long-temps dans Iatonie, à raison de la pression qu’avoient exercée sur eux les
parois musculaires du bas-ventre.
Cependant, vers la fin du mois de frimaire suivant [en décembre], cet officier
sortit de 1 hôpital parfaitement guéri, commençant à marcher sur sa jambe de
bois. Peu de temps après il partit pour France avec une évacuation d’aveugles :
il .doit etre a 1 hôtel des Invalides, à Paris.
La bataille du 30 ventôse an 9 [21 mars 1801] me fournit l’occasion de
fane faire l’amputation de la jambe à un militaire pour une blessure semblable à
celle de M. Bonichon. Quoique (e tétanos fût déclaré et fût d’un caractère aigu ,
l’opération enleva, comme par enchantement, tous les accidens; et, sans l’humidité
de la salle où se trouvoit le blessé, sans la pénurie où l’on étoit des moyens
propres à le garantir de la fraîcheur des nuits, cette opération auroit eu sans douté
un succès aussi complet : il passa environ douze heures dans un calme parfait ; mais
la fraîcheur de la nuit suivante, plus forte qu’à l’ordinaire, rappela tous les accidens,
qui résistèrent à tous les moyens indiqués, et le malade mourut le troisième
jour de l’opération.
Le général de division Destaing reçut, à cette même bataille du 30, un coup
de balle qui lui traversa le bras droit à sa partie moyenne, interne et postérieure.
Une portion du biceps, du coraco - brachial, le nerf radial et le cutané interne
furent coupés: cette plaie laissoit un pont de quelques lignes d’épaisseur, formé
par les tégumens, par le tissu cellulaire et quelques fibres motrices. Les premiers
effets.de cette blessure furent la chute du sabre qu’il avoit en main, la paralysie
du bras., et un trémoussement douloureux qui se manifesta immédiatement sur
toute l’extrémité, accompagné d’angoisses, de foiblesse générale et de gêne dans
les organes de la respiration.
Ce ne fut quavec peine que le général put être transporté à Alexandrie, où il
reçut les premiers secours, qui lui furent administrés par un de mes collaborateurs.
Je ne fus appelé que le huitième jour, époque où il commençoit à éprouver de
très-vives douleurs. Quoique la suppuration fût établie, l’appétit du malade: étoit
dérangé, le sommeil interrompu, et il se déclarait, vers le soir, un mouvement
fébrile. Je sentis d abord la nécessité de couper le pont dans lequel se trouvoient
des rameaux nerveux du cutané interne : mais, le blessé s’étant refusé à cette légère
opération, je fus obligé de m’en tenir à l’application des émolliens et à l’usage
interne des remèdes indiqués; je pansai moi-même la plaie, et continuai de le faire
jusqu’à sa guérison. Le lendemain les douleurs locales étoient plus vives; il y avoit
des mouvemens convulsifs dans la main et l’avant-bras, chaleur dans tout le système,
et resserrement des mâchoires : le blessé, étoit fort, inquiet et dans une agi-,
tation continuelle. Les progrès rapides que faisoient les accidens, me déterminèrent
à couper ce pont, et à inciser le fond de la plaie, où je trouvai quelques brides;
nerveuses ou aponévrotiques.
.. Cette-opération fut douloureuse ; mais, deux heures après, le blessé fut très-sôu-
lagé: à laide des émulsions anodines, des lavemens émolliens, du repos et de la
diète, tous les accidens disparurent dans l'espace de deux jours. La suppuration
devint
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devint belle, la plaie se détergea promptement, les bords s’affaissèrent, et la cicatrice
se forma vers la fin du siège d’Alexandrie.
Cette blessure a laissé l’avant-bras et la main paralysés ; les deux derniers doigts
ont été privés aussi pendant long-temps du sentiment.
Quoique j’aie à regretter de n’avoir pas un plus grand nombre d’exemples de
guérison à présenter, résultant de cette opération, j’en ai assez pour conclure,
1 Que de tous les remèdes conseillés par les praticiens habiles, l’expérience
m’a prouvé que l’extrait d’opium combiné avec le camphre, et le nitrate de potasse
purifié, dissous dans une petite quantité d’émulsions faites avec les semences
froides ou les amandes douces, sont très-efficaces , et agissent d’ailleurs d’autant
plus favorablement, que les malades qui ont de la répugnance pour les autres
liquides, prennent avec plaisir ces médicamens, dont on secondera les effets par
la saignée si elle est indiquée, et par les vésicatoires dans les circonstances dont
nous avons parlé ;
2.° Que l’amputation faite à propos est le moyen le plus certain pour arrêter
et détruire les effets du tétanos , lorsqu’il dépend d’une blessure qui a son siège
aux extrémités.
Je desire que ces observations puissent fixer l’opinion des chirurgiens des armées
sur le traitement du tétanos traumatique ; que le succès d’une opération dont je
pe connoissois pas d’exemple les encourage à la pratiquer, et, en les éloignant
d’une route où l’on doit craindre à. chaque pas de rencontrer la mort, leur fasse
suivre désormais celle où il est encore possible de sauver la vie à quelques dignes
citoyens.
Ê. M. O o o