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510 P O R s’enflammer alfcment, mais encore fc rompre avec
facilite , quand on frappe dans le milieu pour les
faire tomber fur la grille du fourneau.
Peu à peu le feu s’augmente , & plus il acquiert
d’afîiviic , plutôt la bûche , qui fair l’office de
porte à rouvertiire fupérieure du foyer, s’enflamme
aifement ; ainfi il faut que la peribnne qui fert le
fourneau ait toujours une bûche à la main prête à
remplacer celle qui ell brûlée , afin que le foyer
ne refie jamais ouvert. Le feu augmente toujours
de plus en plus ; & fur la fin de l’opération , il
acquiert tant de véhémence , que l’on diroit que le
fourneau va fc liquéfier. Il faut dans ce moment
obferver exaflement la flamme qui fort par la cheminée
: elle pafTe fucceffivcmcnt du rouge pâle au
blanc étincclanr; quand elle ell dans cet état, &
que le dedans du fourneau ell ablolument enflammé
au point de ne pouvoir plus diflinguer les ga-
fettes d’avec la flamme qui les environne , ce que
l’on peut voir par rouvemire pratiquée au-deffus
du foyer , & que l’on nomme l'oeil du fourneau ,
examine les morceaux d'épreuve ;
pour cela on débouche l’ouverture d’épreuve , &
on en tire avec des pincettes les montres qu’on
examine après les avoir laifTé refroidir. Si l’on trouve
qu’elles ne lôient pas affiez cuites , on continue
le feu ; mais fi elles ont reçu le degré de cuilTon
convenable , on cefTe le feu , on ferme l'ouveriure
du foyer avec la lame de fer, & on lailTe le fourneau
fe refroidir. II faut vingt-lix à vingt-fept heures
pour la ctiiffion , & environ quarante - huit
heures pour refroidir le fourneau. Nous avons oublié
de dire que lorfqu’on avoir obfervc l’intérieur
du fourneau par l’oeil ^ , il failoit le refermer tout
de fuite avec une brique exactement compaffiée à
ce trou.
Quand on ouvre les gafettes pour en tirer les
pieces , on trouve affiez fouvent que la violence
du feu ayant fait fondre le fable , dont on avoit
parfemc le fond , ouïe plateau , pour y pofer les
pieces de porcelaine; ce.fable à demi vitrifié s’efl
attaché au pied des vafes , & en rendroit l’ufage
défagréable, ffi on ne l’otolt : ce qui exige un dernier
travail. Ce fable s’ôte avec le tour du lapidaire.
On répand de l’émeri broyé à l’eaii fur la
roue de fer, qui a un mouvement très-accéléré,
comme on fait, & on paffie l e s q u i tiennent
ce fable vitrifié fur cet émeri, jiifqu’à ce que
le fable foit entièrement emporté. C’effi pourquoi
les petits cercles qui fervent de pied aux affiettes
& aux taffies porcelaine ^ ne font jamais couvertes
de vernis.
Dis couleurs^ de la façon de les préparer ^ delà
maniéré de les appliquer fur la porcelaine. Il y a plu-
fieurs chofes à obferver dans l’art de peindre la porcelaine;
la compofition des couleurs, les fondans
qui leur donnent de la liaifon & de l’éclat ; le véhicule
pour appliquer ces mêmes couleurs, qui eft
un compofé gras qui en lie toutes les parties, &
leur donne affiez de confiflance pour être appliquées
avec le pinceau ; & enfin le feu néceffiaire pour
fondre ces memes couleurs fur les vafes de porcelaine
qui en font décorés. M. le comte de Milly ,
que nous ne faifons que copier en l’abrégeant, eft
entré dans les détails les plus exaéls & les plus
précis fur toutes les parties d’un art fi agréable.
Après avoir parlé de plufieurs véhicules dont on
peut fe fervir , pour appliquer les couleurs à la
furface de la porcelaine , il donne la préférence à
l’huile effentielle de térébenthine ; mais comme
cette huile éthérée effi très-fluide, M. le comte
de Milly preferit de la difliller au baio-marie , pour
lui donner la confiflance convenable. Par cette dif-
tillation, on en retire l’huile la plus fluide; celle
P O R qui refte dans la cucurbite s’efl épaiffie, & efl propre
à Être employée pour fervir de mordant ; fi
clic le trouvoit trop épaiffie , on lui redonneroit
de la fluidité, en y mêlant de l’huile éthérée.
Le tondant cil compofé de borax calciné , de
nitre & de verre blanc, dans la compofition duquel
on s’effi aflûrc qu’il n’cfl point entré de plomb.
M. de Milly dit qu’on ne peut point preferire la
quantité de fondant qu’il faut employer, qu’elic
dépend de la nature des couleurs» qu’ainfi il faut
les effiayer & en tenir rcgiflre pour l’employer en-
fuite avec fuccès. Les doles des matières qui entrent
dans la compofition du fondant , font quatre gros
de poudre de verre, deux gros & douze grains de
borax calciné , quatre gros & vingt-quatre grains
de nitre purifié.
Il y a plufieurs maniérés de divifer l’or por.r
l’employer dans la peinture, & elles réuffiiffient toutes
également : i®. l’amalgame ; 2°. la précipitation
de l’or diffious dans l’eau régale, faite fans fel ammoniac
par l’alkali fixe; 3". la divifion de l’or en
feuille , par le moyen de la trituration avec du
fucre candi. Lorfqu’on a obtenu une poudre très-
fine d’or par quelqu’une de ces trois maniérés , &
qu’on veut dorer une piece de porcelaine , on mêle
de cet or en poudre avec un peu de borax & de
l’eau gommée, & avec un pinceau on trace les
lignes ou les figures qu’on veut. Lorfque- le tout eft
féché, on paffie la piece au feu, qui ne doit avoir
que la force nécelî'aire pour fondre légèrement la
furface de la couverte de porcelaine, pour lors
on éteint le feu. L’or eft noirâtre en fortant du
fourneau; mais on lui rend fon éclat en frottant
les endroits dorés avec du tnpoli très-fin , ou avec
de l’cmeri; enluite on le brunit avec le bruniflbir.
La couleur pourpre fe prépare avec de l’or dif-
foiis dans de l’eau régale , &T un mélange d’etain &
d’argent diflbus dans de l’acide nitreux. L’eau régale
dont le iervent les Allemands pour diffioudre l’or ,
fe compofé un peu différemment que l’eau régale
ordinaire. Ils prennent parties égales d’efprit de
fe l, d’efprit de nitre 6c de fel ammoniac, mettent
cette compofition fur des cendres chaudes , jufqu’à
ce que le fel loir diffious, ayant foin de ne boucherie
marras que légèrement pour éviter l’explo-
fion. On obtient du violet par le même procédé ,
6c feulementon ajoute plus de diffolution d’étain 6c
d’argent à la dilîblution d’or, & pour varier la teinte
de ces couleurs ou le ton de couleur de ces précipités
, on y mêle plus ou moins de diffiolution d’étain.
La couleur brune nommée en allemand feme fe fait
avec une diffiolution, à laquelle on mêle une diffiolution
d’étain feule fans argent. L’eau deviendra
noire ; verfez deffus de la diffiolution de fel commun,
6c vous obtiendrez un précipité d’une couleur brime
foncée, tirant un peu fur le violet ; on variera le
ton de cette couleur, en employant de l’étain plus
ou moins pur. On prépare un beau rouge avec le
fer ; pour le fixer, il fuffit d’avoir eu foin de le calciner
avec deux parties de fel marin. Pour préparer
la couleur noire, on emploie parties égales de cobalt,
de cuivre fulphuré & de terre d'ombre. Le
brun fe fait avec de la terre d’ombre , 6c le verd
avec du cuivre. On tire un beau bleu du cobalt. Du
fmalt choifii & broyé donne auffii du bleu. Du fmalt
plus foncé, connu fous le nom de bleu d'aqiir ^ 6c
qui n’ eft que le verd de cobalt, fournit un bleu
foncé. On fait un jaune tendre avec du blanc de
plomb de Venife, calciné au creiifet. On peut employer
auffii le jaune de Naples, dont voici la meilleure
compofition : elle eft de M. de Fougeroux, de
l’académie des feiences : cérufe , douze onces ; antimoine
diaphorétique, deux onces ; alun 6c fel ammoniac,
de chaque demi-once : on mêle le tout dans
P O R un mortier de marbre ; on le calcine enfulte fur un
tell â fe'.i modéré, qu’on continue pendant trois
heures, ayant foin d’entretenir la capfiile rouge,
endant tout le teins de la calcination. Suivant la
mianâté de RI ammoniac qu’on emploie, la couleur
du jaune de Naples varie.
Quant à la préparation des couleurs, on les pile
dans un mortier d’agate , de porcelaine ou de verre,
avec un pilon de meme matière, le plus promptement
poffibie 6c à l’abri de la pouffiiere ; enfuite on
les broie fur une glace adoucie 6c non polio , avec
une molette auffii de verre adouci comme la glace.
On les broie avec une petite quantité de fondant
ou d’huile , parce que fi l’on en mettoit trop , cette
huile en s’évaporant, laiffieroit des vuides entre les
molécules colorées, & le deffiein feroit imparfait ;
d’ailleurs , les couleurs étant de chaux métalliques,
courroient rifque de fe revivifier par le phlo-
gilliqiie que l’huile leur foiirniroic ; c’eft pourquoi
U eft abfolument nécefl'aire de faire fccher la peinture
fur un poêle , â une chaleur affiez conficlérable
avant que de la mettre au feu. On broie les couleurs
comme celles qu’on emploie dans la miniature,
jufqu’à ce que l’on ne fente plus d’afperités fous la
molette ni fous les doigts : leur fluidité doit être telle
que l’on en puiffie faire aifement un trait léger & net
avec un pinceau. Alors on prend de ces couleurs
ainfi préparées pour en former ce que les peintres
en porcelaine nomment des inventaires ; ce font de
petits morceaux de porcelaine , fur lefquels ils font
des traits de deux ou trois lignes de largeur , avec
un numéro correfpondant à celui de la couleur, bc
qu’ils mettent enfuite Ibus un mouffle pour y fondre
les couleurs, ayant foin de remarquer le tems
qu’il faut pour vitrifier ces couleurs. Cette précaution
eft néceffiaire pour en faire un uiage affiiiré ,
parce que toutes cos couleurs font brunes avant
que d’avoir paffé au feu, de forte que lut la palette
elles n’ont pas le ton qu’elles auront fur la porcelaine
lorfqu’elles auront paffié au teu , ce qu’on appelle
parfondre les couleurs. Toutes les couleurs préparées
fe mettent chacune fur un morceau de verre
adouci 6c non poli; fous ce verre eft un papier
blanc pour mieux faire foriir la couleur ; fur ce papier
eft le numéro de la couleur, & à côté du verre,
le numéro correfpondant de l’inventaire. L’artifte
forme avec ces couleurs primitives des teintes telles
qu’il le juge néceffiaire, en mettant toujours chaque
teinte fur un verre adouci. C ’eft ainfi qu’il charge
fa palette , puis il peint.
Les fieces de porcelaine, au fortir des mains du
peintre, font expofées à la chaleur d’une étuve très-
chaude, pour faire fécher les couleurs 6c évaporer
l’huile; pour cela on les met fur une plaque de taule,
percée de plufieurs trous ; enfuite on met ces pieces
dans le mouffle pour parfondre les couleurs & leur
donner le vernis. Les inouffles font des vafes de
'terre à porcelaine, qui doivent réfifter au feu , 6c
dont la partie fiipéiieure eft circulaire en forme de
v o û t e , 10. Elles doivent fe fermer exaâement
avec une porte de même maticre , qui eft oppofée
à la partie b, où eft le canal ou tuyau d’obferva-
lion. On introduit les pieces de porcelaine peintes
dans ces mouffles, de façon qu’elles foient ifolées ,
6c ne touchent point aux parois de la mouffle , afin
que, lorfque ces couleurs le fondent, elles ne s’effacent
{fas par le contaft. Ces mouffles font de di-
verlés grandeurs pour les difterentes pieces. Lorfqu’elles
font chargées, elle fe placent furies grilles
Z-, i , dans les cafes a , æ , a , d’un fourneau de
briques, lices avec de la terre-â-four, tel que le
repréfente la fig. n. Ces calés font auffii de différentes
grandeurs fuivant les mouffles qu’on y veut loger.
Ces fours çnt environ cinq à fix pieds de hau-
P O R : i î
teur. A deux pieds de haut on j>ratique doux couHffies
pour chaque cafe dans les parois des murs de fepa-
ration,pour y placer un plateau de fer ou de taule
epaifle c , c , c , dont on va expliquer l’ufage. A deux
pouces 6c demi ou trois pouces au-deffius de ce
pl.ateau, on fixe dans le mur des grilles de fer b , b, by
pour y poler les mouffles. Lorfqu’ellcs font pofees,
on charge^^les plateaux de fer de charbon de hêtre
ou de chaîne bien choifi & bien fain , au point qu'il
ne fume pas en brûlant, ün eu remplit tout l’elpa-
ce entre le plateau 6c les grilles, on en entoure encore
les mouffles jufques fur le dôme, enfuite on
remplit les petits interftices que les morceaux de
charbon ont lailî'cs entr’eux , avec de la bralfe de
boulanger ; fi bien que les mouffles fe trouvent
enfévelies dans le charbon : 11 ne doit fortir hors du
charbon que le tuyau ou canal b , deftiné à voir ce
qui fc paffie dans la moi ffle ; on met dans ce canal
des petits morceaux de porcelaine ^ larges de deux
lignes , lur lefcjucls on a mis des couleurs les plus
difficiles à fondre, pour pouvoir juger du moment
où il fera à propos de ceflér le feu.
Toutes CCS chofes étant ainfi difporées, on allume
le feu avec quelques charbons ardents que l’on
met autour de la mouffle , & on les laiffe s’embrâ-
fer d’eux-mêmes. On doit avoir la plus grande attention
à retirer les charbons qui donnent de la fumée.
Quand tout eft embrâl'é, & que la mouffle
paroît rouge , on retire les montres ou épreuves
qui font dans le canal d’obfervation b fig . / o ; & fi
les couleurs font bien fondues 6c brillantes;on arj cte
le feu fur le champ , en retirant brufquement les
plateaux de fer c , c , c, qui fe meuvent pour cela
dans des couiiffies , & fur lefquels étoient les charbons
qui tombent auffiitôt dans le cendrier, 6c le
feu ceffie. On laiffie enfuite refroidir Je tour, pour
retirer les pieces de porcelaine. Pour ne pas perdre
le charbon qui n’eft pas encore confumé , on l’éteint
dans des étoiiffoirs de taule ou de cuivre, 6c il fert
pour une autre opération.
Tels font les procédés que l’on fuit avec fuccès
dans les manufaclures de porcelaine d’Allemagne. Le
fourneau dont nous avons vu que l’on fe fervoic en
Saxe ^owx c\\vce\d>porcelaine y exige trois compofi-
tions différentes , pour les trois degrés de chaleur,
qui régnent à la partie antérieure, au milieu 6c à
l’extrémité. C ’eft un inconvénient. Le fourneau que
MM. de Montigny & Macquer ont fait conllruire
pour l’ufage de la manufaélure de Seve,a l’avantage
d’avoir par-tout un feu égal , ce qui épargne
la peine de faire trois compofirions ; c’eft ce qui
nous engage à en donner ici la conftruélion.
Ce four eft d’une forme circulaire ; il eft percé
par quatre gorges oppofées, dont les lignes collatérales
tendent au centre , & par lelquelles on
chauffe également par quatre endroits, comme le
repréfente le plan géométral /j. L'épaiffeur
des murailles doit avoir trois pieds ( MM. de Montigny
6c Macquer ne lui en donnent que ueux ) , 6c
le four doit être conftruit avec du grès Icic proprement
comme du marbre, afia que prélentant une
furface plane 6c unie, elles réfléchiflént également
une grande chaleur. Il y a entre deux foyers une
porte affiez élevée pour qu’un homme puûfey paffier;
on la place à trois pieds au-deffus de l’aire du four ,
parce qu’elle doit être murée du même grés après
qu’on y aura arrangé la porcelaine. Quand on veut
enfourner les pieces , on pofe les premieres à l’aide
d’un marche-pied, jiffiqu’à ce qu’on foit au niveau
du feuil de la porte ; ou bien deux ouvriers, placés
l’un fur la porte, l’autre dans le four , font le fer-
vice. Les gafettes fe pofent les unes fur les autres
comme dans les fours de Saxe, 6c il eft à propos
qu’elles ne fe touchent point, ni aux murs du four»
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