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trop petite quaiitité pour produire un changement
lenlible , puilquc par leur moyeu ou ne pouvolt
cclalrcr i\ la fois qu'une petite partie de l’iris. Je fis
à ce lujct un autre cône de canon non tranlparont
dont la baie avoir cin<[ pouces de dîametfe. Je coupai
ce cône vers ia pointe par une i'edHon parallèle
à l'.i baie. Cette l'edHon circulaire qui avoir un dcini-
pouce de diamètre , fut couverte <l’un diiciue de
carton que je découpai tout autour de fa circonte-
rcnce en y faifant une ouverture annulaire , de
façon qu’il reÜoit au milieu un petit cercle de carton
l'outcnii des deux côtés par deux petits^ brins
que j’avois exprès lalfl'és en découpant ; ainfi la lumière
devoir l'ortir du cône fous la figure d’un anneau
lumineux , avec lequel j'éclairai exadlement
tout le contour de l'iris du chat pendant que la prunelle
refloit dans l’ombre du petit dilque,central.
De cette fiçon je réitérai fouvent l’exiiérience, augmenta
m la lumière me lervant de cartouches plus
ou moinsgramis,i!^ jamais la prunelle ne le coniradla,
quelque parfaitement que l’iris fût éclairé.
Je \’Otdus aufîî cflayer fi je ne produirois rien en
augmentant de beaucoiq) la force delà liimiere.J’in-
trodnifis dans un cône de papier une lentille plane
d’un côté Si convexe de l’autre , Sc après celle- ci
une autre convexe des deux côtés, de façon que le
foyer ou la réunion des rayons fortoit tout jufte
hors de la pointe du cône. La lumière y étoit fi
vive , qu’on ne pouvoir pas l’endurer fans douleur,
de façon que le chat entroit en fureur cfTayoit
de m’échapper toutes les fois que je falfois tomber
cette lumière fur fit prunelle. Je fis avec cette nia-
chine les memes expériences que ci-deffus , & je vis
conflamnient que la lumière qui atteint le fond de
roL'il, ell la feule qui tait rétrécir la prtinelle , & que
quand la lumière frappoit l’iris , la prunelle étoit
immobile, 6c l'animal ne donnoit aucune marque
de fenfation douloureul'e. La meme choie arriva,
quand je fis ufage d’une petite lentille de microlcope
adaptée à la pointe d’un cône, laquelle donnoit un
petit foy er, mais d’une lumière très-vive & perçante.
J’ai répété toute cette longue fuite d’expériences
en mefervant de la lumière du folcil, introduite dans
une chambre par un feul petit trou. Les effets font
les memes,fl ce n’elf que les mouvemens de la prunelle
font plus grands qu’à la lumière de la bougie.
Ce que j’ai clfayc fur le char, l’a été aulîl fur un
çhien 6c fur les yeux de quelques-uns de mes amis ,
ik les übfcrvaiions 6c les réfultats ont toujours été
les memes.
Je crois être en droit de conclure fans exception
que l’iris n’efl pas irritable parla plus vive lumière
extérieure , mais qu’il fe meut uniquement, quand
la lumière j)ar la prunelle va jufqu’au fond de l’oeil:
Sepuilque le cryllallin , l’humeur vitrée, 6c tout ce
que la lumière rencontre fur ia route jnl'qu’à la riiim
eff incapable de fenfibilité 6c d'irritabilité , on doit
auïïi convenir que tous les mouvemens de l’iris qui
fe remarquent en conféquence de la lumière, naif-
fent de fon aélion fur l’intime organe de la vue.
Ces vérités que j’ai établies par des preuves di-
reétes 6c décifives , concourent admirablement à
expliquer pluficiirs maladies fingulieres de l’oeil,
maladies qu’on n’a pas fu connoître à fond jufqu’à
préfenr, & qui font même inexplicables dans l’un-
cicnne hypothefe fur les mouvemens de l’iris; aufii
ces mêmes maladies peuvent fervir à confirmer de
j)lus en plus les vérités que je viens d’établir. C ’efl
un fait aflc'z connu , que dans les amaurofes ou gouttes
fcrcincs, quand le principe du mal refide dans
le nerf optique , l’iris perd toute forte de mouvement,
de façon que les chirurgiens admettent fon
immobilité pour indice certain du dérangement de
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l’organe de la vue. Dans les cataraéfes aufii, qxianti
le mal réllde dans le cryllallin , la prunelle perd un
peu de fon mouvement, 6c elle le perd en proportion
de la plus grande dilatation de l’opacité fur le
cryllallin;aulllquand l’humeur vitrée le trouble j);u-
le glaucome (maladie tres-grave de l’oeil ) , Fuis
refie en partie 6c fort fouvent entièrement immobile.
Si donc la prunelle n’cflpas mife en mouvement
par cette lumière qui fiajîpc l'Iris , mais le rétrécit
ou s’élargit parle mo)cn des rayons qui parviennent
iufqii’à l’organe de la vue, qui elf capable
d'irritabilité , il en faut néccffaiicmcnt conclure (]ue
dans ramaiirofis, quand la ùùm ou le nerf opticjue
lent affeélés, elle doit relier immobile. De mémo
dans les cataraéfes, moindre cil la lumicrc qui peut
parvenir au fond de l’oeil , moindre doit être Ion
mouvement ; mais [.'lus le ci illallin devient opaque,
moins de lumière peut trouver pafiage , ainfi
l’iris doit en eonf'équonce être moins mobile.
Dans le glaucome , fi toute rhumenr \ irrée<!cvient
opaque , l’iris devient immobile ; car tout pafiage cil
bouché atix rayions de la lumière , ou s’il en paffe
encore quelques-uns , elle fe meut aufii en proj)or-
tion: ainfi les mouvemensdes priinellesdoivcnc être
proportionnés , 6c à la fenfibilité qui relie dans l’organe
, 6c à la quantité de lumière qui petit parvenir
jul'qu’au fond de l'oed.
De l'étcu nalurtl de l ’iris , & de la producUon des
n:onverncns dans l'iris, par lu lumière qui Jrappe
lu réline.
LoiTqtie la m'/'Ô/c eff frappée par la lumière, on
voit l'iris fe mouvoir, 6c la prunelle fe rétrécir <à
la lumière trop vivo , 6c s’élargir fi elle ell moindre.
Il y a donc une caufé de ce mouvement 6c de cette
concorde entre la f enfation de la rétine 6c tes mouvemens
de l’iris. Si l’on eût remarque quelque connexion
des parties, elle auioit éclairci une queflion li difli-
cil(î ; mais ici l’anatomie nous abandonne. On ne
dilcerne aucun filament du nerf optique ou delà
rétine , qui aboutiife à l’iris ; c’efl de-l;\ que naît i’in-
ccriitude 6c le lilencc des anatomifies Itir ce point,
l.’hypoihefe de M. Mariottequi, luppofant que la
choroïde ell l’organe do la vue, 6c que l’iris fait partie
de la choroïde , feroit foudain difparoître toute
difficulté, ne doit être comptée pour rien, car la
choroïde n’étant pas l’organe de la vue , Ion fyfiême
tombe tout à la fois.
Le feul Nforgagni, très-favant anatomific , effaya
le premier ce que pcifonne n’auroit pti mieux faire
que lui. Il imagina tjue lanauire n’avoit j)as en vain
prolongé la rétine jufqu'au corps ciliaire ; 6c recherchant
quel ufage ])Ouvoit avoir le bord de h rétine ynxs
de l’iris , propoia la conjeéhirc très-fubtile qui fuit.
« Neque tarnen reliruc uluriorem progreßum inttlileni
cenfeo : irno nlßine conjeclura fu llit, indefonaße repe-
tendu caufu cß, car pro varia retina ab irnmißo lamine
ugltaiione , continuo ciliare corpus, 6' annexd iris varui
agitatione fe dijponunt, videlicet ut conjuncla retina
unßones, aut ejus fpirituum motus alio alius modo,
graduve , cum ciliuri corpore comtnunicaniur. Quodfi
conjcclurarn non improbes , etiumß non portas ciiin hlu-
riotto, choroidern eß'e pracipuum vijïts Inßrumencum ,
habebis tarnen iindc intelligas , cur uLitu pupilla ln ob)-
curioTi loco dilaietur , in luminc contrahatur : qttod dU
explicacu dißicillimum , ß retina vif lis ßaiueretur orga-^
Tiurn, cenfebutiK Epiß. Anat. //, § >8 , pag.
Dans cette conjeéliirc, on fnppofe , li je ne nie
trompe , que la rétine fra[)pée par la Inmlerc ,lbulhc
des trémoufiemens 6c des ofcillations, en un mot
qu’elle cfl irritable ; que ces ofcillations parvenues
jufqu’à fon bord , fe communiquent au corps ciliaire,
6c de celui-ci à l’ii is , 6c qu’ainli fe fait la contracllon
de la prunelle par la trop vive lumicre. Mais l’illufi^^
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Haller a déjà démontré par des faits, que le nerf
ifeft pas irritable, 6c qu’il ne trémoufle ni n’ofcille,
Giiel que foit le corps dont il ell frappé ; on ne peut
donc lifivre la conjeéhire de Morgagni,pmfque la
^fôneeflune moelle nerveufe comme Je nert optique.
Et en effet, comment peut-on imaginer des
vibrations 6c des trémouflémens dans un corps mou
& muqueux comme \z. rétine, 6c d’ailleurs environné
de parties molles? moins encore peut-on concevoir
que CCS vibrations puiffem fe communiquer à les
parties les plus éloignées, par le feul léger attouchement
de quelques foibles rayons de lumière, fur
le fond d’une membrane très-lubtile 6c très-flalque.
Mais quand même quelque légère ofcillation poiir-
roit parvenir jufqu’aux bords de la rétine., comment
peut elle être communiquée au corps ciliaire? Scs
plis font durs , forts , 6c étroitement attachés à la membrane du corps vitré, 6c moins en ctat de
iranfmettre à l’iris les vibrations reçues par le moyen
du corps ciliaire. Quand on accorderoit même
qu’elles y paffent, l’iris n’en feroit pourtant pas remué
, piiifqu’il ell immobile aux piquures d’une aiguille,
à l’aaion d’une très-vive lumicre, 6c aux
ItinccIIes du feu éleélrique. Mais fi cela e l l , les ef-
prits animaux même ne pourront la remuer; car
je n’entends pas comment peuvent être tranfmifcs
au corps ciliaire les vibrations des efprits animaux,
quelque infenfibles 6c légères qu’elles foient. Cependant
oil ne trouve aucune connexion ou filament
de la rétine au corps ciliaire 6c à l’iris , jamais l’iris
ne fait aucun mouvement, lorfqu on pique fesnerfs,
ou le nerf optique même 6c la rétine, dans les animaux
encore vivans ou morts depuis peu , Sf lorf-
qu’on va jufqu’à percer avec des épingles ces parties,
comme je l’ai plufieurs fois eflaye.
Ainfi, ce point de phyfiquc animale ell jufqu’à
préfent entièrement inconnu , 6c il faut d après les
expériences examiner comment cette connexion 6c
cette analogie dans les mouvemens peuvent exifter,
& quelle ell l’origine de leurs differences; mais on
ne peut connoître le vrai changement de I iris , fi
on ne connoît fon état naturel ou de repos; ce ll
donc à cette recherche qu il faut, avant tout, s attacher.
Les anatomifies ont cru allez communément
que l’état naturel de l ins ell fon rétrccifiement,
c’ett à-dire, quand la prunelle eft plus large; mais
n’ayant pas trouvé d’afl'cz fortes raifons pour me
perfuader, je commençai à douter , & de ce doute
naquit l’envie de faire une longue fuite d’obferva-
îions. J’avois toujours vu l’iris convexe dans mon
chat, 6c tel il eft aiilfi dans les hommes. Je ne con-
cevois pas comment il pouvoit garder fa figure dans
fon expaiilion , quand la prunelle fe rétrécit, li cela
n’etoit pas fon état naturel ; car il paroît qu il de-
vroit plutôt s’applatir dans ce mouvement, par la
contraélion des fibres circulaires fuppolées, comme
i’avoit cru Winfiow ( Mérn. de lacad. /y2/.),qui
ne s’ étonne aucunement de ce phcnonieiie, tout
contraire qu’il ell aux théories déjà reçues ; je cherchai
donc l’état de l’iris dans le fommeil : fûr de le
trouver dans fon état naturel, j’eus recours à mon
chat devenu , par l'habitude , docile & patient.
Après lui avoir fait eflûyer une longue diete de
plufieurs jours, je lui apprêtai de quoi manger
largement, de façon que demi-heure après je le
trouvai étendu par terre, abattu par le fommeil.
Je me couchai doucement lur le lit , le tenant toujours
dans mes bras , avec une paupière tjue j'eus
foin de tenir ouverte pendant deux heures avec mes
doigts. Quand je commençois enfin à défefpérer de
le voir endormi , je vis la prunelle fe rétrécir à
melûre que l’animal approchoit de l’état de Ibm-
meil. Deux minutes n’ètoient pas écoulées, qu’il
commença à trembler,copime s’il eût été en con-
lorne IV,
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vulfion. J’ai obfervc plufieurs fols la même chofe
dans les animaux enfevelis dans un profond fommeil
, parficiiliéremcnt dans les chiens. Dans mon
chat endormi, la prunelle étoit réduite à une cilipfc
très-applatle , 6c pas plus large au milieu qu’un
quart de ligne; elle alla toujours décroilTant julqu’à
ce qu’elle fut réduite en très-peu de tems à moins
(l’im tiers de ligne de longueur 6^ à moins de largeur
en proportion. La prunelle n’efi jamais fi fort
rétrécie , quand elle efl frappée par la plus vive
lumière , réunie par des lentilles fur la rétine. Je répétai
cinq fois en dlffcrcns tems l’obfervation énoncée.
Toujours quand le chat s’endort, la prunelle
fe rétrécit pardégrés. Dans le fommeiüc plus profond
elle eft plus étroite encore, mais jamais entièrement
fermée; comme je l ’ai vue depuis. En m’y prenant
de la forte , il fallolt beaucoup de tems, 6c le chat
s’endormoit difficilement les yeux ouverts : j’imaginai
donc de le tenir couché avec moi, gardant
une petite bougie allumée à quelque difiance, le
chat tourné de telle façon, que fes yeux ctoient à
l’abri de la lumière. A peine fut-il endormi, que je
lui ouvris doucement les paupières, mais avec grande
difficulté ; car du moment que je lui roiichois
l'oeil, de la main, il fe réveilloit. Je me mis donc
à lui tenir toujours une main fur la tête, ÔC à attendre
dans cette pofiurc qu’il fût endormi , de façon
qu’avec un feul doigt je lui ouvrois aifément les
yeux , fans difeonlinuer la preffion de toute la
main fur la tête. La prunelle toujours plus petite
dans le plus fort fommeil, n’étoit pourtant pas
toujours égale , ni de la même configuration , mais
paroifToit toujours fous des figures differentes, le
plus fouvent elliptique, fermée en haut 6c en bas,
6c fi rétrécie , qu’il n’y refioit qu’un petit trou
ovale au milieu, prolongé en deux petites découpures
capillaires. En général, la prunelle étoit
trois ou quatre fois plus longue que large , 6c tott-
jours beaucoup moindre que quand le chat étoit
éveillé, même expofé à la plus vive lumière. J’ai
eu enfin deux fois le plaifir de la voir entièrement
fermée , fans qu’il y en eût d’autre vcfiige de prunelle
, qu’une efpece d’incifion longue d’une ligne ,
6c pas plus large qu’un cheveu. Ayant réitcié l’ob-
fervation avec une lumicrc forte 6c vive , je vis
que la prunelle n’étoit pas fufceptible d’ultérieur
rétreciffementjÔC toutes les fois que le chat couvroit
l’iris avec fa troifieme paupière,en regardant de côté
à travers la cornée, on voyoit la piiinelle très-
étroite à l’ordinaire dans l’ombre de cette membrane.
N’étant pas encore content d’avoir vu la prunelle
des chats entièrement fermée dans le fommeil, je
voulus voir celle de l’homme. U y avoit un petit
enfant de dix-huit mois ou environ , qui à une certaine
heure du foir dormoit très-profondément. Un
jour au coucher du foleil, je le trouvai endormi
dans une chambre, où à peine y avoit-il aficz de
jour pour démêler les objets les plus voifms. Je lui
ouvris doucement les paupières de l’oeil droit ; il
parut iè réveiller, mais aufii tôt il retomba endormi
; la prunelle trcs-rciiecie étoit réduite à un petit
cercle pas plus large qu’un fixiemc de ligne , 6c
les bords de l'iris paroifi'oient flotter dans l’humeur
aqiieufè; il m’etoit arrivé d’obferver la même chofe
dans le chat. Pour m’affurer que la prunelle de-
meuroit ainfi rétrécie, j’éveillai l’enfant, 6c foudain
elle fe dilata beaucoup, mais pour peu de
tems, car elle fe rétrécit par degrés julqu’au diamètre
d’une ligne, 6c fe maintint dans cet état pendant
une heure 6c demie. Ainfi dans le fommeil, elle
étoit, autant qu’on peut juger par la fimple infpe-
èiion, irentc-fix fois plus petite. Ayant examiné
uliifieurs auircs fois cct enfant dans le fommeil ,
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