
coquillages, par-tout ailleurs : le fond, dans bien des endroits, est tapissé de
mousse.
Le lac Menzaleh est très-poissonneux ; l’entrée des bouches est fréquentée par
des marsouins. Nous n’avons pas vu beaucoup d’oiseaux sur le lac, mais bien sur
la plage, le long de la mer, dans les parties que les eaux venoient d’abandonner.
On navigue sur le lac à la voile, à la rame, et à la perche ; le vent contraire
double ou triple le temps d’un trajet, selon que le vent est fort. On mouille
en s’amarrant à deux perches, qu’on enfonce très-aisément, l’une de l’avant et
l’autre de l’arrière.
Les bateaux pêcheurs du lac Menzaleh ont à-peu-près la même forme que ceux
du Nil, c’est-à-dire que leur proue est plus élevée d’environ sept décimètres que
leur poupe. Dans la première, l’arrière trempe encore davantage dans l’eau ; ce
qui donne plus de facilité au pécheur, debout sur le pont, d’assembler son filet,
de le jeter, et de le retirer. La quille est concave sur sa longueur, à cause de
1 échouage, assez fréquent dans un lac qui se trouve avoir autant de bas-fonds.
Lorsque les habitans de Mataryeh vont faire la pêche loin de leurs îles, ils
prennent de l’eau douce dans de grandes jarres qui sont amarrées au pied des
mâts de leurs djermes : chaque djerme a une de ces jarres.
Les pécheurs de Mataryeh paroissent former une classe particulière. Comme ils
interdisoient la peche du lac Menzaleh à leurs voisins, ils avoient avec eux peu
de communication. Presque toujours nus, dans l’eau, et livrés à des travaux
pénibles , ils sont forts, vigoureux et déterminés. Avec de belles formes, ils ont
un air sauvage; leur peau brûlée par le soleil, leur barbe noire et dure, rendent
cet air plus sauvage encore. Lorsqu’ils se trouvent en présence de leurs ennemis,
ils poussent mille cris barbares avec l’accent de la fureur ; ils frappent sur une sorte
de tambourin, sur le pont de leurs bateaux, et sur tout ce qui peut faire du bruit ;
ils embouchent le buccin, et développent le fameux rouhh (i) dans la conque de
ce coquillage. « Si nous étions des miliciens, disoient les volontaires, ce vacarme
» nous feroit peur, et nous nous jetterions à l’eau. » Ainsi le soldat Français
conserve par-tout sa gaieté, et sauve par un bon mot l’ennui, ou l’idée du danger
des circonstances où il se trouve.
Le lac Menzaleh ne communique avec la mer que par deux bouches praticables,
celles de Dybeh et d’Omm-fàreg, qui sont les bouches Mendésienne et
Tanitique des anciens.
Entre ces deux bouches, il en existe une troisième, qui auroit communication
avec la mer sans une digue factice, formée de deux rangs de pieux, dont l’intervalle
est rempli de plantes marines entassées. On trouve une bouche semblable,
mais comblée, au-delà de celle d’Omm-fareg. Ces ouvertures étoient connues
des anciens, et Strabon les désigné par le nom de [pseudostomata] ,
Élusses bouches.
La langue de terre qui sépare la mer d’avec le lac, et qui s’étend depuis la
(i) Roulih a ’nny yâ kelb! Retire-toi de moi, chien
bouche Phatnitique, ou de Damiette, jusqu’à la bouche Pélusiaque, n’a , sur un
développement d’environ 92,000 mètres, que quatre interruptions. Cette langue
assez large entre Damiette et Dybeh, entre Omm-fareg et Péluse, n’a que très-
peu de largeur entre Dybeh et Omm-fareg; ellc'est très-basse, sans culture, et,
comme les îles du lac, couverte en quelques endroits de plantes marines! La
plage n’est point riche en cpquillages ;.on n’y voit ni cailloux roulés ni d’autres
pierres, mais seulement quelques ponces que. la mer y amène..Les coquillages les
plus communs sont les buccins .et les bivalves de la .petite espèce.
.Chaque bouche est fermée, du côté de la mer, par une barre en portion de
cercle, dont les,extrémités se rattachent'.à la côte, à l’endroit des récifr. Ces
barres diffèrent de celle qui se trouve à l’embouchure du.Nil à Damiette, .et qui
dailleurs a la même figure et la même position, en ce qu’elles n’ont point de
boghaz. Mais, comme le vent élève les eaux d’une passe de près de six décimètres,
et quelquefois plus, on peut franchir ces barres avec des embarcations d’un tirant
d eau assez avantageux.
Pour que ces barres eussent des boghaz, il faudroit qu’il existât.aux bouches
des courans considérables; ceux qu’on y voit sont déterminés par une .sorte de
balancement des eaux du lac et de celles de la mer pendant et après le solstice
comme nous allons le faire voir.
Durant le solstice d’été, le vent du nord-ouest pousse les .eaux de la mer sur
une partie des côtes de l’Egypte, les y tient suspendues, et fait refluer les eaux
du lac Menzaleh sur les îles basses et sur ses bords ; le lac. lui-même reçoit les
eaux de 1 inondation qui lui sont fournies par les canaux qui y aboutissent : c’est
le moment de la plaine pour ce vaste bassin. Lorsque le vent du nord-ouest cesse,
les eaux de la mer, en retombant par leur poids, laissent à découvert une plage
d environ deux cents mètres; l’inondation du Nil commence à baisser; les eaux
du lac .se retirent de dessus la partie des îles qu’elles recouvroient, comme les
eaux de 1 inondation abandonnent le sol de l’Égypte , et il se forme aux deux
bouches de Dybeh et d’Omm-fkreg un courant du lac dans la mer, dont la vitesse
est d environ trois mille mètres à l’heure ; ce qui doit occasionner, au bout d’un
certain temps, une baisse sensible des eaux du lac.
LÉgypte demande donc à être considérée dans- deux états: le premier à
lepoque ou les eaux de l’inondation couvrent le pays; le second, lorsque les
eaux sont entièrement écoulées.
Etat actuel des Terres qui avoisinent le lac Menzaleh.
'aCxMenzaleh sont en Partie stériles et en partie cultivés.
NH 'USqU’à k b°Uche I S l l les langues de terre qui
ong e la mer sont stériles ; la plaine de Péluse et les bords du lac
remontant vers la province de Charqyeh, sont un désert.' Cette province est