C H A P I T R E I I I .
D e la Trompette tles Egyptiens modernes, appelée N e fy r ( i ).
A r t i c l e I."
Opinion de Scacchi sur la form e de la Trompette des anciens Egyptiens ; Ressemblance
parfaite qui se trouve entre la forme qu’il lui suppose et celle
de notre Trompette moderne, dont se rapproche beaucoup aussi le Nefyr
des Egyptiens modernes.
S c a c c h i (2) s’imaginoit que la trompette des anciens Égyptiens étoit d’une
forme semblable à celle dont nous nous servons aujourd’hui, et il se fondoit sur ce
passage du xi. livre des Métamorphoses d Apulée : Ibant dicati magno Serapi
tibicincs, qui, per obliquum calamum ad aurem porrectùm dextram , familiärem templi
modulumfrequentabant. « (Panni eux) marchoient les trompettes consacrés au grand
y> Sei apis, lesquels, au travers dun tube courbe et retourné vers l’oreille droite,
» produisoient, à de fréquens intervalles, les mêmes sons qu’ils avoient coutume
» de faire entendre dans le temple du dieu. » Il explique ces mots per obliquum
calamum par une trompette repliée, et croit que ceux-ci, dextrâ (3) familiarem templi
deique modulum frequentabant, signifient que les musiciens, en alongeant ou en
retirant de la main droite les canaux, obtenoient divers sons musicaux, et que
c’étoit ainsi qu’ils varioient la modulation.
Mais, si Scacchi avoit su alors que la trompette des Égyptiens modernes est à peu
près semblable à la nôtre, qu’elle est aussi Composée d’un canal replié, il eût pu
avec bien plus de raison nous assurer que le nefyr étoit parvenu immédiatement
des anciens Égyptiens aux Égyptiens de nos jours ; peut-être même eût-il reconnu,
après avoir entendu comme nous le nefyr, que c’étoit la même espèce de trompette
dont les Lycopolites, les Busirites et les habitans d’Abyde ne pouvoient
supporter le son, parce qu’ils le trouvoient semblable au cri de l’âne, qui, par son
poil roux, ressembloit à leur mauvais génie Typhon, qu’ils avoient eh horreur.
D e meme qu on n a pas ete tenté d examiner si ces rapprochemens des anciens
Égyptiens étoient réels ou imaginaires, raisonnables ou non, nous ne chercherons
pas non plus à prouver combien ceux de Scacchi sont peu fondés; d’ailleurs, d’autres
l’ont fait, et ses compatriotes eux-mêmes (4). Nous nous contenterons de décrire
simplement le nefyr, ne voulant point prévenir le jugement des lecteurs savans,
.qui, mieux que nous, sont capables de prononcer sur une pareille question.
(0 nefyr. qu'jl a émise sur l’instrument dont il '(•2) V oyez est question dans ce Gabinetto armonico pieno d'isiromenti sonori, passage de l’Ane d’or,
indicati i spiegati dal Padre Filippo Bonanni, della campa- (4) Voici ce que nous lisons à ce sujet dans le Gabinetto
gnia di G lesi, & c. in R om a, 172a, in-4.«, p. 49 et 50. armonico ifc. dal Padre Bonanni, cité dans la note
(3) Si Scacchi avoir. lu. le texte d’Apulée correctem ent précédente: « Descrisse quest’ ¡strumento anche Io
écrit, comme il est rapporté au commencement de cet ar- » Scacchi, Myroth.j, cap.¡4,0 affermò che tal sorte di
ticle, il n’eût pu concevoir One opinion semblable à celle ..trom ba fit usata dagl’ antichi E giziani, fondato sù le
DES ORIENTAUX.
A r t i c l e II.
D e la Matière, de la Forme, de la Composition et des Dimensions du Nefyr
et de ses parties.
L es canaux dont se compose le nefyr, sont entièrement en cuivre. Ils sont
formés de lames étroites et minces de ce même métal roulées en tube, et dont les
bords latéraux rapprochés sont soudés l’un à l’autre d’une manière presque imperceptible.
Le bocal et l’embouchure sont en fonte, et d’une seule pièce.
L e nefyr dont nous avons fait l’acquisition, étant vieux, a été réparé en plusieurs
endroits; on connoît ces réparations aux morceaux qui ont été rapportés, et aux
soudures assez grossièrement faites qui unissent ces morceaux au reste de l’instrument.
Cette observation n’étoit pas bien nécessaire; et nous ne l’aurions pas faite,
si le dessin et la gravure n’avoient rendu sensibles les réparations dont nous parlons,
et si nous n’avions craint qu’on ne les confondît avec ce qui tient à la construction
de cet instrument. Ainsi, pour éviter toute méprise semblable, nous prévenons
que les morceaux apparens que nous ne désignerons pas dans notre description,
ne sont que de simples raccommodages.
Le nefyr se compose des mêmes parties que notre trompette ; les deux branches A
et a ( 1 ) ; les deux potences P ; le pavillon C ; les cinq noeuds N , N , n , n et n ; le
bocal et l’embouchure E, e ; le bandereau B, et les anneaux x.
La hauteur totale de l’instrument tout monté avec son bocal, depuis e jusqu’à Cl,
c’est-à-dire, tel qu’il est représenté planche CC ,fg . 13 , est de 908 millimètres ; et
sans le bocal, il n’en a que 81 o.
» parole di Apulejo, il quale, nel libro secondo » ( il faut
lire undecimo; l’auteur a pris les chiffres // pour deux, et
c’est onje) « delle Metamorfosi, dice, parlandodelli sacrili
fizii celebrati in onore dalla dea Iside: Ibantettibicines »
(le mot tibicines ne se.trouve point en cet endroit dans le
texte, mais plus bas ; il faut lire ce passage comme nous
l’avons écrit dans le premier alinéa de cet article) « dicati » magno Serapi tibicines, qui, per obliquum calamum ad » aurem porrectùm, dextrâ familiarem templi deique mo-
lydulum frequentabant ; e della parola, per obliquum cala- » mumarguisce, tal sorte di trom ba ripièga ta; e dall’
» altre, dextrâ familiarem templi deique modulum frequen- . » tabantj stima significarsi il moto della mano che ora
» allungava, ora accorciava la trom ba. Dextrâ extendente » (dice egli) vel retrahentè tuba canales, musicales soni » ab ea edebantur, in eaque ex tensione et retrazione tìbicì- » nes modulabantur. E ne pone la figura a cart. 674, nella
» quale però apparisce alcuna spezzatura, ed è in tutto
»sim ile a quella oggi dì usata com m uném ente, e da noi
» esposta al numero IV. Stim ò perciò il Bartolini essersi
»ingannato Io Scacchi, poiché (dice) di tal sorte di
»trom ba spezzata, non se ne vede alcuna espressione
» antica onde la stimò modèrna : Qiiod instrumentum » (sono paiole di lu i, pag. 225) n calimi mi hi ex veteribus » liaurire li cuit, licèi nostris temporibus illud tuba? genus » exstare atque'in usu esse non ignorent. »
Nous ajouterons, à l’appui de ceci, qu’on ne reco.nnoîf
que six espèces différentes de trompettes antiques, et
qu’aucune d’elles ne ressemble à notre trom pette, ni au
nefyr. La première est celle dont on attribuoit l’invention
à M inerve, et à laquelle les Argièns donnèrent le nom de
ozL\7ny% AiQnvala., salpinx Athênaia, c’est-à-dire,.trompette
Athénienne. La seconde est celle dont les Egyptiens se
servoient dans leurs sacrifices et dont ils regardòient Osiris
comme l’inventeur, la même à laquelle ils avoient donné le
nom de pçivw, clmoüê. La troisième est celle des Gaulois :
elle étoit de fonte et d’une m oyenne grandeur; son bocal
représentoit la figure de quelque animal ; elle avoit un
canal en plom b, au travers duquel passoit le souffle de
ceux qui jouoient de cet instrum ent ; les sons en étoient
fôrt aigres : les Gaulois l’appeloient carnix. La quatrième
est celle des Paphlagoniens : l’embouchure représentoit
la tête d’un boe uf; elle rendoit une sorte de mugissement
très-fort ; on l’embouchoit en la tenant élevée en l’air. La
cinquième est celle des M èdes, dont le tube étoit de roseau ;
elle rendoit un son grave. La sixième étoit la trom pette
Tyrrhénienne, semblable aux flûtes Phrygiennes; l’em bouchure
en étoit en fonte, et elle rendoit un son aigu :
on prétend qu’elle fut communiquée aux Romains par
les Tyrrhéniens eux-mêmes. Voye1, sur le premier inventeur
de la trom pette, Paléphate et Pausa niai, lib, Ht, (1) Voyez planche C C , fig. tj.