48 N I E La poufiîcrc dans laquelle les fleurs des bleds font
réduites par la nielle^ s’offre à la fimple vue comme
line pouffiere du noir le plus foncé extrêmement
fine ; mais qui délayée dans l’eau, ne paffe point par
le filtre ; quand on la regarde k travers une forte
loupe, ellereffemble à de petitsvers morts , parce
qu'elle eff compofee de débris de petits vaiffeaux
oii le fuc couloit, qui ont été fuffoqués ou comprimés
; après quoi l’air les ayant defléchés, ils ont
éclaté ; les fucs épais & gâtés qui y ont croupi les
ont îout-à-la-fois obflrué & extraordinairement
dirtendus , ce qui leur confervefous la loupe la forme
de petits vermiffeaux. Ginani prétend que dans
lanalylè chymique de cette pouffiere noire, il a
trouvé beaucoup de fel volatil. Nella fiparnijone
ckyrnica. ddla mauna jîUgginofa molto fa l volatik vi
ho feoperto : cette pouffiiere a une mauvaife odeur,
comme celle du charbon ou carie des bleds , mais
elle a moins de confiffance ; & comme ces grains
ont peu d’adhérence entr’eux, & que les enveloppes
font détruites, cette pouffiere eff facilement emportée
parle vent & lavée par la pluie, de forte
qu’on ne ferre communément dans les granges que
le fquelette des épis. M. Adanfon dit, page 44 , que
la pouffiere de la nielU n’eft pas contagieufe comme
celle du charbon, & que les expériences de M.Tillet
prouvent quelle ne fecomrnunique nullementyi\cme qt\
laupoudrant les grains avec cette pouffiiere noire;
niaisM. Duhamel eff plus inllruit,&auffii moins affirmatif
fur ce fujet intéreffant ; voici comme il s’exprime
, page 3 de fes Elérnens , tome 1 : « fuivant
«quelques expériences de M. Tiilet, il ne paroît
« pas que la pouffiiere de la nielle proprement dite
« foit contagieufe ; & nous parlerions plus affirma-
« tivement fur ce point, fi nous avions pu ramaffer
« une affez grande quantité de cette pouffiere noire ;
«mais les vents & la pluie l’emportent, on n’en
« trouve que très-peu dans les granges : nous invi-
« tons ceux qui voudront contribuer aux progrès
5) de l’agriculture à faire de nouvelles épreuves pour
« s’affiurer de la réalité de la contagion de la nielle ;
« mais nous les avertiffons de le garder de confon-
« dre la nielle proprement dite, avec le charbon ;
«cette confufion a Jette en erreur jafqu’â préfent
« piufieurs phyficiens ». Pour moi, d’habiles cultivateurs
m’ont affuré plufieurs fois que la nielle eff
auflî contagieufe que le charbon, Ôc que fi elle ne
produit pas autant de mal, c’ eff parce qu’elle eff
diffiipée avant les moiffons, ou parce qu’étant à découvert
, & par conféquent plus deffiéchée & moins
onélueufe quecelledu charbon, quirefferenfermée
dans la pellicule des grains , elle eff moins propre à
s’attacher après la broffe de la femence, oii les poils
qui font à l’extrémité oppofée au germe la retiennent,
lorfque le bled a le bouton qu’il eff moucheté.
J’ajouterai encore une remarque particulière que
j’ai eu occalion de faire , c’eft que la nielle détruit
plus facilement les épis du froment que ceux
de l’orge, parce que le calice 6c les enveloppes
font plus tendres & moins adhérens au grain de froment
que ceux de l’orge. D ’après cette ffrufture,
on voit que la pouffiiere de la nielle reffe fouvent
dans les balles de l’orge, d’oùil eff aifé de la retirer;
dans cet état elle eff en tout femblable à la pouffiere
contagieufe du charbon, elle eff auffii fétide , auffi
graffie, auffi onftueufe ; elle a la môme couleur
marron, parce qu’elle n’eff pas auffii deffiéchée que
la nielle ordinaire , qui eff plus noire , 6c je fuis
convaincu qu’ elle eff contagieufe comme le
charbon.
Par tout ce qui a été dit ci-devant, il eff manife-
ffe qu’il ne faut pas chercher l’origine de la nielle
proprement dite (^necrojîs jîoralis') dans des caufes
externes, telles que lesbrouillardsgras, les piquures
N I E d’infeftes , les faifons pluvleufes, &c. &c. mais que
la caufe ell interne 6: qu’elle rélide pour l’ordinaire
dans la corruption de la femence , foit que dans l’origine
cette fcmencc pleine d’un fuc laiteux n’ait pas
acquis ion entière maturité 6i qu’elle foit reliée ini-
paifaite, foit que cette femence mûre , mais en core
fraîche & tendre, ait contraèlé de l’humiditc dans la
gerbe & qu’après avoir été entafféc elle fe foit tellement
échauffée dans la grange, que non-feulemcnt
fes lues laiteux aient pu y acquérir de mauvaifes
qualités, mais même que la moelle de la partie fupé-
rieure de la plantule fcminale qui eff deffince ;\ produire
les fleurs 6c les fruits ait fermenté au point de
devenir auffi vicicuic ; il n’y a point de leffive ni de
recette qui puilTent rendre a des femences ainff altérées,
la faculté de fe reproduire qu’elles ont perdue
par la mort des organes qui y doivent concourir.
On fe rappelle fans doute tout ce que j’ai dit
dans l’anatomie particulière du grain de froment fur
les parties diverfes qui le compofent & qui doivent
concourir à la perfeélion d’une lémence deffince à fc
reproduire. On lait que la plantule fcminale douée
de toutes fes parties y eff régulièrement agencée
comme dans un réfervoir par le concours déterminé
des plus petites particules qui fervent à la former :
elle y eff nourrie, elle s’y étend , fe développe 6c
devient auffi complette qu’il eff nécefiaire pour lé
trouver dilpolce à l’accrolffiement qu’elle recevra
dans fon tems. La formation entière 6c le développement
de cette tendre plante, encore en femence, dépendent
inconteffablemeqt d’une certaine direftion
6c dilpofftion effientielle du tiffu extrêmement fin des
canaux 6c des fucs qui y coulent. II eff de toute
nécefflté que l’ordre qui y régné ne fouffre aucune
atteinte depuis les premiers rudimens de fa formation,
après qu’elle a été fécondée, jufqu’à ce que
la lemence entière ait obtenu le véritable point de
la perfetHon qui lui convient. Plus les femences font
tendres & petites, c’eff-à-dire, plus elles font dif-
tantes du point de leur maturité, plus les fucs qui
y coulent doivent être déliés , fluides 6c tempérés,
afin de fe répandre dans toute la fubffance de la
tendre plantule fcminale, en parcourant avec une
même régularité 6c une égale vîreff'e les vaiffeaux
infinimens fins dans lefquels coulent ces fucs. Sup-
pofons préfent des qualités contraires à celles
requifes pour l’entiere perfeèlion d’une femence def-
linée à fe reproduire , 6c nous verrons alors qu’une
femence imparfaite par défaut de maturité, ou par
la nature vicieufe des fucs qui y ont circulé avant
fa maturité, ou par quelqu’autre caufe poftérieure
qui en altéré l’organifation , ne peut manquer de
produire la mort de la femence, ou des maladies
dans la plante qui en doit naître.
En effet les femences fruélifiantes, douces, glai-
reufes 6c plus ou moins femblables au lait peuvent
aifément prendre des qualités contraires à leur nature,
lorfqu’elles font à demi mûres, imparfaitement
feches , ou même tout-à-fait humides, dans le lems
oü elles font recueillies 6c entaflees l’une fur l’autre;
de forte qu’elles ne tardent pas à s’échauffer ou à
contraéfer de la moiffffure : on en fera aifement convaincu
quand on réfléchira que la coêlion & la pu-
tréfadion en agiffant fur les lûbflanccs glaireufes,
douces 6c terreffres font capables de les altérer, de
les diffbudre & de les corrompre, fur-tout fi on
fuppofe que ces mêmes fubffances glaireufes font
compofées d’un amas de plffegme, d’une terre fubtile,
d’un acide extrêmement délié 6c volatiüfé 6c d’une
petite quantité de principe inflammable dont l’union
eff fl aifément détruite par lacoélion , la fermentation
6c la putréfaélion.
Quant aux femences imparfaites 6c qui ne font
pas
N ï E N I E pas encore mûtes , les cifconftances qui viennent
d’être indiquées fe trouvent en plus grand nombre
dans les unes 6c en moindre dans les autres, fur-
tout certainesannéesüîi lafaifon demeure long-tems
froide 6c humide dans les lieux où la culture de la
terre eff mal exercée, comme auffii dans les efpeces
de bled qui mirriffient un peu plus lentement, comme
l’orge, le froment, &c. C’eff-là fans doute que ré-
fldent les caufes premieres de \z nielle, n\[.ù eff encore
augmentée par le defaut de précaution avec lequel
les grains font recueillis 6c raffemblés dans les granges.
Les phyliciens fentiront bien que cette opinion
fur l’origine de la nielle qui détruit les épis dans le
fourreau n’eft pas fondée fur de Amples conjcèlures
ou fur des expériences incertaines, en tout cas jo
vais ajouter les preuves de M. Gleditsch.
Il fe trouve des différences fmgulieres dans tous
les épis, par rapport à la bonté des grains ; communément
ceux qui font places le plus bas 6c les premiers
font les plus parfaits 6c doivent par conféquent
être ceux qui produifent les plantes les plus fortes,
au heu que ceux qui les luivent, quoiqu’ils foient à
la vérité encore bons, ne valent pourtant pas autant
que les premiers, 6c ne produifent que des
plantes médiocres, dont l’accroiffement dépend
beaucoup de la faifbn 6c de la bonté du terro-ir. Les
autres grains qui font vers le haut, au-delà de la
moitié des épis, fc montrent d’une qualité confldéra-
bloment inférieure, 6c le plus louvent ne pouffent
que des plantes fort foibles, chétives, vicieufes 6c
monffrueufes qui s’améliorent à la vérité par rapport
à l’extcrieur de la fleur 6c du tuyau ; mais quand
après avoir fleuri, elles doivent porter des femences,
ellesmontrent leur tbibleff'e 6c leurs défauts, auxq\;els
il n’eff plus poffibie enfuite de remédier, 6c telle elt la
caufe de la degeneration des grains flou n’a pas foin
de changer 6c renouveller les femences. Enfin la quatrième
6c la derniere forte de grains qui fonttoiit-à-
fait à la pointe des épis, eff la plus impartalte ; ces
grains n’ayant pas acquis une maturité luffilantc, demeurent
lans force ; ils fe feparent difficilement de
leurs épis lorfqu’on bat le bled, 6c il eff rare, ou
plutôt il n’arrive jamais qu’ils germent bien en terre.
Cette différence entre les grains peut-être appliquée
à prefquc toutes les autres plantes qui portent
leur femence, 6c elle eff très-connue de toutes les
perfbnnes intelligentes dans l’économie champêtre,
qui fe débarraffent, autant qu’il eff poffibie, de ces femences
imparfaites , 6c q\ii ne les choiflffent jamais
pour emblaver leurs champs. Les caufes de cette différence
entre les grains de bled d’un même ép i,
n’ont pas befoin d’etre expofées plus long-tems,
pLiifque rhiffoiro de la végétation les donne fuffi-
lamment à connoîire. Tout ce qu’il eff nécefTaire
d’obferver ici là-delTus , c’eft que l’épi le plus parfaitement
mûr n’eft jamais tout à-fait exempt de
ces foibics grains : mais ordinairement ils font en
fort petit nombre en comparaifon des bons. Le contraire
arrive auffi louvent lorfque l’épi n’eff pas parfaitement
mûr, fur-tout dans les efpeces de bled qui
mùriffeiu fuccelfivement 6c un peu lentement, comme
l’orge 6c le froment dont les épis contiennent
une beaucoup plus grande quantité de grains imparfaits
que de parfaits, principalement li l’été n’a
pas été chaud 6c lec. Non-feulement ces grains mii-
liffcnt l’un après l’autre 6c pas tous enfemble , mais
ils pouffent encore plufieurs tiges collatérales ; d’où
il arrive néceffairement que les tiges affoiblies qui
en naiffent 6c qui fout toutes entourées de jeunes
plantes précoces, deviennent encore plus mauvaifes
6c ae portent aucune lemence qui arrive à maturité.
Une pareille graine, quand on coupc les bleds encore
verds,ou qu’on les raffemble humides,étant employée
de nouveau 6c toute fraîche pour enfemencer, con-
Tomt iV,
4 9
îribiie fans contredît beaucoup à cnoendrer la nielle
des bff'ds, à caulc de Ibn imperfeérion 6c de fon aUc-
ration du fuc nourrilfier dont il a été parlé ci-dellûs.
Sous ce point de vue la caule premiere de lu
nielle eff OU rimperfeclion de la femence j>rivce de
quelques-unes de fes parties effienticllcs, ou l’ob-
Itruétion totale 6c irrémédiable du liflù entier de la
plantule féminale ou l’altcraiion des fucs du cotilc-
don deffinc à lui donner la premiere nourriture ,
d’où réfultc pendant raccroiütment l ’intefruptioa
de la circulation, 6c la rupture des vaiffeaux en
vertu de laquelle les fucs inéguliéremont prelTcs 6c
dont le mouvement cft dérangé, venant à le corrompre
fort vite , le changenr dans cette pouffiere
enniellée qu’on trouve dans l’épi. Cette deffruCtion
totale 6c cette mortification effs parties de la fleur
n’eff fenflble pour nous que lorfque le développement
de les parties arrive ; mais le vice rcmonie
plus haut, puifque tous les rejettons de la plante
enniellée y participent également; ces rejettons font
foriTics par certains niamens particuliers qui ibner.c
du centre de la moelle {procejfus medullures ) 6c re çoivent
avec elle toutes fes qualités nuilibics ; la
moelle 6c les proceflûs médullaires qui en dérivent
avec elle, font les feuls attaques I puifque , les
fleurs exceptées, la racine porte une plante toute
lembiablo aux autres: mais il n eff pas furprenanc
que la fleur foit ordinairement feule attaquée, puif-
qu’elle rire toute fa Jubilance de la moelle feule.
Une remarque fort lingulicre 6c dont on peut lirer
quelques inductions, c’eft que la nielU eff fort commune
dans les plante» qu’on fait fleurir avant leur
faifon, par le moyen des ferres chaudes; il en eff
de meme fi la plante fleuriflbit après la faifon : e'eff
ce qui arrive aux bleds d’hiver, lemés en mars ; muis
dans ces cas particuliers la nielle vient moins de l’im-
pcrfcèHon de la femence que de la mauvaife oualité
que contraae la moelle des plantes dont on force
les produaions par la chaleur, ou qu’on retarde par
des lemailles tardives 6c qu’on oblige par ce moyen
de fleurir dans une laifon différente^de la leur.
Quand on connoît les caufes de la jiielU il eff
aifé d’y remédier en ne choifuTanc pour femences que
des grains parfaits entièrement mûrs 6c princioale-
ment dans le bas de l’épi; ce qui eff aifé, fi on fe contente
de fecouer Icgcrememfurun tonneau défoncé
les plus belles gerbes, parce que les grains du bas de
l’épi étant les plus mûrs, fe détachent plus facilement:
on évite par-là l’inconvénient fl commun de voiries
plus belles femences s’cchaufiér 6c fc moiflr lorl'qu’on
les iaiffe en tas dans les germes jufqu’au lems des fe-
mailies. Le laboureur intelligent laille toujours ua
morceau de champ affez conlldérable fans y toucher
pendant la moiffon, afin que le froment ayant
le tems d’y mûrir tout-à-fait, foit propre à Jervir
de femence; 6c s’il apporte les foins convenables
pour le ferrer 6c le garder, il aura la confolarion de
voir la nidie difparoîire de les héritages, 6c lès bleds
loin de dégénérer , augmenter en pcrfeélion fans
qu’il foit force de tirer fes femences d’ailleurs que
de fon propre fonds.
J’ai dit plus haut que je m’étois trouvé d’accord
avec M. Gleditlch , dont je viens de rapporter le
fentiment furies caufes de Va nielle. Cet accord flatte
trop mon amour-propre pour ne pas en rapporter
les preuves. Voici ce que je dis dans mon ouvrage
latin imprimé en 176^. Cavendum imprimis ne pian^
uiLi feu corculuni ferninis fuerit aluratum in acervo
humulitdie aiu fermeniauone ; & ideo jemen ante pro-
mendum quam recondatur me£is ; nam f i jetnen hu/ni-
ditalc aut fermentationis calon in acervo germinaveric
, r:ulUi feges ex eo fperanda.............nigredinis
verb & carkunculi caufa in fe habit imbeeiUuas
jeminis , Jl carcofun fuerit aliave caufa corrupium
G