inondée par le canal de Moueys ; ie même canal et celui d’Achmoun inondent
une partie du canton de Menzaleh. Le canton de Fareskour reçoit les eaux du
canal de ce nom. Les presqu’îles de Damiette et de Menzaleh sont couvertes de
telles rizières alimentées par des canaux d’irrigation qui ont dans leur voisinage
des canaux d'écoulement.
Le rapprochement des canaux d’Eusab el-Kache [Qassâb el-Qach] et de Douhâr-
Selameh, à une lieue au-dessus de Damiette, m’a donné la çlef du système d’irrigation
suivi dans cette partie, et en même temps la facilité de connoître à-peu-près,
sans nivellement, la différence de hauteur des eaux du Nil et de celles du lac.
Le premier canal tire scs eaux du Nil, se dirige vers le lac, et n’a point de
communication avec lui : il est enfermé entre des déblais de terre, et fournit, au
moyen de coupures, des rigoles pour l’arrosement.
Le second communique avec le lac seulement ; il est plus bas que le canal d’Eusab
el-Kache’ [Qassâb el-Qach], sur le côté duquel il vient aboutir, et dont il n’est
séparé que par une digue de peu d’épaisseur : ce canal est destiné à recevoir l’écoulement
des eaux de ces rizières.
En rapportant la hauteur des eaux de ces deux canaux à la partie supérieure de
la digue qui les sépare, on a trouvé, le ty vendémiaire [7 octobre], trente-cinq
centimètres pour la différence de hauteur des eaux du premier canal sur celles du
second : ce qui a donné, pour ce jour, l’élévation du Nil sur la partie correspondante
du lac Menzaleh ; car le rapport entre ces deux hauteurs doit varier suivant
les quantités dont baissent les eaux du Nil et celles du lac. On voit au-dessous de
Menzaleh deux canaux qui ont un pareil rapprochement, et il doit en exister de
semblables dans le golfe de Fareskour. Un nïlomm^alomhri placé à chacun de ces
points donneroit journellement le rapport de ces variations.
Le terrain pour les rizières est divisé en compartimens cernés de petites digues
dans lesquelles existent des coupures qu’on ouvre et qu’on ferme à volonté, pour
faire entrer les eaux et les laisser écouler.
Les champs pour ensemencer les terres, les carrés pour retirer le sel marin
par évaporation, sont disposés de la même manière. Dans ce dernier procédé,
l’eau subit seulement une première évaporation par son séjour dans un réservoir
séparé : quand elle est ainsi concentrée, on l’introduit dans les compartimens,- où
elle se répand en surface, et conserve peu de profondeur. Les eaux mères se
rendent dans un réservoir, plus bas.
Lorsqu’on veut semer, on commence par donner une première façon ; on inonde
ensuite le champ qu’on a préparé : au bout de vingt-quatre heures, et après que la
terre est bien humectée, plusieurs hommes y entrent, fouillent le terrain avec les
mains, l’égalisent, et jettent en dehors les mottes trop dures. Cette opération
terminée, on fait écouler les eaux : peu de temps après on jette la semence ; et
au bout de quelques jours le champ se couvre de verdure. Nous avons observé
que la térre des déblais qui borde les canaux d’irrigation, est employée comme
engrais : on la place par tas dans les champs, avant de tracer les sillons, de la
même manière qu’on dispose les tas de fumier en Europe.
O n
On voit que, dans ce système, il existe un canal supérieur, pour les eaux qui
alimentent, et un canal inférieur, qui reçoit le déversement de ces mêmes eaux,
après qu’elles ont été employées.
Lorsqu on ne peut pas se procurer ce niveau supérieur, on élève les eaux par
le moyen de roues à pots ou de roues à jantes creuses : ces dernières servent de
préférence, lorsque le niveau du canal alimentaire n’est pas trop bas.
Telle est la manière de cultiver les terres aux environs de Damiette et de Menzaleh.
Ce dernier endroit possède près du lac, et dans la partie comprise entre
les deux branches dans lesquelles se divise le canal d’Achmoun, au-dessous de la
ville, deux marais salans, qui fournissent une grande quantité de sel, qu’on obtient
par les procedes ci-dessus, très-blanc, et cristallisé par couches de six à huit millimètres
d’épaisseur.
Une des branches du canal d’Achmoun se dirige vers el-Safrah : ses eaux servent
à alimenter les rizières, et à abreuver, pendant la durée de l’inondation, la population
des îles de Mataryeh et celle des villages voisins. Les habitans profitent de
ce moment favorable pour remplir les citernes publiques, qui sont de grands réservoirs
à ciel ouvert, construits en maçonnerie, et revêtus, dans l’intérieur, d’un très-
bon ciment: on y introduit jusquacinq mètres d’eau. Quand ce secours est épuisé,
on ouvre, dans la campagne, des puits d’environ trois mètres de profondeur, qui
deviennent tres-abondans. Il n’est pas extraordinaire que l’eau afflue dans ces
citernes artificielles, creusées dans un terrain imbibé d’eau pendant quatre mois
de 1 année, et dont les couches inférieures d’argile tenace sont imperméables.
S. I V .
Formation du lac Menzaleh.
D ’a p r è s ce que nous avons dit sur l’ancienne direction des branches Tanitiqué
et Mendésienne, il paroît que ces branches traversoient, pour se rendre à la mer ,
le terrain que recouvre aujourd’hui le lac Menzaleh. Ce lac n’est donc point un
lac maritime, pareil à ceux que l’on voit sur les côtes des ci-devant Languedoc et
Roussillon; il n’a donc pas toujours existé : mais quelle a pu être la cause de sa for-
mat ion î cest ce que nous allons tâcher d’expliquer.
Je dis d’abord que ce lac n’est point un lac maritime. La nature du fond du lac
Menzaleh, où 1 on trouve par-tout la vase duNil, et la profondeur de ses eaux, qui
est generalement d’un mètre, tandis quelle est beaucoup plus considérable dans
les directions présumées des branches Tanitiqué et Mendésienne, annoncent évidemment
que le bassin du lac Menzaleh est un terrain d’alluvion formé par les
blanches du Nil, et non par le mouvement des eaux de la mer.
Je dis, en second lieu, que ce lac n’a dû se former que par la rupture d’équi-
entre les eaux de Ja mer et les eaux des branches-Tanitiqué et Mendésienne.
La branche Phatmtique ou de Damiette ayant été creusée de main d’homme,
au rappoit dHérodote, ne devoit pas être, à beaucoup près, aussi considérable
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