en fixassent les limites f il deviendrait encore nécessaire de construire des
ouvrages pour empêcher les eaux salées du lac de refluer sur les terres environnantes,
dont les lagunes ne permettent pas la culture sur une grande étendue de
pays, au sud, pendant huit à neuf mois de l’année.
§. II.
Canal de Fara’ounyeh,
L e canal de Fara ounyeh [Khalyg el-Fara'oimyeh, le canal des Pharaons] traverse
obliquement le haut Delta, du sud-est au nord-ouest : il prenoit autrefois, avant
^établissement des digues au village de Fara ounyeh, des eaux dans la branche de
amiette; il les reçoit aujourd’hui de la branche de Rosette, par son embouchure
a Nadir : c’est ce canal qui, passant à Menouf, chef-lieu de la province de ce nom,
servira pour le passage de la rivière de Moueys dans la branche de Rosette, à moins
que, les choses ne prenant de l’extension par la suite, on ne préférât d’ouvrir un
autre canal plus direct sur Rahmânyeh, qui partageroit plus avantageusement le
Ainsi que toutes les autres dérivations des deux branches du Nil', ce canal a
pu ne servir d’abord qu’aux irrigations : mais l’abondance des eaux qu’il a reçues
par deux grandes ouvertures à Fara’ounyeh, l’a considérablement agrandi ; et la
pente, rapide qu’il a de Kafr-Fara’ounyeh à Nadir, en l’approfondissant et l’élargissant
encore, soutiroit une si grande masse d’eau de la branche de Damiette
que les provinces de Charqyeh, de Qelyoubyeh, de Mansourah et de Damiette!
se ressentirent fortement de l’abaissement des eaux du fleuve. Cette diminution
devint telle, que les eaux de mer, ne trouvant plus, dans les basses eaux du Nil,
leur force d’équilibre vers Damiette, refluèrent jusqu’à Fareskour, et causèrent le!
p us grands dommages. Les malheurs qu’éprouvèrent ces provinces, excitèrent les
plus vives réclamations auprès du Gouvernement des beys : elles furent successivement
écoutées ou rejetées, suivant les intérêts des divers gouvernans, et les sommes
ou les presens plus ou moins considérables qu’ils recevoient des parties intéressées.
La prise d eau du canal fin enfin fermée à Fara’ounyeh par deux digues-sur lesquelles
on construisit de petits ouvrages de défense, dont les beys confièrent la garde au
gouverneur de la province, qui y mettoit des troupes pendant tout le temps de
la crue du Nil. Bientôt la province de Menouf elle-même, celles de la Baheyreh,
de Rosette et d’Alexandrie , se plaignirent du manque d’eau que leur occasion^
noit la fermeture du canal par les digues de Fara’ounyeh. Il y avoit quatre ans
que cet état de choses existoit, lorsque les Français arrivèrent en Egypte; ces
dermeres provinces, privées de l’abondance des eaux qu’elles recevoient avant
1 ouverture du canal de Fara’ounyeh, portèrent leurs réclamations à la décision
du général en chef.
, ^6S Provmces intéressées à la fermeture des digues de Fara’ounyeh vinrent
reclamer en opposition. Ces demandes, fondées sur des intérêts divers, mais
importans, déterminèrent le général en chef à faire paraître à ce sujet, la veille
de son départ d’Égypte pour la France, l’ordre du jour suivant :
Ordre du jour, du quartier-général de Menouf, le j fructidor an 7 [22 août 1790].
« Il existoit, il y a plus de cinquante ans, une digue à Fara’ounyeh, qu’il étoit
» d’usage de couper au moment où le Nil diminuoit, et de fermer au moment où il
» augmentoit; depuis, on a laissé librement passer les eaux par le canal de Menouf.
» Depuis quatre à cinq ans, au contraire, on a rétabli la digue à Fara’ounyeh,
» que Ion na plus coupée, et les eaux passoient entièrement dans la branche de
» Damiette; ce qui a diminué l’inondation du Delta et de la Baheyreh, mais a con-
» siderablement augmenté celle des provinces de Charqyeh, Damiette, Mansourah
” et Qelyoubyeh. Les commandans de ces provinces réuniront les gens les plus
» instruits de leurs provinces, et se feront remettre des notes,
» 1.° Sur la quantité de terrain qui ù’étoit pas arrosée, il y a cinq ou six ans,
» lorsque la digue de Fara’ounyeh n’existoit pas;
» 2.° Sur la quantité de terrain qui se trouve aujourd’hui inondée par l’établis-
» sement de la digue de Fara’ounyeh ;
» 3. Enfin, sur le tort que faisoit à leurs provinces l’usage plus ancien d’ouvrir
33 cette digue au moment où le Nil commençoit à baisser.
»Les commandans des provinces de Menoufyeh, Baheyreh, Gharbyeh, Ro-
33 sette, et d Alexandrie, se feront également remettre desnotes,
33 1.° Sur la quantité de terrain qui étoit inondée avant l’établissement de la
33 digue de Fara’ounyeh;
33 2. Sur celle devenue inutile par l’établissement de cette digue;
33 3. Enfin, sur le bien que produisoit dans ces provinces l’usage plus ancien
33 de couper cette digue au moment où le Nil commençoit à baisser.
33 Le commandant de la province de Menouf se fera remettre un état des
33 dépenses que l’on étoit d’usage de faire toutes les années pour couper et fermer
33 cette digue.
33 M. Le Père, ingénieur en chef, recueillera tous les renseignemens sur cette
33 importante question, afin d’en faire un rapport dans l’année : il fera aussi
33 observer avec le plus grand soin les autres canaux qui paraissent avoir une
33 tendance à porter les eaux de la branche de Damiette dans celle de Rosette.
33 Signé A lexandre BERTHIER, chef de lÉtat-major général. 33
En conséquence de cet ordre, je chargeai l’ingénieur Févre de se transporter
sur les lieux pour y prendre les renseignemens nécessaires; il me remit à ce sujet
un mémoire détaillé : les généraux commandant les provinces m’adressèrent aussi
les renseignemens demandés par l’ordre du jour qui vient d’être cité; et, l’année
suivante, les ingénieurs Jollois et Dubois levèrent le plan du canal, en firent le
nivellement, et me remirent leur travail commun.
Dans la crue du Nil de lan 7 , on trouva, le 12 fructidor [29 août 1799],