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continuellement les pafliiges des planètes & des
étoiles par le méridien, pour déterminer leurs atccn-
fions droites , & c'eft le fondement de toute l’aftro-
nomie. On lé fert pour cet effet, ou d’un quart de
cercle mural, ou d’une lunette méridienne appellee
auHi irijlrumeni des pa(fages.
Quand on n'a aucun de ces deux inftrumens , ou
que l’on n eft pas afluré de l’exaditude de leur pofi-
tion , l’on emploie les hauteurs correfpondantes_,
q u i, étant corrigées par l’équation des hauteurs , s’il
s’agit du foleil ou d’une planete , donnent le moment
du palTage au méridien.
On calcule aufli continuellement le palTage des
aftres par le méridien , lorfqu’on connoît leurafcen-
fion droite & celle du Ibleil. Il eü évident que û un
aftre a 30«^ d’afcenfion droite de plus que le foleil,
il doit paflér au méridien à deux heures précifes ;
mais c’eft au moment que l’aftre eft dans le méridien
qu’il faut que la différence foit de 30«^ : ainfi,
quand on ne fait pas à-peu-près l’heime où il doit
paffer , on commence par une fuppolition ; on prend
la différence des afcenfions droites de l’aftre & du
foleil pour ce jour-là en général ; on la convertit en
tems , à raifon de 1 5 par heure , & l’on a a-peu-
près le paffage. On calcule de nouveau la différence
des afcenfions droites pour l’heure trouvée ; on la
convertit en tems , & l’on a plus exaélement le
pajl'ijgc cherché. ( M. d e l a Lai^d e . )
Passage par le Nord , {Géogr.Comm. Navig.)
On a pu remarquer en lilani divers articles de géographie
de ce SuppUnunt^i'xwow^ Amérique septentrionale
, Asie , C alifornie , Mer de
l ’ouest, que l’on s’y propoloit pour buf principal,
de prouver que le pajjagi en Amérique par le nord*
oueft étoitimpoftible, 6c qu’il ctoit non-feulement
poftible par le nord-eft, mais fur & facile. On remarquera
encore le meme but dans Vaniçle Y e ço.
Tous ces articles contiennent des raifonsôc des preuves
de cette double aftertion ,_ce qui abrégera beaucoup
celui-ci. Je commencerai par établir quelques
notions dont on doit fe munir avant que de pratiquer
la route que je tente d’ouvrir aux navigateurs.
Les glaces font le plus à craindre dans le voift-
nage des terres : ce font les grandes rivieres qui les
déchargent dans la mer a leur embouchure ; c eft le
vent du nord q ui, fur la mer glaciale, les retient &
les accumule autour des terres. Un vent de fud au
contraire, les fait fondre & les difperfe au loin en
débris flottans. Le froid n’augmente pas à proportion
qu’on approche du pôle ; le Spitzberg eft moins
froid que la nouvelle Zemble, quoiqu’il foit plus
feptentrional de fept à huit degrés. Le Groenland eft
plus fertile au nord qu’au midi : c’eft par la production
d’un pays qu’on peut juger de fa température.
On a trouvé fous le quatre-vingtieme degré de latitude
un marais fans fond , & qui n’eft jamais gelé ;
tandis qu’au foixantieme degré près de Sakiitzk ,
M.Gmelinaffure quedurant deux étés la terrecreu-
fée à treize toifes de profondeur, étoit gelée & dure
comme un roc. Gouldens, qui avoit fait trente fois
le voyage du nord,a certifié à Charles II, roi d’Angleterre,
que deux vaiffeatuhollandois avoieni trouvé
à 89 dégrés, c’eft-à-dire , au pôle Arclique,une
mer libre, profonde & fans glaces. Enfin les navigateurs
ne doivent pas ignorer que l’Amérique eft
plus froide que l’Afie, au moins de dix dégrés. Les
prétendues preuves alléguées jufqu’à préicnt en faveur
de la pofiîbilité du p^^ÿdge par Us mtrs du nord-
o iu j t fe réfutent d'elles-mèmes ( la neuvième
carte géographique de ce Supplément ). On a refferré la
mer orientale : mais ce qu’on perd fur cette mer, on
le regagne du côté des terres , qu’on avance jiifqu’à
207 dégrés de longitude. Des-lors on retranche une
P A S bonne partie de l’oueft de l’Amérique, q ui, refferré
de ce côté , fe trouve encore limité vers le fud par
une clpece de golfe qu’on tait avancer au-delà du
foixantieme degré de latitude. Mais que deviendront
alors les relations de tous les peuples de l’Amérique,
placés entre le cinquantième & le foixantieme dégrés
de latitude, qui parlent d’un continent de mille
lieues vers l’oueft} Que dira - t - on du témoignage
d’un peuplefauvage qui venoit du cinquante-unieme
dégré, fans avoir la moindre connoiffance d’une mer
dans fon voifinage ? Si les Sauvages de la baie d’Hud-
fon n’ont aucune idée de ce pajfage, qui doit être
fort proche de leur contrée, comment fe perfuader
qu’il exifte? On le place à 61 dégrés 30 minutes.
AVilfon, dit-on, y a paffé, & n’y a trouvé fur la fin
du détroit qu’une mer fans terre de côté ni d’autres.
Pourquoi donc chercher encore ce p^Jfage qu’un An-
glois a trouvé, quand on en a la latitude précife?
Mais c’eft; en le cherchant que d’autres Anglois,
choifis par M. Dobbs, ont découvert qu’il n’exiftpit
pas, & qu’au lieu d’une mer, ils n’ont trouvé que
des rivières. Ellis convient lui-même que tomes fes
recherches aboutirent à découvrir que le prérendu
détroit trouvé par AVilfon, finiflbit par deux petites
rivières ; qu’ayant tente à droite & à gauche,il avoit
trouvé une ouverture au fud, mais barrée par une
file de rochers, & une ouverture au nord , qui expi-
roit à trois milles de l’entrée. Cependant Ellis prévenu
pour ce pacage, le cherche dans un autre endroit.
Mais les raifons qu’il donne pour vouloir qu’on
le trouve, font bien foibles. S’il y avoit, dit-il, un
grand continent à l’oueft de la baie d’Hudfon, on y
trouveroitde gros bois, cependant on n’y voit
que des buiffons. Je réponds que le continent de la
Tartarieeft très-vafte; cependant il n’y croit point
de grands arbres au-delà du foixantieme dégré : c’eft
le froid, & non pas feulementle voifinage delà mer,
qui s’oppofe à la végétation des arbres. Il y a des
îles, des ifthmes, des montagnes voifînes delà mer,
qui font couvertes de forêts. Ellis fuppofe un flux de
la mer du fud, qui exifte jufqu’à fix cens lieues dans
les terres. Pourquoi donc n’a-t-il pas fuivi ce flux au
tems du reflux ? Pourquoi n’a-t-il pas cherché cette
mer du côté de l’oueft ou du fiid-oueft? Ellis a trouvé
des baleines de deux cens pieds dans la baie de
Hudfon: il fuppofe qu’elles venoient de cette merin-
connue, & conclut qu’elle ne doit pas être éloignée.
Mais comment auroient-elles franchi un pajjage fi
étroit que celui qu’il a trouvé ? Enfin, on fuppol'e ce
pacage tantôt au foîxante-deuxieme, tantôt au foi-
xante-cinquieme, & tantôt au foixante-nsuvieme dégré.
Mais une nation fauvage, placée au foixante-
douzieme degré , vient jufqu’au Fort-Bourbon, fous
le cinquantc-feptieme dégré, toujours à pieds, fans
avoir aucun ufage des canots, ni lapins légère connoiffance
d’une mer ou d’un détroit, fi ce n’eft d’une
baie à l’eft. Comment une mer aufli grande que celle
qu’on fuppofe à l’oueft, fcroit-elle ignorée des peuples
qui voyagent à deux ou trois cens lieues autour
d’eux? Toutes les nations américaines, depuis le
foixantieme degré jufqu’au quarantième, parlent
d’un continent de cinq cens lieues, & de quatre à
cinq mois de marche. Dans toute cette étendue, il
n’y a donc pas un détroit entre les mers du fud & du
nord. Ces fauvages ont moins d’idée de cette mer,
au nord-oueft de leur pays, qu’ils n en ont de peuples
éloignes à mille lieues dechez eux. Enfin, quand
bien même il y auroit wnpaffage au nord-oueft vers
le pôle, pourquoi le chercher parla baie de Hudfon,
jiifqu’aufondde la baie de Baffins, pour venir paffer
fous le pôle, & fe porter au cap de Schalaginskoi, à
travers une mer inconnue, peut-être coupée d’iîes
& de rochers, peut-être fermée par des terres?
Pour revenir à Ellis, un de mes amis qui le vît à
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Uvoimie, ! ly a y à 8 ans, lui parlant de les decouvertes
Ellis lui dit naturellement qu’il croyoït tou-
iours un ou un détroit à la Répulle-Baie ,
Hc non ailleurs ; que du refte , il ne penloit pas que
cette decouverte pût être d’un grand ufage , n\ que
même refpéiance d’un pa(fage de ce côté put être
réalilée à l’avantage de la navigation. Je ne fuis pas
étonné qu’EUis ait renoncé à une opinion qu’il avoit
ibiitenue avec tant de zele. Mais je trouve fort remarquable
cju’il ait perfifté à croire qu’il y eut un
détroit à la Répulfe-Baic , avant qu’on parlai delà
decouverte dont je vais donner l’hiftoire.
Dans les papiers publics du mois d’avril 1769 , je
lus ce qui fuit. 4 ‘jv/f/.
« I ly a quelques mois, qu’un officier, qui a ci-
M devant monté des vaiffeaux de Li compagnie de la
» baie de Hudfon, fit part aux miniftres, qu’il avoit
» trouvé le pajjage déliré par le nord-oueft pour
» aller aux Indes orientales ; ayant 'heureufement
» paft’é du détroit de RépullV-Baie à un autre dé-
w troit par lequel il avoit paffé dans l’Océan de la
» Tartarie. Cet officier, de l’agrément du miniflere,
» commença à mettre au jour ces découvertes &
» dreffa de.s plans & des cartes exaéles des côtes
» par lefquclles il avoir paffé. Mais cette publica-
tion a été tout-à-coup fiipprimée , & l’on pré-
>f tend qu’il a été réfolu , fur les inftances de la
»» compagnie des Indes , & celle de la baie de Hud-
» fon, de ne point rendre pjiblique cette découverte,
»ni rien qui y eft relatif».
On peut juger combien ma curiofité fut excitée
par cette nouvelle ; j'écrivis dans rinftant à un ami
de Londres, aufti curieux que moi de pareilles découvertes
; les priant de vouloir me dire au plutôt,
fl le fait étoit v ra i, fi on n’en pouvoir favoir le détail,
quel étoit le nom de l’officier , &c. &c.
J’eus une prompte réponfe , que le fait étoit vrai,
que le capitaine fe nommoit Alexandre Cluny j qu’un
libraire lui avoit dit, que dans peu il publieroit un
ouvrage de ce navigateur, avec une cane ; quoiqu’il
n’y toucheroit rien de cette découverte ni n’en diroit
quoi que ce fut, jufqu’à ce qu’il fût aft'uré de la ré-
compenfe promile.
Je foupçonnai pourtant que la carte du moins don-
neroit plus ou moins d’éclairciftcment, & je priai
mon ami de m’envoyer cet ouvrage , fitôt qu’il
paroîtroit; demandant s’il n’y avoit pas moyen de
tirer quelque chofe de plus de M. Cluny. Il m’envoya
le livre me promettant de faire fon jioffible
pour parler au capitaine ; & de me faire lui-ménje le
rapport de leur entretien, devant me venir voir en
feptembre.
L’ouvrage a pour titre, VAmerican traveller^ ou le
Voyageur Américain^ &c. fans nom d’auteur. Voici
ce qui regarde l e , comme on pourra le voir
fur l’extrait de la carte ( Voyei carte AT.). Le fond de
la Repulie-Baie, eft entre 66 & 67 ^ latitude 291 ^
longitude; le détroit fe détourne un peu incliné vers
leôSt^^ latitude & 2 8 9 longitude, jufqu’à prefque
6 9 latitude & 165 longitude ; de maniéré que là
longueur ne feroit qu’environ 27^, ce qui feroit 202 ^
lieues , jufqu’à fa communication avec la mer du
nord ; la fin forme deux caps ; l’un vers le nord , cap
Spurrèl, l’autre au Sud, cap FowUr;\-A côte vers
l’eft prefque tout oueft & oiieft-liid-oueft jufqu’à
<S8'* latitude & 2iOd longitude, vers l’endroit oîiil
fuppofe que Givofden avoit abordé.
Je prcflài donc mon ami d’avoir un entretien avec
M. Cluny & de lui demander 1°. fi réellement il
avoit vu & pafl'é ce détroit ? i'*- Pourquoi, ne voulant
rien publier de cette découverte, il avoit tracé
ce détroit fur fa carte ? 3*^. Qu’à 83 a n’ayant vu ni
îcrre ni glace , pourquoi il n’avoit pas été allez en-
yieux de poufl'er julqu’àu pôle pour le reconnoitre ?
Tome IV,
P A A 2 5 1
Mon ami m’en fit le rapport verbal en feptembre,
m’affurant qu’iI avoit eu une converfation avec M.
Cluny fur la fin d'aoùt ; mais occupé des préj)ara[ifs
de Ion départ, ils croient convenus d’en avoir une
plus ample à fon retour ; qu’il avoit répondu à mes
queflions:
1°. Que réellement il avoit vu & j)affé ce détroit,
que meme il avoit examiné tous les environs, ayant
fait pliifieurs voyages par terre dan.s ces quartiers.
Qu’il y avoit tant de détails & de circon-
ftances, lur cette découverte , au point que par l’inf-
peclion de la carte feule, & lans des explications on
n’en pouvoir giiere faire ufage.
3®. Que la penfée lui étoit bien venue de pouffer
vers le pôle, mais qu’il avoit en même tems réfléchi
qu’on ignoroit tout de ce côté ; que des gouffres ,
quelque vertu aimantée, ou d'autres dangers étoient
à craindre fous le pôle, & qu’un feul vaiffeau ne
pouvoir rifqucr ce voyage, avant que toutes les
circonftances n’en fiiffcnr connues.
Je recommandai fort à mon ami d'avoir une ample
cenverfation avec M. Cluny à fon retour, lur
divers objets, dont je lui donnai la note.
II ne put fe rendre à Londres avant le mois de
février 1770. Auffi-tôt il écrivit à M. Clunv, &
lui demanda un moment d’entretien. Le capitaine
répondit c^u’il le j)rioit d’attendre le rétabliffement
de (a famé , qu’aiors il viendroit voir mon ami à
fa campagne : celui-ci s’en informant, en juin , apprit
fa mort.
Tous ces faits étant intereffans par eux-mêmes,
inconnus, & par la mon de M. Cluny, devenus tels
que peut-être on oubliera cette découverte ( * ) , on
en donnera avec le tems quelque conte fcmblable à
ceux de l’amiral de Fonte & de Fuca. J’ai cru qifil
convcnolt de faire un rapport fideie de tout ce que
) en iais, & l’accompagner de quelques réflexions.
Que dire de cette découverte? Onme pardonne-
roit bien quelques doutes.
Midleton doit avoir découvert la baie de Ré-
pull'e (quoique le N e tte lia ait été auparavant placé
à peu près dans ces memes parages) : il l’a trouvée
de fix à fept lieues de largeur au fond , & point
de pajj'age, ce qui lui a fait donner le nom de R c -
pulJé-Buie. Tous les environs remplis de glacçs ,
le vaiffeau en fut pris le i i ou 12 juillet au nord-
oueft du cap Dobbs; une riviere dont l’embouchure
étoit de 7 à 8 lieues; le lieutenant envoyé le 15
pour la remonter, revint le 17 , ayant pénétré par
les glaces, & trouve qu’elles en cotivroient toute la
largeur; point de poilfons dans cette riviere, fans
doute parce qu’elle eft le plus fouvent glacée.
Comment efpérer que dans un détroit, qui avoit
échappé à Midleton , il n'y eCtt pas de glaces ; dans
un détroit, dis-je, de paffé 200 lieues de long, entre
67 & 69 de latitude ? mais les Anglois prévenus
, dirent que Midleton s’étoit laiflé corrompre.
Si d’un autre côté je fais réflexion , que Cluny a
dit avoir vu ; qu’il s’eft adreffé aux miniftres, qu’il
avoit commencé à drefl'er des plans & des cartes;
qu’il efpcroit une grande récompenfe, & fans doute
d’être employé pour perfeêlionner la découverte
avant que de l ’obtenir ; que les deux compagnies
dévoient être perfuadees de la vérité, puifqu’elles
fe mirent à la traverfe ; qu’il a également tracé le
pajjage fur la carte publiée, impolc des noms
aux deux caps, &c. on n’en devroit plus douter. On
peut y ajouter que le peu & très-peu qu’on fait des
(*) Je me ùiis trompe en ceci ; on parle d’enrreprsndrc une
nouvelle tent.itive vers le nord-ouell cette année i -'72, & 011
efpere d’y réiiffir, parce que , dit-on , un particulier .a pnlTé ce
détroit; on ne le nomme pas, mais ce ne faureit être un autre
que ce capitaine Cluny.
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