
 
        
         
		Je  Je pansai  avec  les  émolliens,  et lui  prescrivis des boissons  rafraîchissantes,  la  
 plus  grande  tranquillité  et  la  diète. 
 A  ma  seconde  visite,  qui  eut  lieu  trois  heures après, je trouvai  que  tous les  
 accidens  étoient aggravés;  je  lui  fis  faire de suite une saignée du bras, et  le mis à  
 1 usage  des  émulsions,  auxquelles  j’ajoutai  le  nitrate  de  potasse  purifié,  lether  
 sulforique  alcoolisé,  le  sirop  de  diacode  et  l’eau  de  fleurs  d’orange  aux  doses  
 convenables,  à prendre  par verre tous les  quarts  d’heure;  les topiques émolliens  
 forent continués. La nuit fut pénible; le lendemain,  le malade  étoit  dans le même  
 état,  la jambe  très-enflammée;  il  avaloit  difficilement,  et les mâchoires  étoient  
 toujours serrées.  Je fis réitérer la saignée, et l’on continua les mêmes médicament  
 avec  augmentation  des  antispasmodiques. 
 La nuit suivante fot calme; la fièvre se  dissipa,  tous  les autres accidens  s’apaisèrent  
 et allèrent  en diminuant.  Un  suintement  sanguinolent  dégorgea  les  plaies  
 ■et  la  jambe,  le  spasme cessa totalement,  et la suppuration  devint belle et abondante; 
   les excrétions  reprirent  leur  cours,  le sommeil  se rétablit;  et au moment  
 où  je  partis  pour  le Kaire,  il étoit  en  voie  de guérison.  Peu  de  temps  après  il 
 fot  en  état de repasser en France avec le général  en  chef B o n a p a r t e . 
 M.  Croisier,  aide-de-camp  du  général  en  chef,  avoit péri  du  tétanos  dans  le  
 désert  de Qatyeh,  à  notre  retour  de  Syrie,  par  suite  d’une  semblable  blessure. 
 M.  Estève,  directeur  général  et  comptable  des  revenus  publics  de  l’Égypte,  
 fot  attaqué  d’une  légère  esquinancie  inflammatoire,  déterminée  par  la présence  
 dune  portion  d’arête  de poisson, qui setoit fichée  dans  un  des sinus  de  l’arrière-  
 bouche :  sa petitesse  la fit  échapper  à  toutes mes  recherches. 
 Le  treizième jour  de 1 accident  et le troisième  de l’époque  à laquelle  l’inflammation  
 s’étoit formée,  les symptômes du tétanos se déclarèrent, tels que le serrement  
 des mâchoires,  les mouvemens  convulsifs  des  muscles  de la face;  accompagnés  
 de  douleurs violentes,  et de  la roideur de  tous les muscles de la gorge; le  
 pouls  étoit nerveux  et  accéléré ;  des soubresauts  fréquens se faisoient sentir  dans  
 les extrémités supérieures;  il  y avoit suppression de selles, beaucoup  de gêne dans  
 la  prononciation  et  la  déglutition. 
 La  marche rapide  des  accidens  fitisoit  trembler  pour  la  vie  de  M.  Estève ;  
 toute  l’armée  en  étoit affectée,  et  craignoit  de  perdre  un  administrateur  dont  
 elle  apprecioit  les  talens,  les  qualités,  et  qu’elle  chérissoit  comme  l’homme  le  
 plus  intègre. 
 Je mis  de  suite  le  malade  à  l’usage  d’une  boisson  émulsionnée  et  édulcorée,  
 à  laquelle  jajoutai  1 extrait  d’opium,  le  castoréum,  le  camphre,  le  nitrate  de  
 potasse  purifié  et  lether  sulforique  alcoolisé,  à  des  doses  assez  fortes,  qu’il  
 prenoit  par  verre de  quart d’heure  en quart  d’heure. L’état  de foiblesse du pouls  
 ne me  permit  pas  d’üser  de  la  saignée;  j’appliquai  des  cataplasmes  résolutifs  sur  
 la région antérieure du cou; j’ordonnai des bains de pieds, deslavemensémolliens,  
 la vapeur d une forte décoction de jusquiame,  de pavot et  de racine de guimauve  
 à recevoir sur la gorge,  des frictions sèches sur  toute  l’habitude  du  corps,  et je  
 fis  éloigner  tout  ce qui  pouvoir  troubler le  repos.  Je  suivois  pas à  pas  tous  les 
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 phénomènes  de  la maladie.  La nuit  suivante  fot  très-agitée ;  les douleurs  étoient  
 violentes, la déglutition se suspendit, la salive sortoit de la bouche, les mâchoires  
 étoient fort  serrées ;  le malade  était  dans  une  agitation  pénible et continuelle,  il  
 tomboit par momens dans un assoupissement interrompu par de légers accès de frénésie  
 ; tout annonçoit enfin le danger le plus imminent.  Cependant, vers les quatre  
 heures  du matin, une  sueur douce  et  abondante  qui s’établit sur  la poitrine  et  le  
 bas-ventre, succéda à cette  crise violente ; le malade entra dans  un état  de calme,  
 et  put  avaler un  verre  de lemulsion précitée. Le  second  verre augmenta  la sueur  
 et le  relâchement  des parties  :  ce  qui  me  fit favorablement augurer de ses effets;  
 car lorsque  la  sueur est  symptomatique,  elle  commence par la  tête  et  les  extrémités, 
   tandis que, si elle  est  critique, elle se  forme  sur  la  poitrine  et  sur  le  bas-  
 ventre.  Le  lendemain  les  mâchoires  étoient  totalement  relâchées,  la  déglutition  
 étoit facile,  et les  contractions  des muscles beaucoup moindres. Je substituai aux  
 cataplasmes  résolutifs  les  linimens  volatils,  et  à  lemulsion  une  tisane  amère  et  
 laxative,  pour  débarrasser les  premières voies  et  rétablir le  ressort  de  l’estomac:  
 peu  de  jours après, M.  Estève se  trouva parfaitement  guéri. 
 , L’arête paroît avoir  été entraînée par une légère suppuration qui  s’étoit  établie  
 dans  l’arrière-bouche. 
 J’ai remarqué que les malades  ont moins de  répugnance  à avaler les  émulsions  
 que  tout  autre  liquide.  Elles  sont  plus  douces,  plus  agréables,  et  facilitent  les  
 effets  des  remèdes  avec  lesquels  on  les  combine. 
 Les  frictions  huileuses,  préconisées  par  quelques  auteurs,  ont  été  mises  en  
 usage  à  l’hôpital  n.°  2  du  Kaire ;  mais  elles  n’ont  rien  changé  à  l’état  de  la  
 maladie. 
 Les frictiops mercurielles m’ont paru aggraver les accidens chez  ceux à qui elles  
 ont  été  administrées.  L’emploi  de  ce  moyen,  même  contre  les  maladies  vénériennes, 
  exige, en Egypte, les plus grandes précautions ;  car l’administration de ce  
 remède, faite comme en Europe, a produit, dans ce climat, des accidens fâcheux,  
 tels  que  la folie,  des  maladies  hépatiques,  &c. 
 ■  Les  cataplasmes  de  feuilles  de  tabac  sur  les plaies  des personnes  atteintes, du  
 tétanos n’ont  été., suivis  d’aucun  effet  avantageux.  Les  alcalis  ont  été  employés  
 pour plusieurs  tétaniques,  sans  succès.  Les  vésicatoires,  qui  ont été appliqués sur  
 la gorge  dans le  cas  du  trismus, et notamment à M.  Navailh,  n’ont rien produit  
 d’avantageux. 
 Le  moxa  et  le  cautère  actuel,  conseillés  par le père  de la  médecine,  ont  eu  
 le même  résultat.  Le  moxa a  été  employé, à Jaffa,  chez  trois blessés; le  tétanos  
 a  suivi  sa  marche  ordinaire  et  s’est  terminé  par  la. mort.  J’ai  cité  un  exemple  
 frappant  du  non-succès  du  deuxième  moyen  dans  un  opisthotonos. 
 Les  grandes  plaies,  telles  que  celles  qui  proviennent  de  l’amputation  d’un  
 membre,  ou  les  plaies  avec  perte  de  substance,  quoiqu’elles  soient  quelquefois  
 suivies du tétanos,  ne  prouvent pas  que l’amputation  que je propose contre cette  
 maladie, soit  dangereuse  et  ne  puisse  au  contraire  être  suivie  de résultats  avantageux  
 ,  d’autant plus  qu’il  est  facile  au  chirurgien  attentif de  prévenir le  contact 
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