on trouve de nouveaux détails sur les modes et sur les mutations des tons.
Nous allons les rapporter, parce qu’ils nous donneront encore l’occasion de ikire
quelques observations tendant à dissiper l’obscurité qui règne dans le texte de
ce traité, de même que dans tous les papadike que nous avons connus jusqu’à ce
jour. L ’auteur reprend donc ainsi les tons qu’il àvoit abandonnés :
« Si vous élevez la voix au-dessus du premier ton ananes , vous aurez le
» second neanes ; ensuite, si vous élevez également (i ) la voix au-dessus du second
35 ton, ce sera le troisième ton n ana; si vous élevez encore de même la voix
>5 au-dessus de ce troisième ton, cela sera le quatrième ton h a g ia ; enfin, si vous
» élevez la voix au-dessus du quatrième ton, cela formera [le ton] aneanes (2).
Q, » Comment, par une marche continue en montant, parvenons-nous au
35 quatrième ton î
jR. 33 De même que vous avez formé les quatre tons, il faut aussi composer
33 leurs quatre sons (3).
D E S P L A G A Ü X .
33 A partir du premier ton, descendez de quatre intervalles (4); cela vous donnera
33 le plagal du premier to n , lequel plagal se nomme aneanes (5). Si, à partir du
33 second ton, on descend de même de quatre intervalles, on aura le second plagal
33 qui se nomme neeanes ; ainsi du reste : car, comme nous l’avons déjà dit, si vous
33 élevez encore la voix au-dessus du premier ton, cela fera le second ton; et si vous
33 élevez derechef la voix, ce sera le troisième. Il en est de même pour les plagaux :
33 chacun d’eux s’élève [graduellement] au-dessus du précédent et s’y lie (6). C ’est
33 ainsi que l’ont enseigné les poètes de l’Église (7) : ils ont compté quatre tons
(1) II n’y a que l’expérience qui puisse faire concevoir
l’inexactitude de cette expression : l’auteur appelle
élever également la voix, quand on l’élève naturellement
suivant l’ordre diatonique des sons; car du premier ton
A N A N E S au second ton n e a n e s , il y a une différence
de l’intervalled’unton, tandis que du second ton N E A N E S
au troisième ton N A N A la différence n’est que-d’un demi-
ton , ainsi qu’on le verra bientôt dans le tableau que nous
allons présenter des modes, et dans le paradigme de ces
mêmes modes, de leurs mutations et modulations. Upe
seule méprise de cette espèce sur le véritable sens de l’auteur
suffirait pour faire soupçonnera un étrangerqu’il règne
le plus grand désordre dans tout le système de cette musique;
et il y a, a la vérité, dans les papadike, pour ainsi
direà chaque phrase, des équivoques semblables à celle que
nous remarquons ici en ce moment. Au reste, il-y a peu de
traités de musique où l’on'puisse observer une exactitude
rigoureuse dans les expressions, soit en France., soit en
Italie ou ailleurs; le langage technique y est trop rempli,
chez tous les peuples, de termes pris dans une acception
particulière et figurée, et souvent dans plusieurs sens dif-
férens,pour que la théorie en soit facile à concevoir sans
le secours d’un maître et sans l’expérience de la pratique.
(a) Pour bien entendre tout ceci, il est nécessaire de
voir le paradigme.
(3) Les Grecs emploient le mot pour signifier ton ,
mode, et le mot feorn dans le sens de ion, élévation
ou abaissement de la voix, conséquemment aussi dans
le sens d’intervalle chanté et de son.
(4) Nous traduisons ici. le mot yayàç par celui d’w-
tervalles, et non par le mot voix ou sons, qui seroit
équivoque en ce lieu; car il s’agit, en effet, des quatre
intervalles qui forment la quinte : si nous n’en avions
pas acquis la certitude par l’expérience, nous ne pourrions
tout au plus que le conjecturer, et notre opinion
ne seroit pas une autorité suffisante pour dissiper toute
incertitude en pareil cas ; niais nous pouvons garantir
ce que nous remarquons en ce moment, comme un fait
qui nous a été constaté par la pratique.
(5) Voye% le paradigme.
(6) Pour concevoir l’enchaînement des plagaux, il
faut encore avoir recours au paradigme.
(7) Il y a dans le texte, tÎÏs- E’xxAtjoraf Tomraj. Nous
n’avons pas osé traduire ce passage, ainsi que nous
sommes convaincus qu’on doit le faire, par les auteurs du
chant d’église ; mais il sera toujours facile de substituer
mentalement ce. sens au premier, si l’on adopte les raisons
que nous avons exposées plus haut, et qui nous font préférer
cette interprétation à la traduction littérale, qui,
dans notre langue, n’offre pas les mêmes idées qu’en grec.
» principaux;
33 principaux ; de ces tons ils ont formé les quatre plagaux, les moyens et les
33 dérivés'. Ceux qui disent qu’il y a seize tons, se trompent ; ce sont des espèces
3> de dérivés des huit tons, c’est-à-dire, des quatre premiers et des quatre plagaux,
33 ainsi que des deux moyens nenanÔ et nana. David composa les quatre tons
33 ou les quatre modes (1): Salomon, son fils, composa les quatre plagaux, et les
33 deux moyens, nenano, nana.
? 33 J’ai écrit cela, dit l’auteur, pour la même fin dans laquelle Salomon chantoit
33 dans le temple de Jérusalem, sur les dix tons, le psaume Laudate, où ce mot
33 est répété au commencement de chacun des dix versets.
33 II y a, sur l’art du papadike [de la musique], d autres choses que 1 on ne pounoit
» se rappeler. D ’ailleurs, une même définition étant tournée de mille manières ,
33 nous les passerons sous silence, pour ne pas répandre de la confusion dans le
33 discours (2). Damascène explique autrement les huit tons (3). 33
L’auteur revient encore aux signes du chant, et répète ce qui a déjà été dit
plusieurs fois; puis il termine brusquement, en disant ; «Voilà tout ce qui concerne
33 ce fragment [4). Gloire à Dieu dans tous les siècles. Ainsi soit-il.
» 1 5 , de la main d’Eminanuel Kalos, 29 octobre. »
Celui-ci ayant donc oublié de nous faire connoître les signes dont on se sert
pour indiquer les mutations ou changemens de ton, nous emprunterons ce qur
suit, de notre second traité, et nous y joindrons les intonations propres à chaque
ton, suivant que nous les avons apprises dans nos leçons; puis nous présenterons
les deux tableaux des paradigmes des tons, que nous avons copiés, avec l’aide de
Dom Guebraïl, d’un de nos traités de chant où ces tableaux formoient une espèce
de vignette.
« Les mutations des huit tons sont écrites ainsi dans le Stichêrarion et dans
» le Papadike:
M U T A T IO N S DES H U IT T O N S .
¿> # y TrpaTov ............... Mutation ¿du premier ton... 31—^- n --j|
A - na - nés.
y ftev'Tzpou Mutation du second ton .. .
Ne - a - nés.
( 1 ) On lit dans le texte, ActC'iS' imniotv t»Y itasapat
fiyouç, ny>vy id i •ntrtm.çy.ç fuyàç , D a v id composa les quatre
to n s , c ’ est-à-dire, les quatre voix. Ici le mot çaràç doit
s’entendre de l’intonation; et comme l’intonation indique
le mode et qu’elle en est en quelque sorte un abrégé,
nous avons pensé que le sens n’y perdroit rien, en substituant
le terme d’ intonation à celui de voix ; ou plutôt
nous dirons franchement que notre longue expérience
dans la musique Eurôpéenne, et la connoissance pratique
que nous avons de la musique Grecque moderne, ne
nous laissent aucune incertitude sur le sens que nous
avons choisi.
É . M .
(2) Les Grecs eux-mêmes ont donc reconnu le défaut
que nous reprochons à leurs traites de chant, puisqu’ils
avouent qu’il y a des redites fréquentes, du desordre
et de la confusion dans leurs traités de musique
ou papadike,
(3) Il y a lieu de croire, par ce que dit ici l’auteur,
que les principes ne sont pas exactement les memes
qu’ils étoient au temps de S. Jean Damascène, qui, le
premier, inventa cette espèce de musique.
(4) On lit dans le texte avvnplcL, qui signifie abrège,
précis, fragment ; et en effet, cette dernière partie, à
commencer des tons, est détachee de ce qui precède. O 00 00