétrécir
quand la lumière étoit trop forte. A force de
répéter ces mouvemens de l’enfance, on les fait
d;:ns un inffant, mais toujours par volonté , S: nous
pouvons les faire mille fois de fuite, quand il nous
p la ît, pourvu que ce foit dans les circonffances
même par lefqueUes nous en avons pris l’habitude.
On peut dilater, fi l’on veu t, la prunelle, pourvu
que l’on s’éloigne de la lumière, 6c on peut la rétrécir
en s’approchant & regardant de près. Mais
quiconque voudroit dilater ou refferrer fes prunelles
à fa fantaifie, hors de ces circonffances, ne pour-
roit pas y réuffir. On ne l’a jamais fait dans tout le
cours de la vie , ainfi on n’en a pas pris l’habitude;
on ne doit donc pas s’étonner fi cela ne réuffît pas,
comme on ne réuffiroit pas non plus à marcher la
premierefois, ou à mouvoir les oreilles. On tourne
ainfi les yeux toujours également par l’ufage con-
îr?£lé pour mieux voir à fon aife; que fi l’ul'age le
permetfoit, on pourroit librement tourner les yeux
léparément, comme il arrive aux enfans; mais de
ce que nous fommes habitués à mouvoir les yeux
enfemble , il ne s’enfuit pas que la liberté Sc le
pouvoir nous foienc ôtés de les tourner librement.
De ce que donc la prunelle eff déterminée à fe
mouvoir par des circonffances uniformes 6c conf-
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tantes, H neVenffiit pas que la dilatation & fon
refferrement foient moins libres 6c fpontanés. On le
fait très-aifément par coutume quand on v eu t, ntais
c’eft une volonté habituelle, ou pour ainfi'dire
une volonté qui fut libre ; mais pour l’avoir e.xcrcée
tant de fois, nous en avons fait une coinparailbn
néceff'aire 6c indivifible dans nos befoins.
De même nous ne pouvons pas nous paffer d’être
heureux; mais c ’eft toujours nous qui voulons le
bonheur. Le fage veut la béatitude , mais il eff contraint
à la vouloir. 11 y a donc une volonté contraîn^g
à fervir aux befoins qui naiffent en nous des objets
externes, & qui ne fuit pas notre choix; on doit
prendre garde à ne pas confondre cette volonté
forcée, avec les mouvemens cjiii ne font aucunement
volontaires. De cette forte font donc les aéles
habituels ; mais il ne nous eff pas défendu de faire
toute forte d’efforts pour les réprimer. Il eff cependant
vrai que l’effort fera inutile , & fi l’on y parvient
une fois , il y faut un travail obffuié , & il
faut s’effayer mille & mille fois , 6c voilà ce aiff
s’appelle vertu, 6c comment on devient héros. Dans
notre cas des prunelles, il n’eff venu en idée à per-
fonne de les dilater ou rétrécir, fi ce n’eff pour
mieux voir , 6i peut-être ne feroienr-elles pas fuf-
cepiibles d’un nouveau mouvement, 6c il n’y aiiroit
pas à s’étonner fi l’on ne réuffiffoit pas. Mais on ne
peut pas affurer par-là qu’il foit abfolumenî impof-
fible de les mouvoir à notre fantaifie , ôc de vaincre
ainfi cette habitude invétérée.
Ainfi pour forcer les Stahliens au filence, il ne
fuffit pas de dire que nous ne lavons ou nous ne
pouvons faire certains mouvemens malgré tous nos
efforts, 6c qu’ainfi les organes ne dépendent pas de
la volonté, On répondra toujours qu’on n’a pas pris
l’habitude d’e.xercer ces organes à d’autres mouvemens,
qu’à ceux auxquels ils ont été dreffés par un
ufage continuel, & qu'il n’y a pas à s’étonner ; en
coniéquence fi l’on ne réulfit pas à réprimer les
mouvemens ordinaires, ou à en faire de nouveaux,
on pourrott , je crois, établir une réglé nouvelle
pour diffinguer les mouvemens involontaires, 6c
de pure néceffîté de la vie , de ceux qui font fpontanés
6c de l’ame. On fait généralement que tous
les mufcles que font les mouvemens volontaires fe
retirent lorlqu’on pique ou qu’on preffe leurs
nerfs. Lecoeu;, au contraire, les infertins & la veffte
ne fe meuvent aucunement fi on pique leurs nerfs
ou fi l’on irrite 6c fi l’on perce avec des aiguilles
le cerveau 6c la moelle de l’epine, comme je l’ai
fouvent effayé. L’aine pour mouvoir les organes
mer en oeuvre les nerfs , & le fluide très-fubtil qui
les remplit; elle s’en ferviroit ainfi, 6i dans le coeur
ÔC dans les vifeeres, fi c’étoit elle qui les mît en
mouvement, & leurs nerfs étant ftimulés ils de-
vroient fe remuer; ils ne le font pas, donc leur
mouvement eff purement méchaniqiie , n’eff pas
arbitraire 6c moins encore habituel. II eff auffi rres-
fûr que les vifeeres ne font pas mus par le fluide
nerveux, comme les autres mufcles , puifc[u’ils ne
font remués ni par la volonté ni par la piqmire du
nerf; ainfi donc les parties en général qui font en-
héremenî indépendantes de l’ame, ou n’ont pas de
nerfs, ou font organifées de façon que les nerfs qiu
s’y trouvent font incapables d’y produire aucun
rnouvement. Ces viieeres étant fournis de fibres irritables
devront (e mouvoir par leur forme 6c par
les chofes externes qui les touchent & les piquent,
quelque différentes qu’elles foient du ffuide nerveux;
ainfi l’urine fait rétrécir la veffîe ; l’effomac
& les inteffins font mus par les alimens, & le fang
des ventricules fait battre le coeur.
Je crois donc que les animaux en bon étaf de
fanté n’ont aucun organe remué par mouvement
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méchanique, 6c qui puiffe dans le même tems fervir
à la volonté. Il ne faut pas oublier les favans phy-
ficiens ( Strotmio , Botrhaavi , Arnberger , Martin ,
Ludwig) Zinn. ) , & leurs différentes opinions
fur la refpiration; les uns ont imaginé qu’après
l’expiration , les efprits animaux forçoient les mufcles
à faire l’infpiration ; les autres ont attribué cet
effet à d’autres canfes. Mais de toute façon, fi la refpiration
étoit involontaire , après l’expiration on de-
vroit reprendre haleine malgré foi-même ; car l’ame
ne peut pas empêcher le cours des mouvemens né-
cefidirement produits par un choc méchanique,
oomme ils le leroient, felon l’hypothefe de ces favans.
On peut voir, quand on voudra, la vérité de
ce que j’avance ; on n’a qu’à piquer quelque mufcle
volontaire ou le nerf qui y aboutit, nous avons alors
beau vouloir le contenir, il faut que le mufcle s’y
retire même malgré nous. Le mufcle enfin ne peut
ne fe pas mouvoir toutes les fois que le fluide nerveux
le met dans un état tel que la contraéHon
doive s’enfuivre ; on voit cela dans les convuifions
qu’on ne peut pas fiipprimer;& quand il arrive qu’on
les retient, cela provient de ce qu’elles font fi foibles
Si fl languifl'antes, que les mufcles qui s’oppo-
fent par des mouvemens contraires , prévalent, forcés
par la volonté d’agir plus efficacement où il y a
plus de befoin de réfiltance. La convulfion alors ne
ceffe pas, parce que le fluide qui la réveille eff retenu
, mais parce qu’ailleurs les-forces qui luffifent à
fupprimer la convulfion fe font accrues. C ’eff un
fait fiir qu’après l’expiration, tous les mufcles qui
doivent dilater la poitrine reffent relâchés, mous
& cédans, 6c on ne découvre en eux aucun effort de
fe contrafter derechef, parce qu’ils ne font aucunement
roides au toucher, comme doit l'être tout
mufcle quand il commence à fe contracter. J’en ai
fouvent fait l’efl'ai fur moi-môme, en tâtant les
mufcles de ma poitrine mille fois pour en être
fur ; on peut aulfi l ’elî'ayerfur des animaux , & lur
des chiens lévriers en particuliers qui font les plus
maigres. Si les mufcles dévoient nccefiairement fe
retirer & fe contraôer, il s’en'fuivroit le contraire;
donc, quand ils le font, ce n’eft pas par néceffité
machinale, ni par l’affluence du fluide nerveux.
On ne peut dire non plus que la poitrine ne fe dilate
pas, parce qu’elle en eff empêchée par l’ame,
qui fe iert de la force des mui'cles antagoniffes.
Chacun s’apperçoit qii’après l’expiration, on peut
fi l’on veut fe retenir de reprendre haleine , ce qui
même arrive fouvent dans les plus légères diffra-
élions de l’ame occupée à d’autres objets ; on peut de
plus le faire fans mouvoir les mufcles, on n’a qu’à
laiffer la caiffé de la poitrine aller d’elie-meme fans
faire d’effort, ni fe retenir. On peut voir pendant
quelque tems comment le tout eff dans un repos
parfait, & on n’efliiie aucune angoilé , ni envie
ffimulante de refpirer. Si l’infpiration devoir né-
cefi'airement fuccéder à l’expiration , cette tranquillité
qui dure quelque tems n’auroit pas lieu.
Les mufcles qui abailfent la poitrine, ne pourroient
pas s'oppofer à cette dilatation organique, car réellement
ils ne fe coniraftent pas , comme on voit
par l’attouchement extérieur. On les trouve de
môme mous 6c relâchés dans le tems qu’on ne
fait aucune infpiraiion.'ün pourroit meme dire de
ces mulcles déprefi'eurs de la poitrine, qu’on ne
les met jamais en oeuvre dans la tranquille refpira-
ordinaire ; ÔC fi on s’en fervoit pour retenir 1 in(|)!Fation , on devroit refi'entir les efforts des
mulcles infplrateiirs contraires roidis , ce qui ne
s’oblerve abfolumem point.
De ce que quelqu’un a pu éternuer à fa volonté,
on pourroit inférer que réternument eff un mouvement
volontaire & -organique dans le même tems.
Tomt IF,
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La plupart des médecins le croient un mouvement
machinal. Willis crut appercevoir une ramification
du nerf ophtalmique , qui en defeendant devenoit
intercoftale , ôc de-là il voulut rendre raifon de
etermiment, ayant imaginé un accord par lequel
l irritation des narines , propagée par le moyen des
nerfs communicans, faifoit trcmoiiffer tous lesmuf-
cles qui fe meuvent quand on éternue. Plufieurs
anatomiftes fuivirent fon opinion. Mais lorfqu’on
eut découvert dans la fuite que les chofes n’étoient
pas dansj état ou il les fuppofoit, l’hypothefe tomba
delle-meme,jufqu’àcequeMeckel,iUuftreanatomilte,
trouva enfin la vraie origine du nerf intercoffal {de
nervo quinu paris.')Le nerf maxillaire fupérleur,qui
neff autre chofe que la fécondé ramification delà
cinquième paire des nerfs du cerveau,à peine forti du
crâne,envoie un rameau replié en arriéré , qui retourne
versée crâne, 6c va jufqu’aux organes de
lo iiie , 6>c s a^'çe\\e\e nerf vidien. De celui-ci partent
plufieurs autres petits nerfs qui vont aux narines.
Un peu plus en arriéré s’en détache la branche,
qui va former le nerf intercoffal (réunie avec
une autre ramification de la fixieme paire). Il dit,
que^ fi quelque chofe irrite les nerfs des narines ,
1 irritation doit fe communiquer à tout le nerf intercoffal
, 6c par la connexion de l’intercoftal avec
le frénique, 6c par fes autres ramifications, devront
etre fecoués le diaphragme , & les mufcles du cou ,
du dos & des reins. Mais toutes ces imaginaiions-
là , fl je ne me trompe, ne prouvent rien. On volt
feulement que l’éternument vient après la vellica-
tion des narines ; mais on ne voit pas que cette velli-
cation^en foit la caufe efficace , & on ne démontre
pas qu’il foit un fimple mouvement organique. Il y
a beaucoup d’autres mufcles qui fe remuent feulement
à l’occafion d’autres mouvemens , fans que
pourtant ils en dépendent. Et pourquoi l’éternument
ne peut-il pas être un effet de la volonté qui veut
fe délivrer de ce picotement, comme elle fait dans
la refpiration ? Si réternument étoit purement mécanique,
il paroît qu’on pourroit le faire naître à
notre bon plaifir, en imitant les nerfs des narines ;
- mais l’expérience fait voir le contraire, car dans
les chats ou chiens mourans, ou morts depuis peu ,
j’ai irrité les nerfs de la tête , en particulier la première
, &: la cinquième paire, 6c après les avoir
bien piqués & bleffés, jamais l’étermiment ne s’eff
enfuivi ; ce peu d’expériences fiiffifent pour prouver
que leternument n’eff pas un mouvement machinal,
parce que les mufcles fe retirent généralement
toutes les fois qu’on irrite les nerfs qui y abou-
tiffent. On ne peut en douter, & il eff fur que dans
les animaux mourans, ou même morts , les mufcles
confervent long-tems leur mobilité, fi l’on irrite.
long-tems leurs nerfs.
Toutes les fuppofitions fondées fur le confente-
ment nerveux, font fauffes 6c démenties par l’expérience.
On a toujours fuppofé que, quand on irrite
un nerf, le mouvement peut également fe communiquer
par toutes fes ramifications au-defîbus 6c au-
deffus de l’endroit de l’irritation. Mais j’ai vu mille
fois,& avant moi Haller & Oder,qu’on ne peut jamais
faire retirer d’autres mufcles que ceux qui font au-
deffousde l’endroit où l’on irrite le nerf, & jamais
ceux auxquels abomifiént les ramifications du même
tronc au deffus de l’endroit de l’irritarioii.-fi i’on coupe
la tête aux grenouiIles,& qu’on les pique légèrement
à l’épine du dos, pénétrant avec une aiguille bien
fine le long de cette partie, les jambes reffent immobiles;
mais les irmfcles des bras fe remuent à
droite ou à gauche , it-lon quelle partie on a piquée
de la moelle. Au contraire, fi l’on coupe l’épine
au-deffbiis des bras, ÔC qu’on la perce en haut,
les bras ne remuent pas jufqu’à ce que la pointe loit
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