C H A P I T R E III.
Des diverses Timbales en usage en Egypte; des Dimensions de chacune d ’elles,
de l emploi qu on en f a i t , et de la mani'ere de s ’en servir.
L e son de cette espèce d’instrument, sans être tout-à-fait impossible à distinguer,
tient néanmoins beaucoup de la qualité du son des instrumens puremènt
bruyans, c est-a-dire, de celui des tambours : aussi, quand les Égyptiens ne désignent
point leurs timbales par un nom particulier, ils leur donnent le même nom par
lequel ils désignent leurs tambours ; seulement ils ajoutent à ce nom une épithète
propre à distinguer cette timbale des tambours.
Pour nous, qui navons quune sorte de timbales, nous n’éprouvons pas le
meme embarras; un seul nom nous suffit; et ce nom, qui est une onomatopée,
caractérise passablement le son de cet instrument, ou plutôt encore l’action par
laquelle on le frappe.
On compte en Égypte sept sortes de timbales, dont six sont différentes les unes
des autres, soit par la forme, soit par la matière; la septième diffère au moins de
celles-ci par 1 emploi qu on en fait. Parmi ces sortes de timbales, il y en a cinq en
usage dans les cérémonies solennelles, lorsque toutes les autorités de la ville réunies
se rendent dans le lieu vers lequel les appelle le motif qui les a rassemblées ( i ) ;
et c est ordinairement aux principales fêtes ou réjouissances publiques. Dans ces
circonstances, les autorités religieuses, montées sur des mulets (2), et les autorités
civiles et militaires, montées sur des chevaux, sont toujours accompagnées des
instrumens de musique dont le son est le plus éclatant ou le plus bruyant. Ces instrumens
sont le zamr, les trompettes, les cymbales, les timbales et les tambours.
Les timbales, qui sont en usage aux grandes solennités, sont les noqqâryeh
les naqrazan ; les tabil châmy ^ » L l , c ’e st-à -d ire , les tambours de
Syrie ; le tablai eggâouyg a L L , c ’est-à-dire, tambour du gâouyg (3); et
le tabil migry t S j f J -J s , ou tambour Occidental.
Toutes ces timbales sont en cuivre et couvertes d’une peau, ainsi que les nôtres ;
mais elles ont, à proportion de leur capacité, plus de profondeur que nos
timbales.
Les noqqâryeh sont deux grosses timbales en cuivre, d’inégale grandeur, mais qui
ont les mentes proportions ; elles sont portées sur un chameau ou sur un mulet
qui sert de monture à celui qui les bat : la plus grosse (4) est à sa droite, et la
(1) Voye^ les notes de I article précédent. ^ pretre G rec, natif aussi du Kaire et interprète A rabe,
(2) C ’étoit jadis en E urope, comme en Égypte, la lequel nous a écrit ce m ot tel que nous le présentons,
m onture de distinction des gens de loi ou des ecclé- N ous pensons que ce savant a , pour l’écrire ainsi,
siastiques. Depuis long-tem ps, cet usage n’existe plus quelques raisons que nous ne connoissons pas. Cepen-
parm i nous; le pape seul l’avoit conservé. dant, nous le répétons, nous n’avons jamais entendu
( 3 ) N ous avons entendu prononcer ce m ot au prononcer ce m ot au Kaire autrem ent que chaouych. K aire, chaouych. M . C heftegy, prêtre Q o b te, natif (4) O n n’a gravé que celle-ci et deux d’une autre
du K aire, prononce chaouych, et nous a même écrit form e, parce que toutes les autres sont de l’une de ce m ot en arabe de cette m anière, ; mais nous deux espèces, sinon que les proportions en sont dcief-s suivons ici I orthographe qu’a adoptée D ont R aphaël, férentes.
moins grosse à sa gauche. La plus grosse peut avoir de diamètre 650 millimètres,
sur la surface A que présente la peau qui couvre l’orifice du vase en cuivre ; sa
profondeur, depuis le centre C de la peau jusqu’au sommet B de la partie convexe,
nous a paru être de y 32 millimètres. La moins grosse doit avoir environ
433 millimètres d’étendue diamétrale à sa surface A , et sa profondeur, depuis le
centre C de cette surface jusqu’au sommet B de la partie convexe, 328 millimètres.
Ces deux timbales se battent alternativement avec des baguettes x , y , ou avec de
petits maillets de bois : ces baguettes, ainsi que celles des tambours, se nomment
en arabe qadâbbah ¿â-dds (1). On frappe à coups plus ou moins précipités sur la
moins grosse, et à coups plus ou moins lents sur la plus grosse, suivant le rhythme
qu’a adopté le timbalier; ce qui së pratique de même pour toutes les espèces-de
timbales doubles..
Les naqrazân sont deux timbales de moyenne grandeur, l’une d’un plus
grand volume que l’autre, quoique toujours dans les mêmes proportions. Il est vraisemblable
que le nom de naqrazân est un mot composé de naqr, qui signifie
bruit, ou, dans le langage technique de la musique Arabe, le temps rhythmique
marqué par le bruit de l’instrument que l’on frappe, et de | | zan, qui, en turc et en
persan, exprime l’action de frapper. Conséquemment, naqr-zan signifieroit, quifait le.
naqr, c’est-à-dire, qui marque la mesure. Le mot zan s’emploie ici dans le même sens
que le mot zadan, qui, en persan, signifie frapper, jouer des instrumens de musique,
et même des instrumens à vent aussi-bien que des instrumens à percussion ou
à cordes; car on dit en persan B P nây zadan, jouer de la flûte, comme l’on dit
{jdj t d e f f z a d a n , jouer du deff (espèce de tambour de basque dont nous avons
parlé), et r j i j (_j—— L tabl zadan, battre la caisse : on appelle même en persan
¿ jj (J.J? tabl zan, le tambour, celui qui bat la caisse. Il y a donc tout lieu de
croire que le mot naqr-zan est formé ainsi que nous l’avons présumé, et qu’il doit
avoir l’acception que nous lui donnons. Celui qui bat les naqrazân est monté sur
un âne; à chacun de ses côtés, il a une de ces timbales. La plus grande est-à sa
droite; elle peut avoir de diamètre, à sa surface A , 332 millimètres, et. 325 millimètres
en profondeur, depuis le centre c de la surface A , jusqu’au sommet B de
sa partie convexe. La plus petite est à sa gauche; elle a à peu près de diamètre,
à sa surface A, 270 millimètres; sa profondeur, depuis le centre c de cette surface
jusqu’au sommet B de la partie convexe, n’a guère moins 4e 2 17 millimètres.
L a manière débattre cet instrument est la même que celle des noqqâryeh ; seulement/
les baguettes sont plus petites.
L e tabil châmy J d = , ou tambour de Syrie, est une timbale qui a très-peu
de profondeur en raison de sa largeur (2). Le diamètre de sa surface plate A est
de 487 millimètres; et sa profondeur, à partir du centre c de cette surface, jusqu’au
Sommet B de sa surface convexe, n'est pas de plus de 108 millimètres. Celui qui
bat la timbale, tient cet instrument suspendu verticalement sur son ventre par un
(1) E n turc, on lés appelle tchouinâq.
É. M.
(2) Voyez pl. C C,fg. 2$ et jo}