
C H A P I T R E V.
De la F lûte Egyptienne appelée en arabe Nây
A r t i c l e I . "
D es diverses espèces de Nây.
D e tous les instrumens à vent des Orientaux, il n’y en a point de plus renommé
que le nây : nous n’oserions même assurer que ce n’est pas de cet instrument que
Ménandre a Voulu parler dans ce yers de sa Messénienne ( t ) :
’ApetClov ot/p êyà X£K.ÎVYtn$c. cevAoV.
« Assurément j’ai joué de la flûte Arabe. »
II y a peu d instrumens qui soient variés en autant d’espèces diverses et d’un
usage plus général. On en trouve un grand nombre de différentes grandeurs,
et il y en a dans presque tous les tons principaux. Les derviches ou foqarâ ont
leur espece de nay; les mendians ont aussi le leur, et les musiciens de profession
ont également, pour leurs concerts, une certaine espèce de nây qu’ils préfèrent
aux autres : ce n est pas qu ils ne fassent encore usage de celles-ci dans certaines
circonstances, ou seulement pour s’exercer ; mais nous n’avons point connu, au
Kaire, de musiciens qui les eussent toutes réunies. Ceux qui savent jouer d’une
demi - douzaine de différentes espèces de nây, sont fort rares à rencontrer (2).
Mohammed Kachoueh, le plus habile musicien de toute l’Égypte en ce genre,
avouoit lui-même qu’il ne s’étoit jamais essayé sur plus de six à huit sortes de nây
-différentes, et que ceux de ces instrumens sur lesquels il s’étoit exercé le plus,
étoient le nây châh »Li | p | ( c ’est ainsi qu’on nomme le grand nây), lé nây kouchùuk
le nây soforgeh (3), le nây motlaq le nây giref
(1) Meimndrl Fragm. gr. et lat. de chants. « D ans les premiers siècles, dit A thénée,
(2 ).Le doigter n’est pas la seule chose qui peut em - » liv. x i v , ch. v in , pag. 631, on n’adm ettoit que ce
barrasser les musiciens Arabes sur cet instrum ent : il y a .. qui étoit beau et honnête ; chaque cantique ne fece-
encore une autre difficulté bien capable de les arrêter; » voit que les ornemens qui lui convenoient. Il y avoit
cest celle du ton ou m ode dans lequel il est accordé, » p o u r chacun d’eux, ainsi que pour les divers jeux pu-
C om m e chaque ton ou m ode a sa gamme différente de » blics, des flûtes qui leur étoient propres, accordées au
celle des autres et ses règles particulières, il faut néces- » to n de ces chants. . . Pronom us fut le prem ier qui varia
sairement connoître celle du ton propre au nây dont on » les modes suivant la variété des flûtes, &c. & c. »
veut jouer ; et il y a très-peu ou même il n’y a point de (3) Ces trois espèces de nây sont percées de six trous
m usiciens, soit A rabes, soit Egyptiens, qui possèdent par devant, et d’un par derrière, plus élevé que les autres
parfertement l’art de jouer de toutes ces différentes flûtes: • d ’environ deux distances et dem ie,cela n est pas difficile à concevoir, en se rappelant ce qui séparent entre eux les trois prem iesresm ebtl alebsl etsr oài sc dèleler-s
que nous avons d it, ainsi que le tableau que nous avons niers trous les uns des autres. Nous ne pouvons nous ex-
présenté de ces gammes dans notre M émoire sur l’état pliquer ici que d’une manière générale, parce que, les
aac vtuaerli éd, ep aPra rlta mfoursmicea l eetn laE gcyopntset.r uScit iodnan, sl els’ Oflrûietenst oenn ddiismtaenncseios nesn dtree clehsa qtruoeu se svpaèrciee ndte d naânys élata mntê dmifef éprreonptoerst,i olens
autant d'espèce?différentes, c’e st, sans do u te, par une qu’elles. N ous déterminerons avec plus de précision le
raison semblable à celle qu’eurent les anciens de faire des juste lieu de ce trou, lorsque nous décrirons les dimen-
ifilsû stee ss eein v ociheanq tu dea ntosn l' aectc doem dpiavgenresems efno tr mdeess d cihvearcsuens ee,s pdèocenst sions d’une espèce quelconque de nây,
(Jsjc». jjrl» [petit nây], le nây hoseyny ¡¿yii ( i) . Conséquemment il y avoit
encore beaucoup d’autres nây qui lui étoient.inconnus, ou dont il ne savoit pas
jouer : tels étoient sans doute le nây abnân dI pffli ; le nây châh mansour
|[èU; le nây e’râqy Lÿ’v [flûte Babylonienne, ou sur le ton d’e’râq];
le nây neh ou nym ç ÿ j a! ^-L’ , c’est-à-dire, de neuf et demi (2) ; Je nây dch ou nym
jîU j e s c ’est-à-dire, de dix et demi (3); le syâh nây || |j| sL-~j, nây noir
ou roseau noir; le nây sa fnrjD ^ (_5'k> nây jaune; le nây qar'ali '¿À (4); le
nây dâoud | 3| | c’est-à-dire, le nây de David; et plusieurs autres que nous
pourrions rassembler encore, s’il étoit nécessaire d’en faire la recherche : mais une
plus longue énumération seroit peu utile, puisqu’on peut les ranger tous en deux
classes, l’une des nây percés de sept trous, l’autre des nây percés de huit trous; la
différence des longueurs étant analogue à la gravité ou à l’élévation du ton sur
lequel les nây sont accordés, et ce ton ayant été expliqué dans notre Mémoire
sur l’état actuel de l’art musical en Égypte. Chacun peut actuellement se faire une
idée juste de toutes ces espèces de nây, et même de toutes les espèces possibles, sans
que nous ayons besoin de faire de chacun de ces instrumens une description particulière
; ce qui nous entraîneroit dans des répétitions Continuelles et fastidieuses.
Nous nous bornerons donc à en décrire un de chacune de ces deux espèces.
A r t i c l e I I .
D u Nây châh ( 5 ) , ou du grand Nây, percé de’ sept trous ; de ce qu’il a de
commun avec les autres N â y , et de ce qui lui est propre.
I l y a, dans le grand nây à sept trous, des choses qui lui sont communes avec
tous les autres nây, soit à sept trous, soit à huit trous ; il y en a aussi qui lui sont
. exclusivement propres. Ce qu’il y a de commun a toutes les especes de noy,
1.” c’est que le tuyau en est d’un seul morceau de canne de roseau, dont le bout
le plus petit est par le bas, et le bout le plus gros est par le haut, conformément
aux proportions reçues parmi les Arabes, comme nous 1 avons deja fait remarquer ;
2.0 c’est que les cloisons des noeuds ont été enlevées jusqu au niveau des parois de
ce roseau, dont on a retiré la moelle, et qui a été nettoyé fort proprement ; 3.° c est
que non-seulement on a abattu par dehors les reriflemens et lés aspérités des
noeuds, mais encore, en les brûlant avec un fer rougi au feu, on y a fait tout autour
une hoche large pour l’ordinaire de 9 millimétrés, et quelquefois plus, profonde
de l’épaisseur d’une corde très-fine de boyau enduite d une composition de
cire et de résine, et liée à plusieurs tours en spirale dans cette hoche, dont elle
’ tro(u1s) , Cseeps t'tpraori sd edvearnnti èeret su nf lpûtaçrs desrornièt rep.e rcées de huit (3) Il s’agit probablement encore des phalanges du roseau, c o m m e dans le précédent. Ces noms sont purem ent persans.
(2) 11 y a apparence qu’il s’agit ici du nombre de pha- (4) C e nây pourroit bien être le même que le <¿0 ©L«
langes que doit avoir le roseau propre à cette flûte; car il syâhnây; carsyâh en persan et qarah en turc veulent dire
nous a paru que ces phalanges étoient comptées par les noir. N ote de M . Silvestre de Sacy.
Égyptien,s modernes. (5) Planche C C , fig. 18. H h h h h h » É . M .