
navire qui, dans les mois de juin, juillet et août, ferait route par le canal de
Mozambique. Cette traversée de cinq mois est d’ailleurs assez ordinaire, comme
on le sait par les relations de quelques voyageurs.
Le trajet par l’Isthme de Soueys et la mer Rouge ne serait que de trois mois
et demi : il pourrait être réduit à moins de trois mois, par un concours possible
de circonstances favorables pour les navires de commerce ; et cette traversée serait
moindre encore pour ceux qui, prenant le canal plus direct, de Soueys à Tyneh,
près de Péluse, et ne passant plus par Alexandrie et le Nil, ne seraient tenus à
aucune relâche. A la vérité, commé, dans tous les cas, on aurait à attendre les
moussons pour le retour, on n’obtiendrait pas un très-grand avantage sur la voie
de 1 Océan, qui exige près d’une année pour l’aller et le retour; mais il ne faut pas
perdre de vue qu’en supposant celle de l’Égypte, on y a des établissemens d’en-
trepot, et que, parcourant le golfe Arabique, le commerce y trouverait des
moyens directs d’échange et des complémens de chargemens.
D ’après les résultats de ce parallèle, on voit qu’il y aurait souvent, toutes
choses égales d’ailleurs, une économie de temps pour la navigation par la mer
Rouge; ce qui est déjà très-précieux : mais un plus grand avantage qu’on peut se
promettre du trajet par cette mer, c’est que les équipages seraient moins sujets
aux maladies qui les ravagent à la hauteur du Cap de Bonne-Espérance, et moins
long-temps éloignés des ressources que présentent les pays civilisés; on verrait
encore s ouvrir de nouvelles sources de commerce et d’industrie avec l’Arabie
et 1 Abyssinie, et avec toute la côte orientale de l’Afrique, qui, si connue des
anciens, et presque ignorée de nos jours, reprendrait une nouvelle existence.
On conclura de tout ce qui vient d’être dit sur les stations, les ports les
courans et les moussons de la mer Rouge, que la navigation de cette mer, dont
les cotes desertes sont encore dépourvues de grands ports, sera moins avantageuse,
il est vrai, pour une marine militaire, mais le sera toujours beaucoup plus
qu on ne le pense aujourd’hui, pour une marine commerçante.
La voie de Soueys dans l’Inde par la mer Rouge, tenue par les bâtimens du
pays, est réellement longue, périlleuse et difficile; mais on a vu que cela ne tient
quà I ignorance des navigateurs Arabes, à la mauvaise construction de leurs bâtimens
, ainsi qu’aux entraves apportées par les beys et par la Porte, divisés d’intérêt.
Les citations que nous avons faites des expéditions maritimes qui ont eu lieu
sur cette mer, et des navigateurs Européens qui l’ont fréquentée, ont levé tous
les doutes, toutes les craintes sur.l’existence prétendue de ses dangers, et ont fait
connoître qu’elle peut devenir encore, comme elle l’a été, la voie la plus avantageuse
du commerce des Indes. C ’est donc à la Porte, en cherchant à s’élever à
la hauteur de la situation politique et commerciale des puissances de l’Europe,
à s’éclairer enfin sur ses véritables intérêts.
S E C T IO N II.
De la Rivière deMoueys. — Du Canal et de la Digue de Fara’ounyeh.
— Canal de Chybyn-el-ICoum. — Des Branches du N il.______Des
Boghâ-^ ou Bouches de Damiette, de Rosette et de Bourlos. De
la Navigation du Nil. — Tableau des Bâtimens qui naviguent
sur le fleuve et sur les côtes maritimes de l’Égypte.
§. I ."
Du Ter ci t-el-AÉoueys, ou Rivière de Aloueys»
A u n e lieue au nord des ruines d’Atryb, sur la rive droite de la branche de
Damiette, et près de Kafr-Moueys, se trouve l’origine du Tera’t-el-Moueys ; le
cours de cette rivière, qui débouche dans le lac Menzaleh, vers les ruines de San
ou Tanis, est tres-sinueux; il est denviron trente-cinq lieues, des ruines d’Atryb
à celles de Tanis. Tout porte à penser que le lit de cette rivière est celui des
anciennes branches Pélusiaque et Tanitique, dont la partie supérieure, d’Atryb
à Bubaste, appartient à la Pélusiaque, et la partie inférieure à l’ancienne branche
Tanitique : c est dans cette opinion que nous donnons à la rivière de Moueys le
nom cle branche Pélusio- Tanitique.
La première reconnoissance de ce canal fut faite, en frimaire an j [décembre
’ 79®]» Par MM. Malus, officier du génie, et Févre, ingénieur des ponts et
chaussées ; elle avoit pour objet principal de savoir si sa .navigation pouvoit
ouvrir une communication plus directe entre le Kaire et Menzaleh,sans descendre
et passer à Damiette. Le rapport de ces ingénieurs fut très-fàvorable ; et M. Malus
le communiqua a 1 Institut d Egypte, dont il étoit membre (i). Cette belle
rivière est aussi navigable que Je Nil ; et cet avantage nous a déterminés à y fixer
le point de partage du canal de Soueys près de Bubaste, d’où l’on pourra, comme
on l’a déjà exposé, se diriger au sud, à l’ouest et au nord, vers le Kaire, Alexandrie
et Damiette.
Le barrage ecluse que nous proposons d’établir au-dessous du bassin de
partage, près de Bubaste, devra suppléer avec avantage, par les raisons que nous
avons dites, à la digue que l’on construit annuellement au Kafr-Moueys, pour
prevenii une trop grande depense d’eau de la branche de Damiette par Je canal
de Moueys.
Si le lac Menzaleh etoit réduit à son minimum d’étendue par des digues qui
( i) Ce rapport est inséré dans le I . " volume des Mémoires de l'Institut d’Égypté, imprimés au Kaire;