
avantages qu’en pouvoient retirer la géologie et les arts, que MM. Berthollet,
Fourier, et Redouté jeune (1), ont été.invités à s’y transporter, et que j’ai eu ordre,
en m’occupant de quelques vues militaires, de protéger leurs recherches dans un
pays exposé aux incursions des Arabes errans, qui viennent', tantôt de la haute
Egypte, tantôt des côtes de Barbarie, piller et assassiner, sur la lisière du désert, le
paisible cultivateur, le malheureux fellâh. Nous nous sommes réunis pour tâcher de
recueillir toutes les observations qui nous ont paru être de quelque utilité. Je vais
rendre compte des détails du voyage, et je laisse à M. Berthollet le soin de
présenter lui-meme le résultat des expériences intéressantes qu’il a faites pour
connoître la nature d’une substance dont le produit sera d’une valeur bien plus
considérable > dès quil aura indiqué les véritables procédés de son exploitation.
§. m
De la Vallée des Lacs de Natroun.
Nous sommes partis de Terrâneh le 4 pluviôse [24 janvier], à deux heures du
matin; et, après quatorze heures de marche, nous avons aperçu la vallée où se
trouvent les lacs de Natroun.
Topographie. La vallée du Nil et celle des lacs sont séparées par un vaste
plateau dont la surface est légèrement ondulée, et toujours parallèlement à la
mer. Ce plateau, qui se soutient à-peu-près au même niveau, peut avoir trente
milles de largeur. Le terrain, ferme et solide, est recouvert de graviers de différentes
grosseurs, de petits cailloux roulés, diversement colorés, et de quelques
cailloux agatisés. Les vents rasans de l’ouest ont poussé sur le revers des collines
qui bordent le Nil, et dans la vallée, presque tous les sables mouvans. La roche
calcaire se montre en quelques endroits à la surface du terrain. Du reste, on
n aperçoit dans ce désert, qu on diroit l’oubli de la nature, que trois ou quatre
espèces de plantes foibles, petites, sans vigueur, et extrêmement disséminées,
telles que le nitraria épineux (2) et la jusquiame violette (3).
Il seroit bien difficile qu aucun être vivant pût trouver sa subsistance sur un
sol dune pareille aridité : aussi nous n’y avons vu qu’une seule espèce d’insecte,
et elle ny est pas commune; c’est la mente obscure. L’épithète que. porte cet
insecte, est bien analogue à l’état d’isolement dans lequel il vit au sein d'un tel
désert.
La direction de la route, en partant de Terrâneh, est d’abord de l’est à l’ouest
Environ deux heures avant d’arriver à la vallée de Natroun, après avoir passé une
espèce de col très-bas qu’on appelle Râs el-Baqarah ou la Tête de la Vache, la
direction se plie à-peu-près au nord-ouest-quart-ouest. On descend ; 1 on trouve à
mi-côte, sur un mamelon, un Qasr, ou fort ruiné, dont l’enceinte carrée, flanquée
(1) Habile artiste pour le dessin des plantes, des M. Dnchanoy, et M. Regnault, élève de M. BerthoIIèt
animaux , et principalement des poissons coloriés, ont été adjoints à la commission.
(a) Nitraria Schoberi, Lin. (3) Hyoscyamus damra, Fors.
de tours rondes a deux de ses angles ,■ est bâtie avec des fragmens de natroun ;
ce qui annonce que les pluies ne sont pas considérables dans cet endroit. On voit,
sur la pente opposée, le couvent A'el-Barâmous, ou couvent des Grecs ; à gauche*
à-peu-près à la même distance, le couvent des Syriens et celui d’Anbâ-Bichây*
placés dans le voisinage l’un de l’autre.
Nous avons lié par un triangle le Qasr, le couvent d’el-Barâmous, et celui des
Syriens. Ayant pris pour base la distance entre le Qasr et le couvent d’el-Barâmous,
que nous avons fait mesurer, et qui s’est trouvée de 7231 mètres trois
quarts, le calcul du triangle nous a donné 7430 mètres deux tiers pour-la distance
entre le Qasr et le couvent des Syriens, et 9258 mètres un quart pour
celle entre ce dernier couvent et celui d’el-Barâmous. La route pour se rendre d’un
de ces endroits à 1 autre, est de sable mouvant, ferme parfois, avec quelques efflorescences.
On aperçoit çà et là quelques plantes ; on rencontre presque par-tout
du gypse et des bancs de roche calcaire, et l’on voit, entre le couvent d’el-Barâmous
et celui des Syriens, de la très-belle craie.
Géographie physique de la vallée. ^ La vallée de Natroun fait un angle d’environ
44° ouest avec le méridien magnétique. Les lacs, quant à leurs positions
respectives et à leurs longueurs, sont dans le même sens, qui est celui de la vallée.
Le P. Sicard marque leur bassin perpendiculaire à la direction de la vallée ; ce
qui est contraire à l’hydrographie en général. Le P. Sicard n’indique sur sa carte
quun grand lac, et il en existe six, trois au nord du Qasr.et trois au sud. Les habi-
tans de Terrâneh en comptent même sept ( voyez la carte topographique de
lEgypte) : le lac n.° 4 a été effectivement séparé en deux par une digue actuellement
rompue. D’Anville, sur la foi de Strabon, marque deux lacs; mais il leur
donne la même position que le P. Sicard.
Les lacs de Natroun comprennent une étendue d’environ six lieues de longueur
sur six cents à huit cents mètres de largeur, d’un bord du bassin à l’autre ; ils sont
séparés par des sables arides. Les deux premiers, vers le sud, portent le nom de
Birket el-Daouârah, ou lacs des Couvens. Les lacs n.°s 3 , 4 , y, 6, ont des noms qui
ne présentent aucune signification particulière. Les Arabes- Sammâlou (1) font la
contrebande de natroun au lac n.° 6, et le portent à Alexandrie.
On trouve de l’eau douce, plus ou moins potable, en creusant le long des lacs,
sur la pente du côté du Nil. Pendant trois mois, de l’année, c’est-à-dire, pendant
les trois mois qui suivent le solstice d’été, l’eau coule abondamment à la surface
du terrain. Les eaux croissent jusqu’à la fin de décembre; elles décroissent ensuite,
et quelques-uns des lacs restent à sec.
L état physique des lacs est essentiel à remarquer.
Les bords des lacs, à l’est, sont découpés en petits golfes où l’eau transsude et
se tonne en fontaines, comme à la naissance des vallons ; elle s’échappe ensuite
en petits ruisseaux, qui se rendent dans le fond des bassins. La partie du terrain
f l i B B Cettem m être comp°s&de miii= on. trois chefs, d o n . l p r i o r i ’ g S I