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40S P L A fécondantes pourrolt opérer de pareils phcnomcnes;
cependant, ce qu’il y a de lingulier, ce ll que ces
habiles phylicieiis n’en regardent pas moins la de-
génération du bled en ivraie comme une fauffeté, à
caiife de quelques tentatives infruélueul'es.
Vallériiis examine aulTi,cn peu de mots, la que-
ilion de la degeneration &c du changement d'efpeces.
Il le croit polfible , & prétend que les obfervations
faites juCqu’à prél'ent, font infuffifantes pour décider
cette fameufe queÜion ; que nous lomines encore
bien éloignes de connoître toutes les reflburces 6c
tous les lecrets de la nature : que quand meme il y
auroit plufieurs expériences contraires au changement
d’efpece, on en peut feulement conclure qu’il
n’arrive pas toujours, mais non pas que la nature ne
nuilTe s’y prendre de quelqu autre maniéré pour 1 o-
pércr, que rien ne retarde plus le progrès desfeien-
ces que ceux qui croient ces fortes d’expériences
fort inutiles , 6c que les vues de la nature font impénétrables
à l’efpric humain ; qu’on voit des change-
mens d’efpeces dans toui les régnés, & que c’eft à
l ’expérience à décider feule de celui du bled. Z/lie-
rion /' expcrienii<z luim run comniindarnus.
Cette expérience neferoit peut-être pas fi difficile
a faire qu’on le croit communément; en effet, les
orains de bled qui viennent à la fommitéde l’épi, font
ordinairement inféconds & üeriles, affames, maigres,
étroits, ferres, défi échos, légers de poids fur-
nageant dans l’eau, 6'»'. parce qu ils n ont pu être
aulfi aifément fécondes par les pouifieres des étamines
pendantes à de longs filets, que les grains inférieurs.
Ce lont ces grains imparfaits de la fommité
de l’épi appellés/rir,"felon Varron, que les anciens
croyoieni donner nailiance au leig e a 1 ivraie ,
qu’ils regardoient comme du froment dégénéré. U
feroit aiféde fuivre les végétations fucceffives de ces
grains dégénérés, & même d’expliquer, fuivant la
Phyfique, leur changement d’elpece. Severinus, dans
fonouvrage intitulé PhUojophicce medicinct, croit
qu’il fe peut qu’il y ait dans les leniences, des germes
équivoques fufceptiblesde plufieurs formes, ou pour
narler fon langage, des plantes qui contiennent en
puiffiance differentes formes. Ainfi,dansla femence du
froment eft peut-être contenue obfcurément celle de
l’ivraie , quoique d’une maniéré bien moins développée
& dans un éloignement de production. Quand
ce principe fe rencontre avec des caufes qui le développent,
ou avec des caufes plus puiffantes que le
principe du froment, alors l’ivraie pouffe & devient
elle-même une plante radicale qui, oubliant la premiere
forme qu’elle avoit dans le grain de froment,
fe reproduit elle-même. Ce fentiment paroît acquérir
le dégrc d’évidence par la plante mi-partie de froment
&: d’ivraie, dans laquelle l’épi d’ivraie paroif-
folt nourri aux dépens du froment qui étoit chétif.
Si l’on veut expliquer ce phénomène par le mélange
des pouffieres féminales, ce mélange n’auroit pu fe
faire que lors de la précédente formation de ce grain
unique qui a produit deux épis fi différens, & cela
reviendroit à l’explication que j’ai donnée, que dans
un même grain de bled il peut y avoir plufieurs germes
équivoques fufceptibles de différentes formes
felon les circonffances. Le mélange des pouffieres qui
produit des plantes métiffes, de nouvelles efpeces &
même de nouveaux genres qui n’avoient jamais exi-
f fe , eff un argument invincible en faveur de l’opinion
qui admet la dégénération du froment,en feigle & en
ivraie ; j’ai fur ce fujet une lettre curieule que m’écrivit
M. Commerfon , en m’envoyant un nouveau
genre de plante qui doit fa naifi'ance à l’art & qui n’a-
voit jamais exillé dans la nature. Voye:^ aulTi Brad-
Hijloin natiirelU des Fraijîers ^ par M. Duchefne.
Quoi qu’il en foit du changement d’efpece, il eff
P L A avoué que le froment dégénéré lorfqu’ün ne change
pas les femences &: qu’on feme toujours dans le même
fol, le grain qui en efl provenu. M. Gaffelin , a
aufli remarqué que par une fuite de cette dégénéra-
lion , les épis devenoient blancs, foibles & llériles ;
& que pour éviter cet inconvénient, il ne falloît choi-
fir pour femence que les épis roux qui font toujours
les plus forts , les plus vigoureux & les plus grenés.
1°. Le feigle ell un genre de plante fans pétale , te
qui ne diffère du froment qu’en ce que le grain &
l’épi font plus minces , plus maigres, plus alongés,
& d’une couleur plus bife. L’épi du feigle eft plus
plat, toujours barbu, de fon grain plus foible & plus
nud , quitte plus aifément la balle. Sa tige poufle au
commencement des feuilles rougeâtres qui deviennent
vertes par la fuite , mais qui font plus longues
& plus étroites que celles du froment ; elle porte fix
â fept tuyaux 8c quelquefois davantage, à la hauteur
de cinq , fix ôc l'ept pieds : ces tuyaux font droits ,
femblables â ceux du froment, mais plus grêlés, plus
longs 8c montant eu épis un mois plutôt que le froment
, ce qui prouve les inconvéniens de femer du
méteil qui eft un mélange de bled 6c de feigle, parce
que ce dernier plutôt mCir tombe de l’épi avant que
le froment n’ait acquis fa maturité.
Ün diftingue aufii cette plante en feigle d’hiver ,
qui fe cultive comme le froment d’hiver, 5c en feigle
de mars, qui doit fe femer un peu plus tard que le
froment marfais, mais fans lelfive ni jiréparation de
chaux, parce qu’il n’eft point fujet à la nielle ni au
charbon comme le froment ; mais il eft auffi plus fujet
à l’ergot, elpece de poifon dont j’ai parlé à l’article
M a l a d i e s des grains. Au furplus, le feigle a
de grands avantages, il eft moins fujet que Le froriienc
à être endommagé par le gibier 8c les oifeaux, il ell
plus aifé à conferver dans les greniers, il vient bien
dans les pays froids 8c dans les terres qui feroient
trop maigres pour le froment.
Il eft une autre efpece de feigle qu’on nomme f e l -
g/e b la n c , qui eft une efpece d’épeautre un peu plus
nourri 6c plus épais que le feigle ordinaire. Il tient
du froment 8c de l’orge, on l’appelle en quelques endroits
bled-barbu , il eft plus hâtif que le feigle commun
8c que le froment, on penfe que c’eft Xolyra des
Grecs 8c des Latins.
On cultive le feigle prefque par-tout, les montagnards
8c les peuples des pays feptentrionaux s’en
fervent ordinairement pour faire du pain : mais il
faut remarquer à ce fujet, que le feigle eft de meilleure
qualité dans les pays froids que dans les pays
chauds. On ne mange prefque par-tout que du feigle
en Suede, oüil donne une farine très-belle. Cependant,
il y diminueroit chaque année de qualité 8c à
la fin il ne feroit bon à rien, fi l’on n’avoit foin de ne
pas femer du feigle deux années de fuite dans le même
champ, de cette maniéré ce grain ne s’abâtardit
jamais 8c il refie très-beau. Dans toute la Pruffe, on
ne connoît pas le pain de froment, mais feulement celui
de feigle. En Italie , an contraire, on neleyuhive
qu’au pied des Alpes ; 8c fi on en cultive ailleurs,
c’eft plutôt pour fervir de fourrage aux animaux ;
quand les années font favoraliles, on peut les faucher
trois fois la premiere année, 8c deux fois dans le
cours de l’année fuivante.
En France , on cultive beaucoup le feigle, parce
qu’il vient en abondance 8c avec une grande facilité,
même dans de mauvaifes terres où l’on ne peut
recueillir du froment ; quand 1 année eft feche ou
froide , on a des feigles en abondance. Les anciens
avoient un proverbe pour défigner les efpeces de
terre qui conviennent au feigle 6c an froment.
Les froments fane ra s en la terre boueufe ^
Les feigUs logeras en la terre poudreufe.
P L A
La paille de feigle n’eft pas fi bonne pour le
bétail que celle de froment, mais elle eft Ircs-
utile pour faire leur Imere & des hens ; cominc
elle ell fort longue , on ne la bat point avec le
fléau 8c on la laiffe en fon entier , pour s’en fervir
à^couvrir les granges & les mailbns ; on l’emploie
à lier les gerbes 8c la vigne, à faire les pa-
liffidcs, &c. On l’appelle en Bourgogne du gluy.
ün fait avec la farine de feigle , du pain qui
tient le premier rang après celui de la farine de
froment. Il eft très-blanc, lorfqu’on n’y emploie
que la fleur de farine ôc qu’on le fait avec
il eft affez bien levé ÔC d’un gout agréable ; il paffe
pour rafraîchilTant, & entre dans le régime des
perfonnes qui fe prétendent échauffées. Le pam
groffier de feigle , n’a pas les mêmes avantages,
fl leve mal, il eft épais , gluant, lourd , indigefte.
Tel qu’il eft cependant , c’ eft la nourriture ordinaire
de plufieurs provinces , comme la Champa-
gn« , l’Autunois , le Morvant, la Sologne , l’Anjou
, le Rouergue , d’c.
3°. L’épeautre (ii) , autrement appelle froment
rou"c, froment locar, bled Locular , efpece de froment,
dont la racine fibreufè pouffe , ainfi que le
bled ordinaire , un nombre de tuyaux menus , à la
hauteur d’environ deux pieds ; l'es feuilles font
étroites; la plante reffemblc bcaucouj) â celle du
froment, mais elle a les tuyaux plus minces, Lépi
plat 8c uni, le grain jetté feulement des deux côtés,
8c une barbe longue 8c déliee : le grain eft plus
petit 8c plus brun que celui du froment ordinaire;
il eft de couleur rougeâtre foncée , comme fon épi.
Suivant l’auteur de la Uaïfon Rujîlqne, il y en a
deux efpeces , l’une fimple, 8c l’autre qui a double
bourre, ôc toujours deux grains dans chaque gouflè : ,
il y en a qui regardent le feigle blanc , dont nous '
avons parlé , comme une efpece d’épeautre : le peuple
l’appelle communément de Vefpiote.
Ce grain n’eft nullement délicat fur la qualité
du terrein. Que la terre foit légère ou argilleufe,
il n’importe ; fa culture eft femblable à celle du
froment, excepté qu’il faut femer l’épeautre de
bonne heure , quoiqu on fâche qu il ne »era mur
qu’après le froment, étant, dit Olivier Déferrés ,
Le bled le plus lidrif à faner & le plus tardif à moif-
fonner, demeurant en terre plus que nul autre. Comme
fa paille eft dure 8c de petite fubftance, elle n]eft
point goûtée du bétail ; enforte qu’on ne cultive
ce grain que dans les endroits où l’on ne peut
élever ni froment , ni feigle.
Les anciens faifoient beaucoup plus de cas de
l’épeautre que nous ; ils l’appelloient la femence ,
comme fi c’eut été le grain par excellence ; la
raifon pouvoir être , premièrement, parce qu’ils en
faifoient’ des fromentées, ou efpece de bouillies ,
qu’ils eftimoient beaucoup ; fecondement, parce
qu’ils ne donnoienr point de paille à leur bétail,
8c que celle-ci ne fervoit qu’à faire de la litiere.
L’épeautre croiflbit dans les endroits rudes 8c montagneux
de l’Egypte, de la Gre ce, de la Sicile ôc
de l’Italie : on le'cultive encore beaucoup en Suiffe
ôc en Allemagne , oii il réuflît bien ; on s’en fert à
faire de la biere : le pain qu'on en fabrique n’eft
point défagréable au goût, mais on prétend qu’il
eft lourd à l’eftomac. La tunique ou balle étant adhérente
à l’épeautre, on ne peut )a féparer qu’an
fricaffant le grain, ou le faifant rôtir ; mais ce bled
eft fifort en ufage en plufieurs endroits de l’Allemagne
, qu’on y a inventé des moulins qui ne fer-
(<i) Horitum diflidum fpica caniidà feu briia nuncupatum, Tourn. C’eft le ^cia des Grecs, 6c le {ca ou Cependant M, de Reneaume, dans fes Mémoifreems edne dl’easc aLdaétminise. des fciences, 1708, prétend que c’eft le p r adorcum veterum
que ilbus appelions brance oncpeaiure. Voyez ïartide Bled.
Tome IK
P L A 409
vent qu’à le dépouiller de fa balle. Les meules de ces
moulins ne portent pas entièrement à plomb , de
forte qu’elles ne mordent point fur les grains ,
8c CCS moulins ont un tuyau ou porte-vent, dont
l’embouchure répond à l’endroit d’où fort le grain
mêlé avec la balle , que le froiflèment de la meule
eu a détaché , Ôc par ce moyen , il tombe tout
nettoyé dans la met, ce qui eft très-commode 8c
fort ingénieux.
L’epeautre, eftungrain qui tient en quelque façon
le milieu entre l’orge ÔC le froment; la fleur de là
farine approche de la bonté de celle du froment.
« Quand il ejî ebourré, dit Olivier Deferres, & dé-
» pouillé de fes pellicules , H demeure par apres des plus
» délicats fromens très-propres à faire pain blanc 6*
» friand, mais d'autant qa en cela n'y a du profit, ne
» rendant que fort peu de belle farine pour L'abondance
» du fon qu'elle fait étant moulai & pellée, caufequ'en
» ce royaume telU forte de bled n e f beaucoup prifée ».
M. Duhamel dit qu’on cultive l’epeautre vers
Montargis ; que le pain qu’on en fait eft de bon
goiit, mais qu’il n’eft pas fi délicat que celui du
froment.
4°. L’orge, comme Toutes les autres plantes^
dont la tige eft en tuyau, a beaucoup de racines
fibreufes. Cette tige a deux à trois pieds de hauteur,
o-arnie de cinq à fix noeuds, à chacun def-
quels naiffent des feuilles verdâtres, affez femblables
à celles du chiendent; ces épis font compofés
de paquets de fleurs en filets , fournies en leur
bafe de balles ou d’envelopes rudes 8c barbues ;
aux fleurs fuccedent des graines longues , pâles ou
jaunâtres , farineufes , pointues , renflées en leur
milieu, 8c fortement unies à leur enveloppe.
Il y a des orges d’hiver qui fc fement en automne,
8c des orges printaniers qui fe fement en mars.
L’orge d’hiver, qu’on nomme efeourgeon, feour-
geon , 6c par corruption , fouenon ÔC fucrion , eft
appelle par l’auteur de la Maifon Ruflique , fecour-
geon , comme qui diroit fecours des gens , parce
qu’étant hâtif ( car il mûrit en juin avant tout
autre grain) , il eft d’un grand fecours aux pauvres
gens qui n’ont pas affez de bled pour vivre juf-
qu’à la nouvelle récolte { b ) . On le nomme encore
orge (Caiitomne , parce qu’il fe feme avec le
méteil; orge qiiarré^ parce que fon épi a quatre
rangs de grains ôc quatre coirts ; orge de prime,
parce que c’eft le premier grain qu’on moiffonne.
Le tuyau de cette efpece d’orge eft moins haut
que celui du feigle, mais plus grand que celui de
l’orge commun ; ü eft garni de cinq à fix noeuds
ôc quelquefois davantage, à chacun defquels naif-
lèni des feuilles plus étroite« que celles du froment;
plus rudes, 8c couvertes le plus fouvent d’une fine
pouffiere de verd de mer dans l’endroit qui em-
braffe la fige; fes grains pâles 8c jaunâtres, ventrus
8c pointus par les deux bouts , ibnt ranges fur
quatre lignes parallèles qui donnent une forme
quarrée à l’épi ; fes grains font plus gros que ceux
de l’orge commun ; quand ils font mêlés avec le
froment, on en fait d’affez bon pain. On con-
fomme une grande quantité de ce grain dans le
Périgord & dans le Limofin.
Quoique l’écourgeon feul fourniffe par lui-même
une nourriture affez grofliere, il eft néanmoins d’un
grand fecours pour les pauvres dani les difettes,
p arce qu’il mûrit de bonne heure : les Flamands
font de cette efpece d’orge, une grande confom-
mation en grain, parce qu’ils en font de la biere;
au lieu qu’en France , on la fait plus ordinairemenc
avec de l’orge commun.
(b) Olivier Deferres appelle l’écourgeon barbu-marfes, & il
le ruet mal-à-propos au nombre des fromens. F f f
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