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c’cll liir-tout cil fait de langage qu’on p6ut clire^
Quufid tout /c monde a tort, tout U monde a raifort.
11 n’en cÙ pas moins vrai qu’il y a clans la nature une
infinité cj’cjl>;ets d’un caraélej'e li marque, ou de
grandeur ou de ban'dîc, que rcxprcfTion propre en
cil drcmiollenicnr noble ou baflc chc/. toutes les nations
cultivées, &C qui ne peuvent être avilis ou relevés
que par une forte d'alliance que l’eNqu-drion
juétapiiyrique fait contrarier à l’idée, ou par feipece
de div’crliüiî que le mot vague ou détourné lait à
i’iniagination.
A notre égard & dans notre langue, Icfeul moyen
de lé former une idée judo du langage noble, c’c l l ,
<|uant au familier, de fréquenter le monde cultivé
& poli; quant au llyle plus élevé, de lé nourrir
de la Icélurc des écrivains qui ont excellé dans
l’éloquence & dans la haute poélie.
Du tems de Montagne & d’Amiot, les François
n’avoient pas encore l’idée du ilyle noble. Comparez
ces vers de Racine:
Mais quelque noble orgueil qu iifpire un fitigfi bciUty
Le crime d'une tnere eji un pejunt fardeau.
Avec ceux-ci d'Amiot:
Qui fent fon pere ou fa rnere coupable
JJi quelque tort on faute reprochablt,
Cela de eCEur bas & lâche Le rend.
Combien qu'il Ccùt de fa nature grand.
Et ces vers d’un vieux poète appellé la Grange:
Ceux vrain'ent font heureux
Qui nont pas le moyen cT cire fort malheureux ,
ILt dont la qualité pour être humbli 6' commune j
Ne peut pas ilia f ter la rigueur de fortune ,
avec ceux que Racine a mis dans la bouche d’Aga-
luemnon :
Heureux qui fatisfaic de fon humble fortune ,
l.ibrc du jongfiiperbc oii je fuis attaché,
Hit dans l'état olfeur ou les dieux l'ont caché !
Ce n’a été que depuis Malherb:', Balzac & Corneille,
que la ciifiérence du Ilyle noble 6c du familier
populaire s’eilfait fentir ; mais de leur tems' même
le Ilyle noble étoit trop guindé & ne le rapprochoit
pas allez du familier décent qui lui donne du naturel.
Corneille fentoit bien la néceiïlté d’etre limple dans
les chofes ruTij)les ; mais alors il defeendoit trop bas,
comme il s’élevoit quelquefois trop haut , quand il
vouloit cire fublime. Racine a mieux connu les limites
du Ilyle héroïque & du familier noble ; & par la
facilité des j)an'ages qu’il a fu le ménager de l’un à
l ’autre , par le mélange harmonieux qu’il a fait de
ces deux' nuances , il a fixé pour jamais l’idée de
l'élégar.ce & de la noblejfc du Hyle.
C ’eil le plus grand fcrvice que le goût ait jamais
pu rendre au génie ;car tant qu’une langue ell vivante
que ridée de décence 6c de noblejjé dans l’expref-
iion ell variable d’un fieclc à l’autre , il n’y a plus
de beauté durable ; tout périt fuccelTivement. Hoye^
dans ri.*l'[)ace d’un demi-fiecle combien le Hyle de
la tragédie avoir changé , 6c comparez aux vers de
VAndromaque de Racine, CCS vers de VAndromaque
de Jean Heudon en 1598.
O trois 6’ quant fois plus que nés fortunée
Celle qui au pays fa mifere a bornée ,
Sur la tombe ennernit ayant foufjcrt la mort ,
Et qui n'a comme nous été lotiie au fon ,
Vnur entrer peu apres , captive , dans la couche
£>'un fuperbe vainqueur & fàgneur trop farouche ,
E l lequel pour une autre , étant faoulé de nous ,
Serve , nous a baillée <i un efclave époux !
Que manque-t-il à cela pour être touchant? une
oxprelfion élégante & noble. C’ell encore pis , fi
l'on compare d l'Hcrmiow de Racine, la Didïainc
de Heudon. CcUe-ci, en apprenant la mort de Pyrrhus
, s’éevie :
Ah ! je je/is que c'ef fait, je fuis morte , autant vaut.
IJtlas ! je réen puis plus ; le pauvre coeur me faut.
Dans ce tcms-hl, voici comment on annonçoit à
une reine la mort tragique de fon fils.
P’ülrc fils s'ejljetté du haut d'une fenêtre ,
La tète contre bas. Envoyeq-U quérir.
Hélas , madame ï il c f en danger de mourir.
Aujourd’hui l’on rlroit aux échus , li fur la fcenc
on cntencloit pareille choie ; 6c ce qui feroit fi ridicule
pour nous, croit loucl'umt pour nos aïeux :
tant il ell vrai que dans une langue vivante rien
n’cll alTuré de plaire 6c de réulfir d’un liccle à l’autre
, qu’autant que les idées de Inenféance 6c de no-
blijje ont été fixées par des écrits dignes d’en être les
modèles. Aujourd’hui même, pour être naturel avec
noblefc, il faut un goût délicat 6c sûr.
7/ aura donc pour moi combattu par pitié
dit Aménaïde en parlant de Taiicrede ; cela cil noble.
I l ne s'ef donc pour moi battu que par pitié é*
eût été du Ilyle comique. ( M. Aî.iKMOKtTEi.')
NOÈyrcpos,(^IIifLfucr.')h\s dcLamech. C'en. P'',
2p. Il naquit l'an du monde 1056, 2944, avant
Jcliis-Chrifl ; il fut julle 6c i>arfait clans toute la conduite
de fa v ie , & trouva grâce devant le Seigneur,
qui voyant la malice profonde tics hommes, 6c que
toutes leurs voies ctoient corrompues, rdlolut de
faire périr par un déluge tout ce qui rclpiroit lur lu
terre. Dieu ordonna donc ù Noé de bâtir une arche
pour lelauver du déluge , lui 6c toute lu famille,
avec des bêtes 6c des oilcaux de route efpcce, mâles
6c femelles. Il marqua lui-même la forme , les mc-
fures 6c les proportions de ce grand vaillcau, qui
devoir être de la figure d’un coffre, long de 300
coudées , large de 50 , 6c haut de 30, enduit de bitume,
6c dilli'ibuc en trois étages , dont chacun devoir
avoir plufieurs loges. Noé crut à la parole de
Dieu , 6c exécuta tour ce qu’il avoir commandé. Ü
crut des chofes qui n’avoient aucune apparence ; 6c
lur cc fondement il entreprit un ou\'rage lans exemple,
6c perlévcra pendant un liecle dans cc travail,
malgrcles railleriesdcs hommes. Une ceffoit pendaiii:
ce tems d’avertir les hommes de ce qui devoir arriver;
mais ceux-ci, tropoccuj>és de leurs affaires 6c de
leurs plaifirs,traitoient de rêveries tout ce que leur
difoit Hoé do la vengeance di\ ine qui alloit éclater
fur eux : Depuis que nosptresfont morts , diloicnt -ils,
toutes chojesJoni comme elles étaient au commencement.
Gen. P'I. Cependant Noé ayant tait porter dans l’ar-
chc toutes les chofes néceffaires pour la vie des hommes
6c des animaux qui dévoient y entrer, lej)t jours
avant le déluge , Dieu lui ordonna d’y entrer lui-
même avec la femme, les trois fils 6c leurs femmes ,
6c des animaux de toute cQ ece, qui vinrent par couple
fe préfenter à lui par un inflinêl particulier que
Dieu leur donna. 11 étoit alors âgé de 600ans; après
que tout fui entré, Dieu ferma l’arche cn-dehors ; oc
le jour de la vengeance étant venu , la mer fcdJjorJa
de tous côtés, 6c il tomba une pluie horrible pendant
quarante jours 6c quarante nuits. Toute la ti-rre fut
inondée, 6c tout périt, excepté ce qui étoit dans
l’arche, laquelle flottoit fur les eaux. Ajjrès que les
eaux eurent couvert la face de la terre pendant lyo
jours, Dieu fe fouvint de Noé ; il fit Ibuffler un grand
vent qui commença â faire diminuer les eaux; 6c
Icpt mois après le commencement du déluge, i ’ar-
che fe rcpolii fur les montagnes d’Arménie ou te
mont Ararat, près la ville d’Erivan. Le dixième jour
du dixième mois , les fommets des montagnes le
découvrirent; ÿc quarante jours s’étantpaffés depuis
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ipie l’on cvit commence à les appercevoir, A V ouvrit
la fenêtre de l’arche, 6c lâcha un corbeau,
qui en étant forti, ne rentra plus: il alloit 6c reve-
noit jufqu’à ce que les eaux fuffent entièrement def-
féchées. Il envoya enfuite la colombe q ui, n’ayant
pu trouver oît affeoir fon pied , revint dans l’arche :
lépt jours après il la renvoya de nouveau, & elle
revint portant dans fon bec un rameau d’olivier dont
les feuilles ctoient toutes vertes. Noé connut par-là
que les eaux ctoient retirées de deffus la terre; 6c
après avoir encore attendu fept jours, il laiffa aller
pour la troifieme fois la colombe qui ne revint pas.
Il fit alors une ouverture au toit de l’arche ; 6c regardant
de-lâ , il vit la terre entièrement découverte :
cependant il paffa encore j)rès de deux mois dans
l’arche; 6c après ce tems , il en fortit im an après
qu’il y fut entré. Son premier foin fut de dreffer un
autel au Seigneur, 6c de lui offrir en holocaufie un
de tous les animaux purs qui ctoient dans l’arche.
Dieu eut l'on facrifice pour agréable, le bénit lui 6c
fes enfans, fit une alliance avec eux , 6c voulut que
l’arc-en-cicl en fût comme le ftgne , afin que toutes
les fois qu’il paroîtroit il fe fouvint de ce paûe qu’il
fail'oit avec eux , & qu’il empêchât les eaux d’inonder
une autrefois la terre. Après ledéluge,A^!9/fe mit
à cultiver la terre, & il planta la vigne. Elle étoit
connue avant ce tems-là , mais Noé fut le premier
qui la planta avec ordre, 6c qui découvrit l’ufage
qu’on pouvolt faire du raiiin en exprimant la liqueur.
Ayant donc fait du vin, il en but ; 6c comme U n’en
avoit point encore éprouvé la force , il s’enivra, &
s’endormit dans fa tente. Cham fon fils l’ayant trouvé
découvert d’une maniéré indécente, s’en moqua,
6c en donna avis à fes freres, qui marchant en arriéré,
couvrirent d’un manteau la nudité de leur pere. Noé
à fon rév eil, apprenant ce qui s’étoit paffé , maudit
Chanaan , fils de Cham , dont les defeendans furent
dans la l'uite exterminés par les Ifraclites , 6c bénit
Sem ÖC Japhet. Ce faint homme vécut encore 350
ans depuis le déluge, 6c mourut à l’âge de 950 ans ,
recommandable fur-toau par la grandeur 6c la fermeté
de fa foi. Ce fut par cette toi, félon les paroles
de S. Pau l, qu’ayant reçu un avertill’ement du c iel,
6c croyant ce qui n’avoit encore alors aucune apparence,
il bâtit l’arche pour fauver fa famille ; il fut le
réconciliatciir du genre humain , 6c le médiateur de
l’alliance de Dieu avec les hommes, le confervateur
de la religion 6c de la piété, le héraut de la pénitence
, l’héritier 6c le prédicateur de la vraie julllcc ,
6c le pere d’un monde tout nouveau. Tous ces cara-
fteres fe trouvent réunis en fa perfonne, quoique
dans un fens très-borne, qui nous avertit de ne pas
nous arrêter à lu i, mais de nous élever jufqu’au v éritable
libérateur dont il étoit la figure , & à qui feul
ces aiigulles qualités conviennent dans toute leur
étendue. Gen. P ',C ,y .E c c l. X L l F , iy .I f.H V ,c j.
Eu X I r . 14. Mat. XXIH. j y . Heb. X I , y .j. Pent.
I II. 20. (4-)
NOËL , f. m. (^Mußq. d'églife.') forte d’air deftiné
à certains cantiques que le peuple chante aux fêtes
de Noël. Les airs des no'éls doivent avoir un caraèlere
champêtre 6c palloral convenable à la fimpücitc des
paroles, 6c à celle des bergers qu’on fuppofe les
avoir chantés en allant rendre hommage à l’enfant
Jéfus dans la crèche. (.S)
NOEMA, belle, {Hiß. fier.') fille de Lamech
6c de Sella, foeur de Tubalca'ïn. On croit qu’elle
inventa la maniéré de filer la laine, 6c de faire la
toile 6c les étoffes, 6c que c’eft la même que la Minerve
des Grecs. Gen. IV. 22. (-f)
NOÉMI, belle, ( Hiß.facr.) femme d’Elimelech,
de la tribu de Benjamin , laquelle ayant etc obligée
de fuivre fon mari dans le pays des Moabites, l’y
perdit, ôc maria fes deux fils, Chélion 6c Mahalon,
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à Orpha & à Ruth , filles Moabites. Ces deux jeunes
hommes étant morts fans laiffer d’enfans, Noémi réfo-
lut de retourner dans la Judée , 6c fes deux bats
l’ayant fuivie, elle les conjura de reprendre le chemin
de leur pays , parce qu’elle n’étoit point en état
do les établir dans le ficn. Orpha la crut, 6c revint
chez la mere ; mais Ruth ne voulut point la quitter,
6celles arrivèrentenfemble à Bethléem, dans le tems
que l’on commençoit à couper les orges. Ruth demanda
donc permilfion à fa belle-mered’ailcr glaner,
pour amaffer de quoifubfûler pendant quelque teins,
6c elle alla dans le champ d’un nommé 7?oo.^, homme
fort riche , 6c le proche parent d’Eümelech , qui
l’invita à fuivre fes moiffonneurs, 6c à manger avec
les gens. Ruth de retour à la malfon , ayant appris
à Noémi ce qui s’étoit pafié , ccile-ci l’avertit que
Booz étoit fon proche parent ; 6c elle lui donna un
expédient pour le déterminer à Fépoufer. Ruth fulvit
le confeil delà belle-mcro , 6c réiiflït à fe marier
avec Booz, dont elle eut un fils nommé Obed, qui
fut un des ancêtres de Jéfus-Chrjfi. Toutes les femmes
en féliciter'cnt Noémi: béni fait le Ssiyieur ,
difoient-elles , qui na point privé votre famille d'un
héritier qui fera revivre le furnom 7 ’Ifraël , & qui fera
votre corfolation & le foutien devotre vieillejje. Noémi
prit foin elle-même d’élever l’enfant, 6c elle lui fer-
vit de nourrice, Ruth , / , 2 , j , 4. (-{-)
N(JLODUNUAl, ( Géogr. anc. ) cnliute Diablin-
tes. Ptolomée nous indique la ville principale des
Diublintes ,\0'.\s\c nojn de Noeoditnum ; c’efi: fous
celui de Civltas Diabhntum que la Notice des provinces
de la Gaule en fait mention dans la troifieme
Lyonnoife.
Par les écrits du moyen âge on découvre fa pofi-
tlon dans le Maine, fous le nom de DiabUntes. Dans
le teftament de l’évêque Bcrtehram , de l'an 61 ^ , on
trouve oppidum Diablintis, depuis Jiiblent dans un
titre de 1225 ; 6c comme un bourg dans le
doyenné d’Evron, près de Mayenne, en tirant vers
le Mans : les débris qu’on y voit d’un ancien édifice
font regardes comme un monument dus Romains.
D ’Anv. Not. Gal. page 48G. {C .j
N'CEOMAGU'S, {Hijl. anc. ) capitale des VadN
caffes, que Ptolomée place avec les Meldi, dans
l’intérieur de la Lyonnoil'e, à l’orient des peuples
Scgujiani ( du Forez ) , près la Belgique ; cette po-
fiiion énoncée a étc finvie par Gerard Mercator qui
marque les VadicaJJës à l’efi d’Auiiui. Ortelius , lavant
géographe , n’a pas ofé trop s’écarter de la
polition donnée par Ptolomée ; il les a placés entre
Autim, la Saône 6c la Loire, dans le pays de Cha-
rollois; mais il n’a pas lait attention que ce pays
faifoit partie des Ædui, 6c qu’il efl encore du diocefe
d’Autun.
Jofeph Scaliger a cru que Nxomagus croit Noyon,
en Picardie ; mais Noyon n’étoit point une cité ,
c’etoit un château, cafirum Noviomacum , de la cité
des Veromandai, dans la Belgique.
Nicolas Sanlôn, 6c après lui Philippe Briet, ont
cxw (\\.\Q\çsP^adicaJJes ét.oient dans les environs de
Nevers, mais cette ville étoit de la cité àisÆdui:
Novioduniirn Æduorum , dit Céfar.
Clavier a imaginé que Ncomagns étoit Nuys en
Bourgogne , 6c que les VadicafJ'es étoient fituésdans
ce canton ; mais il auroit dû remarquer que Nuys
étoit delà cité d’Autun, qui s’érencloit jnfqu’à la
Saône. Adrien de Valois place les P'adicajfes dans le
pays de Châlons-fur Marne, 6c penfeque cette ville
étoit le Nceomagus de Ptolomée , le fondant fur le
nom de Noviomagus , qu’on lit fur une voie Romaine
, décrite dans la table de Peutinger , qui marque
Noviomagus aux environs de Reims ; mais ce Novio-
magus étoit dans la Belgique,fur une voie qui codniu-
foit de Reims à Cologne, en paffantpar Vau-d’Etréc