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la 105® année de Jcfns-Chrift. Les événemens de
ces deux niaiilblécs font dans le nicine goût ; mais
le dernier cit le plus élégant, & Hni avec plus de
foin. Ils font tous deux tellement dans le goût & la
maniéré des autres édifices publics en général, qu’on
peut fuppofer que ce ne font pas des ouvrages de
üecles fort différens.
On a dû connoître les fources abondantes & continuelles
de Palmyn, aufli-tot qu’on eut trouvé le
paflage du défert & qu’on l’a pratiqué , & que dés
le tems auquel le commerce a commencé à attirer
^’attention , on a dû faire grand cas de la lituatioii
d’une ville qui étoit nccefîaire pour entretenir la
communication entre l’Euphrate & la Méditerranée,
Falmyrc n’étant qu’û environ vingt lieues de cette
riviere , & û environ cinquante de T yr de deSidon,
fur la côte. Comme ce dclert fe trouve dans le voi-
finage des premieres fociéles civiles dont nous favons
quelque chofe, il n’y a point de doute que cela ne
foit arrivé de bonne heure : les écrits de Moïfe aite-
fient politivement qu’il y a eu une communication
très-ancienne entre Padan & Aran , qui a été enfuite
la Méfopotamie de la terre de Canaan.
Le pays n’a point change de face , & a toujours
été tel qu’on le voit; ce qui n’d i pas Improbable ,
y ayant peu d’endroits dans le monde qui changent
moins que les deferts. U y a lieu de croire que Fal-
myrt a toujours été pourvue d'eau comme elle i’eft,
& que fon voifinage en a toujours eu le môme be-
foin. Jofephe dit que c’eP pour cette raifon que Salomon
fît bâtir dans cet eudroit-là. Les Perfes , après
s’etre rendus les maîtres de PAfie , entreprirent, en
quelque forte , de fournir d’eau le défert, en accordant
des terres en propriété pendant cinq générations,
à ceux qui y feroient venir de l’eau : niais
les aqueducs fouterrains qu’on fit pour cela , depuis
le mont Taurus, étoient fi expofésàetre détruits,
qu’ils ne répondirent pas long-tems à la fin pour laquelle
on les avoit faits. On voit que dans la guerre
entre Arface & Antiochus le Grand, chacun tail oit fon
foin principal de s’afliirerde l’eaududéfert, fans laquelle
une armée ne pouvoir pas le traverfer.
Il eft évident par l’hifioire que le commerce des
Indes orientales a extrêmement enrichi tous les pays
par oil leurs marchandlfes ont palîé depuis Salomon
jufqu’à préfent. Il a été la fource des richefies de ce
prince , des Ptolomées , & certainement de Fai-
myrz : on n’en fauroit rendre raifon autrement.
Quel que foit le tems auquel Palmyre efl devenue
un des canaux par où pafioient les marchandil'es des
Indes, il femble très-raifonnable d’attribuer fon opulence
à ce commerce, qui doit avoir été très-floriflant
avant la naiflance de Jefus-Chrift, d’autant plus
qu’on trouve par les inferiptions qu’environ ce tems-
là les Palmyréniens étoient riches donnoîent dans
le luxe. C ’eft faute d’avoir fait attention à cette cir-
conftance du commerce des Palmyréniens & des
richeffes qu’il a dû produire , que les écrivains ont
attribué jufqu’ici leurs édificesaiix fuccefTeurs d’Alexandre
, ou aux empereurs Romains , & qu’ils ont
avancé cela comme quelque choie d’aflez certain,
plutôt que de fuppofer qu’ils en avoient fait la dé-
penfe.
Comme les anciens auteurs gardent un profond
filence fur ce période opulent 6c tranquille de l’hi-
Roire des Palmyréniens , on en peut conclure que
tout-à-fait appliqués au commerce, ils le mêloient
peu des querelles de leurs voifins , & qu’ils étoient
afiez fages pour ne point négliger les deux avantages
delà fituationdeleurville,favoirle commerce6c
lafûreté. Un pays oii l’on mene une vie aulïipaifible,
fournit peu de ces événemens frappans , que les
hiftoriens prennent plaifir à raconter. Le défert étoit,
è beaucoup d’égards, à PaLmyrc çe qu’eft la mer à
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la Grande-Bretagne ; il faifoit fes richeffes 6c fa détente.
La négligence de ce double avantage rendit
les habitans plus remarquables & moins heureux.
ü n ne fauroit déterminer d’une maniéré fatisfai-
fanîe les liailons particulières qu’ils eurent avec les
Romains avant ic tems d'üdenat, quand elles commencèrent,
ni combien de fois elles furent interrompues.
La marque la plus ancienne de leur dépendance
efl qu’ils avoient une colonie Romaine du
tems de Caracalla. Le fecours qu’ils donneront à Alexandre
Sévere contre ArtaxerS:és, prouve feulement
qu’ils étoient fes alliés.
Avant le tems de Jullinien , Falmyrc étoit réduire
ûun état auffi bas que celui oii on la voit aujourd’hui.
Elle avoit perdu ta liberté, fon commerce.
Ion bien 6c fes habitans, dans cet ordre naturel dans
lequel les malheurs publics cm coutume de lé fuivre
l’un l’autre.
Si la lucccffion do fes calamités fut plus prompte
qu’à l’ordinaire , on en peut trouver la raifon dans
la fituation particulière de cette ville. Un pays fans
terre , pour ainfi dire , ne pouvoir fublifter que par
le commerce ; rindullrie des habitans ne pouvoit
opérer que par cette voie ; & la perte de leur liberté
ayant entraîné celle du commerce , ils furent réduits
à vivre fans rien faire du peu de leur capital qu’Au-
rélien avoit épargné ; quand cela fut dcpenlé ,
la nccefiîté les obligea à abandonner la ville.
Il efl difficile de deviner le liecle des édifices dont
on voit les ruines par monceaux : mais il efl évident
qu’ils étoient d’une plus grande antiquité , que ceux
dont les ruines font encore élevées en partie. Si l’on
peur en juger en comparant l’état de déperifiémeutde
ces édifices avec celui du monument de Jamblichus,
on ne fauroit s’empêcher de conclure qu’ils étoient
très-anciens ; car cet édifice qui efl bâti depuis mille
lépt cens cinquante ans , efl le morceau d’antiquité
le plus complet qu’on ait jamais vu ; les planches 6c
les efcaliers en étant encore tout entiers , quoiqu’il
confifle en cinq étages.
Les édifices qui exiflent ne font ni l’ouvrage de
Salomon , ni celui des Seleucides , & il n’y en a que
peu qui foient celui des empereurs Romains. Ils
ont prefque tous été bâtis par les Palmyréniens
même. Le monument élevé par Jamblichus pouvoit
être le plus ancien, & l’ouvrage de Dioclétien le
moins : l’efpace qu’il y a entre deux eft d’environ
trois cens ans.
Les autres bâtimens ont fans doute été élevés
avant ce dernier, ôi probablement depuis le premier.
Il eft raifonnable de fuppofer que, quand des particuliers
ont pu élever des monumens aulfi magnifiques,
fimplement pour i’ufagc de leurs familles, la
ville dans ce tems d’opulence , a été en état de faire
ladépenfe immenfe de fes édifices publics. On ne fait
que croire des réparations d’Adrien : celles que fit
Aurélien font confidérables, & ont dû coûter beaucoup.
Si les ruines à^Palmyrc font les relies les plus confidérables&
les plus complets de l'antiquité que nous
connoiffions, cela vient fans doute de ce qu’d y a peu
d’habitans dans le pays pour les gâter, de ce que le
climat eft fee & de ce qu’étant éloignés de autres
villes , on n’a pu en employer les matériaux à d’autres
ufages.
On fait que la religion des Palmyréniens étoit la
païenne , & il paroît par la magnificence extraordinaire
du temple du Soleil, qu’ils rendoient un grand
honneur à cette divinité. Cela leur étoit commun
avec les peuplcs'de la Syrie dont ils étoient les plus
voifins.
Leur gouvernement étoit républicain ; mais il ne
rçftç rien du tout de leurs loix , de leur police, &c.
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Les inferiptions nous apprennent feulement les noms
(le quelques-uns de leurs raagiftrats.
Le traité du fublime de Longin fuffit pour nous
faire juger de l’érat de leur littérature.
L’art'^de monter à cheval étoit fort eftimé dans
ce pays, comme il l’efl encore par les Arabes, &
Appién nous afTure que les Palmyréniens étoient
experts à manier l’arc.
Il paroît par leur fituation qu’ils ne pouvoient pas
s’employer beaucoup à l’agriculture ; auffi ell-ce
pour cela qu’il ell plus ailé de rendre raifon de la
magnificence extraordinaire de leur ville , puilqu’il
falloit qu’elle fût le centre de leurs plaifirs , de
même que de leurs afi'aires.
On eft furpris de ne point trouver de relies de
théâtre, de cirque, ni d’aucune place pour des jeux
6l des exercices dans fes récréations chez un peuple
fi confiné par fa fituation , quand on confidere
que les Grecs & les Romains aimoient ces divertii-
femens à l’excès. Cependant il y avoir des jeux
publics à Palmyre ^ dont le foin étoit du reftbrt de
l’édile.
Les Palmyréniens tenoient de l'Egypte la magnificence
extraordinaire des monumens pour leurs
morts : il n’y a point de peuple qui ait approché
davantage des Egyptiens dans cette forte de dépenfe.
On trouve des momies dans leurs monumens funèbres
, & la maniéré dont les Palmyréniens embau-
moient les corps, eft exaflement la même que celle
des Egyptiens.
Les coutumes que les Palmyréniens obfervoient
dans lenrs funérailles venoient d’Egypte, leur luxe de
Perfe, leurs lettres 6l leurs écrits de Grece. Comme
ils étoient finies au milieu de ces trois grandes nations
, il y a lieu de croire qu’ils avoient adopté plu-
fieurs de leurs coutumes. ( Voye\ le plan gcomctral
des ruines de Palmyre, planche I. dans ce Supplément.^
La ville de Palmyre efl fîtiiée au pied d’une chaîne
de montagnes ftériles à l’occident, & eft découverte
de tous les autres cotés. Elle ell au 34® degré
de latitude , à fix journées d’Alep , à autant de Damas,
& à environ vingt lieues de l’Euphrate à l’orient.
Quelques géographes la placent les uns en
Syrie, les autres dans la Phénicie , & les autres enfin
dans l’Arabie.
Les murs decette ville (43) font flanqués de tours
quarrées, mais iis font tellement détruits, qu’en quantité
d’endroits ils font au niveau de la terre , ôc que
fouvent on ne peut les diftinguer des autres ruines.
On n’en apperçoit rien au fud-ell, mais il y a lieu de
croire qu’ils renfermoient le grand temple dans leur
enceinte , & fur ce pied-là ils ont dû avoir trois
milles d’Angleterre de circuit.
On voit aux environs des ruines préfentes un
terreiii d’environ dix milles des circonférence , &
qui eft un peu élevé au-deflûs du niveau du défert,
quoiqu’il ne le foit pas tant que celui de ce plan au-
dedans des murs. Les Arabes prétendent que c’étoit-
là l’étendue de l'ancienne ville , 6i qu’on y décou-
vroit des ruines. Voici une meilleure raifon que
leur autorité. Un circuit de trois milles croit bien
petit pour Palmyre dans fon état de profpérité, fur-
tout fi l’on confidere que la plus grande partie de cet
efpace eft occupé d’édifices publics , dont l'étendue
6c le grand nombre de magnifiques fépulcres
font des preuves évidentes de la grandeur d’une
ville.
Les murs qu’on a marqués dans le plan ne renferment
que la partie de la ville oû étoient les édifices
publics dans fon état florifTant.
En bâtifîam le mur vers le nord-oueft, on profita
de la commodité de deux ou trois fépulcres qui fe
îrouvoient dans cet endroit, 6c dont la forme étoit
Tome ly .
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fi convenable , qu’on les convertit en tours de
flanc.
Comme ce mur eft poftérieiir aux fépulcres, on
cluit conclure qu’il a été bâti depuis l’établilTement
fie la religion païenne à Palmyre. Ce mur exclut de
fon enceinte non-feulement une grande partie de
I ancienne ville, particniicrement au fud-eft , mais
renferme encore,au nord 6c nord-oueft du terrein
qui n’en étoit pas.
La partie du mur où il n’y a point de tours, de
meme que le bâtiment en ruine ( ) , ont été ajoutés^
long-tems après, & font bâtis dans le goût du
château dont nous parlerons plus bas.
Au haut de l’une des plus hautes montagnes qui
font au nord-oueft, ell un château (34) où l’on
monte par un chemin très-difficile & très-efearpé.
II eft entouré d’un fofTé profond, taillé dans le roc
ou plutôt dont on a tiré les pierres ; le pont-levis en
ell rompu. On trouve dans le château un fort profond
, aufiï taillé dans le roc, à deireln , ce femble
de faire un puits, quoiqu’il foit i'ec à prélent.
Les Arabes difent que c’ell l’ouvrage du fameux
Faccarùin, qui le fit bâtir pcmr lui fervir de retraite
pendant que fon pere étoit en Europe, ce qui
ne s’accorde point avec rhiftoire des Drufes.
La montagne fur laquelle il eft bâti eft une des
plus hautes qu’il y ait aux environs de Palmyre. Ds
cette hauteur , d’oii l’on voit extraordinairement
loin au fud, le défert retRmbleàune m er;& à l’oiieft,
on voit le fommet du Liban 6c qaelques endroits de
l’A.ntiliban.
II y a à l’eft & au fud du temple du foleil quelques
oliviers avec du grain que les Arabes cultivent
& qu’ils enferment demurs de terre pour en éloigner
les beftiaux. On pourrait faire de ce terrein
une charmante campagne par le moyen de deux'petites
rivieres mii y font.
Leur eau eft chaude 6c chargée de foufre, ce qui
n’empêche pas que les habitans ne la tiouvent faine
6c afiez agréable. La plus confidérable a fa fource à
roLiell, au pied des montagnes, dans une belle
grotte qui eft affiez haute au milieu pour pouvoir
s’y tenir debout. Tout le fond eft un baffin d’eau
très-claire, d’environ deux pieds de profondeur. La
chaleur ainfi concentrée en fait un excellent bain ,
6c le courant qui en fort avec afl'ez de rapidité, a
environ un pied de profondeur , 6c plus de trois de
largeur. Cette eau eft refl'errée en qoelqiies endroits
dans un lit pavé ; mais après un cours qui n’eft pas
bien long, elle eft imbibée par le fable à l’eft des
ruines. Les habitans difent que cette grotte a toujours
la môme quantité d'eau. I! paroît, par une
infeription qu’il y a tout auprès fur un autel dédié
à Jupiter, qu’elle s’appellolt Ephea, 6c qu’on en con-
fioit le foin à des perlbnnes qui tenoient cct office
par éleêUon.
L’autre petite riviere ( 4 3 ) , dont on n’a pu
trouver la fource, a autant d’eau à-peu-près, 6c
traverfe les ruines dans un ancien aqueduc fouier-
rain , près du grand portique , & dans la même di-
reêlion : elle fe joint à la premiere à l’eft des ruines,
6c fe perd avec elle dans le l'able. Les Arabes dil'ent
qu’il y en avoit unetrolfiemc qui n’étoit pas fi con-
fiidérable que les deux autres, qui couloir auffi dans
un aqueduc fouterrain au travers des ruines , mais
dont le lit étoit tellement engorgé par les décombres
, qu’il y a quelque tems qu’elle ne paroît
plus.
Outre ces eaux foufrées , ü y avoit encore autrefois
un aqueduc fouterrain qui apportoii de bonne
eau à la ville. Il croit bâti très - folidemenr, avec
des ouvertures de diftance en dlftance pour le nettoyer.
Il eft à préfent rompu à environ une demi-
F f ij